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19/03/2014 | FRANCE | N°12-26016

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 mars 2014, 12-26016


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 25 juillet 2012) que Mme
X...
a été embauchée par contrat de travail à durée indéterminée, le 28 février 2007, par la société Rhône Alpes travail temporaire en qualité d'assistante d'agence ; qu'elle a été licenciée le 19 juin 2007 ; que, le 21 novembre 2007, elle a saisi la juridiction prud'homale pour voir déclarer son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, et condamner la société à lui payer diverses sommes au titre de l'exécution et de la

rupture de son contrat de travail ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la sociét...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 25 juillet 2012) que Mme
X...
a été embauchée par contrat de travail à durée indéterminée, le 28 février 2007, par la société Rhône Alpes travail temporaire en qualité d'assistante d'agence ; qu'elle a été licenciée le 19 juin 2007 ; que, le 21 novembre 2007, elle a saisi la juridiction prud'homale pour voir déclarer son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, et condamner la société à lui payer diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la salariée diverses sommes à titre de rappel d'heures supplémentaires et congés payés afférents, ainsi que de dommages-intérêts pour travail dissimulé, alors, selon le moyen :
1°/ que constituent des heures supplémentaires les heures de travail réalisées par un salarié au-delà de la durée correspondant à un temps plein ; que ne constituent donc pas des heures supplémentaires celles simplement réalisées en dehors de l'horaire habituel de travail, mais sans dépasser le seuil de déclenchement des heures supplémentaires ; qu'en l'espèce pourtant, la cour d'appel a cru pouvoir affirmer que l'employeur exigeait de la salariée l'accomplissement d'heures supplémentaires, soit en continuant sa tâche après la fermeture de l'agence, soit au contraire en la commençant avant l'ouverture de celle-ci, après avoir seulement relevé qu'il ressortait d'une attestation qu'il était demandé à Mme
X...
d'être plus souple sur ses horaires, et de parfois assurer l'ouverture de l'agence ou de travailler après 17 heures 30 ; qu'en statuant ainsi par des motifs impropres à caractériser la réalisation d'heures supplémentaires, le fait que la salariée ait pu être amenée à travailler en dehors des horaires habituels n'impliquant pas nécessairement l'accomplissement d'heures de travail au-delà de la durée légale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1321-10 et L. 3121-11 et suivants du code du travail ;
2°/ que les juges du fond ne peuvent pas dénaturer les écrits soumis à leur appréciation ; qu'en l'espèce, Mme Y... atteste notamment que Mme
X...
« a très vite intégré les horaires de travail (8 heures 30-12 heures 14 heure-17 heures 30) » et qu'« elle ne souhaitait pas faire des heures supplémentaires » ; qu'elle relate encore que la salariée a refusé de venir travailler à 8 heures, partait à 17 heures 30 quitte à fermer l'agence, et avait immédiatement compensé un dépassement ponctuel d'horaire en fin de matinée par un retour plus tardif à son poste en début d'après-midi ; qu'ainsi il ne ressort pas de cette attestation que l'employeur aurait imposé des heures supplémentaires à la salariée, mais au contraire qu'elle a toujours refusé d'en réaliser ; qu'en affirmant cependant qu'il ressortait de l'attestation de Mme Y... que « l'employeur exigeait de la salariée l'accomplissement d'heures supplémentaires au-delà de l'horaire hebdomadaire de travail et sans aucune contrepartie, soit en continuant sa tâche après la fermeture de l'agence, soit au contraire en la commençant avant l'ouverture de celle-ci », la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
3°/ que les juges du fond sont tenus par les limites du litige telles qu'elles sont fixées par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, il était constant que l'horaire collectif affiché dans l'entreprise était 8 heures 30 à 12 heures puis 14 heures à 17 heures 30 et que l'horaire d'ouverture de l'agence était 8 heures à 12 heures et 14 heures à 18 heures ; qu'en affirmant cependant que « les heures d'ouverture de l'agence étaient fixées de 8 heures 30 à 17 heures 30, mais que l'horaire collectif de travail s'étalait de 8 heures à 18 heures les jours ouvrables » pour en déduire « qu'il appartenait donc à l'employeur d'organiser et de répartir le service entre les employés pour assurer le fonctionnement de l'entreprise dans le cadre de l'horaire collectif de travail tout en respectant la durée hebdomadaire de travail » et qu'« il était systématiquement demandé aux salariés de l'agence d'accomplir des heures de travail en dehors des heures d'ouverture de l'agence au public en dépassement de leur horaire hebdomadaire de travail », la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
