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15/05/2014 | FRANCE | N°12-29290

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 15 mai 2014, 12-29290


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée à compter du 2 novembre 2005 en qualité de psychologue technicienne, catégorie cadre, position 1-2, coefficient 1000, par la société Psya, laquelle exerce une activité de soutien et d'accompagnement psychologique par téléphone ; que la salariée a pris acte de la rupture du contrat de travail par lettre du 26 septembre 2008 et a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
A

ttendu que pour débouter la salariée de ses demandes au titre des majorations...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée à compter du 2 novembre 2005 en qualité de psychologue technicienne, catégorie cadre, position 1-2, coefficient 1000, par la société Psya, laquelle exerce une activité de soutien et d'accompagnement psychologique par téléphone ; que la salariée a pris acte de la rupture du contrat de travail par lettre du 26 septembre 2008 et a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Attendu que pour débouter la salariée de ses demandes au titre des majorations des heures complémentaires, l'arrêt retient que les dispositions contractuelles ne caractérisent ni en la forme ni au fond le contrat de travail à temps partiel tel que défini par les articles L. 3123-1 et suivants du code du travail ; que notamment l'écrit ne contient pas toutes les mentions exigées par l'article L. 3123-14 du code du travail et envisage une durée de travail de 35 heures par semaine, c'est-à-dire d'un temps plein ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le contrat de travail stipulait, en son article quatre, que la salariée devait effectuer un temps de travail de 13 heures par semaine minimum et, en son article premier, que la durée de travail ne pouvait pas excéder 35 heures hebdomadaires, la cour d'appel, qui en a dénaturé les termes clairs et précis, a violé le texte susvisé ;
Et attendu que, conformément à l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de la demande au titre des majorations pour heures complémentaires entraîne, par voie de conséquence, la cassation sur le second moyen du chef des demandes relatives à la prise d'acte de la rupture du contrat de travail ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 mai 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Psya aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Psya à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mai deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait débouté Madame Maud X... de sa demande tendant à voir reconnaître le caractère à temps partiel de son contrat de travail, et obtenir la condamnation de la société PSYA à lui payer les sommes de 5.343 euros et de 534 euros au titre de la majoration pour les heures complémentaires et des congés payés afférents,
Aux motifs que Mme X... soutient qu'il résulte clairement de son contrat de travail qu'elle a été embauchée à temps partiel pour un horaire de 13 heures par semaine minimum, soit selon elle 53 heures par mois, que dès l'embauche elle a travaillé largement plus que ce minimum sans toutefois atteindre le temps plein de 151,67 heures mensuelles sauf en janvier 2008 ; qu'elle ajoute que le contrat ne mentionnait ni un horaire modulé, ni les mentions prévues par l'article L. 3123-14 du code du travail relatives à la durée hebdomadaire ou mensuelle convenue, la répartition de cette durée entre les jours de la semaine ou du mois, les cas dans lesquels cette répartition peut-être modifiée, les modalités de communication par écrit des horaires pour chaque journée et les limites d'utilisation des heures complémentaires ; qu'elle se réfère sur ce dernier point aux règles conventionnelles limitant le nombre d'heures complémentaires effectuées au cours de la même semaine au tiers de la durée hebdomadaire prévue par le contrat, indique qu'elle effectuait en moyenne 105,80 heures par mois de travail, soit plus des 53 heures mensuelles prévues à son contrat et que, quand elle a demandé en avril 2008 à revenir à la durée de travail prévue contractuellement l'employeur s'y est opposé ; qu'elle réclame, pour la période où elle a travaillé, le paiement de la majoration de 25 % prévue à l'article L. 3123-19 du code du travail pour les heures complémentaires qu'elle a effectuées au-delà de 58,3 heures par mois (soit 53 heures + 1/10ème) ; que la société Psya répond que la salariée n'a jamais demandé le paiement de ces majorations avant sa prise d'acte de rupture ; que selon elle, le contrat prévoyait une durée du travail hebdomadaire de 35 heures, c'est-à-dire un temps plein, une modulation des horaires étant mise en place afin d'éviter que par le jeu de la comptabilisation des astreintes réalisées le temps effectif de travail dépasse la durée légale, ce qui explique l'expression « ne pourra excéder » et une durée minimale de présence sur place, c'est-à-dire sans compter les astreintes, de 13 heures par semaine étant garantie à la salariée ; que le contrat de travail liant les parties prévoit que Mme X... « exercera ses fonctions dans les locaux de la société Psya et à son domicile » (astreintes à domicile) ; qu'il stipule :
« Article deux - durée du travail :
En raison du passage aux 35 heures au 1er janvier 2002, la durée du travail ne pourra excéder 35 heures hebdomadaires, soit 151,67 par mois.
