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18/12/2013 | FRANCE | N°13-12099

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 18 décembre 2013, 13-12099


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Met hors de cause la société Garantie mutuelle des fonctionnaires (GMF), l'Association syndicale libre du lotissement les Monts Caraïbes, la SCI Mathilde et Mme X... ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 30 avril 2012), que M. Y... a chargé M. Z..., architecte assuré par la société Mutuelle des architectes français (MAF) de la conception d'un lotissement sur un terrain lui appartenant, dont certains lots, commercialisés par la société Agence Frevel immobilier (AFI), devenue la sociétÃ

© Joseph Baur immobilier (JBI) et gérés par l'association syndicale libre...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Met hors de cause la société Garantie mutuelle des fonctionnaires (GMF), l'Association syndicale libre du lotissement les Monts Caraïbes, la SCI Mathilde et Mme X... ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 30 avril 2012), que M. Y... a chargé M. Z..., architecte assuré par la société Mutuelle des architectes français (MAF) de la conception d'un lotissement sur un terrain lui appartenant, dont certains lots, commercialisés par la société Agence Frevel immobilier (AFI), devenue la société Joseph Baur immobilier (JBI) et gérés par l'association syndicale libre (l'ASL) les Monts caraïbes, ont été acquis par Mme B..., la SCI Mathilde et Mme X..., laquelle, assurée en police dommages-ouvrage par la société Garantie mutuelle des fonctionnaires (GMF), a chargé M. Z... de la maîtrise d'oeuvre de la construction de sa maison ; que se plaignant d'éboulements, l'ASL, après expertise, a assigné M. Y..., en qualité de lotisseur, la société AFI, devenue la société JBI, M. Z... et son assureur, en réparation des préjudices subis par les parties communes et certaines parties privatives du lotissement ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident, pris en ses deux premières branches :
Attendu que M. Z... et la MAF font grief à l'arrêt de les condamner, in solidum avec M. Y... et la société Joseph Baur immobilier, à payer diverses sommes à l'ASL Les Monts Caraïbes, Mme X..., la SCI Mathilde et Mme B..., alors, selon le moyen :
1°/ que, d'une part, dans leurs conclusions d'appel, M. Z... et la MAF ont soutenu que l'architecte avait été chargé d'une mission limitée à l'obtention d'un permis de lotir, que ce dossier à usage uniquement administratif ne pouvait servir à la réalisation des travaux de viabilité du lotissement et que l'architecte n'était intervenu ni dans l'élaboration technique des plans d'exécution, qui n'ont d'ailleurs pas été réalisés, ni dans le calcul des VRD, ni dans la maîtrise d'oeuvre d'exécution des travaux de VRD ; que pour retenir sa responsabilité, la cour d'appel a notamment estimé que le programme et les plans qu'il avait dressés ont servi de base pour les travaux et qu'ils étaient insuffisants en raison de l'absence d'étude du bassin versant du lotissement et d'une sous-estimation évidente des arrivées d'eaux pluviales ; qu'en faisant ainsi abstraction du fait que les éléments du dossier de permis de lotir ne pouvaient servir à la réalisation des travaux de viabilité, et sans justifier que l'étude du bassin versant du lotissement ait dû être effectuée dans le cadre de la demande de permis de lotir, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
2°/ que, d'autre part, la responsabilité du maître d'oeuvre doit être appréciée par référence aux missions qu'il a réellement assumées, et non simplement à des contrats qui n'ont pas été exécutés ; qu'en l'espèce, dans leurs conclusions d'appel, M. Z... et la MAF ont soutenu que l'architecte n'ayant pas été payé de ses honoraires, il avait cessé toute intervention après l'obtention du permis de lotir ; que pour retenir sa responsabilité, la cour d'appel s'est fondée sur un contrat visant une mission complète de maîtrise d'oeuvre pour l'élaboration et l'exécution des travaux d'équipement du lotissement, ainsi qu'un courrier selon lequel l'architecte avait reçu commande d'un dossier de permis de lotir, qui comprenait les plans, le règlement et le programme des travaux ; qu'en se déterminant par ces motifs, sans répondre aux conclusions soutenant que l'architecte avait interrompu sa mission compte tenu de l'absence de règlement de ses honoraires, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la responsabilité de M. Z... était recherchée, comme concepteur du lotissement et comme maître d'oeuvre de la construction de la maison de