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30/04/2014 | FRANCE | N°13-14217

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 avril 2014, 13-14217


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 15 mai 2012), que Mme X... a été engagée le 13 juin 2008 par la société Alba en qualité de secrétaire assistante de direction ; que l'employeur lui a, le 23 mars 2009, adressé un courrier lui faisant part de sa décision de surseoir à une mesure de licenciement, en détaillant cependant les motifs l'ayant conduit à envisager un licenciement, et en mentionnant : « nous referons un point complet ensemble le 30 avril 2009 afin d'évaluer s'il

y a eu de votre part une évolution tangible et durable dans votre tra...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 15 mai 2012), que Mme X... a été engagée le 13 juin 2008 par la société Alba en qualité de secrétaire assistante de direction ; que l'employeur lui a, le 23 mars 2009, adressé un courrier lui faisant part de sa décision de surseoir à une mesure de licenciement, en détaillant cependant les motifs l'ayant conduit à envisager un licenciement, et en mentionnant : « nous referons un point complet ensemble le 30 avril 2009 afin d'évaluer s'il y a eu de votre part une évolution tangible et durable dans votre travail » ; que la salariée a été licenciée par courrier du 28 avril 2009 indiquant qu'elle ne répondait toujours pas « aux attentes indispensables liées à un poste de secrétaire assistante de direction » et en visant les motifs énoncés dans la lettre du 23 mars 2009, dont une copie était jointe ; que, contestant son licenciement, l'intéressée a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, que constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par l'employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération ; qu'il s'ensuit que le licenciement présente un caractère disciplinaire lorsqu'il est motivé par le manquement du salarié à son obligation de discrétion ; qu'il ressort des constatations auxquelles la juridiction du second degré a procédé que l'employeur reprochait à Mme X... « son comportement qui a entamé notre confiance, à savoir qu'ayant trouvé à l'ordinateur de la direction, le bulletin de paye de Mme Y..., vous vous êtes empressée de le montrer à un commercial de l'agence. C'est une attitude douteuse et inacceptable pour une secrétaire de direction qui doit être discrète par nature » ; qu'en retenant cependant, pour écarter les divers moyens que Mme X... tirait de la méconnaissance de la procédure disciplinaire, que les griefs invoqués dans la lettre de licenciement ne constituaient pas une faute disciplinaire mais que l'employeur lui reprochait un mauvais accomplissement de son travail et le fait de ne pas répondre aux attentes liées à un poste de secrétaire assistante de direction, bien qu'il était reproché à Mme X... une faute disciplinaire consistant dans une violation de son obligation de discrétion, la cour d'appel a violé l'article L. 1335-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant relevé qu'il était reproché à la salariée un mauvais accomplissement de son travail et le fait de ne pas répondre aux attentes liées à un poste de secrétaire assistante de direction, la cour d'appel, exerçant les pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail, a estimé que ces manquements caractérisaient une insuffisance professionnelle constituant une cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile, et 37 de la loi du 10 juillet 1991 rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente avril deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Boullez, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR écarté les demandes que Mme X... avait formées à l'encontre de la société ALBA afin d'obtenir le paiement de diverses indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse AUX MOTIFS QU'il s'évince des dispositions de l'article L. 1232-6 du code du travail que c'est le motif de rupture mentionné dans la lettre de licenciement qui détermine le caractère disciplinaire ou non du licenciement ; que le licenciement pour motif inhérent à la personne relève soit du pouvoir de direction soit du pouvoir disciplinaire de l'employeur. Dès lors qu'il résulte des termes de la lettre de licenciement que l'employeur reproche une faute au salarié, il s'agit d'un licenciement disciplinaire et l'employeur doit alors respecté les règles propres au licenciement disciplinaire notamment adresser la lettre de licenciement au plus tard dans le mois suivant l'entretien préalable ainsi que le prévoit l'article L.1332-2 du code du travail, faute de quoi le licenciement est irrégulier ; qu'en dehors de toute faute, l'employeur peut décider de rompre le contrat de travail d'un salarié dans l'intérêt de l'entreprise à condition d'invoquer une cause réelle et sérieuse ; que l'insuffisance professionnelle constitue une cause légitime de licenciement mais elle se distingue de la faute. Il n'est pas nécessaire que les termes exacts « insuffisance professionnelle » soient employés pour que le licenciement soit fondé sur ce motif. Pour que l'insuffisance professionnelle puisse constituer une cause légitime de licenciement, il appartient au juge, sans prétendre substituer son appréciation à celle de l'employeur, de déterminer