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18/03/2014 | FRANCE | N°12-22273

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 mars 2014, 12-22273


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société General motors Strasbourg en 1992 en qualité d'agent de fabrication coefficient 170 et exerce depuis 1996 divers mandats électifs ; que soutenant être victime d'une discrimination en raison de ses activités syndicales, il a saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir notamment le versement de dommages-intérêts, ainsi que son reclassement au coefficient 215 ;
Sur le deuxième moyen du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi

incident :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société General motors Strasbourg en 1992 en qualité d'agent de fabrication coefficient 170 et exerce depuis 1996 divers mandats électifs ; que soutenant être victime d'une discrimination en raison de ses activités syndicales, il a saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir notamment le versement de dommages-intérêts, ainsi que son reclassement au coefficient 215 ;
Sur le deuxième moyen du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne sont pas de nature à permettre l'admission des pourvois ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal :
Vu les articles L. 2145-1 et L. 2145-8 du code du travail ;
Attendu que pour rejeter la demande du salarié tendant à ordonner son reclassement au coefficient 215 et condamner l'employeur à lui payer l'arriéré de salaire, les primes d'intéressement et de participation correspondant depuis le 1er février 2008, ainsi que d'ordonner sous astreinte à l'employeur de délivrer les bulletins de salaire rectifiés, la cour d'appel énonce qu'elle ne peut, après avoir constaté une discrimination syndicale dans le déroulement de carrière d'un salarié, qu'allouer des dommages-intérêts et qu'il ne lui appartient pas dans ce cadre d'ordonner à l'employeur de fixer le salaire à tel ou tel montant, en sorte que les demandes à ce titre ne peuvent qu'être rejetées ;
Attendu cependant que la réparation intégrale d'un dommage oblige à placer celui qui l'a subi dans la situation où il se serait trouvé si le comportement dommageable n'avait pas eu lieu ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'il lui appartenait de rechercher, comme il lui était demandé, à quelle classification serait parvenu le salarié s'il avait bénéficié d'un déroulement normal de carrière et d'ordonner le cas échéant, à titre de réparation, son repositionnement à cette classification, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes du salarié tendant à ordonner son reclassement au coefficient 215, à condamner l'employeur à lui payer l'arriéré de salaire, les primes d'intéressement et de participation correspondant depuis le 1er février 2008, ainsi qu'à ordonner sous astreinte à l'employeur de délivrer les bulletins de salaire rectifiés, l'arrêt rendu le 15 mai 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;
Condamne la société General motors Strasbourg aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. X... la somme de 2 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mars deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de ses demandes d'ordonner à l'employeur de lui faire bénéficier d'une rémunération mensuelle majorée de 143 euros et de la classification coefficient 215 à compter de la signification du jugement, et de condamner l'employeur à lui payer l'arriéré de salaire, et primes d'intéressement et de participation depuis le 1er février 2008 au jour du jugement ainsi que d'ordonner sous astreinte à l'employeur de délivrer à compter du 1er février 2008 les bulletins de salaire rectifiés portant la nouvelle rémunération et la nouvelle classification ;
AUX MOTIFS QUE Monsieur Renald X... sollicite la condamnation de son employeur à lui payer une somme de 13.292 euros à titre de dommages-intérêts sur le fondement de la discrimination syndicale dans le déroulement de sa carrière ; que l'article L 1132-1 du Code du travail dispose que : "Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire directe ou indirecte, notamment en matière de rémunérations, au sens de l'article L 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille, ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap"; qu'aux termes de l'article L 2141-5 du code du travail "il est interdit à l'employeur de prendre en considération l'appartenance à un syndicat ou l'exercice d'une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d'avancement, de rémunération et d'octroi d'avantages sociaux, de mesures de discipline et de rupture du contrat de travail" ; qu'enfin, s'agissant de la preuve lorsque survient un tel litige, l'article L 1134-1 du code du travail prévoit que le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, et qu'au vu de ces éléments, il appartient à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en l'espèce, Monsieur Renald X... a été embauché en 1992 en qualité d'agent de fabrication au coefficient 155 ; qu'en 2007 il bénéficiait du coefficient 190 ; que Monsieur Renald X... fait état d'une comparaison de l'évolution de sa carrière avec celle de onze salariés embauchés comme agent de fabrication à la même période que lui et au même coefficient ; que sur ces onze salariés embauchés en 1992 au coefficient 155, huit ont un coefficient de 215 en 2007, seul trois ayant un coefficient de 190 ; que sur ces onze salariés, neuf ont une rémunération supérieure à celle de Monsieur X... ; que Monsieur Daniel Y... et Madame Isabelle Z... ont un diplôme CQP Tourneur comme Monsieur X... mais bénéficient d'une rémunération supérieure à la sienne de 135 et 165 euros ; qu'il ressort de cette comparaison que la carrière de Monsieur Renald X... a connu une évolution beaucoup plus lente que les salariés embauchés à la même période et qu'il bénéficie d'un coefficient plus faible et d'une rémunération moins importante que ceux-ci ; que cette constatation laisse supposer l'existence d'une discrimination directe fondée sur l'activité syndicale de Monsieur X... ; qu'à cet égard, l'employeur qui conteste toute discrimination syndicale, fait état, quant à lui, d'une comparaison avec la carrière d'autres salariés, mais n'apporte cependant aucune réponse quant à la comparaison avec les salariés mentionnés par Monsieur Renald X... ; que la différence de traitement entre Monsieur X... et d'autres salariés réunissant les mêmes conditions d'emploi et d'ancienneté ne peut s'expliquer uniquement par les quelques reproches émis lors des évaluations annuelles, alors qu'en outre les évaluations des autres salariés ne sont pas produites ; que la