(...)« Article cinq - horaires de travail :
« Le présent contrat est conclu et accepté pour réaliser toutes les fonctions pendant les week-end et les jours fériés et/ou les jours ouvrables.
« Mademoiselle Maud X... effectuera un temps de travail de 13 heures par semaine minimum.
« Compte tenu des conditions particulières de travail et des impératifs de service, la répartition de ces horaires sera notifiée à Mademoiselle Maud X... selon un planning qui lui sera communiqué quinze jours minimum avant le début de chaque période. (...)
« Article six - rémunération :
« En contrepartie de l'accomplissement de ses fonctions Mademoiselle Maud X... percevra :
« - une rémunération brute sur la base du salaire minimum de la catégorie à laquelle elle appartient, soit à ce jour 11,07 euros horaires pour toutes les périodes de vacations effectuées dans les locaux de la SAL PSYA, décomptées et considérées comme du temps de travail effectif.
« Ces heures de travail effectif supporteront les majorations légales et conventionnelles en cas de travail de nuit, de dimanche et des jours fériés.
- une rémunération forfaitaire brute pour les périodes d'astreinte à domicile au cours desquelles Mademoiselle Maud X... pourra vaquer librement à ses occupations, non assimilées à un temps de travail effectif, sans toutefois que ces périodes dépassent une durée maximale de 60 heures hebdomadaires.
« Les plages d'astreinte sont modifiées et définies comme suit à compter du 17 novembre 2003 :
- 14,94 euros pour une période d'astreinte de 5 heures ;
- 17,38 euros pour une période d'astreinte de 6 heures ;
- 22,87 euros pour une période d'astreinte de 9 heures ;
- 23,63 euros pour une période d'astreinte de 10 heures ;
- 28,35 euros pour une période d'astreinte de 12 heures ;
- 30,79 euros pour une période d'astreinte de 14 heures ;
- une rémunération forfaitaire brute fixée à ce jour à 22,87 euros pour tout dossier traité par téléphone ou sur internet (chat), qui aura donné lieu à la création d'un compte-rendu d'entretien, effectué pendant les périodes d'astreinte à domicile, décompté et considéré comme temps de travail effectif.
« Ces heures de travail effectif supporteront également les majorations éventuelles légales et conventionnelles.
« Une indemnité de 30,49 euros par mois est accordée pour toute utilisation d'un PC personnel à domicile ».
Que ces dispositions contractuelles ne caractérisent ni en la forme ni au fond le contrat de travail à temps partiel tel que défini par les articles L. 3123-1 et suivants du code du travail ; que notamment, l'écrit ne contient pas toutes les mentions exigées par l'article L. 3123-14 et envisage une durée du travail de 35 heures par semaine, c'est-à-dire d'un temps plein, en contradiction avec l'article L. 3123-1 du même code ; que quelles que soient les difficultés d'exécution induites par sa formulation, il s'agit par conséquent d'un contrat de travail à temps plein ; que les bulletins de salaire de Mme X... mentionnent en ce qui concerne sa rémunération :
- une rubrique « salaire horaire » indiquant le nombre d'heures de « travail effectif » réalisé et le taux horaire appliqué,
- des rubriques « Astreinte » selon la durée des astreintes assurées (astreinte 12h, astreinte 14h, astreinte 6h...) et pour chacune le forfait correspondant,
- une rubrique « majoration dossier » indiquant le nombre de dossiers traités par téléphone ou sur internet pendant les périodes d'astreinte à domicile et le montant forfaitaire par dossier,
- une rubrique « indemnité PC » avec le montant de l'indemnité correspondante,
Qu'il en résulte que, si le nombre d'heures payées au taux horaire figurant sur ces bulletins est toujours inférieur à la durée légale du travail de 151,67 heures, y figurent séparément des temps d'astreinte à domicile payés forfaitairement en fonction de leurs durées respectives ; que l'exécution du contrat entre les parties confirme par conséquent l'existence d'un temps plein ; que l'ambiguïté vient du fait que le contrat entretient une confusion entre temps de travail effectif et temps de travail dans les locaux de la société et qu'il ne donne aucune traduction en équivalent temps effectif des astreintes à domicile, lesquelles doivent cependant être prises en compte pour le calcul du temps de travail effectif ; qu'il apparaît, en outre, que le maximum et le minimum envisagés sont indiqués, pour l'un en temps de travail effectif et pour l'autre en temps de présence réelle sur place ; qu'en l'absence de travail à temps partiel, la demande en paiement d'heures complémentaires doit être rejetée ; que le jugement sera donc confirmé à ce titre ;