4°/ que la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; qu'en refusant en l'espèce de prendre en compte, dans son appréciation du temps de travail l'ayant conduite à retenir l'existence d'heures supplémentaires, le fait que la salariée a été autorisée à réduire occasionnellement son temps de travail pour convenances personnelles, la cour d'appel a violé les articles L. 3121-1 et L. 3121-11 et suivants du code du travail ;
5°/ que la dissimulation d'emploi salarié prévue par l'article L. 8221-5 2° du code du travail n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur les bulletins de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué ; qu'en condamnant en l'espèce l'employeur à payer à la salariée l'indemnité prévue à l'article L. 8223-1 du code du travail après avoir seulement relevé qu'il était, selon elle, systématiquement demandé aux salariés de l'agence d'accomplir des heures de travail en dehors des heures d'ouverture de l'agence au public en dépassement de leur horaire hebdomadaire de travail et sans prise en compte de ce travail supplémentaire dans le calcul de leur rémunération, sans caractériser l'intention de l'employeur de mentionner sur les bulletins de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 8221-5 et L. 8223-1 du code du travail ;
Mais attendu, qu'appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel, qui a constaté, hors toute dénaturation et sans méconnaître les limites du litige, que l'employeur imposait en toute connaissance de cause à la salariée d'accomplir des heures de travail en dehors du temps d'ouverture de l'agence au public correspondant à la durée légale de travail hebdomadaire, sans prendre en compte ce travail supplémentaire dans le calcul de sa rémunération, a légalement justifié sa décision ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement de la salariée est dépourvu de cause réelle et sérieuse, et de la condamner à verser à cette dernière des dommages-intérêts à ce titre, ainsi qu'au remboursement prévu par l'article L. 1235-4 du code du travail au profit des organismes intéressés, alors, selon le moyen :
1°/ que la cassation à intervenir sur le fondement du premier moyen emportera, par application de l'article 625 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif relatifs au licenciement dès lors que la cour d'appel a jugé la rupture sans cause réelle et sérieuse en se fondant sur l'existence d'heures supplémentaires, la cour d'appel ayant notamment retenu que la salariée aurait pu légitimement se plaindre, même devant des tiers, d'avoir dû assumer des heures supplémentaires qui ne lui auraient pas été réglées ;
2°/ que les juges du fond doivent examiner les griefs de licenciement formulés dans la lettre de rupture ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement ne reprochait pas seulement à la salariée le dénigrement de l'employeur, mais encore son « attitude de défiance vis-à-vis de vos supérieures hiérarchique et collègues de travail, menaçant régulièrement de quitter l'entreprise s'il n'est pas donné une suite favorable à vos desiderata notamment au regard concernant le niveau de rémunération, ou si une remarque vous est faite sur vos aménagements personnels de votre emploi du temps, ou encore votre manque de motivation et d'implication à votre poste de travail » ; qu'en omettant d'examiner ce grief, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6, L. 1234-1 et L. 1235-1 du code du travail ;
3°/ que les juges du fond doivent examiner les griefs de licenciement formulés dans la lettre de rupture ; qu'en l'espèce, l'employeur ne reprochait pas seulement à la salariée d'avoir été absente de son poste de travail à 14 heures le 31 mai 2007 si bien que l'agence est restée fermée jusqu'à ce qu'elle arrive, et d'avoir un autre jour fermé l'agence avant l'horaire normal de fermeture ; qu'il lui reprochait encore d'avoir agi sur sa seule initiative sans prévenir personne ; qu'en omettant d'examiner si le licenciement n'était pas sans cause réelle et sérieuse dès lors que la salariée avait réalisé unilatéralement, sans prévenir personne, ses « aménagements personnels de son emploi du temps » comme le lui reprochait son employeur dans la lettre de rupture, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6, L. 1234-1 et L. 1235-1 du code du travail ;
Mais attendu, d'abord, que le rejet du premier moyen rend sans objet le premier grief du second moyen ;
Attendu, ensuite, que c'est par une appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments produits devant elle, tant par le salarié que par l'employeur, que la cour d'appel a décidé, dans l'exercice des pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail, que le licenciement de la salariée ne procédait pas d'une cause réelle et sérieuse ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Rhône Alpes travail temporaire aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Mme
X...
