LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 juin 2012), que Mme X... a été engagée le 1er septembre 2004, par la société Réside études, ayant notamment pour activité la promotion, la gestion et l'exploitation de programmes immobiliers, en qualité de négociatrice ; que le 18 juin 2009, invoquant divers griefs à l'encontre de son employeur, elle a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail ; qu'elle a été licenciée le 7 janvier 2010 pour insuffisance de résultats ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la salariée une certaine somme à titre de commissions et de congés payés afférents, alors, selon le moyen :
1°/ que dans ses conclusions récapitulatives d'appel (p. 18), l'employeur soutenait que la « motivation » du jugement entrepris était « contraire aux termes du contrat de travail, qui n'accorde aucun droit à commission en cas d'annulation « acquéreurs », sans qu'il ait besoin de considérer ou d'analyser les motifs d'annulation desdits acquéreurs » ; qu'en effet, il ressort de l'article 6 du contrat de travail que « Mme Anne-Marie X... percevra une rémunération définie comme suit (...) une partie variable, constituée de commissions brutes sur les ventes qu'elle aura réalisées, payable à la signature de l'acte authentique (...) un décompte de commissions (...) tiendra compte des avances sur commissions générées sur les réservations d'appartements effectuées, des commissions acquises sur les régularisations d'actes authentiques et des avances sur commissions à retenir sur les réservations annulées » ; qu'en condamnant l'employeur à payer à l'employée des commissions correspondant à des réservations annulées par les clients, au motif que les décisions auraient reposé sur « un retard important pris par le programme immobilier », de sorte qu'il « ne peut s'agir d'une annulation imputable au client » (arrêt attaqué, p. 5), la cour d'appel a méconnu la force obligatoire des stipulations contractuelles précitées, en violation de l'article 1134 du code civil, ensemble les articles L. 1221-1 et L. 1222-1 du code du travail ;
2°/ qu'en fondant son arrêt (p. 5) sur « une attestation de M. Stéphane Y... du 31 janvier 2011, lequel précise en effet que « les annulations promoteur ont cessé d'être payées à cette période (à partir de 2008) contrairement à ce qui se pratiquait jusqu'à ce jour », quand il ressort de ses énonciations que la réclamation de Mme X... ne portait que sur des commissions afférentes à des réservations annulées, non pas par le promoteur, mais par des clients acheteurs, la cour d'appel a formulé un motif erroné et, en tout état de cause, inopérant et privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1134 du code civil, ensemble les articles L. 1221-1 et L. 1222-1 du code du travail ;
Mais attendu que, sans encourir aucun des griefs du moyen, la cour d'appel a constaté que l'employeur s'était engagé à payer des commissions en cas d'annulation promoteur d'une réservation et que dans les hypothèses pour lesquelles la salariée sollicitait le versement d'une commission qui ne lui avait pas été payée l'annulation était intervenue en raison d'un fait du promoteur ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts exclusifs et de le condamner à payer une certaine somme à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi qu'à rembourser à Pôle emploi des indemnités de chômage versées à la salariée, alors, selon le moyen :
1°/ que la cassation sur un chef de dispositif s'étend à ceux qui en sont indivisibles ou en dépendent nécessairement ; qu'en l'espèce, le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de la société Réside études étant fondé par la cour d'appel sur le défaut de paiement de commissions qui auraient été dues à Mme X..., la cassation à intervenir sur le premier moyen emportera cassation, par voie de conséquence, des chefs du dispositif présentement critiqués, par application de l'article 624 du code de procédure civile ;
2°/ alors que, au surplus, seul un manquement avéré et suffisamment grave de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail est de nature à justifier le prononcé de la résiliation judiciaire à ses torts exclusifs ; que tel n'est pas le cas lorsque les parties s'opposent sur la lecture d'une stipulation claire et précise du contrat de travail, à laquelle, au surplus, les juge du fond croient devoir ajouter pour trancher le litige ; qu'en l'espèce, à supposer par hypothèse justifiée une telle adjonction, elle ne suffisait pas à elle seule à fonder une résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1184 du code civil, ensemble les articles L. 1221-1 et L. 1222-1 du code du travail ;
