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26/03/2014 | FRANCE | N°12-29324

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 mars 2014, 12-29324


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 7 juillet 1999 en qualité de responsable de bureau d'études par la société Matériel de première transformation du bois, aux droits de laquelle se trouve la société E. Gillet M1TB, a été licencié pour motif économique par lettre du 15 juin 2009 ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le second moyen :
Vu les articles L. 3141-12, L. 314

1-14, D. 3141-5 et D. 3141-6 du code du travail ;
Attendu qu'eu égard à la finali...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 7 juillet 1999 en qualité de responsable de bureau d'études par la société Matériel de première transformation du bois, aux droits de laquelle se trouve la société E. Gillet M1TB, a été licencié pour motif économique par lettre du 15 juin 2009 ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le second moyen :
Vu les articles L. 3141-12, L. 3141-14, D. 3141-5 et D. 3141-6 du code du travail ;
Attendu qu'eu égard à la finalité qu'assigne aux congés payés annuels la Directive 2003/88 du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, il appartient à l'employeur de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d'exercer effectivement son droit à congé, et, en cas de contestation, de justifier qu'il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande d'indemnité compensatrice de congés payés, l'arrêt retient que le salarié ne justifie pas que l'employeur l'a mis dans l'impossibilité de prendre la totalité de ses congés payés légaux et conventionnels faute de planification ou application erronée de la convention collective ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses constatations que l'employeur ne justifiait pas avoir satisfait à ses obligations, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande d'indemnité compensatrice de congés payés, l'arrêt rendu le 10 octobre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Condamne la société E. Gillet M1TB aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société E. Gillet M1TB à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six mars deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté monsieur X... de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE le licenciement économique est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison de l'absence de motivation suffisante de la lettre de licenciement, ce que conteste l'employeur ; qu'en l'espèce, le salarié a donc fait l'objet d'un licenciement économique en ces termes : « Je vous confirme que nous rencontrons de graves difficultés économiques dans la mesure où notre société enregistre une baisse très importante de ses commandes. C'est ainsi que par note diffusée en avril dernier, j'avais informé chacun de ce que les commandes étaient de 20 % en deçà de la normale et que cette baisse s'accentuait progressivement, notre activité étant tournée vers les investissements lourds des entreprises. Or, le ralentissement de l'économie et la limitation des octrois de crédits bancaires à nos clients ont conduit nos clients à honorer les commandes précédemment passées et financées mais à différer et même abandonner les projets d'investissements. Ces constats ont une répercussion immédiate sur notre activité des tous prochains mois et ne laisse pas présager d'une reprise rapide d'une activité normale de notre entreprise puisque ce sera nécessairement avec retard que nous percevrons les effets de la reprise économique. Notre société a donc mis en oeuvre des décisions importantes et notamment : la diminution de la rémunération des dirigeants, le non renouvellement des contrats précaires venant à échéance, la fusion technique des deux sites de la société afin de limiter les frais administratifs ainsi que les postes en doublon. Cette dernière décision a pour effet la suppression de 11 postes dont trois départs naturels à la retraite sans remplacement externe. Huit salariés sont donc concernés par la procédure de licenciement. Par application des dispositions légales sur les critères d'ordre des départs et en tenant compte des possibilités de certains de bénéficier d'une embauche par ailleurs vous êtes inclus dans la procédure. Malgré nos recherches, nous n'avons pu procéder à votre reclassement » ; que, dès lors, la lettre de rupture qui vise expressément les difficultés économiques rencontrées par la société, leurs répercussions, les moyens mis en oeuvre pour y remédier et les conséquences sur l'emploi et notamment celui de monsieur X..., tous éléments matériellement vérifiables, répond aux dispositions de l'article L.1233-16 du code du travail ; que le salarié soutient encore l'absence de sérieux des difficultés économiques invoquées ce que conteste l'employeur ; qu'en l'espèce, il résulte des pièces comptables produites par la société que son activité a effectivement diminué puisque les commandes représenteraient 6.009.097,00 euros en 2007, 4.041.489 en 2008 pour chuter en 2009 à 805.123,00 euros ; que, le 30 septembre 2009, le commissaire au compte de la société déclenchait d'ailleurs une procédure d'alerte ; que la société justifie dès lors que les mesures prises de restructuration conduisant à la suppression d'emplois et notamment celui de monsieur X..., s'imposaient. ; qu'elles n'ont d'ailleurs pas été suffisantes comme le démontre l'ouverture d'un règlement judiciaire en mars 2012, ce qui conforte la réalité de difficultés économiques sérieuses et durables ; que, contrairement à ce qu'il affirme, monsieur X... ne démontre pas que des embauches de salariés auraient été faites dans le même temps que son licenciement ni que l'employeur aurait exigé sa présence en mai 2009 pour surcroît d'activité alors qu'en réalité il lui appartenait de mener à bien une mission qui lui avait été confiée ; qu'il ne procède que par affirmations lorsqu'il indique que le motif de son licenciement serait le seul montant de son salaire ; que la réalité du motif économique est dès lors justifiée ; que le salarié soutient encore que l'employeur a manqué à son obligation de reclassement, sans plus de précision, et alors même qu'il ne prétend pas que la société aurait fait partie d'un groupe et que la restructuration a conduit à la suppression de onze emplois (dont huit licenciements), ce qui suffit à justifier de l'impossibilité dans laquelle l'employeur se trouvait de reclasser le salarié étant encore rappelé que monsieur X... a adhéré à la convention de reclassement personnalisé le 24 juin 2009 ; que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a