LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 5 février 2013), que du mariage d'Augustine X... avec Joseph Y... sont nés deux enfants, Fernande et André ; que Joseph Y... est décédé le 14 mars 1942 ; qu'il dépendait de la communauté de biens meubles et acquêts ayant existé entre les époux une propriété agricole située à Lapenne, dénommée L'Herbet ; que, par un acte du 6 février 1949, André Y... a vendu à sa mère et à sa soeur les droits successifs qu'il détenait dans la succession de son père ; qu'André Y... est décédé le 26 octobre 1958 en laissant pour lui succéder ses deux enfants, Gérard et Christiane ; que, par un acte notarié du 6 octobre 1973, Augustine X... a fait donation à titre de partage anticipé au profit de sa fille, Fernande, et de ses deux petits-enfants, Gérard et Christiane, de la nue-propriété d'une partie de la propriété de l'Herbet ; qu'Augustine X... est décédée le 20 janvier 1996 en laissant pour lui succéder sa fille, Fernande, et ses deux petits-enfants Gérard et Christiane venant par représentation de leur père, André ; que Mme Christiane Y... a assigné son frère, Gérard, et sa tante, Mme Fernande Y..., en partage de l'indivision ; qu'un arrêt irrévocable du 3 novembre 2008, statuant sur renvoi après cassation (Civ. 1re, 4 juin 2007, pourvoi n° 06-11. 651), a déterminé la masse de calcul de la réserve et de la quotité disponible, constaté l'atteinte à la réserve de Mme Christiane Y... et M. Gérard Y..., fixé la valeur de la propriété rurale d'Herbet à la date de la jouissance divise à 270 000 euros et dit que les notaires liquidateurs devront procéder aux opérations de liquidation de la succession d'Augustine X... ;
Attendu que Mme Christiane Y... fait grief à l'arrêt d'homologuer l'état liquidatif de l'indivision successorale entre les consorts Y... tel que repris dans le procès-verbal établi le 15 janvier 2010, notamment en ce qu'il a fixé l'indemnité de réduction due par Mme Fernande Y... à la somme de 9 411, 59 euros, prévu le remboursement par Mme Fernande Y... à Mme Christiane Y... de la somme de 12 285, 07 euros au titre des dépens exposés dans les précédentes instances et fixé à la somme de 7 753, 32 euros la soulte due par Mme Fernande Y... à Mme Christiane Y... et M. Gérard Y... ;
Attendu que les motifs d'un jugement n'ont pas l'autorité de la chose jugée ; que le dispositif de l'arrêt du 3 novembre 2008 n'ayant pas ordonné la réduction de la donation-partage du 6 octobre 1973, c'est sans méconnaître l'autorité de chose jugée attachée à cette décision, que la cour d'appel a retenu que cette libéralité, qui ne portait pas atteinte à la réserve, ne devait pas être réduite ; que le moyen est sans fondement ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Christiane Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme Christiane Y... et la condamne à payer la somme de 3 000 euros à Mme Fernande Y... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mai deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour Mme Christiane Y...
IL EST FAIT GRIEF A L'ARRÊT infirmatif ATTAQUE d'avoir homologué l'état liquidatif de l'indivision successorale entre les consorts Y... tel que repris dans le procès verbal établi le 15 janvier 2010 établi par Maîtres de LAVAL et VIALLANEIX, notamment en ce qu'il a fixé l'indemnité de réduction due par Fernande Y... épouse Z... à la somme de 9. 411, 59 euros, prévu le remboursement par Fernande Y... épouse Z... à Christiane Y... épouse A... de la somme de 12. 285, 07 euros au titre des dépens exposés dans les précédentes instances et fixé à la somme de 7. 753, 32 euros la soulte due par Fernande Y... épouse Z... à Christiane Y... épouse A... et Gérard Y... ;