que l'incompétence alléguée repose bien sur des éléments concrets et matériellement vérifiables ; que la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; que Mme X... a été licenciée par le courrier du 28 avril 2009 ; qu'il y est expressément indiqué que les motifs du licenciement sont ceux qui ont été exposés au cours de l'entretien préalable, et qui ont été confirmés dans le courrier du 23 mars 2009, joint en copie à la lettre de licenciement ; qu'il doit, en conséquence, être considéré que cette lettre du 23 mars 2009, comprenant les motifs du licenciement, fait partie intégrante de la lettre de licenciement ; que ce sont donc ces motifs là qui doivent être examinés pour déterminer le caractère disciplinaire ou non du licenciement, la salariée affirmant qu'il s'agit d'un licenciement de nature disciplinaire entaché d'irrégularité à l'inverse de l'employeur qui soutient qu'il s'agit d'un motif non disciplinaire ; que les motifs de licenciement visés sont donc les suivants : « Je vous rappelle les principaux motifs qui nous ont amenés à envisager votre licenciement : - Il y a d'abord eu votre comportement qui a entamé notre confiance, à savoir qu'ayant trouvé à l'ordinateur de la direction le bulletin de paye de Madame Y..., vous vous êtes empressée de le montrer à un commercial de l'agence. C'est une attitude douteuse et inacceptable pour une secrétaire de direction, qui doit être discrète par nature. ! Concernant votre travail courant, vous ne vous impliquez pas du tout dans votre tâche de secrétaire assistante, c'est nous qui vous assistons en permanence ! - Vous ne suivez pas les affaires en cours. - Il n'y a pas de remontée des actions que l'on vous demande d'exécuter, la plupart du temps elles ne le sont pas, et vous les avez oubliées ! D'où notre obligation de suivre à votre place. - Vous ne vous sentez pas concernée par l'intérêt de l'entreprise. Votre laxisme nous a déjà fait perdre une affaire, comme vous le savez, de 25.000 €, vous avez fait une erreur d'adresse mail d'un client et vous n'avez même pas assuré le suivi les jours suivants ; Autre exemple avec le vendeur pressé car il partait à l'étranger, pas de remontée de l'info, résultat deux autres concurrents ont pris le mandat. ! Ce sont deux exemples parmi d'autres mais révélateurs de votre conscience professionnelle en regard de l'importance de votre poste.- Les actions qui vous sont demandées ne sont pas exécutées pour la majorité d'entre elles. Si nous ne pensons à nous assurer de leur bonne exécution, nous en découvrons le préjudice après coup. - Le courrier que vous préparez n'est, ni relu, ni retravaillé dans son contexte, et vous êtes une secrétaire de direction! Les estimations clients ne sont pas rédigées dans les délais acceptables pour les clients, même si il vous manque des précisions vous ne gérez pas les problèmes avec votre direction. Vous ne prenez pas les initiatives élémentaires liées à votre fonction : organisation, classement, archivage, etc...tout est dans la facilité et la passivité. Vous occupez ce poste depuis neuf mois et vous êtes positionnée très correctement, alors nous nous interrogeons sur votre attitude. Vous n'êtes pourtant pas surchargée de travail compte tenu du marché, mais au lieu d'en profiter pour mettre votre travail à niveau, vous vous distrayez sur des sites de loisir d'internet, à divers moments de la journée, (Face book, My space, Nrj, etc...) quasiment tous les jours surtout si nous sommes absents » ; que force est de constater que ce n'est pas une ou plusieurs fautes qui sont reprochées à Mme X... mais un mauvais accomplissement de son travail et le fait de ne pas répondre aux attentes liées à un poste de secrétaire assistante de direction, qui lui sont reprochés ; qu'en effet, il lui est d'abord indiqué qu'il lui a été laissé un délai pour corriger ses lacunes, pour s'impliquer efficacement dans son travail, pour répondre aux attentes indispensables liées à un poste de secrétaire de direction, étant rappellé que dans la lettre du 23 mars 2009, un délai lui avait effectivement été laissé pour apprécier si une évolution tangible et durable dans son travail était possible. Ensuite, s'il est question d'un fait précis, le fait d'avoir montrer à un commercial de l'agence le bulletin de salaire de Mme B., ce n'est pas ce fait précis qui est retenu comme motif, puisque ce fait est donné comme exemple de ce qui ne correspond pas au profil de la secrétaire assistante de direction, « discrète par nature » ; que de même, sont ensuite exposés divers comportements pour démontrer son absence d'implication dans l'exercice de sa tâche de secrétaire assistante de direction, absence d'implication qui impose à l'employeur de l'assister « c'est nous qui vous assistons en permanence » : * absence de suivi des affaires en cours ; * défaut de remontée des actions qui lui ont été demandées ; * absence d'intérêt pour l'entreprise, laxisme (là également un fait est cité, erreur dans l'adresse mail d'un client avec une perte de ..., et ce n'est pas ce fait précis qui constitue le motif du licenciement, il n'est évoqué que pour illustrer le propos ) ; * défaut de relecture et de reprise du courrier ; * défaut de rédaction des estimations clients dans des délais acceptables ; * absence d'initiative (classement, organisation, archivage ).

