LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 27 mars 2013), que Mme X..., fonctionnaire territorial, a été détachée par le président du conseil général d'Ille-et-Vilaine au sein de la Chambre de commerce et d'industrie territoriale du pays de Saint-Malo ; qu'au terme de son détachement, l'intéressée a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de rejeter toutes ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que, d'une part, lorsqu'elle intervient à l'initiative de l'employeur, la rupture du contrat de travail à durée indéterminée, quelle qu'en soit la cause, s'analyse en un licenciement ; qu'il est constant que Mme X..., fonctionnaire territoriale détachée auprès de la CCIT du pays de Saint-Malo, était liée à cet établissement public par un contrat de travail à durée indéterminée dépourvu de toute référence au détachement ; qu'ayant relevé que la CCIT du pays de Saint-Malo, employeur, avait pris l'initiative du non-renouvellement du détachement de l'exposante et partant de la rupture du contrat de travail à durée indéterminée liant les parties, la cour d'appel qui retient que ce non-renouvellement ne pouvait être assimilé à un licenciement, n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations d'où il résultait que la rupture du contrat de travail de Mme X... devait donner lieu à la mise en oeuvre d'une procédure de licenciement en l'absence de laquelle elle s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et a violé les articles L. 1231-1, L. 1231-4 et L. 1232-1 et suivants du code du travail ;
2°/ que, d'autre part, et en tout état de cause, le fonctionnaire territorial détaché est soumis aux règles régissant la fonction qu'il exerce par l'effet de son détachement ; qu'il en résulte que le fonctionnaire territorial détaché au sein d'un service industriel et commercial géré par un établissement public pour exercer des fonctions ¿ autres que celles de directeur ou de chef de la comptabilité ¿ dans un rapport de subordination, est lié à cet établissement public par un contrat de travail de droit privé ; que, s'il est à durée indéterminée, la rupture de ce contrat à l'expiration du détachement s'analyse en un licenciement régi par les dispositions du code du travail, lorsque l'établissement public d'accueil s'est opposé au renouvellement du détachement demandé par le fonctionnaire ou que ce non renouvellement est dû à son fait ; qu'en retenant que le non-renouvellement du détachement de longue durée de l'exposante décidé par la CCIT du pays de Saint-Malo ne pouvait être assimilé à un licenciement, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations d'où il résultait que la rupture du contrat de travail à durée indéterminée de Mme X... s'analysait en un licenciement, et a violé les articles 64, 66 et 67 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, ensemble les articles L. 1232-1 et suivants du code du travail ;
3°/ qu'enfin, et en tout état de cause, la décision de ne pas renouveler le détachement d'un fonctionnaire territorial à l'issue de sa période de détachement relève de la seule autorité administrative dont dépend ce fonctionnaire, et non de l'organisme d'accueil ; qu'en relevant, pour rejeter les demandes indemnitaires de Mme X..., que celle-ci, en position de détachement de longue durée, était liée par un contrat de travail à durée indéterminée à la CCIT du pays de Saint-Malo et que le non-renouvellement de son détachement résultait d'une « décision » de l'établissement public, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si et dans quelle mesure la CCIT du pays de Saint-Malo pouvait prendre l'initiative du non-renouvellement du détachement de Mme X..., sans avoir à mettre en oeuvre la procédure de licenciement pour rompre son contrat de travail, la cour d'appel n'a pas légalement justifié son arrêt au regard des articles 64 et 66 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et 3 du décret n° 86-68 du 13 janvier 1986, ensemble les articles L. 1232-1 et suivants du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant retenu que l'intéressée avait régulièrement été détachée par l'autorité administrative pour une durée d'un an à compter du 17 septembre 2007 et que ce détachement avait été renouvelé pour une durée de deux ans, la cour d'appel en a exactement déduit que la