Mais attendu, d'abord, que le rejet du premier moyen rend sans objet le premier grief du moyen ;
Attendu, ensuite, qu'ayant relevé que le versement des commissions constituait une part importante de la rémunération de la salariée, la cour d'appel a estimé que le manquement de l'employeur au paiement de l'intégralité des commissions dues était suffisamment grave pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Réside études aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Réside études à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf janvier deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Tiffreau, Corlay et Marlange, avocat aux Conseils, pour la société Réside études
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à la Cour d'appel d'AVOIR confirmé le jugement ayant condamné la Société RESIDE ETUDES à payer à Mme X... la somme de 4.828,97 € à titre de commissions et celle de 482,89 € à titre de congés payés correspondants,
AUX MOTIFS ADOPTES QUE « la salariée présente un détail de 4 réservations annulées pour lesquelles elle n'a perçu qu'une partie de la commission ; qu'il n'est pas contesté que les réservations annulées ne donnent pas droit au paiement de la commission ; que cependant les réservations annulées pour des faits inhérents au promoteur doivent être réglées ; que les annulations des réservations sont imputables au promoteur en raison des retards de livraison de l'immeuble »,
ET AUX MOTIFS PROPRES QUE « il n'est pas contesté et cela résulte également du rapport d'enquête du CHSCT que, lorsque la commande était annulée du fait du promoteur immobilier en raison notamment de retards du programme ou du fait de la société RESIDE ETUDES, le commercial percevait néanmoins sa commission ; qu'il ne la percevait pas lorsque l'annulation de la commande était imputable au client ; la salariée établit également clairement que la société RESIDE ETUDES, qui réglait sans difficulté les commissions à la suite d'une « annulation promoteur », a changé ses pratiques ainsi que le révèle une attestation de Monsieur Stéphane Y... du 31 janvier 12011, lequel précise en effet que « les annulations promoteur ont cessé d'être payées à cette période (à partir de 2008) contrairement à ce qui se pratiquait jusqu'à ce jour » ; le manquement de l'employeur sur ce point est patent ; et il résulte des pièces produites que celui-ci a entendu revenir sur le paiement des commissions sans en informer la salariée ; ce manquement est sérieux car le versement des commissions constituait une part importante de la rémunération de la salariée (...) il y a lieu de confirmer la condamnation de première instance en ce qu'elle a alloué à la salariée la somme de 4.828,97 € correspondant aux commissions non réglées par l'employeur alors qu'elles se rapportaient à des affaires où la réservation avait été annulée par le fait du promoteur et la somme de 482,89 € au titre des congés payés afférents à ces commissions »,
ALORS QUE 1°) dans ses conclusions récapitulatives d'appel (p. 18), l'employeur soutenait que la « motivation » du jugement entrepris était « contraire aux termes du contrat de travail, qui n'accorde aucun droit à commission en cas d'annulation « acquéreurs », sans qu'il ait besoin de considérer ou d'analyser les motifs d'annulation desdits acquéreurs » ; qu'en effet, il ressort de l'article 6 du contrat de travail que « Mme Anne-Marie X... percevra une rémunération définie comme suit (...) une partie variable, constituée de commissions brutes sur les ventes qu'elle aura réalisées, payable à la signature de l'acte authentique (...) un décompte de commissions (...) tiendra compte des avances sur commissions générées sur les réservations d'appartements effectuées, des commissions acquises sur les régularisations d'actes authentiques et des avances sur commissions à retenir sur les réservations annulées » ; qu'en condamnant l'employeur à payer à l'employée des commissions correspondant à des réservations annulées par les clients, au motif que les décisions auraient reposé sur « un retard important pris par le programme immobilier », de sorte qu'il « ne peut s'agir d'une annulation imputable au client » (arrêt attaqué, p. 5), la Cour d'appel a méconnu la force obligatoire des stipulations contractuelles précitées, en violation de l'article 1134 du Code civil, ensemble les articles L. 1221-1 et L. 1222-1 du Code du travail.