Mme X..., que d'une part, il était établi par les pièces versées aux débats que l'architecte avait reçu une mission complète de maîtrise d'oeuvre pour l'élaboration et l'exécution des travaux d'équipement du lotissement et la conception des réseaux, que malgré des difficultés pour se faire payer ses honoraires l'architecte n'avait pas fait résilier le contrat de maîtrise d'oeuvre le liant au lotisseur et que les plans et le travail de conception étaient manifestement insuffisants, en raison de l'absence d'étude du bassin versant du lotissement et d'une sous-estimation des arrivées des eaux pluviales, que d'autre part, en sa qualité de maître d'oeuvre de Mme X..., M. Z... était responsable des désordres de nature décennale, affectant la sécurité des ouvrages, dus à l'absence d'étude du terrain, au terrassement sans précaution, aux travaux insuffisants de canalisation des eaux, ayant contribué aux désordres affectant le réseau du lotissement et certains autres lots, la cour d'appel, répondant aux conclusions, en a exactement déduit que l'architecte était responsable des plans qu'il avait fournis en tant que concepteur des VRD du lotissement et des travaux réalisés pour Mme X..., sans précaution ni étude préalable ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal :
Vu les articles 4, 564 et 753 du code de procédure civile ;
Attendu que pour déclarer recevable le recours de M. Y... à l'encontre de la société Joseph Baur immobilier, l'arrêt retient que, dans les dernières conclusions devant le tribunal, M. Y... avait demandé, à titre subsidiaire, pour le cas où il serait condamné, que la condamnation soit supportée, au final, par M. Z..., son assureur ainsi que par la société AFI, devenue la société Joseph Baur immobilier ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'aucune demande de garantie n'avait été formulée par M. Y... dans ces conclusions, la cour d'appel, qui les a dénaturées, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident, pris en sa troisième branche :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare recevable le recours présenté par M. Y... à l'encontre de la société Joseph Baur immobilier et condamne la société Joseph Baur immobilier, in solidum avec M. Z... et la MAF, à relever et garantir entièrement M. Y... de ses condamnations au titre de l'application de l'article 1792 du code civil, l'arrêt rendu le 30 avril 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre, autrement composée ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit décembre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits au pourvoi principal par la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux Conseils, pour la société Joseph Baur immobilier.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré recevable le recours présenté par M. Jean-Claude Y... à l'encontre de la société Joseph Baur Immobilier ;
AUX MOTIFS QU'en vertu de l'article 564 du code de procédure civile, « A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ». Il résulte de la lecture des dernières conclusions de M. Y... devant le tribunal notifiées aux autres parties en septembre et octobre 2005 et portant le tampon du greffe de la cour du 18 octobre 2005, que, dans le corps de ses écritures, en page 6, M. Y... avait demandé, à titre subsidiaire, pour le cas où il serait condamné, que la condamnation soit supportée au final, par M. Z..., son assureur, ainsi que par la société AFI. La société AFI étant devenue la société Joseph Baur Immobilier, les recours présentés à son encontre par M. Y... ne sauraient être déclarés nouveaux en appel et, partant irrecevables ;
1) ALORS, D'UNE PART, QU'en affirmant, pour déclarer recevable la demande, qu'il résultait de la lecture des dernières conclusions de M. Y... devant le tribunal de première instance que, dans le corps de ses écritures, en page 6, celui-ci avait demandé, à titre subsidiaire, pour le cas où il serait condamné, que la condamnation soit supportée au final par la société AFI, bien que les dernières conclusions, en première instance, de M. Y... ne comportaient aucune demande en garantie à l'encontre de la société Joseph Baur Immobilier, la cour d'appel a dénaturé ces conclusions et violé de l'article 4 du code de procédure civile ;
