La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/04/2014 | FRANCE | N°13-14129

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 avril 2014, 13-14129


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 16 janvier 2013), que Mme X... engagée le 2 novembre 2006 par la société Imprimerie et éditions Braun en qualité de juriste, et occupant en dernier lieu les fonctions de directrice des ressources humaines, a été licenciée par lettre du 30 juillet 2009 ;
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de dire son licenciement fondé sur une faute grave, de la débouter de l'ensemble de ses demandes et de la condamner à rembourser à la sociét

é une somme à titre de frais postaux, alors, selon le moyen :
1°/ que la lettr...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 16 janvier 2013), que Mme X... engagée le 2 novembre 2006 par la société Imprimerie et éditions Braun en qualité de juriste, et occupant en dernier lieu les fonctions de directrice des ressources humaines, a été licenciée par lettre du 30 juillet 2009 ;
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de dire son licenciement fondé sur une faute grave, de la débouter de l'ensemble de ses demandes et de la condamner à rembourser à la société une somme à titre de frais postaux, alors, selon le moyen :
1°/ que la lettre de licenciement fixe les limites du litige quant aux motifs qui y sont énoncés ; que la lettre notifiant le licenciement à la salariée faisait état, sur cinq pages, de très nombreux manquements graves de la salariée, et motivait le licenciement par « l'ensemble de ces agissements, propos et manquements professionnels » ; que la cour d'appel, qui a constaté que sur cet ensemble de faits était seule établie une anomalie en matière de remboursement de frais, ne pouvait dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse sans violer l'article L. 1232-6 du code du travail ;
2°/ qu'il incombe au juge de rechercher, au-delà des énonciations de la lettre de licenciement, la véritable cause du licenciement ; que la salariée faisait état dans ses écritures d'appel de la volonté de son employeur de l'évincer en suite d'un conflit entre le président-directeur général et le directeur de site, conflit auquel elle avait refusé de prendre part ; qu'en jugeant son licenciement fondé sans rechercher si la cause véritable de ce licenciement n'était pas autre que celle énoncée dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs, en violation des articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail ;
3°/ que la preuve de la faute grave incombe à l'employeur ; qu'il incombait en conséquence à l'employeur de faire la preuve du caractère fictif de la réservation que la salariée avait dû annuler en suite du report de ses congés à l'initiative de l'employeur ; qu'en reprochant à la salariée, qui avait fourni à son employeur une attestation du propriétaire du logement loué pour la période de congés initialement prévue, de ne pas produire le contrat de location ni le justificatif de paiement du loyer convenu, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur la salariée, a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-9 et L. 1232-1 du code du travail, ensemble l'article 1315 du code civil ;
4°/ que la faute grave, qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié constituant une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, doit s'apprécier in concreto ; que la salariée faisait valoir dans ses écritures d'appel que son licenciement était intervenu dans un contexte extrêmement conflictuel qui l'avait conduite à la dépression ; qu'en omettant de rechercher si les circonstances particulières dans lesquelles la faute reprochée avait été commise ne lui ôtait pas tout caractère de gravité, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9, L. 1232-1, L. 1235-1 et L. 1235-3 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté, par une appréciation souveraine des éléments soumis à son examen et sans inverser la charge de la preuve, que sur des demandes de remboursement de frais, la salariée avait trompé son employeur à deux reprises sur un mois, pour obtenir le paiement indu d'une somme de 1 688,36 euros, la cour d'appel a pu en déduire, écartant par là même toute autre cause de rupture, que ces seuls faits, de la part d'une salariée occupant les fonctions de directrice de ressources humaines, et de nature à rompre la confiance tant à l'égard de l'employeur que du personnel placé sous sa responsabilité, constituaient une faute grave rendant impossible le maintien de la salariée dans l'entreprise ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf avril deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour Mme X....
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la salariée de ses demandes tendant à voir condamner son ancien employeur au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, des congés payés y afférents, d'une indemnité de licenciement, d'un rappel de salaire correspondant à la période de mise à pied, des congés payés y afférents, de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, de remboursement de la somme de 1.580 euros et d'avoir condamnée au remboursement de la somme de 108,36 euros.