dit le licenciement économique de monsieur X... justifié et en ce qu'il l'a débouté de ses prétentions en découlant ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE le conseil a pu constater que l'employeur a suffisamment motivé la notification de licenciement pour motif économique ; qu'en effet, il suffit de lire la lettre du 15 juin 2009 en question et versée aux débats, où les motifs énoncés sont « matériellement vérifiables » ; que les causes des difficultés économiques rencontrées par la société, leurs répercussions et les moyens mis en oeuvre pour tenter de retrouver l'équilibre en réorganisant techniquement les deux sites, amenant une suppression de onze emplois, étaient bien réelles et pour le moins sérieuses ; que les commandes ont représenté 6.009.097 € en 2007, 4.041.489 € en 2008 et 805.123 € en 2009 ; qu'il est donc formellement établi que les difficultés économiques rencontrées sont réelles et sérieuses ; que l'épouse même du demandeur, dans une autre instance prud'homale, affirme que la société était au plus mal ; qu'en conséquence, il existe bien une cause réelle et sérieuse justifiant le licenciement économique prononcé, et emportant le rejet des dommages-intérêts demandés de ce chef ;
1°) ALORS QUE la lettre de licenciement donnée pour motif économique, qui fixe les limites du litige, doit mentionner les raisons économiques prévues par la loi et leur incidence sur l'emploi ou le contrat de travail ; que l'énoncé d'un motif imprécis équivaut à une absence de motif ; que la lettre de licenciement qui se borne à mentionner une « baisse des commandes d'environ 20% par rapport à la normale », sans préciser la nature des difficultés économiques en résultant, ne contient pas l'énoncé du motif économique exigé par la loi ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L. 1233-3 du Code du travail ;
2°) ALORS QUE la lettre de licenciement doit comporter non seulement l'énonciation des difficultés économiques, mutations technologiques ou de la réorganisation de l'entreprise, mais également l'énonciation des incidences sur l'emploi ou le contrat de travail du salarié licencié ; que, comme le faisait valoir monsieur X... dans ses conclusions d'appel, la lettre de licenciement se limitait à invoquer la suppression de onze emplois, dont trois départs à la retraite et huit licenciements, sans indiquer l'incidence précise sur le poste qu'il occupait, de la baisse des commandes alléguée ; qu'en estimant néanmoins que la lettre de licenciement répondait aux exigences légales, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L. 1233-3 du code du travail ;
3°) ALORS QU' une baisse d'activité ne suffit pas à établir la réalité de difficultés économiques ; qu'en se référant à la seule baisse d'activité subie par la société Gillet-M1TB à la suite d'une diminution de ses commandes, pour dire le licenciement économique de monsieur X... fondé sur une cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-3 du code du travail ;
4°) ALORS QUE c'est à la date de la notification du licenciement que doivent être constatées les difficultés invoquées par l'employeur ; qu'en se fondant, pour apprécier la réalité des difficultés économiques, sur le déclenchement d'une procédure d'alerte et l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire, intervenus postérieurement au licenciement de monsieur X..., la cour d'appel a violé l'article L. 1233-3 du code du travail ;
5°) ALORS QU' il appartient à l'employeur, de rechercher, préalablement au licenciement, toutes les possibilités de reclassement existantes ; que l'employeur supporte la charge de la preuve de l'impossibilité de tout reclassement ; qu'en relevant que la suppression de onze emplois, dont huit licenciements, suffisait à justifier de l'impossibilité dans laquelle se trouvait l'employeur de reclasser le salarié, dès lors que celui-ci ne démontrait pas que des embauches de salariés avaient été faites dans le même temps que son licenciement, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article 1315 du code civil, ensemble l'article L. 1233-4 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté monsieur X... de sa demande d'indemnités compensatrices de congés payés ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE le salarié soutient qu'il n'a jamais bénéficié des trois jours supplémentaires de congés payés prévus par l'article 14 de la convention collective des cadres de la métallurgie applicable pour les années 2005 2006 et 2007, l'employeur ne les ayant pas planifiés ; que l'employeur soutient quant à lui que le salarié ne justifie pas avoir été empêché de prendre les congés auxquels il pouvait prétendre ; qu'en l'espèce, le droit de congé doit être exercé annuellement en nature et l'indemnité de congés payés ne peut se cumuler avec le salaire ; que le salarié ne justifie pas que l'employeur l'a mis dans l'impossibilité de prendre la totalité de ses congés payés légaux et conventionnels faute de planification ou application erronée de la convention collective ; que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté monsieur X... de ce chef de demande.
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'en droit l'article 14 de la convention collective applicable prévoit trois jours supplémentaires de congés payés par an ; que le code de procédure civile impose par ses articles 6 et 9 aux plaideurs de justifier et de prouver leurs prétentions et par son article 12 impose au juge « de donner ou de restituer aux faits litigieux leur exacte qualification » ; qu'en l'espèce, monsieur X... n'a jamais pu bénéficier de cette disposition pour les années 2005 à 2008, il ne justifie pas en avoir effectué les demandes ; que son épouse établissait les bulletins de paye n'aurait pas manqué de les calculer et de les comptabiliser ;
ALORS QUE faute de prévoir un système de congés payés conforme aux dispositions légales et conventionnelles, l'employeur place le salarié dans l'impossibilité de prendre ses congés ; qu'en estimant que ni l'absence de planification des congés, ni l'application erronée de la convention collective n'étaient de nature à établir que l'employeur avait mis le salarié dans l'impossibilité de prendre la totalité de ses congés légaux et conventionnels, la cour d'appel a violé les articles L. 3141-22 et D. 3141-5 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-29324
Date de la décision : 26/03/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 10 octobre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 mar. 2014, pourvoi n°12-29324


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.29324
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