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28/05/2014 | FRANCE | N°13-10512

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 mai 2014, 13-10512


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé une première fois par la société Legoupil en qualité de poseur de plafonds en novembre 2002, a été licencié le 26 novembre 2003 pour inaptitude et impossibilité de reclassement ; qu'ayant suivi une formation, il a été de nouveau engagé le 1er septembre 2008 en qualité de technicien des méthodes, avec le statut de travailleur handicapé, après avoir été déclaré apte par le médecin du travail au terme de la visite d'embauche ; que le salarié a été

en arrêt de travail pour maladie professionnelle à plusieurs reprises à compter...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé une première fois par la société Legoupil en qualité de poseur de plafonds en novembre 2002, a été licencié le 26 novembre 2003 pour inaptitude et impossibilité de reclassement ; qu'ayant suivi une formation, il a été de nouveau engagé le 1er septembre 2008 en qualité de technicien des méthodes, avec le statut de travailleur handicapé, après avoir été déclaré apte par le médecin du travail au terme de la visite d'embauche ; que le salarié a été en arrêt de travail pour maladie professionnelle à plusieurs reprises à compter du 2 février 2009 ; qu'à l'issue de la visite médicale de reprise effectuée le 5 octobre 2009, le médecin du travail a conclu à son inaptitude totale et définitive à tout poste dans l'entreprise en application des dispositions de l'article R. 4624-31 du code du travail ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche, laquelle est préalable, ci-après annexé :
Attendu qu'après avoir exactement retenu qu'il appartenait à l'employeur de rechercher une possibilité de reclassement du salarié au sein de l'entreprise et le cas échéant du groupe auquel celle-ci appartient, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail, la cour d'appel a relevé, par motifs propres, que l'employeur avait sollicité en vain les préconisations du médecin du travail afin de rechercher toutes les possibilités de reclassement et, par motifs adoptés, qu'il avait effectué au sein du groupe des recherches de postes appropriés aux capacités du salarié, aucun poste n'étant compatible avec son état ; qu'ayant fait ressortir que l'employeur avait rempli son obligation de reclassement, elle a pu en déduire que le licenciement était fondé et écarter la demande en dommages-intérêts relative au bien-fondé de ce licenciement ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles L. 1226-12 et L. 1226-15 du code du travail ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande globale en dommages-intérêts au titre de la rupture, l'arrêt se borne à retenir que l'employeur a satisfait à son obligation de reclassement ;
Qu'en se déterminant ainsi, alors que la demande en dommages-intérêts en application de l'article L. 1226-15 du code du travail inclut nécessairement la demande en dommages-intérêts pour violation de l'obligation de notifier par écrit les motifs s'opposant au reclassement, la cour d'appel, qui ne s'est pas expliquée sur le non-respect par l'employeur de cette obligation, n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, après avoir justement écarté les demandes relatives à un licenciement sans cause réelle et sérieuse, il déboute le salarié de sa demande en dommages-intérêts en ce qu'elle était fondée sur le non-respect par l'employeur de son obligation de notifier par écrit les motifs s'opposant au reclassement, l'arrêt rendu le 13 novembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;
Condamne la société Legoupil AMY Malitourne aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Legoupil AMT Malitourne et condamne celle-ci à payer à M. X... la somme de 1 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mai deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour M. X...
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le licenciement de M. X... reposait bien sur une cause réelle et sérieuse et de l'avoir en conséquence débouté de sa demande tendant à ce que la société Legoupil AMT Malitourne soit condamnée à ce titre à lui payer la somme de 37.865 € de dommages et intérêts ; AUX MOTIFS QU' aux termes de l'article L.1226-10 du code du travail, l'avis d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise délivré, comme en l'espèce, par le médecin du travail ne dispense pas l'employeur de rechercher une possibilité de reclassement au sein de l'entreprise et le cas échéant du groupe auquel celle-ci appartient, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutation, transformation de poste de travail ou aménagement du temps de travail ; que les possibilités de reclassement doivent être recherchées au sein de l'entreprise et, le cas échéant, du groupe auquel elle appartient, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel et que c'est à l'employeur de démontrer qu'il s'est acquittée de son obligation de reclassement, laquelle est de moyens, et de rapporter la preuve de l'impossibilité de reclassement qu'il allègue ; qu'en l'espèce, contrairement à ce que soutient M. X..., l'employeur prouve avoir sollicité le médecin du travail, par lettre du 8 octobre 2009, dont il produit l'avis de réception, qui porte le même numéro que celui figurant sur ladite lettre ; qu'il était rappelé au médecin que les effets de l'inaptitude totale étaient limités au seul poste occupé par le salarié et il lui était demandé d'adresser ses conclusions afin de rechercher toutes les possibilités de reclassement ; que la société Legoupil soutient que le médecin n'a pas donné suite à cette démarche et aucun élément versé aux débats n'est de nature à mettre en doute cette carence du médecin ; que la société Legoupil prouve également que les délégués du personnel, consultés, ont conclu à l'impossibilité de reclassement au sein de la division Legoupil ; qu'elle produit encore les courriers des sociétés du groupe, Legoupil Industrie et Legoupil Aménagement 14, qui indiquent n'avoir aucun recrutement en cours ni aucune perspective de recrutement, étant précisé qu'il ne saurait