rupture du contrat de travail qui avait lié l'agent à l'organisme d'accueil résultant de la décision prise par ce dernier de ne pas solliciter le renouvellement du détachement ne pouvait s'analyser en un licenciement, le fonctionnaire étant alors obligatoirement réintégré dans son corps ou cadre d'emplois et affecté sur un emploi correspondant à son grade relevant de sa collectivité ou de son établissement d'origine à la première vacance d'emploi en vertu des dispositions de l'article 67 de la loi du 26 janvier 1984 ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de rejeter toutes ses demandes, alors, selon le moyen, que l'abrogation d'une disposition législative, en ce qu'elle fait perdre à l'arrêt qui en fait application son fondement juridique, entraîne de plein droit l'anéantissement de celui-ci ; que l'abrogation à intervenir de l'article 67, alinéa 2, de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 en application de l'article 62 de la Constitution du 4 octobre 1958 entraînera par voie de conséquence l'annulation de l'arrêt attaqué pour perte de fondement juridique ;
Mais attendu que la question prioritaire de constitutionnalité présentée par Mme X... n'ayant pas été renvoyée par la Cour au Conseil constitutionnel, le moyen en ce qu'il invoque une annulation de l'arrêt par voie de conséquence de l'abrogation de la loi est, en tout état de cause, devenu sans objet ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six mai deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat aux Conseils, pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
LE POURVOI REPROCHE A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR, en confirmant le jugement du conseil de prud'hommes de Saint-Malo du 30 septembre 2011, débouté Mme X... de toutes ses demandes à l'encontre de la CCIT du Pays de Saint-Malo ;
AUX MOTIFS QU'il résulte des écritures des parties et des documents par elles versés aux débats que : l'arrêté de détachement du 12 juillet 2007 vise le décret du 13 janvier 1986 relatif notamment aux positions de détachement des fonctionnaires territoriaux ; l'arrêté du 23 août 2007 précise que conformément aux termes du statut général de la fonction publique territoriale et du décret du 13 janvier 1986 précité, Madame X... continuerait à bénéficier dans son corps d'origine des droits à l'avancement et à la retraite ; l'arrêté du 16 septembre 2008 maintient Madame X... en position de détachement pour une durée de 2 années, étant précisé que : « Pendant la durée de son détachement, les cotisations salariales et les contributions patronales pour la retraite de la CNRACL seront calculées sur la base du traitement indiciaire afférent au grade et à l'échelon détenu dans son emploi d'origine et feront l'objet d'un titre de recettes auprès de l'intéressée et de l'administration d'accueil » ; sa fiche de notation était adressée chaque année à son administration d'origine par le directeur de la CCI ; la preuve est ainsi rapportée de ce que Madame X... se trouvait, bien que liée par un contrat de travail à la CCIT du pays de Saint Malo, en position de détachement, lequel a été renouvelé pour la dernière fois le 16 septembre 2008 pour une durée de deux années, que la décision de non-renouvellement de ce détachement a été prise à l'issue de cette durée de deux années, qu'ainsi ce non-renouvellement ne saurait être assimilé à un licenciement, le contrat de travail la liant à la CCIT n'ayant d'autre but que de préciser les conditions de la collaboration avec l'organisme d'accueil ; en conséquence, la décision des premiers juges sera confirmée s'agissant de la qualification de la rupture et Madame X... déboutée de l'intégralité des demandes liées à celle-ci ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE par courrier du 10 juin 2010, le Président de la CCI du Pays de Saint Malo avertissait le Président du Conseil Général du non renouvellement du détachement de Madame X... à partir du 16 septembre 2010 et de la réponse de ce dernier au courrier en date du 24 juin, déclarant prendre contact avec l'intéressée afin de transmettre les fiches de poste correspondant à son grade ;
