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02/04/2014 | FRANCE | N°11-26885

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 02 avril 2014, 11-26885


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, tel qu'il est reproduit en annexe :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et de le condamner au paiement de diverses sommes au titre de la rupture ;
Mais attendu qu'ayant constaté que le refus de la salariée de se soumettre aux horaires inutilement pénalisants que voulait lui imposer l'employeur était justifié par des raisons précises et que cette modification n'était pas justifiée par des nécessités de s

ervice mais constituait une réplique au refus légitime de l'intéressée d'ex...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, tel qu'il est reproduit en annexe :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et de le condamner au paiement de diverses sommes au titre de la rupture ;
Mais attendu qu'ayant constaté que le refus de la salariée de se soumettre aux horaires inutilement pénalisants que voulait lui imposer l'employeur était justifié par des raisons précises et que cette modification n'était pas justifiée par des nécessités de service mais constituait une réplique au refus légitime de l'intéressée d'exercer un emploi différent de celui occupé avant son congé parental d'éducation, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Les Portes de Champagne aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux avril deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Les Portes de Champagne
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit le licenciement de Madame X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse, et d'AVOIR condamné la société PORTES DE CHAMPAGNE à lui verser des sommes à titre d'indemnité de licenciement (5.823,79 €), de préavis (3.149,64 €) et de congés payés sur préavis, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (20.000 €), et de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
AUX MOTIFS QU'« au soutien de son appel, la société Les Portes de Champagne fait valoir qu'en application de l'article 1225-55 du code du travail le salarié qui reprend son activité à la suite d'un congé parental d'éducation ne peut refuser une modification de son contrat de travail dès lors qu'il lui est proposé un emploi similaire à celui précédemment occupé, de telle sorte que le refus d'accepter les nouvelles conditions de travail est fautif ; Qu'en l'espèce, elle expose que Madame X... conservait ses fonctions antérieures au même coefficient, la durée de travail restant inchangée de même que la rémunération et le lieu de travail, et souligne que la salariée, qui n'avait pas protesté à réception de la lettre qui l'informait de ces modifications, a refusé de procéder à l'entretien des chambres ; Que la société Les Portes de Champagne ajoute que, prenant acte de ce refus, elle a accepté que remploi de Madame X... soit limité à des taches de serveuse à l'exception de tout ménage en chambre et a donné connaissance à la salariée de son nouveau planning "sur mesure", établi en fonction des horaires des repas, auquel cette dernière a refusé de se soumettre en prétendant appliquer ses anciens horaires ; Que l'appelante soutient que ce comportement est constitutif d'insubordination, ayant au surplus entraîné une désorganisation de l'entreprise, et en conséquence d'une faute grave ; Que pour répliquer aux moyens de l'intimée qui explique son refus par l'existence de deux coupures dans la journée, la société Les Portes de Champagne prétend que Madame X... effectuait déjà en 2005 des journées de 10 heures entrecoupées de deux coupures et que la répartition de l'horaire de cette salariée n'a jamais été contractualisée ; Que toutefois il résulte de l'article 1225-55 du code du travail qu' "à l'issue du congé parental d'éducation ou ..., le salarié retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d'une rémunération au moins équivalente ; Qu'en l'espèce il résulte des explications de l'employeur que la réorganisation opérée pendant l'absence de Madame X... avait notamment consisté à demander à certains serveurs qui l'avaient accepté de travailler au 17 de la Grande rue d'assurer en outre des tâches d'entretien des chambres, c'est à dire de ménage ; Que les plannings produits aux débats font apparaître que les autres serveurs, travaillant au 20 de la Grande rue, ne conservaient que leurs tâches de serveurs ; Qu'ainsi que le souligne Madame X..., c'est seulement lorsque l'emploi précédemment occupé n'est pas disponible que le salarié peut se voir proposer un emploi similaire ; Que la société Les Portes de Champagne ne démontre pas que le précédent emploi de Madame X... était indisponible alors qu'il est constant que les serveurs travaillant au 20 de la Grande rue ne faisaient pas de ménage et qu'il apparaissait possible de permuter l'un de ceux là, sans changement de leur contrat selon la thèse développée par la société Les Portes de Champagne, afin de permettre à Madame X... de retrouver son emploi initial ; Que la société Les Portes de Champagne ne peut prétendre que l'ajout de missions de ménage à celles de serveur ne constituait pas un changement du contrat de travail alors qu'elle n'avait appliqué cette évolution que pour les serveurs qui l'avaient accepté, ainsi que cela apparaît très clairement dans la lettre qui leur avait été adressée le 21 novembre par le directeur pour les remercier d'avoir fait preuve de leur "esprit positif' en acceptant d'assurer "à la fois le service aux résidents et le ménage des chambres" ; Que l'emploi de femme de ménage, serait ce seulement à temps partiel, même si Madame X... n'apparaissait plus sur les plannings que comme AH (agent hospitalier) et non plus comme SE (serveur), ne peut être considéré comme un emploi similaire à celui de serveuse, le maintien de la rémunération étant à cet égard sans incidence ; Que c'est la raison pour laquelle la société Les Portes de Champagne a renoncé, face au refus de Madame X..., à lui imposer d'exécuter ces tâches de ménage des chambres ; mais qu'il apparaît des pièces produites que c'est par abus que l'employeur, mécontent de ce refus, a souhaité imposer à Madame X... des horaires inutilement pénalisants sur cinq jours chaque semaine avec deux coupures de deux heures et de trois heures 15, soit un total quotidien de 5 heures 15 de coupures et une amplitude journalière de 11 heures 45 pour sept heures de travail rémunérées, alors que cette salariée était mère de famille ; Que la société Les Portes de Champagne avait d'ailleurs menacé Madame X... dans une lettre du 2 avril 2009 de telles représailles au cas où elle persisterait dans son refus de faire le ménage, dans les termes suivants : "En cas de refus réitéré de votre part à respecter les tâches vous incombant dans le cadre de votre journée de travail, nous nous verrons contraints de vous notifier un changement d'horaires aux fins d'assurer le bon fonctionnement de l'établissement et la bonne prise en charge des résidents" ; Que la société Les Portes de Champagne ne peut expliquer les horaires imposés par les nécessités du service et les horaires de repas dont l'amplitude avait été réduite alors que les serveurs travaillant au 20 de la Grande rue, dispensés comme Madame X... de ménage des chambres, travaillaient 8 heures 45 par jour 8 jours par quatorzaine en ne supportant qu'une seule coupure l'après midi (celle du matin de 11 H 00 à 11 H 30 étant destinée à leur pause repas), avec une amplitude journalière totale inférieure de 30 minutes à celle de Madame X... ; Qu'il est en outre inexact que Madame X... ait déjà eu à subir deux coupures journalières en 2005, le planning produit par la société Les Portes de Champagne démontrant au contraire qu'il n'existait de véritable coupure que l'après midi, la pause de 30 minutes entre 11 H 00 et 11 H 30 étant consacrée au repas ; Qu'enfin, si le contrat de travail initial de Madame X... ne comportait pas d'horaires précis, il prévoyait en son 4° une disposition sur laquelle la société Les Portes de Champagne ne donne aucune explication aux termes de laquelle "chaque journée de travail ne pourra comporter qu'une seule coupure" ; Que le refus de Madame X... de se soumettre à l'horaire que voulait lui imposer la société Les Portes de Champagne, dès lors qu'il était justifié par des raisons précises qu'elle avait exposées et que cette modification des conditions de travail, contraire aux dispositions claires du contrat, n'était pas justifiée par les nécessités du service mais constituait une réplique au refus légitime de la salariée d'exercer un emploi différent de celui occupé avant son congé parental d'éducation, sera en conséquence considéré comme légitime et non fautif ; Qu'il s'ensuit que le licenciement, motivé par cette insubordination, est dépourvu de cause réelle et sérieuse ; Que le jugement sera confirmé de ce chef » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « Madame X... Isabelle a été embauchée en date du 17.12.1993 par la société La Jérômière, devenue aujourd'hui la SAS LES PORTES DE CHAMPAGNE, par contrat à durée indéterminée à temps partiel, puis à temps complet, en qualité de serveuse, coefficient 200, niveau 1, catégorie 2, selon la classification de la convention collective nationale de l'hospitalisation privée à but lucratif ; que Madame X... Isabelle exécutait 30 heures par semaine sur 5 jours ; que le contrat de travail de Madame X... prévoyait la possibilité d'effectuer des heures supplémentaires niais avec un délai de prévenance de 7 jours ; que Madame X... est partie en congés parental du 1er juillet 2007 au 31 mars 2009 ;qu'elle a prévenu son employeur le 9 mars 2009 de son retour dans l'entreprise au 1er avril 2009 ; que par courrier du 25 mars 