être fait grief de ce que des réponses ont été apportées le même jour par ces deux sociétés, dès lors que c'est la même personne qui est responsable des questions de recrutement pour l'ensemble du groupe et qu'elle avait donc connaissance tant des possibilités de reclassement que du profil professionnel et médical de M. X..., sur lequel il n'était donc pas nécessaire de fournir plus d'informations ; qu'enfin, la société produit les registres du personnel de chacune des sociétés, qui corroborent l'absence de possibilité de reclassement, étant précisé qu'un seul recrutement a eu lieu au sein de la société Legoupil durant la période de recherche de reclassement et qu'il ne pouvait correspondre aux qualifications de M. X... et qu'il en va de même pour le seul recrutement qui a eu lieu au sein de la société Aménagement Malitourne, au demeurant le 16 novembre, soit postérieurement au licenciement ; que s'agissant de l'obligation de sécurité au travail, la société prouve qu'elle s'est tenue aux avis du médecin du travail, étant précisé que le respect doit en être apprécié au regard de la nouvelle embauche qui a eu lieu après un précédent licenciement pour inaptitude et que l'article R.4624-21 du code du travail invoqué par le salarié n'est applicable que pour une visite de reprise, ce qui n'était pas le cas en l'espèce ; que le médecin du travail l'a déclaré apte le 12 septembre 2007 à l'exercice de l'emploi de technicien de méthode, dans lequel il entamait un contrat à durée indéterminée après un contrat à durée déterminée ; que cette aptitude a été confirmée lors d'une visite du 4 avril 2008 ; que la fiche de renseignements médicaux en date du 26 novembre 2008 destinée à renouveler son statut de travailleur handicapé, décrit son poste de travail aménagé sans aucune observation et il ne résulte d'aucune pièce que M. X... se serait plaint de quoi que ce soit au médecin quant à sa santé au travail ; que par ailleurs, et compte tenu de ce qui précède, il ne peut être rien tiré de l'étude de poste réalisée par une infirmière par téléphone, le 17 avril 2009, postérieurement au début de l'arrêt maladie ensuite duquel M. X... n'a jamais repris le travail ; qu'il en va de même de l'attestation de M. Y... produite par M. X..., faisant état de ce qu'il l'avait vu porter des charges de 50 à 60 kgs et indiquant qu'il était à 80 % sur les chantiers, voire plus, dès lors qu'il n'est pas possible de relier cette estimation aux constatations personnelles du salarié attestant ; que surtout, ces éléments ne peuvent prévaloir contre le fait qu'il ne résulte d'aucune pièce que M. X... aurait fourni au médecin du travail durant la relation de travail des indications de nature à laisser ce professionnel penser que les conditions de travail ne correspondaient pas à ses aptitudes ; ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE l'obligation de reclassement prévue par l'article L.1226-10 du code du travail suite à l'inaptitude totale et définitive à tout poste dans l'entreprise pour danger immédiat pour sa santé et sa sécurité (article R.4624-31 du code du travail) décidée par le médecin du travail a bien été mise en oeuvre par l'employeur ; que celui-ci a notamment sollicité du médecin des éléments pour rechercher des possibilités de reclassement, demande qui est restée sans réponse ; que, de plus, la société a bien effectué au sein du groupe des recherches de postes appropriés aux capacités de M. X... ; qu'aucun poste n'était compatible avec son état, que les délégués du personnel ont bien été consultés et ont conclu à l'impossibilité de reclassement de M. X... ; que la société Legoupil AMT Malitourne a donc bien respecté son obligation de reclassement et que le licenciement de M. X... repose bien sur une cause réelle et sérieuse ; ALORS, D'UNE PART, QUE, lorsque l'inaptitude du salarié a pour cause un accident du travail ou, comme en l'espèce, une maladie professionnelle, l'employeur est tenu de faire connaître à l'intéressé, par écrit, non seulement l'impossibilité de reclassement mais également les motifs qui s'opposent à ce reclassement, ce avant que ne soit engagée la procédure de licenciement ; qu'en se bornant dès lors à relever que les pièces produites au débat démontraient l'absence de possibilité de reclassement pour M. X..., pour en déduire que le licenciement de celui-ci était justifié par une cause réelle et sérieuse, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée par les conclusions d'appel du salarié développées oralement à l'audience, si l'employeur, en se contentant d'indiquer dans la lettre de rupture que le reclassement était impossible, n'avait pas manqué à l'obligation d'énoncer par écrit et avant la mise en oeuvre de la procédure de licenciement les motifs qui s'opposaient à ce reclassement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1226-12 du code du travail ; ALORS, D'AUTRE PART, QUE si, dans le cadre de son obligation de reclassement, l'employeur n'est nullement tenu de créer un poste spécialement destiné au salarié concerné, il doit envisager le reclassement de l'intéressé y compris en mettant en oeuvre des mesures telles que mutation, transformation de poste de travail ou aménagement du temps de travail ; que, dès lors, en se bornant, pour retenir que l'employeur avait satisfait à son obligation de reclassement, à énoncer qu'aucune société du groupe n'envisageait un recrutement au jour du licenciement de M. X..., quand la seule absence de recrutement laissait entière la question de savoir si, au sein des entreprises du groupe, le reclassement de M. X... ne pouvait être envisagé par la mise en oeuvre de mesures telles que mutation, transformation de poste de travail ou aménagement du temps de travail, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L.1226-10 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-10512
Date de la décision : 28/05/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 13 novembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 mai. 2014, pourvoi n°13-10512


Composition du Tribunal
Président : M. Chollet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.10512
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