AUX MOTIFS QUE pour fonder leur décision, les premiers juges ont retenu que l'arrêt rendu par la présente juridiction le 3 novembre 2008 déterminait les bases de calcul de l'indemnité de réduction due par Fernande Y... épouse Z... à Christiane Y... épouse A... et Gérard Y... ; Que le tribunal a notamment considéré qu'aux termes de cette décision, cette indemnité devait être calculée selon la valeur de la propriété rurale d'Herbet à l'époque du partage, d'après son état au jour de la donation, soit une valeur du bien en pleine propriété de 270. 000 euros ; Que l'état liquidatif dont l'homologation était demandée prenait pour base la valeur du bien au moment de la donation soit la somme de 37. 321, 36 euros ; Que ce projet n'appliquait pas les dispositions de l'arrêt précité qui avait autorité de chose jugée ; Que les premiers juges ont ainsi considéré que Christiane Y... épouse A... était fondée à s'opposer à l'homologation de cet acte et à solliciter une indemnité de réduction fixée sur les deux tiers de valeur en nue propriété de l'exploitation rurale d'Herbet, soit 180. 000 euros ; Que le tribunal a néanmoins considéré que sa demande tendant à voir fixer le montant de cette indemnité à la somme de 59. 918, 47 euros ne pouvait être accueillie dans la mesure où elle était calculée sur la base d'un évaluation en pleine propriété et non en nue propriété ; Qu'il a ainsi renvoyé les parties devant le notaire afin qu'il soit procédé au calcul de cette indemnité ; Qu'il convient néanmoins de rappeler qu'aux termes des arrêts rendus les 3 novembre 2005 et 3 novembre 2008, la présente juridiction a constaté qu'à la date du décès d'Augustine X... les masses actives et passives au décès s'équilibraient pour aboutir à un solde équivalent à zéro ; Qu'il a été définitivement jugé que la masse de calcul de la quotité disponible et de la réserve, déterminée par la réunion fictive des libéralités, s'établissait à la somme totale de 56. 361, 56 euros se décomposant ainsi : 37. 321, 36 euros au titre des biens objet de la donation-partage de 1973 ; 14. 746, 21 euros au titre des donations indirectes consenties à Fernande Y... épouse Z... à partir de 1974 ; 3. 226, 85 euros au tire de dons manuels ou avantages indirects par mouvements sur les comptes bancaires ayant bénéficié à cette dernière entre le 2 mai 1994 et le 6 mai 1995 ; 533, 57 euros au titre d'un don manuel effectué au profit de cette dernière ; 533, 57 euros au titre d'un don manuel effectué au profit de Madame B... le 16 novembre 1998 ; Que la quotité disponible étant d'un tiers, la réserve globale était de deux tiers et la réserve individuelle de moitié de celle-ci, à partager entre les consorts A...
Y... venant par représentation de leur père prédécédé ; Qu'il s'ensuivait que Christiane Y... épouse A... et Gérard Y... n'avaient pas reçu leur part de réserve dans le partage d'ascendant, n'avaient pas été suffisamment allotis et ne pouvaient compléter leur part de réserve par les biens existants ou par une libéralité en avancement d'hoirie puisqu'ils n'avaient rien reçu ; Que la cour a constaté une atteinte à la réserve de Christiane Y... épouse A... et de Gérard Y... et fixé la valeur de la propriété rurale d'Herbet à la date du 03 novembre 2005, date de la jouissance divise, à la somme de 270. 000 euros en pleine propriété ; Qu'elle a précisé que les notaires liquidateurs procéderaient aux opérations de calcul de la réserve et de la quotité disponible et établiraient le compte de liquidation de la succession d'Augustine X... au vu des deux arrêts rendus ainsi que des règles légales ; Qu'il convient de rappeler que le calcul de l'indemnité de réduction résulte des dispositions impératives de l'article 923 du Code civil rappelées implicitement par la Cour dans les décisions précitées ; Qu'au terme de ce texte, il n'y aura jamais lieu à réduire les donations entre vifs qu'après avoir épuisé la valeur de tous les biens compris dans les dispositions testamentaires, et lorsqu'il y aura lieu à cette réduction, elle se fera en commençant par la dernière donation, et ainsi de suite en remontant des dernières aux plus anciennes ; Que ce texte prévoit ainsi la réduction chronologique des donations entre vifs en remontant des dernières aux plus anciennes ; Qu'il est acquis que la donation du 6 octobre 1973 est la plus ancienne ; Que pour déterminer si la valeur de la propriété de l'Herbet doit être prise en compte pour le calcul de l'indemnité de réduction, il y a lieu de vérifier préalablement si après imputation des donations les plus récentes, les droits de Madame A... de Monsieur Y... sur la réserve ont été affectés par cet acte ; Qu'en l'état des arrêts précédemment rendus la masse de calcul de la quotité disponible et de la réserve déterminée par la réunion fictive des libéralités s'établit à la somme totale de 56. 