AUX MOTIFS QUE par lettre du 30 juillet 2009, dont les termes fixent les limites du litige, la société IMPRIMERIE ET EDITIONS BRAUN a licencié Sarah X... en lui reprochant : - des manquements graves à ses obligations professionnelles de bonne gestion des ressources humaines et à sa mission d'assurer l'existence d'un bon climat de travail, - le dénigrement du président de la société devant des collaborateurs, - des manquements graves à son obligation professionnelle de secret et de confidentialité, - des anomalies graves concernant ses demandes de remboursement de frais ; que s'agissant des remboursements de frais que Sarah X... a obtenu deux remboursements de frais postaux d'un montant de 108,36 euros en présentant une facture de la Poste établie par le bureau de Thann le 13 juin 2009 et un reçu du même montant, établi le 24 juin par le même bureau de poste, pour un affranchissement en date du 13 juin 2009 ; que Sarah X... prétend avoir effectué le même jour deux séries d'envoi d'un nombre identique de lettres recommandées en s'adressant à deux guichets différents du même bureau de poste et affirme que ceux-ci ont donné lieu à l'établissement de deux factures, l'une électronique et l'autre manuelle en raison de la fermeture du guichet ayant réceptionné la deuxième série d'enveloppe ; que ces explications incohérentes, notamment en ce qui concerne la nécessité de s'adresser à un guichet fermé alors que l'on est servi à un guichet ouvert et le fonctionnement de la Poste qui serait en mesure d'effectuer des envois et de recevoir des paiements qu'elle ne pourrait enregistrer, sont au surplus démenties d'une part par le document que Sarah X... qualifie de « facture manuelle », et qui aurait été établi sous cette forme en raison de la fermeture du guichet le 13 juin 2009, alors même qu'il a été rédigé 9 jours plus tard et mentionne expressément qu'il s'agit d'un reçu ne valant pas facture, et d'autre part par la lettre du directeur adjoint du bureau de poste de Thann certifiant que l'envoi de 18 lettres recommandées en date du 13 juin 2009 avait donné lieu à l'établissement de la facture d'un montant de 108,36 euros datée du même jour et qu'aucune autre opération n'avait été effectuée à cette date pour la société Imprimerie et Editions Braun ;qu'il est donc démontré que Sarah X... a trompé son employeur afin d'obtenir un double remboursement d'une même dépense ; que par ailleurs il ressort des explications des parties qu'au cours de l'été 2009 Sarah X... a accepté, à la demande de son supérieur hiérarchique, de différer des congés qui lui avait été accordés du 8 au 22 août 2009, et que la société Imprimerie et Editions Braun s'était engagée à lui rembourser les frais éventuels liés à l'annulation d'une location de vacances ; que Sarah X... a obtenu à ce titre le paiement d'une somme de 1.580 euros par chèque du 10 juillet 2009, qu'elle a elle-même signé avec le comptable, Maxime Y..., en l'absence de Jean-Marie Z..., directeur administratif et financier ; que Sarah X... n'a pu justifier auprès de l'employeur de la réalité de la dépense dont elle avait ainsi obtenu le remboursement, mais s'est contentée de reprocher au dirigeant de la société de ne pas respecter ses engagements, tout en remboursant néanmoins la somme litigieuse à la société Imprimerie et Editions Braun ;qu'il résulte cependant de la réponse que le directeur administratif et financier de la société Imprimerie et Editions Braun lui a adressée le 30 juillet 2009, que pour tenter de justifier du bien fondé du paiement à son profit, Sarah X... avait remis à la comptabilité le 13 juillet 2009 une attestation datée du 1er juillet, alors même que l'accord sur le remboursement de frais éventuels était intervenu le 8 juillet ; que Sarah X... confirme d'ailleurs dans sa lettre du 28 juillet 2009 que le justificatif de la location lui avait été réclamé « semaine 28 », soit entre le 6 et le 12 juillet, et qu'elle a ensuite contacté l'auteur de cette attestation ; que le directeur administratif et financier considérait donc à raison que cette attestation faussement datée était suspecte et ne pouvait suffire à justifier de la réalité de la dépense alléguée, et qu'il lui a demandé a à bon droit de produire une copie du contrat de location ainsi qu'un justificatif des trois versements qu'elle prétendait avoir effectués en paiement de la somme dont elle avait obtenu le remboursement ;que Sarah X... n'a pas été en mesure de remettre les pièces justificatives sollicitées, et même dans le cadre du présent procès, n'a fourni aucun élément permettant de démontrer la réalité des frais dont elle avait obtenu le remboursement, alors même qu'elle ne conteste pas le fait que l'attestation antidatée remise à la société Imprimerie et Editions Braun avait été établie par une personne appartenant à son réseau de connaissances personnelles ; qu'il est donc démontré que Sarah X... s'est octroyée indûment une somme de 1,580 euros en essayant de justifier a posteriori ce paiement par la