2) ALORS, D'AUTRE PART, QU'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour d'appel de nouvelles prétentions, si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait et qu'elles doivent reprendre dans leurs dernières conclusions les prétentions et moyens présentés dans leurs conclusions antérieures, qu'elles sont, à défaut réputées avoir abandonnés ; qu'en l'espèce, en déclarant recevable le recours en garantie présenté par M. Jean-Claude Y... à l'encontre de la société Joseph Baur Immobilier, bien que les dernières conclusions de M. Y..., en première instance, ne comportaient pas d'appel en garantie à son encontre, la cour d'appel a violé les articles 564 et 753 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société Joseph Baur Immobilier de sa demande en garantie dirigée contre M. Y... et de l'avoir condamnée, in solidum avec M. Z... et la société Mutuelle des Architectes Français, à relever et garantir entièrement M. Y... de ses condamnations au titre de l'application de l'article 1792 du code civil ;
AUX MOTIFS QUE, sur la responsabilité de M. Y..., en vertu de l'article 1792-1. 2°), est réputé constructeur, toute personne qui vend après achèvement un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire. Le lotisseur est un constructeur au sens des articles 1792 et suivants du code civil et peut, donc, voir sa responsabilité engagée pour des désordres de nature décennale résultant de défaut de conception ou de réalisation de VRD, directement imputable au lotisseur (Cass. 3ème Civ. 17 décembre 1997, n° de pourvoi : 96-12. 209). Il résulte de ce qui précède une carence patente du lotisseur, en raison de l'insuffisance des ouvrages prévus dans le projet de permis de lotir et du défaut de réalisation des ouvrages. Ces désordres, qui affectent des travaux de nature décennale, objet d'une réception, rendent les ouvrages impropres à destination. M. Y... est, donc, de droit, responsable des dommages sur le fondement de l'article 1792 et suivants du code civil. Pour tenter de s'exonérer de sa responsabilité, M. Y... se prévaut de la faute de Mme X.... Or, il ne démontre nullement que les dommages invoqués proviennent d'une cause étrangère. Il sera donc condamné à réparer les dommages subis par l'association syndicale libre et les colotis justifiant d'un préjudice. (¿) Sur les recours des constructeurs entre eux : En raison du concours des responsabilités et à leurs demandes, il convient de fixer la contribution à la dette de chacun des constructeurs, en fonction de leurs fautes respectives. Au regard des défaillances de M. Z... intervenu, à la fois, comme concepteur du lotissement, du programme des travaux et de ses plans d'exécution insuffisants et, en qualité de maître d'oeuvre, sur le lot n° 6 de Mme X..., de travaux de terrassement très importants sans précaution, qui ont déstabilisé les terres, la voirie et les réseaux, il convient de juger qu'il assumera 65 % des condamnations au titre de la garantie décennale. La société AFI, devenue Joseph Baur Immobilier, qui a assumé des fonctions de maître d'oeuvre d'exécution de travaux de VRD, eu égard à la réalisation défaillante, laquelle n'était même pas en adéquation avec la conception, déjà défaillante de M. Z..., devra assumer 35 % de ces condamnations. En conséquence, sur le fondement de l'article 1382 du code civil, en fonction des demandes telles qu'exprimées par les parties, la société Joseph Baur Immobilier sera relevée et garantie par M. Z... et la MAF in solidum à hauteur de 65 % des condamnations et M. Z... et la MAF seront relevés et garantis, à hauteur de 35 % des condamnations par la société Joseph Baur Immobilier. M. Y..., maître d'ouvrage, sera entièrement relevé et garanti par M. Z..., la MAF et la société Joseph Baur Immobilier ;
ALORS QUE la faute de la victime qui a contribué à la réalisation de son dommage exonère, au moins partiellement, le défendeur à l'action en responsabilité ; qu'en l'espèce, l'exposante sollicitait dans ses conclusions d'appel, la condamnation de M. Y..., lotisseur et maître de l'ouvrage, solidairement avec M. Z..., architecte concepteur et maître d'oeuvre, à la relever et garantir des condamnations qui pourraient être mises à sa charge, en raison de sa responsabilité dans les désordres constatés ; qu'à cet égard, la cour d'appel a explicitement constaté l'existence d'une « carence patente » de M. Y..., maître d'ouvrage et lotisseur, en raison de l'insuffisance des ouvrages prévus dans le projet de permis de lotir et du défaut de réalisation des ouvrages ; qu'en condamnant cependant l'exposante à garantir entièrement M. Y... des condamnations prononcées à son encontre, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales, dans les rapports des constructeurs entre eux, de ses propres constatations relatives aux fautes commises par le maître de l'ouvrage, et a ainsi violé l'article 1147 du code civil. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour de M. Z... et la société Mutuelles des architectes français.
