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09/04/2014 | FRANCE | N°12-29271

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 09 avril 2014, 12-29271


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Constate la déchéance du pourvoi à l'égard de la société Electricité industrielle JP Fauche ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 809, alinéa 2, du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 20 septembre 2012), rendu en matière de référé, que la société EAS développement (la société EAS), exerçant une activité de maintenance et réparation d'aéronefs, a fait édifier, sous la maîtrise d'oeuvre d'un architecte, un hangar destiné à accueillir des avio

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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Constate la déchéance du pourvoi à l'égard de la société Electricité industrielle JP Fauche ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 809, alinéa 2, du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 20 septembre 2012), rendu en matière de référé, que la société EAS développement (la société EAS), exerçant une activité de maintenance et réparation d'aéronefs, a fait édifier, sous la maîtrise d'oeuvre d'un architecte, un hangar destiné à accueillir des avions gros porteurs ; que sont intervenues à ce chantier les sociétés Torras, Guy Fourcade, Electricité industrielle JP Fauche (la société Fauche), la société David Sud dallage (la société David), la société Pomes énergie (la société Pomes) et la société Butzbach ; que se plaignant de désordres et non-conformités, la société EAS a saisi le juge des référés d'une demande d'expertise ; que les constructeurs, qui ne s'y sont pas opposés, ont demandé le versement de provisions à valoir sur le montant des travaux ayant donné lieu à des situations impayées ;
Attendu que pour accueillir les demandes de provisions correspondant au solde dû à chaque entreprise diminué des seules pénalités de retard, l'arrêt retient que les situations de travaux ont été visées par le maître d'oeuvre et que les éventuels désordres et inachèvements ne sont pas d'une importance telle qu'ils empêchent l'exploitation du hangar ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'une expertise avait été ordonnée au vu du constat d'un huissier de justice faisant état de divers désordres et non-conformités et avait pour finalité de déterminer l'existence et la nature de ces désordres et inachèvements, la cour d'appel, qui a tranché une contestation sérieuse, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société EAS à verser diverses sommes à titre de provision, l'arrêt rendu le 20 septembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;
Condamne les sociétés Torras, David Sud dallage, Pomes énergie, Butzbach et Mme Z..., ès qualités de mandataire liquidateur de la société Guy Fourcade aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf avril deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour la société EAS développement.
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société EAS Développement à payer respectivement à la SAS Torras, à la SARL Guy Fourcade, à la SAS David Sud Dallage, à la SAS Pomes Energie et à la SAS Butzbach diverses sommes provisionnelles, portant intérêts au taux légal à compter du 14 décembre 2011 ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE «les entreprises du groupement Torras sollicitent une provision à valoir sur les situations de travaux présentées depuis le mois de mars 2011 et validées par l'architecte, en revanche la société EAS Développement soutient qu'une telle demande est sérieusement contestable en l'état des retards du chantier et des désordres ; que selon l'article 5.1 du marché de travaux du 14.6.2010, le maître d'ouvrage se libérera des sommes dues au titre du présent marché par virement sur le compte commun du groupement sur présentation des propositions de paiement établies mensuellement par l'architecte, seuls les travaux réalisés de manière acceptable pourront faire l'objet du paiement, le maître d'ouvrage pouvant apporter en cas de travaux insuffisamment avancés par rapport au planning ou incorrectement établis une réfaction sur ses paiements jusqu'à complète satisfaction contractuelle ; qu' une retenue de garantie de 5% applicable sur le montant total TTC des travaux sera consignée par le maître d'ouvrage sauf présentation d'une garantie bancaire par le groupement