QUE le fait de se distraire en allant sur des sites de loisir d'internet, n'est pas en lui même le fait qui est reproché à Mme X..., c'est le fait de ne pas avoir profité de son temps libre « pour mettre son travail à niveau » ; que, pour terminer, il sera relevé que l'employeur termine la lettre de licenciement en indiquant que cette situation est préjudiciable à la bonne marche de l'entreprise ; qu'il s'évince de ces remarques que, en dehors de toute faute, l'employeur a décidé de rompre le contrat de travail dans l'intérêt de l'entreprise en invoquant une cause réelle et sérieuse, qui est bien une insuffisance professionnelle ; que, dès lors, il ne s'agit pas d'une procédure disciplinaire, et l'irrégularité soutenue par Mme X... n'a pas lieu d'être retenue. Il convient maintenant d'examiner le caractère réel et sérieux du motif invoqué ; que selon l'article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige, le juge à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utile. Si un doute subsiste, il profite au salarié ; que de l'examen du compte rendu établi par le conseiller du salarié ayant assisté Mme X... durant l'entretien préalable du 10 mars 2009, il résulte que le responsable de l'entreprise a reproché à cette dernière de négliger totalement son travail et a précisé que le licenciement avait pour objet de sanctionner ses négligences professionnelles. En revanche il ne consigne aucune contestation de la part de la salariée, ni même une explication, notamment sur les exemples donnés, la divulgation du bulletin de salaire de Mme Y... ou la consultation de sites internet de loisirs durant son temps de travail ; que de même, Mme X... n'élèvera aucune contestation après le courrier du 23 mars 2009, alors qu'il lui est imparti un délai pour corriger ses lacunes et s'impliquer efficacement dans son travail ; ce n'est que par un courrier du 26 octobre 2009, soit plusieurs mois après son licenciement qu'elle a indiqué, sans précision aucune, contester le motif et la régularité du licenciement ainsi que le solde de tout compte ; que ces éléments suffisent à établir la réalité du motif invoqué par la société ALBA pour mettre un terme au contrat de travail. En conséquence, les moyens soulevés par Mme X... relatifs d'une part au caractère disciplinaire de la procédure de licenciement et de son irrégularité et, d'autre part, sur l'absence de cause réelle et sérieuse seront rejetés. C'est pourquoi la décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a validé ce licenciement intervenu pour insuffisance professionnelle ;
ALORS QUE constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par l'employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération ; qu'il s'ensuit que le licenciement présente un caractère disciplinaire lorsqu'il est motivé par le manquement du salarié à son obligation de discrétion ; qu'il ressort des constatations auxquelles la juridiction du second degré a procédé que l'employeur reprochait à Mme X..., « son comportement qui a entamé notre confiance, à savoir qu'ayant trouvé à l'ordinateur de la direction, le bulletin de paye de Mme Y..., vous vous êtes empressée de le montrer à un commercial de l'agence. C'est une attitude douteuse et inacceptable pour une secrétaire de direction qui doit être discrète par nature » ; qu'en retenant cependant, pour écarter les divers moyens que Mme X... tirait de la méconnaissance de la procédure disciplinaire, que les griefs invoqués dans la lettre de licenciement ne constituaient pas une faute disciplinaire mais que l'employeur lui reprochait un mauvais accomplissement de son travail et le fait de ne pas répondre aux attentes liées à un poste de secrétaire assistante de direction, bien qu'il était reproché à Mme X... une faute disciplinaire consistant dans une violation de son obligation de discrétion, la cour d'appel a violé l'article L 1335-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-14217
Date de la décision : 30/04/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 15 mai 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 avr. 2014, pourvoi n°13-14217


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boullez, SCP Boutet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.14217
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