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05/03/2014 | FRANCE | N°12-25206;12-25207;12-25208;12-25209

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 mars 2014, 12-25206 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° W 12-25.206 à Z 12-25 209 ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon les arrêts attaqués (Metz, 2 juillet 2012), que M. X... et trois autres salariés de l'association Oeuvre de Guénange Richemont ont été licenciés pour motif économique les 28 mai 2008, 2 et 13 juin 2008 à la suite de la cessation d'activité de l'employeur ; que celui-ci a été placé en liquidation judiciaire et M. Y... nommé en qualité de mandataire liquidateur ;
Attendu que l'employeur fait

grief aux arrêts de dire que le licenciement des salariés était dépourvu de cause...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° W 12-25.206 à Z 12-25 209 ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon les arrêts attaqués (Metz, 2 juillet 2012), que M. X... et trois autres salariés de l'association Oeuvre de Guénange Richemont ont été licenciés pour motif économique les 28 mai 2008, 2 et 13 juin 2008 à la suite de la cessation d'activité de l'employeur ; que celui-ci a été placé en liquidation judiciaire et M. Y... nommé en qualité de mandataire liquidateur ;
Attendu que l'employeur fait grief aux arrêts de dire que le licenciement des salariés était dépourvu de cause réelle et sérieuse et de le condamner au paiement de diverses indemnités au titre de la rupture des contrats de travail alors, selon le moyen :
1°/ que la légèreté blâmable ou la faute de l'employeur peut être retenue lorsque celui-ci est à l'initiative de la cessation d'activité ; qu'en considérant que l'employeur avait commis une faute ou, à tout le moins, fait preuve d'une légèreté blâmable privant le licenciement pour motif économique de cause réelle et sérieuse après avoir pourtant constaté que la fermeture de l'établissement avait été décidée par l'autorité préfectorale, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 1233-3 du code du travail ;
2°/ qu'en cas de fermeture d'un établissement constitutif d'un établissement distinct d'une entreprise à structure complexe qui en comporte plusieurs, l'obligation de reclassement ne saurait s'étendre à l'entreprise dans sa globalité ; qu'en reprochant à l'employeur de ne pas avoir recherché des postes de reclassement au sein de l'établissement de Richemont, cependant qu'il ressortait de ses constatations que cet établissement constituait une entité économique autonome par rapport à l'établissement de Guénange, seul établissement affecté par la fermeture du site et la suppression corrélative de tous les postes de travail, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 1233-4 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant constaté que la décision préfectorale de fermeture du site de Guénange était consécutive à un rapport d'inspection des autorités de tutelle qui avait révélé de très graves dysfonctionnements dans la gestion et l'organisation du centre éducatif et de formation professionnelle et que, malgré les injonctions préfectorales formulées à la suite de ce rapport, l'association n'avait pas mis en oeuvre les recommandations et injonctions qui lui étaient faites, la cour d'appel a pu en déduire que la cessation d'activité était due à une faute de l'employeur et a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne l'association Oeuvre de Guénange Richemont aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette ses demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq mars deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen commun produit, aux pourvois n°s W 12-25.206, X 12-25.207, Y 12-25.208 et Z 12-25.209, par Me Haas, avocat aux Conseils, pour l'association Oeuvre de Guénange Richemont
Il est fait grief aux arrêts attaqués D'AVOIR jugé que les licenciements des salariés étaient dépourvus de cause réelle et sérieuse et D'AVOIR, en conséquence, condamné l'employeur au paiement de diverses indemnités au titre de la rupture du contrat de travail ;