d'entreprises, la caution sera libérée ou les sommes seront versées au groupement d'entreprises dans un délai de 12 mois à compter de la réception définitive ; que l''article 17 du marché prévoit qu'à défaut d'achèvement complet des travaux dans le délai contractuel, l'entrepreneur est tenu à réparation de tout dommage et préjudice que son retard peut occasionner, des pénalités de retard seront appliquées, par entreprise et par lot, par jour calendaire de retard sans mise en demeure préalable, sur simple confrontation entre la date d'expiration du délai contractuel d'exécution par corps d'état et de la date réelle de fin d'exécution ; que les pénalités seront calculées sur la base de 10 000 € par jour de retard avec un minimum de 50 000 € à partir du Sème jour et un maximum de 5% du marché par entreprise et par lot ; qu'en exécution de cet article, la société EAS Développement peut donc réclamer aux seules entreprises du groupement responsables du retard de livraison une pénalité de 10.000 € par jour calendaire et au maximum une pénalité de 5% du montant de son marché pour le retard de livraison du hangar, sachant que la date contractuelle était fixée au 31.3.2011 et que la société EAS Développement, qui n'a jamais signé de procès-verbal de réception, a exploité le hangar à partir de septembre 2011 ; que le chantier a donc effectivement été livré avec un retard imputable d'une part pour 81 jours à l'effondrement du 24.12.2010 et d'autre part pour 86 jours aux interventions des entreprises, ainsi qu'il résulte de l'analyse de l'expert dans son compte-rendu d'expertise n° 2 du 30.5.2012 ; que l''article 17 alinéa 3 du marché prévoit que le paiement des pénalités ne déchargera pas l'entrepreneur de son obligation légale d'indemniser le maître d'ouvrage de l'intégralité du dommage subi ; que le rapport financier de M. Hugues A..., expert-comptable, versé par la société EAS Développement évaluant ses pertes d'exploitation, ses pertes de résultat, surcoûts d'exploitation et atteinte à l'image ne peut être apprécié dans une instance en référé, alors qu'il est sérieusement contestable et contesté par les entreprises du groupement Terras devant l'expert judiciaire et que les préjudices immatériels ne peuvent être estimés en l'état par le juge des référés, juge de l'évidence ; que la société EAS Développement, qui exploite le hangar litigieux depuis septembre 2011 ne peut sérieusement opposer les inachèvements, malfaçons et désordres de la construction aux entreprises du groupement Torras, d'autant que les situations de travaux ont été visées par le maître d'oeuvre et que les éventuels désordres et inachèvements ne sont pas d'une importance telle qu'ils empêchent l'exploitation du hangar, notamment le défaut de hauteur sous la poutre et l'absence de finitions des accès au site ; que l''expertise commise par l'ordonnance déférée a pour finalité de déterminer l'existence et la nature des désordres et inachèvements imputables à chaque entreprise et l'expert n'a pas encore terminé ses investigations; que les préjudices subis tant matériels qu'immatériels par la société EAS Développement ne pourront donc être estimés et chiffrés qu'à l'issue de cette expertise» ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE «pour s'opposer aux demandes en paiement provisionnel présentées, la société EAS DEVELOPPEMENT fait valoir qu'elle est autorisée contractuellement à retenir les paiements jusqu'à la livraison d'un ouvrage achevé et conforme ; qu'elle soutient que le bâtiment qui devait être livré le 31 mars 2011 n'est en exploitation que depuis te 30 09 201, soit un retard de 6 mois imputable pour 2 mois à l'effondrement du hangar en décembre 2010, et n'est toujours pas achevé ; qu'elle se prévaut de l'inexécution par les entreprises de l'obligation de résultat qu'elles auraient contractées solidairement à son égard ; qu'il convient de relever qu'aux termes de l'article 17 du marché de travaux, les pénalités de retard sont calculées à partir du 5ème jour et plafonnées à 5% du marché par entreprise et par lot, sans préjudice d'une indemnisation par l'entrepreneur, de l'intégralité du dommage subi par le maître de l'ouvrage ; que la société EAS Développement ne peut sérieusement donc se prévaloir d'une solidarité des entreprises dans le respect du délai de livraison de l'ouvrage fixée, et ce d'autant qu'une telle solidarité n'a pas été expressément prévue dans la convention les liant à ces entreprises ; que par ailleurs, si la société EAS DEVELOPPEMENT est susceptible de se prévaloir de retards d'exécution des prestations, ce retard ainsi qu'elle le reconnaît est pour partie imputable au sinistre survenu en cours de chantier le 24 12 2010, et elle ne justifie du planning d'intervention des entreprises qui a dû être établi à la suite de ce sinistre ; que la société EAS DEVELOPPEMENT qui procède par amalgame entre les différentes entreprises, ne fournissant pas d'éléments précis permettant d'imputer à l'une ou l'autre des entreprises défenderesses, ne peut donc sérieusement se prévaloir en l'état, d'un préjudice notamment d'exploitation excédant le montant de pénalités de retard plafonnées à 5% ; que la société EAS DEVELOPPEMENT ne peut sérieusement se prévaloir que d'une retenue de 5% de ce chef sur la créance des sociétés bénéficiant d'une créance au litre du solde de prix des travaux selon les situations visées par l'architecte et dont les retards d'exécution sont susceptibles de leur être imputés, soit qu'elles admettent elles-.mêmes le principe de cette retenue de ce chef, soit que l'architecte en évoque le principe dans ses situations de travaux ; que si elle est également susceptible de se prévaloir de défauts de finition, non-conformités et désordres affectant l'ouvrage, elle reconnaît être elle-même avoir pris possession de l'ouvrage et commencé son exploitation fin septembre 2011 et ne fournit pas à ce stade, d'éléments suffisants pour établir une créance indemnitaire de ces chefs à l'encontre de l'une ou l'autre des entreprises demanderesses, qui excéderait le montant de la retenue de garantie fixée contractuellement à 5% du montant de chaque marché de travaux » ;
Alors, d'une part, que le juge des référés ne peut accorder de provision au créancier que dans les cas où l'obligation du défendeur n'est pas sérieusement contestable ; qu'en l'espèce, la société EAS Développement opposait aux demandes de paiements provisionnels des entreprises du groupement Torras la clause de l'article 5.1§5 du contrat l'autorisant, en cas de travaux insuffisamment avancés ou incorrectement établis, à retenir ses paiement jusqu'à complète satisfaction contractuelle ; que la Cour d'appel a constaté qu'une expertise était en cours pour déterminer l'existence et la nature des désordres et inachèvements affectant la construction, ce dont il résultait que l'obligation de paiement du maître de l'ouvrage se heurtait à une contestation sérieuse tirée de sa faculté contractuelle de réfaction des paiements ; qu'en faisant néanmoins droit aux demandes de paiements provisionnels des entreprises du groupement Torras, la Cour d'appel a violé l'article 809 alinéa 2 du Code de procédure civile.
Alors, d'autre part, que le juge des référés ne peut accorder de provision au créancier que dans les cas où l'obligation du défendeur n'est pas sérieusement contestable ; qu'en jugeant en l'espèce que la société EAS Développement ne pouvait sérieusement opposer aux entreprises du groupement Torras les inachèvements, malfaçons et désordres de la construction au motif qu'elle avait pris possession de l'ouvrage et que leur importance n'était pas telle qu'ils empêchent son exploitation, la Cour d'appel a tranché une contestation sérieuse en violation de l'article 809 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Alors subsidiairement que le juge des référés ne peut dénaturer les termes clairs et précis des clauses contractuelles ; qu'aux termes de l'article 5.1§5 du contrat, il est prévu qu'en cas de travaux insuffisamment avancés (par rapport au planning) ou incorrectement établis, le maître de l¿ouvrage pourra apporter une réfaction sur ses paiements jusqu'à complète satisfaction contractuelle ; qu'en retenant en l'espèce que le maître de l'ouvrage ne pouvait mettre en oeuvre la clause litigieuse dès lors qu'il avait commencé l'exploitation de la construction et que l'étendue de son préjudice n'était pas encore fixée, quant celle-ci ne comportait pas de telles conditions, la Cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis, en violation de l'article 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 12-29271
Date de la décision : 09/04/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 20 septembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 09 avr. 2014, pourvoi n°12-29271


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.29271
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