Alors, de première part, que le contrat de travail liant les parties stipulait en son « article deux ¿ durée du travail » : « En raison du passage aux 35 heures au 1er janvier 2002, la durée du travail ne pourra excéder 35 heures hebdomadaires, soit 151,67 par mois », ce dont il résultait qu'un plafond maximal de la durée du travail hebdomadaire était fixé à la limite légale de 35 heures ; qu'en considérant que ce contrat « envisage ait une durée du travail de 35 heures par semaine, c'est-à-dire d'un temps plein », pour décider que le contrat de travail litigieux était un contrat de travail à temps plein, alors que la clause se bornait à fixer un plafond au temps de travail effectif, la Cour d'appel a dénaturé l'article 2 du contrat de travail, en violation de l'article 1134 du Code civil ;
Alors, de deuxième part, qu'il résulte de la combinaison des articles L. 3123-14 et L. 3123-17 du Code du travail que le contrat de travail à temps partiel mentionne les limites dans lesquelles peuvent être accomplies des heures complémentaires au-delà de la durée de travail fixée par le contrat, sans que ces heures aient pour effet de porter la durée du travail au niveau de la durée légale du travail ; que partant, en affirmant que le contrat de travail « envisage ait une durée du travail de 35 heures par semaine, c'est-à-dire d'un temps plein, en contradiction avec l'article L. 3123-1 », alors que loin d'être en contradiction avec les dispositions légales propres au contrat de travail à temps partiel, la mention contractuelle d'une limite de 35 heures hebdomadaires au-delà de la durée du travail fixée à 13 heures caractérisait l'existence d'un contrat de travail à temps partiel, la Cour d'appel n'a pas déduit les conséquences légales de ses constatations et violé les dispositions de l'article L. 3123-1 du Code du travail, ensemble les articles L. 3123-14 et L. 3123-17 du Code du travail ;
Alors, de troisième part, qu'aux termes de l'article L. 3123-1 du Code du travail, est considéré comme salarié à temps partiel le salarié dont la durée du travail est inférieure à la durée légale du travail ; qu'en l'espèce, le contrat de travail de Madame X... stipulait qu'elle devra effectuer « un temps de travail de 13 heures minimum », « décomptées et considérées comme du temps de travail effectif », et que « la durée du travail ne pourra excéder 35 heures hebdomadaires, soit 151,67 par mois » ; que la durée du travail prévue au contrat de travail étant donc inférieure à la durée légale du travail, il s'en déduisait que Madame X... devait être considérée comme salariée à temps partiel ; qu'en énonçant toutefois que « l'écrit ne contient pas toutes les mentions exigées par l'article L. 3123-14 et envisage une durée du travail de 35 heures par semaine, c'est-à-dire d'un temps plein, en contradiction avec l'article L. 3123-1 du même code » pour en déduire que « quelles que soient les difficultés d'exécution induites par sa formulation, il s'agit par conséquent d'un contrat de travail à temps plein », la Cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ces constatations et s'est prononcée par des motifs inopérants, a violé les dispositions de l'article L. 3123-1 du Code du travail, ensemble les articles L. 3121-10 et L. 3121-14 du même Code ;
Alors, de quatrième part, en tout état de cause, qu'aux termes de l'article L. 3121-10 du Code du travail, la durée légale du travail effectif des salariés est fixée à trente-cinq heures par semaine civile ; qu'il n'existe pas de droit acquis à l'exécution d'astreintes, sauf engagement de l'employeur vis à vis du salarié à en assurer l'exécution d'un certain nombre ; que par conséquent, ayant constaté, d'une part, que le contrat de travail de la salariée prévoyait qu'elle « effectuera un temps de travail de 13 heures par semaine minimum », « décomptées et considérées comme du travail effectif », et d'autre part, qu'une rémunération forfaitaire brute était prévue pour les périodes d'astreinte à domicile, non assimilées à un temps de travail effectif, au cours desquelles la salariée pourrait vaquer librement à ses occupations, la Cour d'appel ne pouvait valablement en déduire que « quelles que soient les difficultés d'exécution induites par sa formulation, il s'agit par conséquent d'un contrat de travail à temps plein » ; qu'en se prononçant en ce sens, alors que seul un accord sur un temps de travail de 13 heures effectif avait été conclu entre les parties, à l'exclusion de tout engagement sur un nombre d'heures de travail effectif au-delà de ce seuil, et qu'aucun engagement sur le nombre d'astreintes ne figurait davantage au contrat de travail, la Cour d'appel a violé l'article L. 3121-10 du Code du travail ;