circonstance que la convention collective ne prévoit pas d'évolution automatique n'est pas de nature à démontrer que l'évolution de carrière de Monsieur X... n'a pas été discriminatoire ; qu'il n'est dès lors pas démontré que la différence de traitement opérée par l'employeur est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'elle doit à 1'inverse être rapprochée de l'activité syndicale que Monsieur X... exerce depuis 1996 et des différents mandats représentatifs dont il est titulaire ; que les disparités de traitement caractérisent la discrimination syndicale en sorte que Monsieur Renald X... est dès lors fondé à obtenir à ce titre des dommages et intérêts ; qu'eu égard aux éléments dont dispose la cour quant à l'étendue du préjudice subi par Monsieur Renald X... à la suite de la discrimination syndicale dont il a fait l'objet dans le déroulement de sa carrière, il y a lieu de condamner la SAS GENERAL MOTORS STRASBOURG à verser à Monsieur Renald X... la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation dudit préjudice ; que Monsieur Renald X... demande également à la Cour d'ordonner à la Société de le faire bénéficier d'une rémunération majorée de 143 euros et d'une classification coefficient 215, de condamner la Société à payer l'arriéré de salaire et de primes d'intéressement et de participation depuis le 1er février 2008, et d'ordonner sous astreinte à la Société de délivrer les bulletins de salaire rectifiés ; cependant que la Cour ne peut, après avoir constaté une discrimination syndicale dans le déroulement de carrière d'un salarié, qu'allouer des dommages-intérêts ; qu'il ne lui appartient pas dans ce cadre d'ordonner à l'employeur de fixer le salaire à tel ou tel montant, en sorte que les demandes à ce titre ne peuvent qu'être rejetées ;
ALORS QUE la réparation intégrale d'un dommage oblige à placer celui qui l'a subi dans la situation où il se serait trouvé si le comportement dommageable n'avait pas eu lieu ; que les dispositions des articles L 2141-5 et L 2141-8 du code du travail, ne font pas obstacle à ce que le juge ordonne le reclassement du salarié victime d'une discrimination prohibée ; qu'en rejetant les demandes du salarié au motif qu'elle ne peut, après avoir constaté une discrimination syndicale dans le déroulement de carrière d'un salarié, qu'allouer des dommages-intérêts et qu'il ne lui appartient pas dans ce cadre d'ordonner à l'employeur de fixer le salaire à tel ou tel montant, la Cour d'appel a violé les articles L 2141-5 et L 2141-8 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité le montant des dommages et intérêts alloués au titre de la réparation du préjudice consécutif à la discrimination syndicale à la somme 10.000 euros et partant d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande de confirmation du jugement en ce qu'il a condamné l'employeur à lui verser la somme de 13.292 euros à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE les disparités de traitement caractérisent la discrimination syndicale en sorte que Monsieur Renald X... est dès lors fondé à obtenir, à ce titre, des dommages et intérêts ; qu'eu égard aux éléments dont dispose la cour quant à l'étendue du préjudice subi par Monsieur Renald X... à la suite de la discrimination syndicale dont il a fait l'objet, il y a lieu de condamner la SAS GENERAL MOTORS STRASBOURG à verser à Monsieur Renald X... la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation dudit préjudice ;
ALORS QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu'en condamnant l'employeur à verser la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice consécutif à la discrimination syndicale sans assortir cette condamnation d'un motif de nature à justifier ce montant, la Cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS subsidiairement QU'en réduisant à la somme de 10.000 euros, les dommages et intérêts dus en réparation du préjudice consécutif à la discrimination syndicale en référence seulement « aux éléments dont dispose la Cour » sans expliquer en quoi le montant ainsi alloué permettait la réparation intégrale du dommage subi et de placer le salarié dans la situation où il se serait trouvé si le comportement dommageable n'avait pas eu lieu, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L 2141-5, L 2141-8, L 1132-1 et L 1134-5 du code du travail.Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Delvolvé, avocat aux Conseils, pour la société General motors Strasbourg.
IL EST REPROCHE A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR dit que Monsieur Renald X... avait fait l'objet d'une discrimination syndicale de la part de son employeur la société GENERAL MOTORS STRASBOURG
AUX MOTIFS QUE Monsieur X... avait été embauché en 1992 en qualité d'agent de fabrication au coefficient 155 et bénéficiait du coefficient 190 en 2007 ; qu'il faisait une comparaison de l'évolution de sa carrière avec celle de onze salariés embauchés comme agent de fabrication à la même période que lui et au même coefficient ; que sur les onze, huit avaient un coefficient 215 en 2007, trois un coefficient de 190 ; que sur ces onze salariés, neuf avaient une rémunération supérieure à celle de Monsieur X... ; qu'il résultait de cette comparaison que la carrière de Monsieur X... avait connu une évolution beaucoup plus lente que les salariés embauchés à la même période et qu'il bénéficiait d'un coefficient plus faible et d'une rémunération moins importante que ceux-ci, ce qui laissait supposer l'existence d'une discrimination directe fondée que son activité syndicale ; qu'il n'était pas démontré par l'employeur que la différence de traitement opérée était justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination
ALORS QUE la discrimination syndicale résulte de l'inégalité de traitement établie par comparaison du salaire et du classement du salarié avec ceux de ses collègues de même niveau et de leur évolution ; que la cour d'appel qui a constaté que Monsieur X... avait, en 2007, le même coefficient 190 que trois salariés du panel de 11 salariés et une rémunération de même niveau que deux d'entre eux, n'a pas caractérisé la différence de traitement dont Monsieur X... aurait fait l'objet en raison de son activité syndicale ; et qu'ainsi elle a violé les articles L.1132-1 et L.2141-5 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-22273
Date de la décision : 18/03/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 15 mai 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 mar. 2014, pourvoi n°12-22273


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Delvolvé, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.22273
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