la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf mars deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Rhône Alpes travail temporaire.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR condamné la société Rhône Alpes Travail Temporaire à payer à madame
X...
la somme de 380, 92 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires outre congés payés afférents, et la somme de 8232 euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé, ainsi qu'une somme au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « les heures d'ouverture de l'agence étaient fixées de 8 heures 30 à 17 heures 30, mais que l'horaire collectif de travail s'étalait de 8 heures à 18 heures les jours ouvrables ; qu'il appartenait donc à l'employeur d'organiser et de répartir le service entre les employés pour assurer le fonctionnement de l'entreprise dans le cadre de l'horaire collectif de travail tout en respectant la durée hebdomadaire de travail de chaque salariée et en réglant à ceux-ci les heures supplémentaires éventuellement nécessitées par la continuité du service ; que dans son attestation du 25 avril 2008 versée aux débats par la société intimée elle-même, Marie-Véronique Y..., chef d'agence, déclare que le dirigeant de la société, le sieur Z..., s'est rendu compte du manque d'esprit d'équipe de la salariée et de son indisponibilité à finir son travail à 18 heures, qu'elle a demandé à la salariée d'être « plus souple » sur ses horaires de travail et que l'intéressée a refusé d'assurer l'ouverture de l'agence à 8 heures le 15 mai 2007 au motif qu'elle devait conduire sa fille à l'école de même que ledit jour elle a fermé l'agence à 17 heures 40 sans autorisation pour reprendre sa fille à l'école ; qu'il ressort de cette attestation que l'employeur exigeait de la salariée l'accomplissement d'heures supplémentaires au-delà de l'horaire hebdomadaire de travail et sans aucune contrepartie, soit en continuant sa tâche après la fermeture de l'agence, soit au contraire en la commençant avant l'ouverture de celle-ci ; que ce procédé ne saurait être qualifié de souplesse et que d'ailleurs « ladite dame Y... reconnaît que les temps de travail effectués par les salariés ne faisaient l'objet d'aucun enregistrement ou comptabilisation quelconques ; qu'il importe peu que l'employeur ait pu, de manière parfaitement arbitraire, autoriser la salariée a réduire occasionnellement son temps de travail pour convenances personnelles, rien ne démontrant que cette réduction ait exactement compensé les dépassements d'horaire dont la réalité résulte clairement de l'attestation de la dame Y..., chef d'agence ; Attendu, dans ces conditions, qu'il échet de réformer la décision entreprise et de condamner la société R. A. T. T. à payer à Marlène
X...
la somme de 380, 92 € à titre de rappel d'heures supplémentaires outre celle de 38, 09 € pour les congés payés y afférents ; Attendu, sur le travail dissimulé, qu'il ressort de l'attestation précitée de la dame Y..., chef d'agence, produite aux débats par la société R. A. T. T. elle-même, que sous prétexte de " souplesse ", il était systématiquement demandé aux salariés de l'agence d'accomplir des heures de travail en dehors des heures d'ouverture de l'agence au public en dépassement de leur horaire hebdomadaire de travail et sans prise en compte de ce travail supplémentaire dans le calcul de leur rémunération ; que par application des articles L 8221-5 et L 8223-1 du Code du travail, la société R. A. T. T. sera donc condamnée à payer à l'appelante la somme de 8 232 € à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé, étant rappelé que le salaire mensuel brut de l'intéressée était contractuellement fixé à la somme de 1 372, 05 € » ;
1) ALORS QUE constituent des heures supplémentaires les heures de travail réalisé par un salarié au-delà de la durée correspondant à un temps plein ; que ne constituent donc pas des heures supplémentaires celles simplement réalisées en dehors de l'horaire habituel de travail, mais sans dépasser le seuil de déclenchement des heures supplémentaires ; qu'en l'espèce pourtant, la Cour d'appel a cru pouvoir affirmer que l'employeur exigeait de la salariée l'accomplissement d'heures supplémentaires, soit en continuant sa tâche après la fermeture de l'agence, soit au contraire en la commençant avant l'ouverture de celle-ci, après avoir seulement relevé qu'il ressortait d'une attestation qu'il était demandé à madame
X...
d'être plus souple sur ses horaires, et de parfois assurer l'ouverture de l'agence ou de travailler après 17 heures 30 ; qu'en statuant ainsi par des motifs impropres à caractériser la réalisation d'heures supplémentaires, le fait que la salariée ait pu être amenée à travailler en dehors des horaires habituels n'impliquant pas nécessairement l'accomplissement d'heures de travail au-delà de la durée légale, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 3121-10 et L. 3121-11 et suivants du Code du travail ;
2) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent pas dénaturer les écrits soumis à leur appréciation ; qu'en l'espèce, madame Y... atteste notamment que madame
X...
