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18/03/2014 | FRANCE | N°12-28275

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 mars 2014, 12-28275


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 28 septembre 2012), que la société Dynea Resins France a établi et soumis aux représentants du personnel un plan de sauvegarde de l'emploi, qui notamment excluait du bénéfice d'une indemnité extra-conventionnelle forfaitaire les salariés âgés de 57 ans et plus et prévoyait une assiette réduite pour le versement de l'indemnité extra-conventionnelle calculée par mois d'ancienneté pour cette même catégorie de salariés ; que M. X... a été l

icencié par une lettre du 6 avril 2009, alors qu'il avait atteint l'âge de 58 a...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 28 septembre 2012), que la société Dynea Resins France a établi et soumis aux représentants du personnel un plan de sauvegarde de l'emploi, qui notamment excluait du bénéfice d'une indemnité extra-conventionnelle forfaitaire les salariés âgés de 57 ans et plus et prévoyait une assiette réduite pour le versement de l'indemnité extra-conventionnelle calculée par mois d'ancienneté pour cette même catégorie de salariés ; que M. X... a été licencié par une lettre du 6 avril 2009, alors qu'il avait atteint l'âge de 58 ans ; que soutenant que la disposition du plan prévoyant le versement d'une indemnité extra-conventionnelle réduite aux salariés ayant atteint un âge donné constituait une discrimination, il a saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir le versement de la partie d'indemnité dont il avait été privé ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors, selon le moyen, qu'une différence de traitement fondée sur l'âge ne constitue pas une discrimination si deux conditions cumulatives sont remplies : la différence doit être objectivement et raisonnablement justifiée par un but légitime et les moyens de réaliser ce but doivent être nécessaires et appropriés ; qu'en l'espèce, pour dire que la différence de traitement litigieuse ne constituait pas une discrimination, les juges du fond se sont bornés à vérifier qu'elle était objectivement et raisonnablement justifiée par un but légitime, sans rechercher si les moyens de réaliser ce but étaient nécessaires ; qu'en statuant ainsi, ils ont privé leur décision de base légale au regard des dispositions de l'article L. 1133-2 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel a retenu que le choix de l'âge de 57 ans comme critère de limitation des indemnités accordées aux salariés reposait sur la prise en compte du régime d'indemnisation du chômage plus favorable applicable aux salariés licenciés remplissant cette condition, ce régime limitant la perte de revenus consécutive au licenciement, ce dont il résulte qu'en incitant cette catégorie de salariés à envisager une réinsertion professionnelle, les moyens employés pour réaliser l'objectif légitime de maintien de l'emploi et d'équilibre entre les catégories de salariés qui ne bénéficient pas des mêmes avantages après la perte de leur emploi, étaient appropriés et nécessaires ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mars deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour M. X...

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que l'article 2.4.10 du plan de sauvegarde de l'emploi litigieux ne constituait pas une discrimination et d'AVOIR débouté en conséquence le salarié de ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE aux termes de l'article L.1133 du Code du travail, les différences de traitement fondées sur l'âge ne constituent pas une discrimination lorsqu'elles sont objectivement et raisonnablement justifiées par un objectif légitime, notamment de politique de l'emploi, et lorsque les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires; que ces différences peuvent notamment consister en 1) l'interdiction de l'accès à l'emploi ou la mise en place de conditions de travail spéciales en vue d'assurer la protection des jeunes et des travailleurs âgés, 2) la fixation d'un âge maximum pour le recrutement, fondée sur la formation requise pour le poste concerné ou la nécessité d'une période d'emploi raisonnable avant la retraite; qu'en l'espèce, l'article 2.4.10 du plan de sauvegarde de l'emploi incriminé, intitulé "Indemnités extra conventionnelles", prévoit: "une indemnité extraconventionnelle forfaitaire de 24.000 euros sera versée au personnel âgé de moins de 57 ans. Au-delà de 57 ans, il n'y a pas de prime forfaitaire. Une indemnité extra conventionnelle liée à l'ancienneté de 175 euros par mois d'ancienneté sera versée au personnel âgé de moins de 57 ans. Au-delà de 57 ans, l'indemnité sera de 50 euros par mois d'ancienneté"; qu'il résulte du règlement général annexé à la convention du 19 février 2009 relative à l'indemnisation du chômage, en vigueur à l'époque du plan de sauvegarde de l'emploi litigieux, que tous les salariés sont pris en charge dans la limite de leur durée d'affiliation prise en compte pour l'ouverture des droits, cette limite étant fixée à 730 jours pour les salariés âgés de moins de 50 ans, à 1095 jours pour ceux de 50 ans et plus tandis que ceux âgés de 60 ans et 6 mois qui ne peuvent prétendre à une retraite à taux plein continuent d'être indemnisés jusqu'à l'âge auquel ils pourront prétendre et au plus tard jusqu'à 65 ans; qu'il s'ensuit qu'à la date d'établissement du plan de sauvegarde de l'emploi et sous réserve d'une durée d'affiliation suffisante, les salariés de la SAS DYNEA France âgés de 57 ans et plus étaient susceptibles d'être pris en charge jusqu'à l'âge auquel ils pourraient prétendre à une retraite à taux plein et au plus tard jusqu'à 65 ans tandis que ceux âgés de moins de 50 ans n'étaient pris en charge que pendant 23 mois et ceux âgés de plus de 50 ans et de moins de 57 ans que pendant 36 mois; qu'il n'est à aucun moment soutenu que les salariés de 57 ans et plus concernés par les indemnités extraconventionnelles du plan de sauvegarde de l'emploi n'aient pas eu dans leur intégralité la durée d'affiliation suffisante pour bénéficier des périodes maximales de prise en charge; qu'il s'ensuivait que les salariés en question n'ayant pas retrouvé un emploi étaient assurés de bénéficier d'une prise en charge par pôle emploi jusqu'à l'âge maximal de 65 ans alors que les salariés moins âgés n'ayant pas retrouvé un emploi à l'issue de la période maximale de prise en charge par pôle emploi étaient exposés à se retrouver dans la situation de se retrouver sans aucune ressource; que cette perspective était de nature à justifier le versement d'indemnités extralégales et extraconventionnelles supplémentaires au profit des salariés de moins de 57 ans dans un but légitime de compensation de ce risque de perte de toutes ressources avant la date de prise d'effet de leur pension de retraite; que le dispositif mis en place par le plan de sauvegarde de l'emploi apparaît objectivement et raisonnablement justifié par ce but; qu'il convient dans ces conditions de dire que l'article 2.4.10 du plan de sauvegarde de l'emploi litigieux ne constitue pas une discrimination et de confirmer le jugement déféré en ses dispositions déboutant Monsieur Xavier X... de l'intégralité de ses demandes ;
ET AUX MOTIFS, EVENTUELLEMENT ADOPTES DES PREMIERS JUGES, QU'en vertu de l'article L.1132-1 du Code du Travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n°2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L.3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse (...); que l'article L.1132-4 du même Code dispose que toute disposition ou tout acte pris à l'égard d'un salarié en méconnaissance des dispositions du présent chapitre est nul; que l'article L.1133-2 alinéa 1er dispose enfin: "Les différences de traitement fondées sur l'âge ne constituent pas une discrimination lorsqu'elles sont objectivement et raisonnablement justifiées par un but légitime, notamment par le souci de préserver la santé ou la sécurité des travailleurs, de favoriser leur insertion professionnelle, d'assurer leur emploi, leur reclassement ou leur indemnisation en cas de perte d'emploi, et lorsque les moyens de réaliser ce but sont nécessaires et appropriés"; qu'en l'espèce, Monsieur X... soutient qu'il a été victime de la part de son employeur, la Société DYNEA RESINS FRANCE, d'un comportement discriminatoire au sens de l'article L.1132-1 précité du Code du travail, dans la mesure où le P.S.E. élaboré dans le cadre du licenciement économique collectif intervenu le 20 avril 2009 a distingué l'indemnisation des salariés concernés selon qu'ils avaient plus ou moins de 57 ans; que l'article 2.4.10 du P.S.E. incriminé intitulé "Indemnités extra conventionnelles", prévoit: - "une