Le moyen de cassation du pourvoi provoqué fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné M. Z... et la Mutuelle des Architectes Français, in solidum avec M. Y... et la société Joseph Baur Immobilier, à payer diverses sommes à l'ASL Les Monts Caraïbes, Mme X..., la SCI Mathilde et Mme B..., et de les avoir condamnés, in solidum avec la société Joseph Baur Immobilier, à garantir entièrement Monsieur Y... de ses condamnations au titre de l'article 1792 du Code civil ;
Aux motifs que « sur la responsabilité de M. Y... En vertu de l'article 1792-1. 2°, est réputé constructeur toute personne qui vend après achèvement un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire. Le lotisseur est un constructeur au sens des articles 1792 et suivants du Code civil et peut, donc, voir sa responsabilité engagée pour des désordres de nature décennale résultant de défauts de conception ou de réalisation de V. R. D., directement imputables au lotisseur (Cass. Civ. 3ème, 17 décembre 1997, n° 96-12. 209). Il résulte de ce qui précède une carence patente du lotisseur, en raison de l'insuffisance des ouvrages prévus dans le projet de permis de lotir et du défaut de réalisation des ouvrages. Ces désordres, qui affectent des travaux de nature décennale, objet d'une réception, rendent les ouvrages impropres à leur destination. M. Y... est, donc, de droit, responsable des dommages sur le fondement de l'article 1792 et suivants du Code civil. Pour tenter de s'exonérer de sa responsabilité, M. Y... se prévaut de la faute de Mme X.... Or il ne démontre nullement que les dommages invoqués proviennent d'une cause étrangère. Il sera, donc, condamné à réparer les dommages subis par l'Association Syndicale Libre et les colotis justifiant d'un préjudice. sur la responsabilité de M. Z...
la responsabilité de M. Z..., architecte, est recherchée à deux titres, au titre de concepteur du lotissement et au titre de maître d'oeuvre de la maison de Mme X... ; Précisant qu'il a seulement réalisé le dossier administratif en vue de la demande de permis de lotir, il dénie être intervenu dans l'élaboration des VRD, du fait du non-paiement de ses honoraires. M. Y... prétend, quant à lui, que M. Z... a assuré la conception des réseaux, notamment, d'eau pluviales et d'eau potable. De fait, il est produit aux débats un contrat de maîtrise d'oeuvre et une note d'honoraires de M. Z... à M. Y..., qui visent une mission complète de maîtrise d'oeuvre pour l'élaboration et l'exécution des travaux d'équipement du lotissement. Le courrier de M. Z... à M. C... du 30 septembre 1996, précise, d'ailleurs, que le cabinet d'architecture avait reçu commande d'un dossier de permis de lotir, qui comprenait les plans, le règlement et le programme des travaux. Par lettre du 20 juin 1991, M. Z... a transmis à M. Y... la demande de permis de lotir, laquelle comprend, notamment, le programme des travaux, le plan d'épandage, le plan du réseau d'eaux pluviales, le plan du réseau d'eau potable, réseau téléphone et électricité. S'il ressort des débats que M. Z... a connu des difficultés pour se faire payer ses honoraires et qu'il n'a pas suivi l'exécution des travaux, il s'évince de ce qui précède qu'il a bien réalisé la conception des réseaux. Il n'est, d'ailleurs, pas soutenu que M. Z... ait fait résilier, à quel que moment que ce soit, le contrat de maîtrise d'oeuvre le liant au lotisseur. Or, même lorsque l'architecte ne fournit des plans que pour rendre conforme un dossier au code de l'urbanisme, il ne limite pas, pour autant, sa responsabilité relative à la conception du projet et demeure responsable des plans qu'il a fournis. Il est constant en l'espèce, que le programme et les plans de M. Z... ont servi de base pour les travaux réalisés par l'entreprise Desprez, même si celle-ci n'a pas réalisé tous les ouvrages prévus au programme. Et, il est également, constant que ces plans et le travail de conception des ouvrages étaient manifestement insuffisants, en raison de l'absence d'étude du bassin versant du lotissement et d'une sous-estimation évidente des arrivées d'eau pluviales. La responsabilité de M. Z... est, ainsi, établie en tant que concepteur des VRD. En outre, M. Z... ne conteste pas être le maître d'oeuvre de la maison de Mme X.... A ce titre sa responsabilité est, également, engagée, sur le fondement de l'article 1792 du code civil, en raison des désordres de nature décennale, affectant la sécurité des ouvrages (absence d'étude du terrain, terrassement sans précaution, travaux, canalisation des eaux insuffisants), qui ont contribué aux désordres affectant le réseau du lotissement et les lots de certains colotis. Sa responsabilité à l'égard de l'association syndicale libre, de Mme X..., de la SCI Mathilde et de Mme B... sera, donc, retenue et il sera condamné à réparer intégralement les dommages subis par ceux-ci » (arrêt pp. 10 et 11) ; (¿) Sur les recours des constructeurs entre eux En raison du concours des responsabilités et à leurs demandes, il convient de fixer la contribution à la dette de chacun des constructeurs, en fonction de leurs fautes respectives. Au regard des défaillances de