ALORS QUE 2°), au surplus, en fondant son arrêt (p. 5) sur « une attestation de Monsieur Stéphane Y... du 31 janvier 12011, lequel précise en effet que « les annulations promoteur ont cessé d'être payées à cette période (à partir de 2008) contrairement à ce qui se pratiquait jusqu'à ce jour », quand il ressort de ses énonciations que la réclamation de Mme X... ne portait que sur des commissions afférentes à des réservations annulées, non pas par le promoteur, mais par des clients acheteurs, la Cour d'appel a formulé un motif erroné et, en tout état de cause, inopérant et privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil, ensemble les articles L. 1221-1 et L. 1222-1 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à la Cour d'appel d'AVOIR, infirmant partiellement le jugement entrepris, prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme X... aux torts exclusifs de la Société RESIDE ETUDES et condamné celle-ci au paiement d'une somme de 38.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi qu'au remboursement à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées à Mme X... du jour du licenciement au jour de l'arrêt, dans la limite de 6 mois d'indemnités,
AUX MOTIFS QUE « il n'est pas contesté et cela résulte également du rapport d'enquête du CHSCT que, lorsque la commande était annulée du fait du promoteur immobilier en raison notamment de retards du programme ou du fait de la société RESIDE ETUDES, le commercial percevait néanmoins sa commission ; qu'il ne la percevait pas lorsque l'annulation de la commande était imputable au client ; la salariée établit également clairement que la société RESIDE ETUDES, qui réglait sans difficulté les commissions à la suite d'une « annulation promoteur », a changé ses pratiques ainsi que le révèle une attestation de Monsieur Stéphane Y... du 31 janvier 12011, lequel précise en effet que « les annulations promoteur ont cessé d'être payées à cette période (à partir de 2008) contrairement à ce qui se pratiquait jusqu'à ce jour » ; le manquement de l'employeur sur ce point est patent ; et il résulte des pièces produites que celui-ci a entendu revenir sur le paiement des commissions sans en informer la salariée ; ce manquement est sérieux car le versement des commissions constituait une part importante de la rémunération de la salariée ; il justifie en tout cas une résiliation judiciaire du contrat aux torts de l'employeur, cette résiliation prenant effet, non à compter de la présente décision, mais à la date du 7 janvier 2010, date du licenciement ayant mis fin au contrat ; il y a lieu de confirmer la condamnation de première instance en ce qu'elle a alloué à la salariée la somme de 4.828,97 € correspondant aux commissions non réglées par l'employeur alors qu'elles se rapportaient à des affaires où la réservation avait été annulée par le fait du promoteur et la somme de 482,89 € au titre des congés payés afférents à ces commissions ; par ailleurs, compte tenu de l'ancienneté de la salariée au moment de la rupture (plus de 5 ans), de son âge (41 ans), de la durée du chômage subi (jusqu'au 30 septembre 2011), du contexte dans lequel est intervenu la rupture, il y a lieu d'allouer à la salariée une somme de 38.000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse », ALORS QUE 1°) la cassation sur un chef de dispositif s'étend à ceux qui en sont indivisibles ou en dépendent nécessairement ; qu'en l'espèce, le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de la Société RESIDE ETUDES étant fondé par la Cour d'appel sur le défaut de paiement de commissions qui auraient été dues à Mme X..., la cassation à intervenir sur le premier moyen emportera cassation, par voie de conséquence, des chefs du dispositif présentement critiqués, par application de l'article 624 du Code de procédure civile.
ALORS QUE 2°), au surplus, seul un manquement avéré et suffisamment grave de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail est de nature à justifier le prononcé de la résiliation judiciaire à ses torts exclusifs ; que tel n'est pas le cas lorsque les parties s'opposent sur la lecture d'une stipulation claire et précise du contrat de travail, à laquelle, au surplus, les juge du fond croient devoir ajouter pour trancher le litige ; qu'en l'espèce, à supposer par hypothèse justifiée une telle adjonction, elle ne suffisait pas à elle seule à fonder une résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur ; qu'en jugeant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles 1134 et 1184 du Code civil, ensemble les articles L. 1221-1 et L. 1222-1 du Code du travail.