« a très vite intégré les horaires de travail (8h30- 12h 14h- 17h30) » et qu'« elle ne souhaitait pas faire des heures supplémentaires » ; qu'elle relate encore que la salariée a refusé de venir travailler à 8 heures, partait à 17h30 quitte à fermer l'agence, et avait immédiatement compensé un dépassement ponctuel d'horaire en fin de matinée par un retour plus tardif à son poste en début d'après-midi ; qu'ainsi il ne ressort pas de cette attestation que l'employeur aurait imposé des heures supplémentaires à la salariée, mais au contraire qu'elle a toujours refusé d'en réaliser ; qu'en affirmant cependant qu'il ressortait de l'attestation de madame Y... que « l'employeur exigeait de la salariée l'accomplissement d'heures supplémentaires au-delà de l'horaire hebdomadaire de travail et sans aucune contrepartie, soit en continuant sa tâche après la fermeture de l'agence, soit au contraire en la commençant avant l'ouverture de celle-ci », la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
3) ALORS QUE les juges du fond sont tenus par les limites du litige telles qu'elles sont fixées par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, il était constant que l'horaire collectif affiché dans l'entreprise était 8h30 à 12h puis 14h à 17h30 et que l'horaire d'ouverture de l'agence était 8h à 12h et 14h à 18h (cf. notamment conclusions adverses page 3, 2°/ et conclusions de l'employeur page 6) ; qu'en affirmant cependant que « les heures d'ouverture de l'agence étaient fixées de 8 heures 30 à 17 heures 30, mais que l'horaire collectif de travail s'étalait de 8 heures à 18 heures les jours ouvrables » pour en déduire « qu'il appartenait donc à l'employeur d'organiser et de répartir le service entre les employés pour assurer le fonctionnement de l'entreprise dans le cadre de l'horaire collectif de travail tout en respectant la durée hebdomadaire de travail » et qu'« il était systématiquement demandé aux salariés de l'agence d'accomplir des heures de travail en dehors des heures d'ouverture de l'agence au public en dépassement de leur horaire hebdomadaire de travail », la Cour d'appel a violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
4) ALORS QUE la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; qu'en refusant en l'espèce de prendre en compte, dans son appréciation du temps de travail l'ayant conduite à retenir l'existence d'heures supplémentaires, le fait que la salariée a été autorisée à réduire occasionnellement son temps de travail pour convenances personnelles, la Cour d'appel a violé les articles L. 3121-1 et L. 3121-11 et suivants du Code du travail ;
5) ALORS QUE la dissimulation d'emploi salarié prévue par l'article L. 8221-5 2° du Code du travail n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur les bulletins de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué ; qu'en condamnant en l'espèce l'employeur à payer à la salariée l'indemnité prévue à l'article L. 8223-1 du Code du travail après avoir seulement relevé qu'il était, selon elle, systématiquement demandé aux salariés de l'agence d'accomplir des heures de travail en dehors des heures d'ouverture de l'agence au public en dépassement de leur horaire hebdomadaire de travail et sans prise en compte de ce travail supplémentaire dans le calcul de leur rémunération, sans caractériser l'intention de l'employeur de mentionner sur les bulletins de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 8221-5 et L. 8223-1 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR dit le licenciement de Marlène
X...
dépourvu de cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné la société RHÔNE ALPES TRAVAIL TEMPORAIRE à payer à Marlène
X...
