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18/06/2014 | FRANCE | N°13-17139

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 juin 2014, 13-17139


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa cinquième branche :

Vu l'article L. 1332-4 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 16 mai 1994 par le groupement d'intérêt économique Gestion et services groupe Cofinoga en qualité de chef de fabrication ; qu'elle occupait en dernier lieu les fonctions de chargée d'achats fabrication ; qu'elle a été licenciée pour faute grave le 25 mars 2009 ;

Attendu que pour dire le licenciement de la salariée dépourvu de cause r

éelle et sérieuse et condamner l'employeur à lui verser diverses sommes, la cour d'ap...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa cinquième branche :

Vu l'article L. 1332-4 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 16 mai 1994 par le groupement d'intérêt économique Gestion et services groupe Cofinoga en qualité de chef de fabrication ; qu'elle occupait en dernier lieu les fonctions de chargée d'achats fabrication ; qu'elle a été licenciée pour faute grave le 25 mars 2009 ;

Attendu que pour dire le licenciement de la salariée dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner l'employeur à lui verser diverses sommes, la cour d'appel retient que le refus, par la salariée, de reprendre les commandes d'imprimés de courriers de gestion est prescrit ; qu'en se déterminant ainsi sans rechercher si, comme le soutenait l'employeur, la salariée n'avait pas persisté dans ses agissements, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 mars 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ; Condamne Mme X... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit juin deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour le groupement d'intérêt économique Gestion et services groupe Cofinoga.Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de Madame X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse, et d'AVOIR en conséquence condamné le GIE COFINOGA à verser à Madame X... les sommes de 2.412,84 € à titre de rappel de salaire sur mise à pied et les congés payés y afférents, 13.071,45 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents, 42.131 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement et 65.355 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; AUX MOTIFS QUE « la lettre de licenciement du 25 mars 2009 qui fixe les limites du litige énonce trois griefs constitutifs selon elle de la faute grave dans les termes suivants : « - vous persistez à vous opposer à des directives et orientations de votre hiérarchie, - vous vous opposez à toute latitude de décision de votre service et faites obstruction à toute forme d'échanges entre vos collaborateurs et leur N+2, vous avez fait preuve de partialité à l'égard d'un fournisseur ». Il ressort des débats et des pièces qui y sont produites ainsi que l'on relevé les premiers juges que Madame X... a travaillé et progressé dans la hiérarchie de COFINOGA depuis la date de son embauche en avril 1994 sans s'attirer avant l'engagement de la procédure de licenciement d'avertissement ou de remarque négative formalisée à l'exception d'une réserve concernant ses relations managériales avec deux collaboratrices. Il est également constant qu'à la suite du remplacement de sa supérieure hiérarchique un échelon intermédiaire a été créé et pourvu en février 2007 par un autre cadre, Monsieur Y..., dont le positionnement était susceptible de favoriser les conflits avec Madame X... qui s'en était ouverte dès septembre 2006 à la DRH. Il doit être relevé que Madame X... se justifie des attitudes qu'elle a pu adopter en réaction aux interventions e Monsieur Y... en faisant état en filigrane de faits constitutifs selon elle de harcèlement de sa part, sans pour autant formuler de demandes à ce titre. La cour à l'instar des premiers juges appréciera les griefs imputés à la salariée en tenant compte des comportements allégués mais indépendamment de toute notion de harcèlement. Pour étayer ses griefs à l'encontre de Madame X..., COFINOGA produit un certain nombre de documents ou d'attestations émanant de Monsieur Y..., supérieur de l'intéressé, à l'origine ou à tout le moins l'artisan de son licenciement, qui de ce fait ne pourront être retenus qu'avec une certaine circonspection. De surcroît, les éléments ainsi produits outre qu'ils présentent le plus souvent une articulation partiale sinon orientée des faits tels que le courriel adressé en copie présenté comme un ultimatum ou une modification du rattachement fonctionnel présenté comme une demande de choix entre deux personnes ne mettent pas en évidence des éléments objectifs permettant de caractériser la faute grave alléguée. A cet égard, pour faire échec à la prescription invoquée par la salariée s'agissant d'une commande de 2006 et écarter ses arguments concernant son évaluation 2007, il est soutenu que Monsieur Y... n'aurait pu découvrir ces manquements qu'à la fin de l'année considérée le temps pour lui d'en prendre la mesure. Un tel argument est manifestement inopérant en toute hypothèse inopposable à la salariée qui disposait antérieurement d'un supérieur hiérarchique successeur de Madame A..., Monsieur B..., qui avait un positionnement lui permettant d'apprécier la manière de servir de Madame X.... Par ailleurs, même à les supposer avérés, ceux des griefs qui ne seraient pas prescrits tels que le refus de collaborer à la fusion avec le service équivalent de LOYALTI ou la communication des chiffres d'affaires 2007-2008 ou même d'une difficulté à gérer l'interventionnisme de son supérieur auprès de ses collaborateurs ou à laisser à ces derniers plus de latitude dans l'exercice de leurs fonctions, relèveraient de toute évidence plus de l'insuffisance professionnelle qui pour caractériser une faute grave doit résulter d'une mauvaise volonté délibérée du salarié. S'agissant du grief portant sur le traitement privilégié d'un fournisseur force est de constater que les arguments développés par l'employeur sont subjectifs et contradictoires puisqu'il résulte de ses propres développements que c'est à la suite d'une réclamation d'un fournisseur historique, la société VPRINT, qu'aurait été mise en évidence la dépendance vis-à-vis du fournisseur privilégié par Madame X..., l'attestation de Monsieur C... n'ayant