M. Z... intervenu, à la fois, comme concepteur du lotissement, du programme des travaux et de ses plans d'exécution insuffisants et, en qualité de maître d'oeuvre, sur le lot numéro 6 de Mme X..., de travaux de terrassement très importants sans précaution, qui ont déstabilisé les terres, la voirie et les réseaux, il convient de juger qu'il assumera 65 % des condamnations au titre de la garantie décennale. La société AFI, devenue Joseph Baur Immobilier, qui a assumé des fonctions de maître d'oeuvre d'exécution des travaux de V. R. D. eu égard à la réalisation défaillante, laquelle n'était même pas en adéquation avec la conception, déjà défaillante de M. Z..., devra assumer 35 % de ces condamnations. En conséquence, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, en fonction des demandes telles qu'exprimées par les parties, la société Joseph Baur Immobilier sera relevée et garantie par M. Z... et la Maf in solidum à hauteur de 65 % des condamnations et M. Z... et de la Maf seront relevés et garantis, à hauteur de 35 % des condamnations par la société Joseph Baur Immobilier. M. Y..., maître d'ouvrage, sera entièrement relevé et garanti par M. Z..., la Maf et la société Joseph Baur Immobilier » (arrêt p. 16, § 1 à 5) ;
ALORS QUE, D'UNE PART, dans leurs conclusions d'appel (p. 3), les exposants ont soutenu que l'architecte avait été chargé d'une mission limitée à l'obtention d'un permis de lotir, que ce dossier à usage uniquement administratif ne pouvait servir à la réalisation des travaux de viabilité du lotissement et que l'architecte n'était intervenu ni dans l'élaboration technique des plans d'exécution, qui n'ont d'ailleurs pas été réalisés, ni dans le calcul des VRD, ni dans la maîtrise d'oeuvre d'exécution des travaux de VRD ; que pour retenir sa responsabilité, la cour a notamment estimé que le programme et les plans qu'il avait dressés ont servi de base pour les travaux et qu'ils étaient insuffisants en raison de l'absence d'étude du bassin versant du lotissement et d'une sous-estimation évidente des arrivées d'eaux pluviales ; qu'en faisant ainsi abstraction du fait que les éléments du dossier de permis de lotir ne pouvaient servir à la réalisation des travaux de viabilité, et sans justifier que l'étude du bassin versant du lotissement ait dû être effectuée dans le cadre de la demande de permis de lotir, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, la responsabilité du maître d'oeuvre doit être appréciée par référence aux missions qu'il a réellement assumées, et non simplement à des contrats qui n'ont pas été exécutés ; qu'en l'espèce, dans leurs conclusions d'appel (p. 4), les exposants ont soutenu que l'architecte n'ayant pas été payé de ses honoraires, il avait cessé toute intervention après l'obtention du permis de lotir ; que pour retenir sa responsabilité, la cour d'appel s'est fondée sur un contrat visant une mission complète de maîtrise d'oeuvre pour l'élaboration et l'exécution des travaux d'équipement du lotissement, ainsi qu'un courrier selon lequel l'architecte avait reçu commande d'un dossier de permis de lotir, qui comprenait les plans, le règlement et le programme des travaux ; qu'en se déterminant par ces motifs, sans répondre aux conclusions soutenant que l'architecte avait interrompu sa mission compte tenu de l'absence de règlement de ses honoraires, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS QU'ENFIN, toute faute engage la responsabilité de son auteur et justifie, dans les recours entre coresponsables, qu'une part de responsabilité reste à sa charge ; qu'en l'espèce, les exposants ont fait valoir, dans leurs conclusions d'appel (page 10, § 10 à 12), que les désordres étaient essentiellement imputables à la non-réalisation par le lotisseur des travaux de VRD, et plus précisément d'écoulement des eaux pluviales, et ont donc demandé la condamnation de M. Y... et de la société Joseph Baur Immobilier à les garantir à hauteur de 95 % des condamnations prononcées contre eux ; que la Cour d'appel a explicitement constaté l'existence d'une « carence patente » de M. Y..., en raison de l'insuffisance des ouvrages prévus dans le projet de permis de lotir et du défaut de réalisation des ouvrages ; qu'en condamnant cependant les exposants à garantir entièrement Monsieur Y... des condamnations prononcées à leur encontre, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales, dans les rapports des constructeurs entre eux, de ses propres constatations relatives aux fautes commises par le maître de l'ouvrage, et a ainsi violé l'article 1147 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 13-12099
Date de la décision : 18/12/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Basse-Terre, 30 avril 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 18 déc. 2013, pourvoi n°13-12099


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : Me Blondel, Me Le Prado, SCP Boulloche, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin, SCP Roger, Sevaux et Mathonnet, SCP de Chaisemartin et Courjon

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:13.12099
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