361, 56 euros ; Que la réserve héréditaire globale (2/ 3) s'élève ainsi à la somme de 37. 574, 37 euros, soit 18. 787, 18 euros pour chaque enfant ; Que la quotité disponible (1/ 3) s'élève pour sa part à 18. 787, 16 euros ; Que, s'agissant de la donation-partage consentie en 1973 elle s'impute conformément aux précédentes décisions de la Cour à concurrence de : 14. 239, 66 euros à titre préciputaire et 14. 239, 66 euros à titre réservataire pour le lot attribué à Fernande Y... épouse Z..., 8. 842, 04 euros à titre réservataire pour le lot attribué à Christiane et Gérard Y... ensemble, venant par représentation de leur père prédécédé ; Que Fernande Y... épouse Z... a ainsi été gratifiée de 14. 239, 66 euros sur sa part réservataire (18. 787, 18 euros) et Christiane Y... épouse A... et Gérard Y... de 8. 842, 04 euros sur leur part réservataire (18. 787, 18 euros) ; Que la quotité disponible (18. 787, 18 euros) n'a été amputée que de 14. 239, 66 euros au profit de Fernande Y... épouse Z... ; Qu'ainsi, il n'apparaît pas à cette date d'atteinte à la réserve héréditaire et à la quotité disponible ; Qu'il est en revanche constant que les donations indirectes, d'un montant de 14. 746, 21 euros, consenties à Fernande Y... épouse Z... à partir de 1974 se sont imputées sur sa réserve et sur la quotité disponible pour un montant réductible de 5. 651, 17 euros ; Que les autres donations consenties au titre de dons manuels ou avantages indirects 3. 226, 85 euros (533, 57 euros x 2) sont pour leur part entièrement réductibles ; Qu'au regard de l'ensemble de ces éléments, qui ont été intégralement pris en copte par les notaires désignés, il convient d'homologuer leur projet établir le 15 janvier 2010 en ce qu'il a fixé l'indemnité de réduction due par Fernande Y... épouse Z... à la somme de 9. 411, 59 euros et celle due par Marie B...à la somme de 533, 57 euros, en appliquant le principe du nominalisme dans la mesure où les donations portent des sommes d'argent ;
ALORS QUE si l'autorité de la chose jugée s'attache seulement au dispositif et non aux motifs, elle s'étend à ceux qui en sont le soutien nécessaire et en éclairent la portée, ainsi qu'à ce qui a été implicitement jugé comme étant la conséquence nécessaire de ce dispositif ; Qu'ayant constaté l'atteinte à la réserve pour Christiane Y... épouse A... et Gérard Y..., l'arrêt du 3 novembre 2008 a déterminé les éléments constitutifs de l'indemnité de réduction discutée contradictoirement entre les parties et, après avoir dit que « L'indemnité de réduction due par Madame Y... épouse CROS devra être déterminée selon la valeur du bien donné à l'époque du partage d'après son état au jour de la donation », s'est en conséquence prononcé sur la réévaluation de l'objet de la donationpartage de 1973 qu'il fixe à la date du partage, auparavant retenue comme celle de la jouissance divise par l'arrêt du 3 novembre 2005 qui l'a fixée au jour de son prononcé ; Qu'en discutant les éléments à prendre en compte pour l'indemnité de réduction et en fixant la date d'évaluation du bien objet de la donation-partage à celle du partage, avant de renvoyer les parties devant le notaire liquidateur, l'arrêt du 3 novembre 2008 (et celui du 3 novembre 2005 auquel il se réfère) s'est nécessairement prononcé sur la réduction de la donationpartage de 1973 qu'il a décidé ; Qu'en refusant de prononcer la réduction de cette donation partage, l'arrêt infirmatif attaqué n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations aux termes desquelles l'arrêt du 3 novembre 2008 « a constaté une atteinte à la réserve de Christiane Y... épouse A... et de Gérard Y... et fixé la valeur de la propriété rurale d'Herbet à la date du 03 novembre 2005, date de la jouissance divise » et, plus généralement, a refusé d'appliquer l'arrêt du 03 novembre 2008 ; QU'en statuant ainsi, l'arrêt infirmatif a violé l'autorité de la chose jugée attachée aux arrêts des 03 novembre 2005 et 03 novembre 2008 et, partant, l'article 1351 du Code civil.