Alors, de cinquième part, que la salariée produisait aux débats un courriel de Jean-Marie Z..., le président directeur général de la société PSYA, en date du 5 mai 2008, au sein duquel il priait ses salariés de faire respecter la distinction entre le temps de travail réel¿ et le temps de travail contractuel ; qu'il se déduisait de ce courrier que l'employeur distinguait clairement le temps de travail prévu au contrat du temps de travail réellement effectué, que le temps de travail contractuel ne coïncidait pas avec le temps de travail réel, et qu'il refusait explicitement de respecter la lettre du contrat ; qu'en s'abstenant de procéder à l'examen de ce document dont il ressortait sans ambiguïté que le temps de travail contractuel n'était pas respecté par l'employeur, la Cour d'appel a violé l'article du Code de procédure civile ;
Alors, de sixième part, que la Cour d'appel qui a relevé que « l'ambiguïté vient du fait que le contrat entretient une confusion entre temps de travail effectif et temps de travail dans les locaux de la société et qu'il ne donne aucune traduction en équivalent temps effectif des astreintes à domicile » ne pouvait affirmer ensuite que les astreintes à domicile devaient « cependant être prises en compte pour le calcul du temps de travail effectif »; qu'en se prononçant en ce sens pour décider de l'existence d'un contrat de travail à temps plein, la Cour d'appel a dénaturé le contrat de travail litigieux, en violation de l'article 1134 du Code civil ;
Et alors, qu'en se prononçant en ce sens, sans exposer en quoi la salariée avait la certitude d'avoir conclu un contrat de travail à temps complet, la Cour d'appel a de nouveau violé l'article 1134 du Code civil ;
Alors, enfin, qu'en relevant, après examen des bulletins de paie, « que si le nombre d'heures payées au taux horaire figurant (sur) ces bulletins est toujours inférieur à la durée légale du travail de 151,67 heures, y figurent séparément des temps d'astreinte à domicile payés forfaitairement en fonction de leurs durées respectives », et en en déduisant que « l'exécution du contrat entre les parties confirme par conséquent l'existence d'un temps plein », sans expliquer en quoi le respect de la séparation des temps d'astreinte et des heures de travail effectif sur les bulletins de salaire permettait de confirmer l'existence d'un temps plein, ni expliquer comment la durée légale du travail était atteinte chaque mois par le biais des équivalences des temps d'astreinte en temps effectif, dont elle avait constaté que le contrat de travail ne mentionnait pas la « traduction », la Cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3121-10 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait débouté Madame Maud X... de sa demande tendant à voir requalifier la prise d'acte de rupture en licenciement aux torts de l'employeur, et condamner la société PSYA à lui payer les sommes de 1.192 euros à titre d'indemnité de licenciement, de 12.294 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de 51.230 euros pour non-respect de la procédure de licenciement d'un salarié protégé,
Aux motifs que si la procédure de licenciement du salarié détenteur d'un mandat de représentation du personnel est d'ordre public, ce salarié ne peut être privé de la possibilité de prendre acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur en cas de manquement, par ce dernier, à ses obligations ; que lorsqu'un salarié titulaire d'un mandat électif ou de représentation prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit, soit les effets d'un licenciement nul pour violation du statut protecteur lorsque les faits la justifiaient, soit, dans le cas contraire, les effets d'une démission ; qu'il appartient au salarié d'établir les faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur ; que l'écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur ne fixe pas les limites du litige ; le juge est tenu d'examiner les manquements de l'employeur invoqués devant lui par le salarié, même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit ; qu'il résulte de la combinaison des articles L. 1231-I, L. 1237-2 et L. 1235-1 du code du travail que la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur qui empêche la poursuite du contrat de travail ; que le courrier de prise d'acte de rupture du 26 septembre 2008, énonce : « Cette décision est motivée par les éléments suivants :
- refus délibéré de rémunérer les heures complémentaires au taux majoré (au-delà du tiers des heures prévues au contrat de travail),
- comportement autoritaire et portant atteinte à la déontologie du travail de psychologie clinique (notamment en demandant de rappeler des personnes dont l'identité n'est pas connue ou vérifiable au risque de générer des problèmes familiaux graves),
- demande de restituer des comptes-rendus d'entretien téléphonique au mépris des règles du secret professionnel,
« Ces différents points, dont je vous ai informé à plusieurs reprises au cours des réunions de délégué du personnel n'ont suscité de votre part que des réponses méprisantes et autoritaires.
