LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu l'article L.1332-4 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 1er août 1986 par la Fédération départementale des chasseurs de l'Aude en qualité de technicien adjoint, a été licencié pour faute grave le 8 octobre 2007 ;
Attendu que pour dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que les faits reprochés au salarié dans la lettre de licenciement, à savoir un acte d'insubordination pour ne pas avoir respecté les directives dans la restitution de dossiers de subventions fédérales, avaient déjà été sanctionnés par un avertissement le 23 mai 2007 et que la lettre recommandée du 23 juillet 2007 par laquelle il était à nouveau demandé au salarié de restituer ou de compléter les mêmes dossiers avant le 17 août 2007 n'avait pas eu pour effet de reporter la connaissance par l'employeur des faits fautifs, en sorte que les faits à l'origine du licenciement étaient prescrits ;
Attendu, cependant, que si, aux termes de l'article L. 1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, ces dispositions ne font pas obstacle à la prise en considération d'un fait antérieur à deux mois dans la mesure où le comportement du salarié s'est poursuivi ou s'est réitéré dans ce délai ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'il résultait de ses constatations qu'après l'avertissement du 23 mai 2007 et la mise en demeure du 23 juillet 2007, le salarié avait persisté dans son comportement fautif, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamné la Fédération départementale des chasseurs de l'Aude à payer à M. X... des sommes à titre d'indemnité de licenciement, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité de préavis et de congés payés y afférents, l'arrêt rendu le 6 juin 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour la Fédération départementale des chasseurs de l'Aude.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait jugé le licenciement de Monsieur X... injustifié et de l'avoir infirmé uniquement sur le montant des dommages-intérêts qui lui étaient dus à ce titre qu'elle a porté à la somme de 60.000 € ainsi que sur le montant des frais irrépétibles qu'elle a fixé à la somme de 2.000 € ;
AUX MOTIFS QUE « la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; qu'il appartient à l'employeur d'en rapporter la preuve ; que par ailleurs, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance ; qu'en outre une même faute ne peut faire l'objet de deux sanctions successives ; qu'en l'espèce, dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, l'employeur reproche au salarié un acte d'insubordination consistant à ne pas avoir respecté les directives relatives à la restitution des dossiers listés dans une lettre du 10 novembre 2006, restitution devant intervenir avant le 31 décembre 2006 ; qu'or, il ressort des pièces produites aux débats qu'après avoir demandé au salarié, par lettre datée du 20 février 2007, de restituer les dossiers concernés dûment contrôlés avant le 27 février 2007 dernier délai, l'employeur lui a adressé, suivant lettre recommandée datée du 23 mai 2007, un avertissement aux motifs que pour certains dossiers restitués il manquait des documents justificatifs des parcellaires "cultures faunistiques", que de "nombreuses fiches de constats comportent des faux en écriture" et que par ailleurs 12 dossiers n'ont pas été restitué à savoir les dossiers suivants : ACCA de Verzeille, ACCA de Duilhac, ACCA de Roubia, ACCA de Poumas, ACCA de Coursan, ACCA d'Omaisons, Rallye Vallée du Lauquet, ACCA de Montmaur, ACCA de Camplong d'Aude, ACCA de Bizanet, Diane de la Bouïche , Rallye Molière ; que postérieurement à cet avertissement qui a la nature d'une sanction disciplinaire au sens de l'article L. 1331-1 du code du travail, l'employeur a, par lettre recommandée datée du 23 juillet 2007 ''mis en demeure" le salarié de lui "fournir d'ici le 17 août 2007" les 12 dossiers manquants dont la liste est identique à celle figurant dans la lettre du 23 mai 2007; que dans ce courrier du 23 juillet 2007, il est à nouveau demandé au salarié de compléter les dossiers qui ne le sont pas en ce qui concerne principalement les états des parcelles mises en cultures ; qu'alors que les faits reprochés au salarié, à savoir dossiers de subventions fédérales non restitués ou incomplets, sont connus de l'employeur depuis au plus tard le 23 mai 2007 (ayant eu largement le temps de procéder à des vérifications du contenu du carton "remis" le 28 février 2007), la fédération appelante n'a engagé la procédure de licenciement que le 23 août 2007, soit au-delà du délai de deux mois prévu à l'article L. 1332-4 du code du travail, la lettre recommandée datée du 23 juillet 2007 n'ayant pas pour effet de reporter la connaissance par l'employeur des faits fautifs à une date comprise à l'intérieur de ce délai de 2 mois ; que par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés, c'est à juste titre que les premiers juges ont considéré que le licenciement du salarié était dénué de cause réelle et sérieuse » ;
ALORS, d'une part, QUE si aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, ces dispositions ne font pas obstacle à la prise en considération d'un fait antérieur, dans la mesure où le comportement du salarié s'est poursuivi dans ce délai ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel qui a jugé que l'employeur ne pouvait initier la procédure de licenciement de Monsieur X... le 23 août 2007, trois mois après la connaissance exacte qu'il avait eu des faits le 23 mai 2007, sans prendre en considération la poursuite, dans ce délai, du comportement fautif du salarié qu'elle avait par ailleurs constaté, a violé, par fausse application, l'article L. 1332-4 du Code du travail ;
ALORS, d'autre part, QUE la poursuite par un salarié d'un fait fautif autorise l'employeur à se prévaloir de faits similaires, y compris ceux ayant déjà été sanctionnés, pour caractériser une faute grave ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel qui a jugé le licenciement de Monsieur X... injustifié aux motifs que les faits fautifs, connus de l'employeur à la date du 23 mai 2007 étaient prescrits, quand il résultait de ses propres constatations, qu'à cette date, l'employeur avait adressé au salarié un avertissement qui était resté sans effet sur son comportement, de sorte que les faits à l'origine du licenciement, qui n'étaient pas ceux du 23 mai 2007 déjà sanctionnés, mais la réitération ultérieure du comportement fautif du salarié n'étaient pas prescrits à la date du licenciement a, derechef, violé, par fausse application, l'article L. 1332-4 du Code du travail.