LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 6 décembre 2012), que les sociétés Immo Desfray (la débitrice) et MC gare, propriétaires d'un immeuble à usage commercial et les sociétés Le Terminus et La Gare, exploitant dans cet immeuble respectivement un hôtel et un restaurant ont été mises en redressement judiciaire les 25 février, 28 octobre et 25 novembre 2011 ; que le tribunal a rejeté le plan de continuation proposé par la débitrice et prononcé la cession des actifs de cette dernière au profit de la société Ormeaux finances, également acquéreur de ceux des trois autres sociétés ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la débitrice fait grief à l'arrêt d'avoir ordonné la cession de ses actifs, alors, selon le moyen, que le ministère public, dans le cas où il est partie jointe peut faire connaître son avis à la juridiction soit en lui adressant des conclusions écrites qui sont mises à la disposition soit oralement à l'audience ; qu'après avoir indiqué que les débats ont eu lieu à l'audience publique du 8 novembre 2012 à laquelle ont été entendues le président de chambre en son rapport et les avocats des parties en leurs plaidoiries, l'arrêt indique dans ses visas que le ministère public a conclu à la confirmation de la décision déférée ; qu'il résulte de cette mention que le ministère public avait choisi de faire connaître son avis à la juridiction en lui adressant avant l'audience des conclusions écrites où il sollicitait la confirmation du jugement ; que dès lors en s'abstenant de préciser si ces conclusions avaient ou non été mises à la disposition des parties, la cour d'appel a violé les articles 16 et 431 du code de procédure civile, ensemble 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; Mais attendu qu'il ne résulte pas des mentions de l'arrêt que le ministère public, auquel le dossier a été communiqué le 7 novembre 2012 et qui a demandé à l'audience la confirmation du jugement, a conclu par écrit ; que le moyen manque en fait ;
Sur le second moyen :
Attendu que la débitrice fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen : 1°/ que dans ses conclusions récapitulatives d'appel, la débitrice avait insisté sur le fait qu'elle avait une activité autonome de celles des trois autres entreprises et qu'aucune confusion de patrimoines n'avait été constatée ;qu'en liant cependant le sort de la débitrice à celui des trois autres sociétés qui avaient fait l'objet de procédures distinctes sans qu'aucune confusion des patrimoines n'ait été retenue pour adopter le plan de cession présenté par la société Ormeaux finances cependant qu'aucun véritable plan de cession ne pouvait être en réalité arrêté en ce qui concerne la débitrice en l'absence d'activité à maintenir comme d'emploi à sauvegarder, la cour d'appel, qui a en réalité ordonné la cession à vil prix de l'actif immobilier de la SCI, qui avait pourtant proposé un plan de continuation au moins partiel, a excédé ses pouvoirs en violation de l'article L. 642-2 du code de commerce, ensemble l'article 1er du protocole n° 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;2°/ que d'autre part, en rejetant le plan de continuation partielle de la débitrice pour faire droit au plan de cession de la société Ormeaux Finance sans répondre à ses conclusions faisant valoir que les baux en cours n'avaient pas été résiliés, et que l'indemnité d'assurance due par la MAAF à la suite de l'incendie devait lui permettre de faire face au coût de la continuation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile, ensemble 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu, d'une part, qu'il résulte de l'article L. 661-7, alinéa 2, du code de commerce que le débiteur n'est pas recevable à former un pourvoi en cassation contre une décision ayant arrêté un plan de cession ; qu'il n'est dérogé à cette règle comme à toute règle interdisant un recours, qu'en cas d'excès de pouvoir ; qu'ayant relevé, par motifs propres que les candidats repreneurs avaient insisté sur le caractère indivisible de leur offre, et par motifs adoptés que celle de la société Ormeaux finances était la mieux disante et permettrait d'assurer dans les meilleures conditions le maintien des emplois attachés aux fonds de commerce, la cour d'appel qui n'a fait qu'user des pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 631-22 du code de commerce, n'a pas commis d'excès de pouvoir ;Attendu, d'autre part, que l'arrêt relève que l'adoption éventuelle d'un plan de continuation au profit de la débitrice aurait nécessairement une incidence sur la validité des plans de cession des trois autres entités, dès lors que le repreneur ne peut se voir imposer des obligations ou des charges auxquelles il n'a pas souscrit ; qu'il relève encore que la débitrice, dont les seules ressources proviennent de la perception de ses loyers, mise sur l'encaissement d'une somme de 8 970 euros par mois, très supérieure à celle d'environ 5 500 euros que lui versaient les sociétés La Gare et Le Terminus, quand, les candidats repreneurs ayant retiré leurs offres, elle serait sans locataire, sans assurance d'en retrouver un rapidement et aux conditions souhaitées ; que, par ces appréciations, la cour d'appel, qui a répondu aux conclusions prétendument délaissées, a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen, irrecevable en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :REJETTE le pourvoi ;Condamne la société Immo Desfray aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mai deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils pour la société Immo DesfrayPREMIER MOYEN DE CASSATION :
- IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir autorisé la cession de l'entreprise exploitée par la SCI IMMO DESFRAY, d'avoir prononcé la cession totale des éléments d'actifs immobiliers appartenant à la SCI IMMO DESFRAY au profit de la société ORMEAUX FINANCES moyennant un prix global de 700.000 € HT et hors droits, fixé la date d'entrée en jouissance au prononcé du présent jugement soit le 28 juin 2012, d'avoir constaté la transmission au cessionnaire de plusieurs contrats de prêt sur le fondement de l'article L 642-12 du code de commerce ; - AU MOTIF QUE en présence de Madame le Procureur Général près la cour d'Orléans (...) représentée par Madame Elisabeth GAYET, avocat général ; (...) dossier régulièrement communiqué au Ministère public le 7 novembre 2012 ; (...) à l'audience publique du 8 novembre 2012 à laquelle ont été entendus Monsieur Alain RAFFEJEAUD, président de chambre en son rapport et les avocats des parties en leur plaidoirie ; (...) le ministère public a conclu à la confirmation de la décision déférée ;- ALORS QUE le ministère public, dans le cas où il est partie jointe peut faire connaitre son avis à la juridiction soit en lui adressant des conclusions écrites qui sont mises à la disposition soit oralement à l'audience ; qu'après avoir indiqué que les débats ont eu lieu à l'audience publique du 8 novembre 2012 à laquelle ont été entendues le président de chambre en son rapport et les avocats des parties en leurs plaidoiries, l'arrêt indique dans ses visas que le ministère public a conclu à la confirmation de la décision déférée ; qu'il résulte de cette mention que le ministère public avait choisi de faire connaitre son avis à la juridiction en lui adressant avant l'audience des conclusions écrites où il sollicitait la confirmation du jugement ; que dès lors en s'abstenant de préciser si ces conclusions avaient ou non été mises à la disposition des parties, la cour d'appel a violé les articles 16 et 431 du code de procédure civile, ensemble 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
- IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir autorisé la cession de l'entreprise exploitée par la SCI IMMO DESFRAY, d'avoir prononcé la cession totale des éléments d'actifs immobiliers appartenant à la SCI IMMO DESFRAY au profit de la société ORMEAUX FINANCES moyennant un prix global de 700.000 € HT et hors droits, fixé la date d'entrée en jouissance au prononcé du présent jugement soit le 28 juin 2012, d'avoir constaté la transmission au cessionnaire de plusieurs contrats de prêt sur le fondement de l'article L 642-12 du code de commerce ;- AU MOTIF QUE devant le tribunal, ont été présentées deux offres de reprise des activités des sociétés La Gare et Le Terminus et des actifs immobiliers des SCI MC Gare et Immo Desfray, l'une émanant de la société Ormeaux Finances qui a eu la préférence des premiers juges, l'autre émanant de la société Kerdonis ; Que les deux candidats - repreneurs ont insisté l'un et l'autre, ainsi que le rappelait l'administrateur en page 22 de son rapport, sur le caractère indivisible de leurs offres, la société Kerdonis acceptant seulement d'y déroger dans l'hypothèse où un plan de continuation de la société Le Terminus aurait été adopté ; Attendu qu'ainsi, l'adoption éventuelle d'un plan de continuation au profit de la société Immo Desfray aurait nécessairement une incidence sur la validité des plans de cession des trois autres entités, dès lors que le repreneur ne peut se voir imposer des obligations ou des charges auxquelles il n'a pas souscrit ; Que, sans même qu'il soit nécessaire d'ordonner la mise en cause des sociétés MC Gare, La Gare et Le Terminus pour la régularité de la procédure, la cour ne peut que constater le caractère irréaliste du plan de continuation proposé par la société Immo Desfray ; Qu'ainsi, celle-ci table sur l'encaissement d'un loyer mensuel de 8.970 euros, déjà très supérieur à celui que lui versaient jusqu'alors les sociétés La Gare et Le Terminus, de l'ordre de 5.500 euros par mois, alors que les candidats - repreneurs ayant retiré leurs offres, la SCI Immo Desfray, dont les seules ressources proviennent de la perception des loyers, serait sans locataire, sans l'assurance d'en retrouver un rapidement et surtout aux conditions qu'elle souhaite ; Qu'il convient dès lors de confirmer le jugement entrepris ;- ALORS QUE D'UNE PART dans ses conclusions récapitulatives d'appel n° 2 (cf p 4 et 5 notamment), la SCI IMMO DESFRAY avait insisté sur le fait qu'elle avait une activité autonome de celles des trois autres entreprise et qu'aucune confusion de patrimoines n'avait été constatée ; qu'en liant cependant le sort de la SCI IMMO DESFRAY à celui des trois autres sociétés qui avaient fait l'objet de procédures distinctes sans qu'aucune confusion des patrimoines n'ait été retenue pour adopter le plan de cession présenté par la société ORMEAUX FINANCES cependant qu'aucun véritable plan de cession ne pouvait être en réalité arrêté en ce qui concerne la SCI exposante en l'absence d'activité à maintenir comme d'emploi à sauvegarder, la cour d'appel, qui a en réalité ordonné à vil prix de l'actif immobilier de la SCI, qui avait pourtant proposé un plan de continuation au moins partiel, a excédé ses pouvoirs en violation de l'article L 642-2 du code de commerce, ensemble article 1er du protocole n° 1 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme ; - ALORS QUE D'AUTRE PART en rejetant le plan de continuation partielle de la SCI IMMO DESFRAY pour faire droit au plan de cession de la société ORMEAUX FINANCE sans répondre aux conclusions de la société exposante faisant valoir (p 7 et p 11 et s) que les baux en cours n'avaient pas été résiliés, et que l'indemnité d'assurance due par la MAAF à la suite de l'incendie devait lui permettre de faire face au cout de la continuation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile, ensemble 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme.