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27/03/2014 | FRANCE | N°13-15820

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 27 mars 2014, 13-15820


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 février 2013) et les productions, que Albert X..., atteint d'un cancer broncho-pulmonaire diagnostiqué le 14 novembre 2006, est décédé le 15 janvier 2007 à la suite de complications infectieuses avec fortes fièvres ; qu'imputant ce décès au cancer lequel aurait été causé par des expositions à l'amiante, sa veuve Mme Y... a saisi le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) d'une demande en indemnisation des préj

udices subis par son époux et par elle-même à titre personnel ; que l'affecti...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 février 2013) et les productions, que Albert X..., atteint d'un cancer broncho-pulmonaire diagnostiqué le 14 novembre 2006, est décédé le 15 janvier 2007 à la suite de complications infectieuses avec fortes fièvres ; qu'imputant ce décès au cancer lequel aurait été causé par des expositions à l'amiante, sa veuve Mme Y... a saisi le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) d'une demande en indemnisation des préjudices subis par son époux et par elle-même à titre personnel ; que l'affection n'ayant pas été prise en charge au titre de la législation professionnelle, le FIVA a sollicité l'avis de la commission d'examen des circonstances d'exposition à l'amiante qui, le 30 novembre 2009, a indiqué : "l'exposition à l'amiante du défunt est insuffisante pour établir un lien entre son cancer broncho-pulmonaire primitif et l'amiante" ; que, par décision du 3 décembre 2009, le FIVA a rejeté les demandes de Mme Y... ; que celle-ci a contesté cette décision devant la cour d'appel de Paris et l'a saisie des mêmes demandes en indemnisation ; que, par arrêt du 28 février 2011, cette cour a ordonné une expertise afin de déterminer notamment s'il existait un lien de causalité entre l'exposition à l'amiante du défunt et le cancer broncho-pulmonaire ; que M. Stéphane X... et le mineur Noël-Henri, représenté par sa mère Mme Y..., sont intervenus volontairement à l'instance pour demander réparation de leurs préjudices subis du fait du décès de leur père ;

Attendu que M. X... et Mme Y..., celle-ci agissant ès qualités et en son nom personnel, font grief à l'arrêt de les débouter de leurs demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en excluant tout lien de causalité entre une exposition à l'amiante et l'affection dont est décédé Albert X..., au motif que "la logique du rapport et du dossier conduisent à attribuer le décès de Albert X... au tabagisme qu'il pratiquait", cependant que l'expert concluait dans son rapport que "Albert X... est décédé des suites d'un cancer du poumon et de ses traitements qui sont en rapport avec son exposition à l'amiante", la cour d'appel a violé le principe susvisé de l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer les documents de la cause, ensemble l'article 1134 du code civil ;

2°/ que l'existence de plusieurs facteurs ayant directement provoqué un même dommage ne fait pas obstacle à ce que chacun d'entre eux soit retenu comme élément causal ; qu'en admettant même, à titre subsidiaire, que le décès de Albert X... ait été provoqué par plusieurs facteurs, il reste qu'aux termes du rapport d'expertise judiciaire, l'exposition à l'amiante constitue l'un de ces facteurs ; qu'en excluant tout lien de causalité entre une exposition à l'amiante et l'affection dont il était décédé, tout en constatant que "l'exposition à l'amiante a pu participer au développement du cancer" l'ayant affecté et que cette exposition à l'amiante constituait une "circonstance adjuvante" à ce développement ce dont s'évinçait nécessairement l'existence d'un lien causal entre l'exposition à l'amiante de Albert X... et son décès, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 53 III de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000 ;

Mais attendu que l'arrêt retient qu'il existait une incertitude sur l'exposition effective du défunt à l'amiante dans le cadre de ses activités professionnelles ainsi que sur le lien pouvant exister entre son décès et le cancer broncho-pulmonaire dont il était atteint, qu'il n'y avait par ailleurs aucune certitude quant au lien entre sa possible exposition à l'amiante et ce cancer, que le tabagisme important et actif qu'il avait pratiqué avait été le principal facteur causal de ce cancer ;

Que de ces constatations et énonciations procédant de son appréciation souveraine, hors dénaturation, de la valeur et de la portée du rapport d'expertise, la cour d'appel a pu déduire l'absence de lien causal direct et certain entre l'exposition à l'amiante dont avait été victime Albert X... et son cancer broncho-pulmonaire et, par conséquent, son décès ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mars deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour les consorts X...

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté les consorts X... de leurs demandes ;

AUX MOTIFS QUE l'expert n'est clairement affirmatif que sur un point : « En ce qui concerne les éléments pouvant être à l'origine de ce cancer, il est évident que le tabagisme important et actif de Monsieur X... a été le principal facteur causal » ; que le reste de son étude tend à établir que l'exposition à l'amiante a pu participer au développement du cancer étant observé que le cancer constitue le lien nécessaire avec l'affection par l'amiante ; que, pour le surplus, l'expert fait ressortir toutes les incertitudes du dossier ; que ces incertitudes portent sur les conditions mêmes du décès, le lien avec le cancer et ses soins étant même une forte probabilité plutôt qu'une donnée acquise ; que les activités professionnelles de M. Albert X... font apparaître encore plus d'incertitudes et, sur son éventuelle contamination à l'occasion de la construction de la bibliothèque François Mitterrand, d'invraisemblance ; que la logique du rapport et du dossier conduisent à attribuer le décès de Albert X... au tabagisme qu'il pratiquait, l'exposition à l'amiante ne constituant qu'une circonstance adjuvante dans l'hypothèse la plus favorable à la thèse des consorts X... ; que c'est insuffisant pour retenir un lien entre une exposition à l'amiante et l'affection dont est décédé M. Albert X... ;

ALORS, D'UNE PART, QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en excluant tout lien de causalité entre une exposition à l'amiante et l'affection dont est décédé M. Albert X..., au motif que « la logique du rapport et du dossier conduisent à attribuer le décès de Albert X... au tabagisme qu'il pratiquait » (arrêt attaqué, p. 4, alinéa 9), cependant que l'expert concluait dans son rapport que « Monsieur Albert X... est décédé des suites d'un cancer du poumon et de ses traitements qui sont en rapport avec son exposition à l'amiante » (rapport d'expertise, p. 12, alinéa 1er), la cour d'appel a violé le principe susvisé de l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer les documents de la cause, ensemble l'article 1134 du Code civil ;

ET ALORS, D'AUTRE PART, QU' en tout état de cause, l'existence de plusieurs facteurs ayant directement provoqué un même dommage ne fait pas obstacle à ce que chacun d'entre eux soit retenu comme élément causal ; qu'en admettant même, à titre subsidiaire, que le décès de M. Albert X... ait été provoqué par plusieurs facteurs, il reste qu'aux termes du rapport d'expertise judiciaire, l'exposition à l'amiante constitue l'un de ces facteurs ; qu'en excluant tout lien de causalité entre une exposition à l'amiante et l'affection dont était décédé M. Albert X..., tout en constatant que « l'exposition à l'amiante a pu participer au développement du cancer » ayant affecté M. X... et que cette exposition à l'amiante constituait une « circonstance adjuvante » à ce développement (arrêt attaqué, p. 4, alinéas 6 et 9), ce dont s'évinçait nécessairement l'existence d'un lien causal entre l'exposition à l'amiante de M. X... et le décès de celui-ci, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 53 III de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 13-15820
Date de la décision : 27/03/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 11 février 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 27 mar. 2014, pourvoi n°13-15820


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : Me Balat, Me Le Prado

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.15820
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