AUX MOTIFS QUE la cessation d'activité de l'association fait suite, d'une part, à la décision du préfet de fermer définitivement le centre éducatif et de formation professionnelle de Guenange et, d'autre part, à la cession d'une entité économique constituée par le centre éducatif de Richemont ; que si l'association était en droit, comme elle le soutient, de procéder à la cession d'une entité économique constituée par le centre éducatif de Richemont comme il sera vu ci-après, il convient de revenir sur les conditions dans lesquelles la décision préfectorale est intervenue concernant le centre éducatif et de formation professionnelle de Guenange ; que celle-ci est consécutive à un rapport d'inspection des autorités de tutelle qui a relevé de très graves dysfonctionnements dans la gestion et l'organisation du centre éducatif et de formation professionnelle, notamment des carences de la direction et de l'encadrement intermédiaire et une absence de cohérence éducative et de réponse institutionnelle efficace à la maltraitance, susceptibles d'affecter la prise en charge et l'accompagnement des personnes accueillies au sein du centre, lequel rapport se concluait par une série de préconisations et d'injonctions ; que le contenu de ce rapport établit qu'il a été réalisé au terme d'une procédure contradictoire au cours de laquelle l'association a pu faire valoir ses observations ; que celle-ci ne justifie pas avoir d'une quelconque façon contesté le constat et les conclusions de ce rapport lorsqu'il a été porté à sa connaissance ; qu'à la suite de ce rapport, le préfet a, par un courrier du 14 août 2007, formulé à l'égard de l'association une série d'injonctions en lui demandant de communiquer pour le 1er octobre 2007 effectivement prises pour le satisfaire ; que cependant, suivant son arrêté du 6 décembre 2007, le préfet a relevé dans sa réponse du 1er octobre 2007, « M. le Président de l'Association Oeuvre de Guenange maintenait sa confiance à la direction et aux cadres intermédiaires , ne faisant pas état de mesures protectrices propres à remédier dans un délai raisonnable aux dysfonctionnements constatés, notamment en ce qui concerne le projet éducatif, la prise en charge et l'accompagnement des usagers et la réponse institutionnelle à la violence », qu'il en a déduit que l'absence de mise en oeuvre des recommandations du rapport d'inspection et de la lettre d'injonctions exposait les adolescents accueillis au centre éducatif et de formation professionnelle de Guenange à un risque de maltraitance et compromettait durablement la qualité de leur prise en charge ; qu'il a d'ailleurs relevé que compte tenu de ces risques, les magistrats avaient cessé leurs placements et que la protection judiciaire de la jeunesse avait retiré son habilitation à l'établissement ; qu'il a donc prononcé la fermeture totale et définitive du centre de Guenange ; que si l'association a sollicité la suspension dudit arrêté devant la formation de référé du tribunal administratif du tribunal administratif de Strasbourg en arguant d'un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée en raison d'une erreur tant en droit qu'en fait l'affectant, cette requête a été rejetée le 31 janvier 2008 au motif qu'avant même ledit arrêté, l'autorité judiciaire avait cessé de confier l'exécution de mesures au centre et que le préfet du conseil général avait lui aussi décidé de retirer son habilitation ; que dans ses conclusions, l'association ne fait valoir aucun argument susceptible de contredire les termes dudit rapport d'inspection et le constat du préfet l'ayant conduit à prononcer la fermeture définitive du centre, l'intimée se bornant à relever qu'à la lecture dudit rapport, « la responsabilité d'un seul homme ne saurait être retenue » ; qu'il s'évince de l'ensemble de ces éléments que la fermeture du centre de Guenange est la conséquence d'une faute et, à tout le moins, d'une légèreté blâmable de l'association dans la gestion et l'organisation de cet établissement et ce, en dépit des préconisations et injonctions qui lui ont été faites, le retrait du droit de poursuivre une activité et la privation de ressources dont l'intimée argue n'étant ainsi que la résultante de ses propres manquements ; que cette faute ou, à tout le moins, cette légèreté blâmable est directement à l'origine de la cessation d'activité de l'association puisqu'elle a abouti à l'arrêté du 6 décembre 2007 prononçant la fermeture définitive du centre de Guenange et que sans les difficultés ayant affecté ledit établissement et cette fermeture, il est manifeste que la cession de l'entité économique constituée par le centre éducatif de Richemont n'aurait pas été envisagée et n'aurait pas eu lieu ; que la cessation de l'activité de l'association ne saurait