la somme de 8 232 ¿ à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné la société RHÔNE-ALPES TRAVAIL TEMPORAIRE au remboursement prévu par l'article L 1235-4 du Code du travail au profit des organismes intéressés et d'AVOIR condamné la même société à payer à Marlène X... une indemnité par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
AUX MOTIFS QUE « sur les heures supplémentaires, les heures d'ouverture de l'agence étaient fixées de 8 heures 30 à 17 heures 30, mais que l'horaire collectif de travail s'étalait de 8 heures à 18 heures les jours ouvrables ; qu'il appartenait donc à l'employeur d'organiser et de répartir le service entre les employés pour assurer le fonctionnement de l'entreprise dans le cadre de l'horaire collectif de travail tout en respectant la durée hebdomadaire de travail de chaque salariée et en réglant à ceux-ci les heures supplémentaires éventuellement nécessitées par la continuité du service ; que dans son attestation du 25 avril 2008 versée aux débats par la société intimée elle-même, Marie-Véronique Y..., chef d'agence, déclare que le dirigeant de la société, le sieur Z..., s'est rendu compte du manque d'esprit d'équipe de la salariée et de son indisponibilité à finir son travail à 18 heures, qu'elle a demandé à la salariée d'être « plus souple » sur ses horaires de travail et que l'intéressée a refusé d'assurer l'ouverture de l'agence à 8 heures le 15 mai 2007 au motif qu'elle devait conduire sa fille à l'école de même que ledit jour elle a fermé l'agence à 17 heures 40 sans autorisation pour reprendre sa fille à l'école ; qu'il ressort de cette attestation que l'employeur exigeait de la salariée l'accomplissement d'heures supplémentaires au-delà de l'horaire hebdomadaire de travail et sans aucune contrepartie, soit en continuant sa tâche après la fermeture de l'agence, soit au contraire en la commençant avant l'ouverture de celle-ci ; que ce procédé ne saurait être qualifié de souplesse et que d'ailleurs « ladite dame Y... reconnaît que les temps de travail effectués par les salariés ne faisaient l'objet d'aucun enregistrement ou comptabilisation quelconques ; qu'il importe peu que l'employeur ait pu, de manière parfaitement arbitraire, autoriser la salariée a réduire occasionnellement son temps de travail pour convenances personnelles, rien ne démontrant que cette réduction ait exactement compensé les dépassements d'horaire dont la réalité résulte clairement de l'attestation de la dame Y..., chef d'agence ; Attendu, dans ces conditions, qu'il échet de réformer la décision entreprise et de condamner la société R. A. T. T. à payer à Marlène
X...
la somme de 380, 92 € à titre de rappel d'heures supplémentaires outre celle de 38, 09 € pour les congés payés y afférents ; Attendu, sur le travail dissimulé, qu'il ressort de l'attestation précitée de la dame Y..., chef d'agence, produite aux débats par la société R. A. T. T. elle-même, que sous prétexte de " souplesse ", il était systématiquement demandé aux salariés de l'agence d'accomplir des heures de travail en dehors des heures d'ouverture de l'agence au public en dépassement de leur horaire hebdomadaire de travail et sans prise en compte de ce travail supplémentaire dans le calcul de leur rémunération ; que par application des articles L. 8221-5 et L. 8223-1 du Code du travail, la société R. A. T. T. sera donc condamnée à payer à l'appelante la somme de 8 232 € à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé, étant rappelé que le salaire mensuel brut de l'intéressée était contractuellement fixé à la somme de 1372, 05 € ;Attendu, sur le licenciement, que l'employeur reproche à la salariée, dans la lettre de licenciement du 19 juin 2007, d'avoir, de sa seule initiative, fermé l'agence pendant les heures d'ouverture le 15 mai 2007, d'être arrivée le 31 mai 2007 en milieu d'après-midi, et d'avoir dénigré ouvertement, y compris en présence de tiers, ses conditions de travail et de rémunérations ; Attendu qu'il ressort de ce qui précède et notamment de l'attestation de la dame Y... comme de celle de la dame A... que le 15 mai 2007 l'appelante s'est retrouvée seule à l'agence de SAINT-LAURENT-SUR-SAONE (Ain) et qu'elle a pris l'initiative de fermer ladite agence à 17 heures 40 ; Attendu que l'employeur n'établit pas avoir préalablement demandé à l'intéressée d'assurer la continuité du service jusqu'à 18 heures et avoir reçu l'accord de l'intéressée avec pour contrepartie le payement d'heures supplémentaires ; que dès lors, le fait, pour la salariée d'avoir fermé l'agence à 17 heures 40 même si l'horaire collectif de travail fixait la fin de celui-ci à 18 heures ne saurait être considéré comme fautif puisqu'il n'est pas soutenu que ledit jour Marlène
X...