« Plusieurs autres salariés ont quitté l'entreprise, soit en démissionnant, soit en acceptant d'abandonner leur poste, soit encore en introduisant une instance au conseil de prud'hommes pour harcèlement.
« Je vous ai par ailleurs tenu informé que je prenais un poste complémentaire à la mairie de Paris et vous avez alors refusé que je revienne à mon horaire contractuel initial. L'ensemble de ces éléments rend impossible toute collaboration future dans le climat de confiance particulièrement nécessaire à notre activité ».
Que dans la procédure actuelle, Mme X... impute à l'employeur, des « atteintes à l'exécution du contrat de travail » résultant :
- du non-respect des règles relatives au travail à temps partiel et au temps de travail : contrat de travail à temps partiel irrégulier, dépassement de l'horaire de travail (heures complémentaires non payées), (1)
- de la détérioration des conditions de travail (2) :
- distribution inéquitable des tâches (2-1),
- intendance administrative pointilleuse (2-2),
- autoritarisme, attitudes vexatoires, reproches injustifiés (2-3),
- mise en place par la contrainte d'une procédure de rappel par les psychologues des personnes dont les appels n'avaient pu être pris alors que les psychologues s'y opposaient pour des raisons professionnelles et déontologiques, provoquant des sanctions disciplinaires et le départ de plusieurs psychologues (2-4),
- « traitement spécial » à son égard (pressions, mesures de rétorsion et imputations de fautes infondées à son encontre) (2-5).
Que compte tenu des développements ci-dessus et de la nature à temps complet du contrat de travail, les griefs liés au non-respect des règles relatives au travail à temps partiel et au temps de travail (1) ne sont pas fondés dans leur ensemble ; qu'en ce qui concerne les trois premiers griefs relatifs à la détérioration des conditions de travail (2-1) (2-2) (2-3), la salariée se contente d'affirmations, ne fournit aucune explication et ne vise aucune pièce ; que le seul exemple qu'elle cite est celui de la mise en place d'une procédure de rappel des appels « perdus » (2-4) ; qu'ainsi que cela résulte des élément versés aux débats, essentiellement des comptes-rendus de réunion des délégués du personnel, la société Psya ayant constaté, dans le cadre d'une procédure de certification de qualité, un taux de réponse insuffisant, selon elle, aux appels entrants, le taux d'appels perdu étant de 1 % à 20 %, et estimant également ce taux trop important dans la mesure où les appelants étaient des personnes en difficulté psychologique, a envisagé une procédure de rappel des personnes dont l'appel n'avait pu être pris, principalement en raison de l'indisponibilité des psychologues en poste, qui accepteraient d'être rappelées et laisseraient des coordonnées téléphoniques pour ce faire ; que Mme X... ne précise pas en quoi cette procédure de rappel préservant l'anonymat de l'appelant et ne s'effectuant qu'avec l'accord de celui-ci serait contraire aux règles professionnelles ou déontologiques auxquelles sont soumis les psychologues ; qu'elle ne justifie pas plus de cette contrariété, alors même qu'il résulte d'un mél du 31 mars 2008 qu'une instance syndicale consultée ne s'est pas prononcée clairement sur ce point et a affirmé au contraire qu'en l'absence, comme en l'espèce, d'un ordre professionnel et d'un code de déontologie opposable à l'employeur, lequel dispose du pouvoir de décision dans l'entreprise, la seule issue était... le dialogue et la pratique à l'essai, ce à quoi la société Psya ne s'est pas opposée ; qu'en outre, il résulte clairement des pièces produites à cet égard, spécialement d'une note de cinq pages datée du 5 mai 2008 destinée aux psychologues, que la société Psya a mené un dialogue avec ceux-ci, a répondu à leurs questions et expliqué sa position, de sorte qu'il ne peut lui être reproché sur ce point, en la forme comme au fond, de faute