donc constituer un motif économique de licenciement ; que par ailleurs, dès qu'un licenciement économique est envisagé, l'employeur a l'obligation de rechercher un reclassement dans l'entreprise prise dans ses divers établissements ou dans l'une des entreprises du groupe permettant la permutation du personnel lorsque l'entreprise appartient à un groupe, étant précisé qu'en présence d'un plan de sauvegarde de l'emploi, l'employeur doit s'attacher à toutes les possibilités de reclassement, qu'elles soient ou non prévues par le plan ; qu'en l'espèce, le licenciement du salarié, comme celui de l'intégralité des salariés du centre éducatif et de formation professionnelle de Guenange, a été envisagé au plus tard début mars 2007, époque à laquelle le plan de sauvegarde de l'emploi a été établi ; que l'employeur ne justifie pas avoir, dans le cadre de l'obligation de reclassement, pris en compte l'existence du centre éducatif de Richemont ; que l'association ne justifie nullement que le transfert du centre lui aurait été imposé par l'autorité préfectorale et le président du conseil général ; que si à la suite de la notification de la décision portant nomination de M. Z... comme administrateur du centre éducatif et de formation professionnelle de Guenange à compter du 15 décembre 2007, il est indiqué, sous la signature du préfet et du président du conseil général « dans l'hypothèse d'une réponse positive et au vu de la délibération que vous nous aurez fait parvenir, nous précéderons au transfert des autorisations de Richemont à la Fondation Vincent de Paul ¿ », ce dont il s'induit qu'une proposition de transfert avait été faite par l'autorité préfectorale et le président du conseil général, il n'en reste pas moins que c'est l'association qui, par délibération de l'assemblée générale extraordinaire du 14 avril 2008 et alors que le plan de sauvegarde de l'emploi avait été établi antérieurement, a pris la décision de transférer l'activité du centre éducatif de Richemont à la Fondation Vincent de Paul par l'abandon de ses autorisations et habilitations et la cession sans contrepartie de ses immobilisations et actifs du centre de Richemont à la Fondation Vincent de Paul ; que si l'association était effectivement en droit, comme elle le soutient, de procéder à la cession d'une entité économique constituée par le centre éducatif de Richemont, elle ne prouve pas avoir recherché des possibilités de reclassement dans cette entité économique au moment où le licenciement a été envisagé et par suite avant la cession en cause ; qu'ainsi, faute de justifier d'avoir envisagé un reclassement interne en prenant en compte le périmètre de l'entreprise et non celui d'un seul établissement, il apparaît que l'association n'a pas satisfait à son obligation de reclassement ;
ALORS, 1°), QUE la légèreté blâmable ou la faute de l'employeur peut être retenue lorsque celui-ci est à l'initiative de la cessation d'activité ; qu'en considérant que l'employeur avait commis une faute ou, à tout le moins, fait preuve d'une légèreté blâmable privant le licenciement pour motif économique de cause réelle et sérieuse après avoir pourtant constaté que la fermeture de l'établissement avait été décidée par l'autorité préfectorale, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 1233-3 du code du travail ;
ALORS, 2°), QU'en cas de fermeture d'un établissement constitutif d'un établissement distinct d'une entreprise à structure complexe qui en comporte plusieurs, l'obligation de reclassement ne saurait s'étendre à l'entreprise dans sa globalité ; qu'en reprochant à l'employeur de ne pas avoir recherché des postes de reclassement au sein de l'établissement de Richemont, cependant qu'il ressortait de ses constatations que cet établissement constituait une entité économique autonome par rapport à l'établissement de Guenange, seul établissement affecté par la fermeture du site et la suppression corrélative de tous les postes de travail, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 1233-4 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-25206;12-25207;12-25208;12-25209
Date de la décision : 05/03/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Metz, 02 juillet 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 mar. 2014, pourvoi n°12-25206;12-25207;12-25208;12-25209


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.25206
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