ALORS D'UNE PART QUE lorsqu'elle intervient à l'initiative de l'employeur, la rupture du contrat de travail à durée indéterminée, quelle qu'en soit la cause, s'analyse en un licenciement ; qu'il est constant que Mme X..., fonctionnaire territoriale détachée auprès de la CCIT du Pays de Saint-Malo, était liée à cet établissement public par un contrat de travail à durée indéterminée dépourvu de toute référence au détachement ; qu'ayant relevé que la CCIT du Pays de Saint-Malo, employeur, avait pris l'initiative du non-renouvellement du détachement de l'exposante (cf. arrêt, p. 4, §. 2) et partant de la rupture du contrat de travail à durée indéterminée liant les parties, la Cour d'appel qui retient que ce non-renouvellement ne pouvait être assimilé à un licenciement, n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations d'où il résultait que la rupture du contrat de travail de Mme X... devait donner lieu à la mise en oeuvre d'une procédure de licenciement en l'absence de laquelle elle s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et a violé les articles L. 1231-1, L 1231-4 et L. 1232-1 et suivants du code du travail ;
ALORS D'AUTRE PART, et en tout état de cause, QUE le fonctionnaire territorial détaché est soumis aux règles régissant la fonction qu'il exerce par l'effet de son détachement ; qu'il en résulte que le fonctionnaire territorial détaché au sein d'un service industriel et commercial géré par un établissement public pour exercer des fonctions ¿autres que celles de directeur ou de chef de la comptabilité¿ dans un rapport de subordination, est lié à cet établissement public par un contrat de travail de droit privé ; que, s'il est à durée indéterminée, la rupture de ce contrat à l'expiration du détachement s'analyse en un licenciement régi par les dispositions du code du travail, lorsque l'établissement public d'accueil s'est opposé au renouvellement du détachement demandé par le fonctionnaire ou que ce non-renouvellement est dû à son fait ; qu'en retenant que le non-renouvellement du détachement de longue durée de l'exposante décidé par la CCIT du Pays de Saint-Malo (cf. arrêt, p. 4, §. 2) ne pouvait être assimilé à un licenciement, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations d'où il résultait que la rupture du contrat de travail à durée indéterminée de Mme X... s'analysait en un licenciement, et a violé les articles 64, 66 et 67 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, ensemble les articles L. 1232-1 et suivants du code du travail ;
ALORS ENFIN et en tout état de cause QUE la décision de ne pas renouveler le détachement d'un fonctionnaire territorial à l'issue de sa période de détachement relève de la seule autorité administrative dont dépend ce fonctionnaire, et non de l'organisme d'accueil ; qu'en relevant, pour rejeter les demandes indemnitaires de Mme X..., que celle-ci, en position de détachement de longue durée, était liée par un contrat de travail à durée indéterminée à la CCIT du Pays de Saint-Malo et que le non-renouvellement de son détachement résultait d'une « décision » de l'établissement public (arrêt, p. 4, §. 2), sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée (cf. conclusions d'appelante n° 2 du 15 février 2013, pp. 12, 15-16), si et dans quelle mesure la CCIT du Pays de Saint-Malo pouvait prendre l'initiative du non-renouvellement du détachement de Mme X..., sans avoir à mettre en oeuvre la procédure de licenciement pour rompre son contrat de travail, la cour d'appel n'a pas légalement justifié son arrêt au regard des articles 64 et 66 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et 3 du décret n° 86-68 du 13 janvier 1986, ensemble les articles L. 1232-1 et suivants du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
LE POURVOI REPROCHE A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR, en confirmant le jugement du conseil de prud'hommes de Saint-Malo du 30 septembre 2011, débouté Mme X... de toutes ses demandes à l'encontre de la CCIT du Pays de Saint-Malo ;
ALORS QUE l'abrogation d'une disposition législative, en ce qu'elle fait perdre à l'arrêt qui en fait application son fondement juridique, entraîne de plein droit l'anéantissement de celui-ci ; que l'abrogation à intervenir de l'article 67, alinéa 2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 en application de l'article 62 de la Constitution du 4 octobre 1958 entraînera par voie de conséquence l'annulation de l'arrêt attaqué pour perte de fondement juridique.