indemnité extra conventionnelle forfaitaire de 24.000 euros sera versée au personnel âgé de moins de 57 ans. Au-delà de 57 ans, il n'y a pas de prime forfaitaire" - "une indemnité extra conventionnelle liée à l'ancienneté de 175 euros par mois d'ancienneté sera versée au personnel âgé de moins de 57 ans. Au-delà de 57 ans, l'indemnité sera de 50 euros par mois d'ancienneté"; qu'en premier lieu, il doit être observé qu'il n'est pas ici question de l'indemnisation du licenciement prévue aux articles R.1234-1 et suivants du Code du travail à laquelle fait référence la délibération de la HALDE, mais d'une indemnisation supra-conventionnelle négociée entre les partenaires sociaux et l'employeur dans le cadre de l'élaboration du P.S.E.; que l'indemnisation du licenciement dans le cadre des règles définies par le Code du travail et la Convention collective, selon le critère de l'ancienneté dans l'entreprise, n'est donc pas en cause et ce point évoqué par la HALDE apparaît hors sujet; qu'en second lieu, la lecture des procès-verbaux de réunion du Comité d'entreprise qui ont précédé la conclusion du P.S.E. révèle d'une part, qu'il a été clairement distingué l'indemnisation conventionnelle de l'indemnisation extra-conventionnelle du licenciement, d'autre part que cette dernière question a été longuement discutée et que dès le départ des négociations, le principe d'une prime d'ancienneté dégressive en fonction de l'âge avait été admis, quand bien même les parties étaient en désaccord sur les montants proposés; qu'ainsi, lors de la réunion du 5 mars 2009, le représentant du syndicat CGT proposait: "pour les moins de 50 ans: 175 € par mois d'ancienneté; pour les 50 à 57 ans: 200 € par mois d'ancienneté; pour les plus de 57 ans: 50 € par mois d'ancienneté", la direction proposant alors quant à elle à ce stade des négociations, 30 € par année d'ancienneté pour les plus de 57 ans; que le procès-verbal de réunion du 16 mars 2009 acte le fait que "les deux parties se sont mises d'accord sur les points suivants (...). Une indemnité extra conventionnelle forfaitaire de 24.000 euros sera versée au personnel âgé de moins de 57 ans. Au-delà de 57 ans, il n'y a pas de prime forfaitaire. - Une indemnité extra conventionnelle liée à l'ancienneté de 175 euros par mois d'ancienneté sera versée au personnel âgé de moins de 57 ans. Au-delà de 57 ans, l'indemnité sera de 50 euros par mois d'ancienneté. Ces dispositions seront incorporées dans les mesures d'accompagnement mentionnées dans le Livre II de l'ancien Code du travail"; qu'il apparaît donc que les règles déterminant l'octroi des avantages extra-conventionnels susvisés ont été préalablement définies dans le cadre de la négociation du PSE; que les salariés âgés de 57 ans et plus n'étaient pas nécessairement dans une situation identique à celle de leurs collègues âgés de moins de 57 ans au regard des règles de l'indemnisation du chômage puisque les premiers étaient en mesure de bénéficier du versement de leur retraite à taux plein à l'issue du versement des allocations chômage, sans aucune interruption, alors que les seconds ne pouvaient bénéficier au maximum que de 36 mois d'indemnisation de la perte d'emploi (23 mois pour les moins de 50 ans) et couraient donc le risque de se retrouver sans ressources avant de pouvoir prétendre à la liquidation de leur pension de retraite; qu'il était donc logique de fixer à un montant supérieur le montant des primes extra-conventionnelles pour les salariés âgés de moins de 57 ans, logique dans laquelle se sont inscrites dès l'origine les négociations du PSE; que la différence de traitement ne constitue pas une discrimination au sens de l'article L.1132-1 précité du Code du travail, dès lors que les situations considérées sont distinctes et que les salariés ne se trouvent objectivement pas dans une situation identique au regard des règles d'indemnisation de la perte d'emploi; qu'à cet égard, la prise en compte dans une approche globale, de l'écart temporel séparant pour chaque salarié, l'indemnisation de la perte d'emploi et la perception d'une pension de retraite obéit à un but légitime, elle est raisonnablement justifiée et entre ainsi dans les prévisions de l'article L.1133-2 du Code du travail; que Monsieur X... n'a donc fait l'objet d'aucun traitement discriminatoire et il doit en conséquence être débouté de ses demandes;
ALORS QU'une différence de traitement fondée sur l'âge ne constitue pas une discrimination si deux conditions cumulatives sont remplies: la différence doit être objectivement et raisonnablement justifiée par un but légitime et les moyens de réaliser ce but doivent être nécessaires et appropriés ; qu'en l'espèce, pour dire que la différence de traitement litigieuse ne constituait pas une discrimination, les juges du fond se sont bornés à vérifier qu'elle était objectivement et raisonnablement justifiée par un but légitime, sans rechercher si les moyens de réaliser ce but étaient nécessaires ; qu'en statuant ainsi, ils ont privé leur décision de base légale au regard des dispositions de l'article L.1133-2 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-28275
Date de la décision : 18/03/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 28 septembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 mar. 2014, pourvoi n°12-28275


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Fabiani et Luc-Thaler

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.28275
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