de nature à rendre intolérable le maintien du lien contractuel ; que ce grief n'est par conséquent pas établi ; que les seules quatre pièces auxquelles se réfère Mme X... pour étayer ses affirmations selon lesquelles elle aurait subi « un traitement spécial » (2-5) de la part de la direction sont insuffisantes pour démontrer la réalité du grief invoqué ; qu'en ce qui concerne les demandes de l'employeur de dresser des comptes-rendus d'entretien téléphonique, la salariée ne démontre pas qu'elle contreviendrait aux règles déontologiques ; qu'en outre, il résulte d'un courrier de l'employeur du 23 novembre 2007 que la société Psya, saisie des réserves des psychologues quant à la transmission de tels comptes-rendus, a examiné la difficulté et apporté dans ce courrier des réponses pertinentes notamment au regard de l'exercice de leur profession dans un lien salarial subordonné, c'est-à-dire sous le contrôle de l'employeur qui doit avoir les moyens de contrôler l'exécution du travail pour lequel il paie un salaire, et du fait qu'il leur était demandé de produire des compte-rendus « expurgés » de tout élément permettant l'identification directe ou indirecte des personnes concernées, de sorte que l'anonymat des appelants et le secret médical étaient préservés ; que dans ces conditions, la salariée ne démontre aucun comportement fautif de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail et légitimant sa prise d'acte de rupture, laquelle doit, dès lors, s'analyser comme une démission ; que c'est par conséquent ajuste titre que les premiers juges ont débouté Mme X... de ses demandes fondées sur le licenciement ;
Alors, de première part, que la cassation qui ne manquera pas d'être prononcée sur le premier moyen entraînera nécessairement, par application des dispositions de l'article 625, alinéa 2 du Code de procédure civile, l'annulation de l'arrêt attaqué sur le second moyen, en ce qu'il a estimé que « compte-tenu des développements ci-dessus et de la nature à temps complet du contrat de travail, les griefs liés au non-respect des règles relatives au travail à temps partiel et au temps de travail ne sont pas fondés dans leur ensemble » ;
Alors, de deuxième part, que la salariée exposait avoir subi une détérioration des conditions de travail, telle une distribution inéquitable des tâches, qui justifiait également la prise d'acte de rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur (conclusions d'appel, p. 9, § 2) ; qu'elle produisait aux débats des échanges mails faisant ressortir le surcroît de travail administratif et les tâches de « phoning » subis et dénoncés par la salariée; que partant, en relevant que la salariée se contentait d'affirmations, ne fournissait aucune explication et ne visait aucune pièce, la Cour d'appel n'a pas justifié sa décision de base légale au regard de l'article L. 1237-1 du Code du travail ;
Alors, de troisième part, que tout jugement doit être motivé, à peine de nullité ; que ne satisfait pas aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile la Cour d'appel qui se prononce par voie de simple affirmation ; que partant, en affirmant, pour décider que le grief tiré de ce qu'elle aurait subi « un traitement spécial » n'était pas établi, que « les seules quatre pièces auxquelles se réfère Mme X... pour étayer ses affirmations selon lesquelles elle aurait subi un traitement spécial de la part de la direction sont insuffisantes pour démontrer la réalité du grief invoqué », sans en mentionner le contenu de ces pièces ni procéder à leur analyse, même sommaire, la Cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-29290
Date de la décision : 15/05/2014
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 29 mai 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 15 mai. 2014, pourvoi n°12-29290


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.29290
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