n'avait pas respecté son horaire individuel de travail impliquant sa présence dans l'établissement de 8 heures 30 à 12 heures et de 14 heures à 17 heures 30 ; Attendu que la dame Y... indique avoir vu l'appelante se rendant à son travail le 31 mai 2007 à heures 20 alors qu'elle aurait pu ouvrir l'agence dès 14 heures ; qu'il ressort de cette même attestation que la salariée s'est trouvée dans l'obligation le même jour de ne cesser sa matinée de travail qu'à 13 heures afin d'assurer le service d'un client s'étant présenté peu avant midi ; que l'employeur ne démontre pas ni même ne soutient que l'appelante était seule chargée d'assurer la réouverture de l'agence dans l'après-midi du 31 mai 2007 à 14 heures que par ailleurs, il ressort de ces éléments que le temps de travail de la salariée a nettement excédé l'horaire en vigueur au sein de l'entreprise au cours de la matinée ; que l'employeur qui souligne qu'elle pouvait, en compensation, bénéficier de récupérations, ne saurait reprocher à la salariée d'avoir fait une pause d'une heure et vingt minutes alors qu'elle avait droit à une pause de deux heures et qu'il n'établit pas lui avoir demandé d'assurer la réouverture de l'agence à 14 heures ; que ce grief ne peut être retenu ; Attendu, sur le dénigrement, que l'employeur ne mentionne aucun fait précis et matériellement vérifiable ; que le principe de la liberté d'expression permet au salarié de se plaindre, même " ouvertement " comme l'indique la société intimée de ce que les rémunérations qui lui sont dues ne lui sont pas versées, ce qui était le cas en l'espèce puisque Marlène
X...
a dû assumer des heures supplémentaires qui ne lui ont pas été réglées sous prétexte de " souplesse " ; que ce grief, dénué de sérieux, ne peut qu'être écarté ; Attendu que la décision querellée sera donc réformée et que le licenciement sera déclaré dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que la société intimée sera condamnée à payer à l'appelante la somme de 8 232 € à titre de dommages et intérêts » ;

1) ALORS QUE la cassation à intervenir sur le fondement du premier moyen emportera, par application de l'article 625 du Code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif relatifs au licenciement dès lors que la Cour d'appel a jugé la rupture sans cause réelle et sérieuse en se fondant sur l'existence d'heures supplémentaires, la Cour d'appel ayant notamment retenu que la salariée aurait pu légitimement se plaindre, même devant des tiers, d'avoir dû assumer des heures supplémentaires qui ne lui auraient pas été réglées ;
2) ALORS QUE les juges du fond doivent examiner les griefs de licenciement formulés dans la lettre de rupture ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement ne reprochait pas seulement à la salariée le dénigrement de l'employeur, mais encore son « attitude de défiance vis-à-vis de vos supérieures hiérarchique et collègues de travail, menaçant régulièrement de quitter l'entreprise s'il n'est pas donné une suite favorable à vos desiderata notamment au regard concernant le niveau de rémunération, ou si une remarque vous est faite sur vos aménagements personnels de votre emploi du temps, ou encore votre manque de motivation et d'implication à votre poste de travail » ; qu'en omettant d'examiner ce grief, la Cour d'appel a violé les articles L. 1232-6, L. 1234-1 et L. 1235-1 du Code du travail ;
3) ALORS QUE les juges du fond doivent examiner les griefs de licenciement formulés dans la lettre de rupture ; qu'en l'espèce, l'employeur ne reprochait pas seulement à la salariée d'avoir été absente de son poste de travail à 14h le 31 mai 2007 si bien que l'agence est restée fermée jusqu'à ce qu'elle arrive, et d'avoir un autre jour fermé l'agence avant l'horaire normal de fermeture ; qu'il lui reprochait encore d'avoir agi sur sa seule initiative sans prévenir personne ; qu'en omettant d'examiner si le licenciement n'était pas sans cause réelle et sérieuse dès lors que la salariée avait réalisé unilatéralement, sans prévenir personne, ses « aménagements personnels de son emploi du temps » comme le lui reprochait son employeur dans la lettre de rupture, la Cour d'appel a violé les articles L. 1232-6, L. 1234-1 et L. 1235-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-26016
Date de la décision : 19/03/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 25 juillet 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 mar. 2014, pourvoi n°12-26016


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.26016
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