production d'une attestation de complaisance ;qu'entre le 13 juin et le 13 juillet 2009, Sarah X..., qui occupait des fonctions de directeur des ressource humaines, a donc trompé à deux reprises son employeur pour obtenir le paiement indu d'une somme totale de î.688,36 euros ; que ces faits, qui conduisaient la société Imprimerie et Editions Braun à perdre toute confiance dans la salariée, alors même qu'une telle confiance est indispensable entre un employeur et un cadre de haut niveau compte tenu du degré d'autonomie qui lui est laissé, et qui décrédibilisaient la salariée à l'égard du personnel placé sous sa responsabilité, rendaient impossible le maintien de la salariée dans l'entreprise ;que la société Imprimerie et Editions Braun était dès lors fondée à licencier Sarah X... pour faute grave de ce seul chef, et que celle-ci sera en conséquence déboutée de toutes ses demandes au titre du licenciement ; que Sarah X..., qui réclame le remboursement de la somme de 1.580 euros payée spontanément à la société Imprimerie et Editions Braun à l'issue de l'entretien préalable au licenciement, ne démontre pas le caractère indu de ce paiement ; que non seulement elle n'apporte aucune preuve d'avoir dû supporter des frais pour l'annulation d'une location de vacances au cours de l'été 2009, mais qu'il est au contraire démontré que ce paiement correspondait à la restitution d'une somme que la salariée s'était indûment versée et qu'elle avait ensuite tenté de justifier par la production d'une attestation de complaisance ;que Sarah X... est donc particulièrement mal fondée à solliciter le remboursement de cette somme et qu'elle sera donc déboutée de sa demande de ce chef ; qu'en revanche que la société Imprimerie et Editions Braun est fondée à demander le remboursement de la somme de 108,36 correspondant aux frais postaux indûment remboursés à Sarah X....
ALORS QUE la lettre de licenciement fixe les limites du litige quant aux motifs qui y sont énoncés ; que la lettre notifiant son licenciement à Madame Sarah X... faisait état, sur 5 pages, de très nombreux manquements graves de la salariée, et motivait le licenciement par « l'ensemble de ces agissements, propos et manquements professionnels » ; que la Cour d'appel, qui a constaté que sur cet ensemble de faits était seule établie une anomalie en matière de remboursement de frais, ne pouvait dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse sans violer l'article L.1232-6 du Code du travail.
ALORS de plus QU'il incombe au juge de rechercher, au-delà des énonciations de la lettre de licenciement, la véritable cause du licenciement ; que la salariée faisait état dans ses écritures d'appel de la volonté de son employeur de l'évincer en suite d'un conflit entre le Président directeur général et le directeur de site, conflit auquel elle avait refusé de prendre part ; qu'en jugeant le licenciement de Madame Sarah X... fondé sans rechercher si la cause véritable de ce licenciement n'était pas autre que celle énoncée dans la lettre de licenciement, la Cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs, en violation des articles L.1232-1 et L.1235-1 du Code du travail.
ALORS subsidiairement QUE la preuve de la faute grave incombe à l'employeur ; qu'il incombait en conséquence à l'employeur de faire la preuve du caractère fictif de la réservation que la salariée avait dû annuler en suite du report de ses congés à l'initiative de l'employeur ; qu'en reprochant à Madame Sarah X..., qui avait fourni à son employeur une attestation du propriétaire du logement loué pour la période de congés initialement prévue, de ne pas produire le contrat de location ni le justificatif de paiement du loyer convenu, la Cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur la salariée, a violé les articles L.1234-1, L.1234-9 et L.1232-1 du Code du travail, ensemble l'article 1315 du Code civil.
ALORS en toute hypothèse QUE la faute grave, qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié constituant une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, doit s'apprécier in concreto ; que Madame Sarah X... faisait valoir dans ses écritures d'appel que son licenciement était intervenu dans un contexte extrêmement conflictuel qui l'avait conduite à la dépression ; qu'en omettant de rechercher si les circonstances particulières dans lesquelles la faute reprochée avait été commise ne lui ôtait pas tout caractère de gravité, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L.1234-1, L.1234-5, L.1234-9, L.1232-1, L.1235-1 et L.1235-3 du Code du travail, ensemble l'article 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-14129
Date de la décision : 09/04/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 16 janvier 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 avr. 2014, pourvoi n°13-14129


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Fabiani et Luc-Thaler, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.14129
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award