2009, la SAS LES PORTES DE CHAMPAGNE prévient Madame X... d'une modification et de la nouvelle organisation des sites des 17 et 25 grande rue ; que la SAS LES PORTES DE CHAMPAGNE, dans son courrier du 25.03.2009, indique que la fonction de serveuse est complétée par une fonction d'entretien et de ménage des chambres ; qu'il est proposé une modification des horaires de travail à Madame X... : 10 heures journalières en 3 plages horaires ;que dès le 1er avril 2009, Madame X... a continué d'appliquer ses anciens horaires ; qu'à son retour de congé parental, son employeur devait proposer à Madame X... le même emploi ou similaire avec un salaire équivalent ; que Madame X... n'a pas fait l'objet d'une proposition de réorganisation de son poste de travail par son employeur ; que la modification d'horaires est une clause substantielle de modification du contrat de travail ; que Madame X... a été engagée en qualité de serveuse. L'introduction du ménage des chambres est une modification de son contrat de travail ; que Madame X... comptabilise 14 ans et 5 mois d'ancienneté ; Par ces motifs le Conseil de Prud'hommes de SOISSONS, section Activités diverses, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort, qualifie le licenciement de Madame X... née Z... Isabelle sans cause réelle et sérieuse en vertu des dispositions de l'article 1235-3 du Code du travail » ;
1. ALORS QU'il résulte de l'article L.1225-55 du Code du travail qu'à l'issue du congé parental d'éducation le salarié retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d'une rémunération au moins équivalente ; que ce texte n'impose nullement à l'employeur de créer un emploi ou de procéder à des permutations de personnel pour rendre le poste disponible ; qu'en relevant néanmoins que « la société Les Portes de Champagne ne démontre pas que le précédent emploi de Madame X... était indisponible alors qu'il est constant que les serveurs travaillant au 20 de la Grande rue de ne faisaient pas de ménage et qu'il apparaissait possible de permuter l'un de ceux là (...) afin de permettre à Madame X... de retrouver son emploi initial », la cour d'appel a violé les articles L. 1225-55, L. 1235-1, L. 1235-3, L. 1235-4 et L. 1234-1 du Code du travail ;
2. ALORS, EN OUTRE, QUE l'organisation des horaires de travail relève, sauf abus de sa part, du pouvoir de direction de l'employeur ; que l'employeur peut donc procéder à une nouvelle répartition des horaires de travail sans avoir à recueillir l'accord du salarié ; que le refus persistant du salarié d'un simple changement de ses conditions de travail peut être sanctionné par un licenciement pour faute ; que la cour d'appel a notamment relevé que « les serveurs travaillant au 20 de la Grande rue, dispensés comme Madame X... de ménage des chambres avaient une amplitude journalière totale inférieure à 30 minutes à celle de Madame X... » ; que de telles constatations ne suffisent pas à caractériser une modification du contrat de travail, pas plus qu'un abus de l'employeur dans la fixation des horaires de travail de la salariée ; qu'en jugeant néanmoins le contraire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil, ensemble les articles L.1221-1, L.1222-1, L. 1235-1, L. 1235-3, L. 1235-4 et L. 1234-1 du Code du travail ;
3. ALORS QUE pour dire que la société LES PORTES DE CHAMPAGNE ne pouvait pas imposer de nouveaux horaires à Madame X... la cour d'appel a encore relevé que « si le contrat de travail initial de Madame X... ne comportait pas d'horaires précis, il prévoyait en son 4° une disposition sur laquelle la société Les Portes de Champagne ne donne aucune explication aux termes de laquelle « chaque journée de travail ne pourra comporter qu'une seule coupure » alors qu'elle avait constaté que ce contrat de travail initial était un contrat à temps partiel et que par la suite la salariée était passée à temps plein, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé les articles L.1221-1, L. 1235-1, L. 1235-3, L. 1235-4 et L. 1234-1 du Code du travail ;
4. ALORS, ENFIN, QU'il résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué que l'aménagement des horaires de Madame X... n'a consisté en définitive qu'à un déplacement des temps de coupure au sein de la journée de travail, sans modification de l'amplitude ; qu'en considérant que cet aménagement, pourtant justifié par la réorganisation des services durant le congé parental de la salariée, aurait été constitutif d'un abus, la cour d'appel a violé les articles L.1221-1, L.1222-1, L.1235-1, L.1235-3, L.1235-4 et L.1234-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-26885
Date de la décision : 02/04/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 14 septembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 02 avr. 2014, pourvoi n°11-26885


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:11.26885
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