à cet égard qu'une portée limitée évoquant l'absence de concertation pour les seules commandes ponctuelles. Outre que l'employeur évoque une faute professionnelle grave dont la seule énonciation ne peut suffire à caractériser la faute grave, il est tout à la fois fait état du risque important encouru par l'entreprise au regard de la dépendance alléguée et l'absence de risque quant au choix du prestataire pour la fourniture d'enveloppes en cause. En toute hypothèse, l'ensemble des faits invoqués par l'employeur, y compris l'absence de demande d'avoirs, se rattachant au grief de favoritisme à l'égard d'entité appartenant à la société holding TFH relèverait de l'insuffisance professionnelle dont le caractère délibéré ne peut résulter de l'absence de remontée alléguée de l'information à sa hiérarchie. En ce qui concerne les fautes managériales imputées à Madame X..., les développements relatifs à l'absence d'autonomie des collaborateurs apparaissent d'autant moins pertinents en particulier en ce qui concerne le choix des produits qu'il ressort des débats qu'au delà de leur référencement qui relevait de la seule responsabilité de Madame X..., ils disposaient de toute latitude en la matière. S'agissant du climat existant entre Madame X... et ses collaborateurs par ailleurs invoqué par l'employeur pour justifier la mise à pied immédiate de sa salariée, la description a posteriori qui en est faite apparaît d'autant moins crédible que la connaissance que prétendent avoir les mêmes dissensions entre leurs supérieurs aurait dû les conduire à s'en ouvrir beaucoup plus tôt à Monsieur Y... à l'occasion de ses interventions directes et répétées auprès d'eux. Au regard de ce qui précède, la cour dispose de suffisamment d'éléments pour estimer que l'employeur ne rapporte pas la preuve du caractère gravement fautif des faits qu'il impute à faute à Madame X.... La décision des premiers juges déclarant le licenciement sans cause réelle et sérieuse sera par conséquence confirmée » ; 1°) ALORS QUE le juge prud'homal a l'obligation d'examiner l'ensemble des griefs mentionnés dans la lettre de licenciement ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement notifiée le 25 mars 2009 par le GIE COFINOGA à Madame X... lui reprochait notamment d'avoir contraint ses collaborateurs à se prononcer publiquement sur la politique managériale menée par son supérieur hiérarchique, ce qui était de nature à fragiliser l'autorité de ce dernier, et d'avoir, le 10 mars 2009, fait preuve d'insubordination en contredisant un ordre direct de son supérieur hiérarchique ; qu'en ne s'expliquant pas sur ces griefs expressément mentionnés dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du Code du travail ; 2°) ALORS QUE les faits d'insuffisance professionnelle peuvent constituer une faute grave s'il résulte d'une mauvaise volonté délibérée du salarié ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a affirmé que les faits non prescrits imputés à Madame X... et relatifs à son refus de collaborer à la fusion du service, à la communication des chiffres d'affaires 2007-2008, à ses difficultés à gérer l'interventionnisme de son supérieur auprès de ses collaborateurs ou à l'absence de latitude laissée à ces derniers ne caractériseraient que son insuffisance professionnelle, tout comme ceux relatifs à son favoritisme envers certains fournisseurs ; qu'en statuant ainsi, cependant que de tels agissements présentent nécessairement un caractère volontaire et constituent une exécution fautive du contrat de travail, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L.1221-1, L.1234-1 (par refus d'application) et L.1232-1 (par fausse application) du Code du travail ; 3°) ALORS QU'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si la persistance, la nature et le nombre de ces manifestations d'insuffisance professionnelle ne démontraient pas une mauvaise volonté manifeste de la salariée, que l'exposant mettait en exergue dans la lettre de licenciement autant que dans ses conclusions reprises oralement et qui permettait de les qualifier de faute grave, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1234-1 du Code du travail ;4°) ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE l'insuffisance professionnelle traduit l'état d'un salarié incapable d'accomplir sa tâche sans qu'il puisse lui être imputé de faute ou sa mauvaise volonté ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement reprochait notamment à Madame X... d'avoir demandé à ses collaborateurs quel manager ils préféraient entre elle et Monsieur Y..., contredit un ordre de ce dernier et interdit son exécution par ses subordonnés, d'avoir indiqué que le choix des fournisseurs était fait collégialement, alors qu'elle l'imposait, d'avoir refusé de demander un avoir à un fournisseur, d'avoir passé une commande à une société alors qu'une proposition moins chère avait été faite par un autre fournisseur et d'avoir attribué des opérations récurrentes à un fournisseur sans consultation tarifaires d'autres concurrents ; qu'en affirmant que ces faits, qui résultaient pourtant d'un comportement volontaire et délibéré de Madame X..., ne constituaient que des manifestations d'insuffisance professionnelle, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1, L. 1234-1 et L. 1235-1 du Code du travail ; 5°) ALORS ENFIN QUE la persistance par le salarié dans des agissements fautifs autorise l'employeur à tenir compte de faits antérieurs, même prescrits, dans la limite de trois ans ; qu'en opposant la prescription de l'article L.1332-4 du Code du travail à certains faits fautifs invoqués par le GIE COFINOGA dans la lettre de licenciement, sans rechercher, comme elle y était expressément invitée, si ces faits ne présentaient pas un caractère continu, de telle sorte que l'exposante pouvait s'en prévaloir pour justifier le licenciement, la cour d'appel a violé le texte susvisé.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-17139
Date de la décision : 18/06/2014
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 07 mars 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 jui. 2014, pourvoi n°13-17139


Composition du Tribunal
Président : Mme Lambremon (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Tiffreau, Marlange et de La Burgade

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.17139
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