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11/12/2013 | FRANCE | N°12-26532

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 décembre 2013, 12-26532


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée (conseil de prud'hommes de Pau, 10 août 2012) rendue en matière de référé et en dernier ressort, que Mme X..., engagée le 24 octobre 2011 par la société Lidl en qualité de chef caissière et exerçant ses fonctions dans l'établissement de Mourenx, (64) a été informée le 4 avril 2012 de sa mutation au magasin de Jurançon (64) à compter du 16 avril 2012 ; que la salariée a refusé cette mutation et saisi la juridiction prud'homale d'une deman

de de rappel de salaire ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'ordonnance...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée (conseil de prud'hommes de Pau, 10 août 2012) rendue en matière de référé et en dernier ressort, que Mme X..., engagée le 24 octobre 2011 par la société Lidl en qualité de chef caissière et exerçant ses fonctions dans l'établissement de Mourenx, (64) a été informée le 4 avril 2012 de sa mutation au magasin de Jurançon (64) à compter du 16 avril 2012 ; que la salariée a refusé cette mutation et saisi la juridiction prud'homale d'une demande de rappel de salaire ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'ordonnance d'accueillir cette demande, alors, selon le moyen :
1°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens qu'il a relevés d'office, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que si, lorsque la procédure est orale, les moyens soulevés d'office sont présumés avoir été débattus contradictoirement à l'audience, il peut être apporté la preuve contraire ; qu'en l'espèce, le conseil de prud'hommes a constaté qu'à l'appui de sa demande, Mme X... soutenait qu'elle n'avait pas signé d'avenant à son contrat de travail avalisant sa mutation sur l'établissement de Jurançon et qu'elle avait été empêchée d'exécuter son travail sur le site de Mourenx ; qu'il a également constaté qu'en réponse, la société Lidl faisait valoir que la mutation de Mme X... sur le site de Jurançon avait été décidée, à l'une des conclusions de l'enquête du CHSCT, sur le fondement des stipulations de son contrat de travail et que la salariée s'était opposée à cette décision de mutation en ne gagnant pas son nouveau poste ; qu'il s'en évinçait que les moyens débattus entre les parties à l'audience ne concernaient que l'acceptation, ou non, par Mme X... de sa mutation au sein de l'établissement de Jurançon ; que le juge des référés a rappelé les prétentions et moyens développés par les parties à l'audience et dans les conclusions de l'employeur, ceux-ci ne comportant aucun moyen tiré de la qualité du signataire de la lettre informant la salariée de sa mutation ; qu'en relevant dès lors d'office, sans recueillir les observations préalables des parties, le moyen tiré de ce que le contrat de travail avait été irrégulièrement modifié dans la mesure où la lettre portant information de la décision de changement de lieu de travail avait été signée par le président du CHSCT, le juge des référés du conseil de prud'hommes a violé le principe du contradictoire, ensemble l'article 16 du code de procédure civile ;
2°/ que les juges du fond doivent répondre aux conclusions dont ils sont saisis et que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motif ; qu'en l'espèce, la société Lidl invoquait l'incompétence de la formation des référés du conseil de prud'hommes en l'absence d'urgence, Mme X... ayant été licenciée concomitamment à l'introduction de la demande de rappel de salaires ; que le conseil de prud'hommes a cependant condamné l'employeur sur le fondement de l'article R. 1455-5 du code du travail à verser à la salariée un rappel de salaire pour la période ayant précédé son licenciement ; qu'en statuant ainsi, sans aucunement répondre au moyen de la société Lidl qui faisait valoir l'absence d'urgence, le juge des référés du conseil de prud'hommes a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ alors que ce n'est qu'en l'absence de contestation sérieuse de l'employeur que la formation des référés peut ordonner toute mesure urgente à la demande du salarié, ou accorder à ce dernier une provision ; que se heurte à une contestation sérieuse la demande de rappel de salaire dont l'examen du bien-fondé suppose l'appréciation de la régularité de la mise en oeuvre d'une clause de mobilité ; qu'en l'espèce, il était constant que le contrat stipulait une clause de mobilité prévoyant la possibilité d'une mutation sur un autre magasin, sans avoir à recueillir l'accord du salarié, du moment que c'était dans un rayon de 25 km ; que pour affirmer que le droit de Mme X... à rappel de salaire n'était pas sérieusement contestable, le juge des référés n'a à aucun moment fait ressortir que la mutation décidée ne correspondait pas à cette prévision contractuelle ; qu'il a, différemment, relevé le CHSCT n'avait pas le pouvoir de décider de la mutation d'un salarié, décision relevant du ressort du seul employeur, et que le courrier de mutation était signé par le président du CHSCT ; qu'en se déterminant de la sorte, quand la mutation de Mme X..., décidée sur les préconisations du CHSCT, entrait dans les prévisions de sa clause de mobilité et avait été décidée par un représentant de l'employeur, peu important que, par erreur, après avoir indiqué son nom, il ait mentionné sa qualité de président du CHSCT, le juge des référés du conseil de prud'hommes a tranché une contestation sérieuse sur la validité de la mutation dont avait fait l'objet Mme X..., et a ce faisant violé les articles L. 1221-1, R. 1455-5 et R. 1455-7 du code du travail ;
4°/ que ne constitue pas une modification du contrat de travail, mais un simple changement des conditions de travail, la mutation du salarié correspondant aux stipulations contractuelles ; qu'en l'espèce, en affirmant, pour faire droit à la demande de rappel de salaire, que la modification du lieu de travail et dans le cadre d'un poste de caissière à temps partiel constitue une modification importante du contrat de travail, et qu'aucun avenant au contrat de travail modifiant le lieu de travail n'avait été signé par Mme X..., le juge des référés du conseil de prud'hommes a violé les articles L. 1221-1, R. 1455-5 et R. 1455-7 du code du travail ;
Mais attendu, d'abord, qu'en matière de procédure sans représentation obligatoire, les moyens retenus par le juge sont présumés, sauf preuve contraire non rapportée en l'espèce, avoir été débattus contradictoirement à l'audience ;
Attendu, ensuite, que l'octroi d'une provision, dans le cas où l'obligation n'est pas sérieusement contestable, n'est pas subordonné à la constatation de l'urgence ;
D'où il suit que le moyen, inopérant en ses troisième et quatrième branches comme critiquant des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Lidl aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne la société Lidl à payer à SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat, la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze décembre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Lidl
Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'AVOIR condamné la SNC Lidl à payer à Melle Aurélia X... avec remise du bulletin de salaire correspondant la somme de 1.800 euros brut pour la période du 30 mai au 21 juin 2012, date de la rupture du contrat de travail par l'employeur ;
AUX MOTIFS QUE « l'article R 1455-5 du code du travail dispose : « dans tous les cas d'urgence la formation de référé peut, dans la limite de la compétence des conseils de prud'hommes, ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend » ; que l'article R 1455-7 du même code précise : « dans le cas où l'existence de l'obligation ne serait pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire » ; que c'est dire que la formation de référé est compétente dans l'octroi de provision ou pour l'exécution de l'obligation liée à l'existence d'obligation non sérieusement contestable ; qu'en ce qui concerne la demande des salaires des mois de mai et juin 2012, il n'est pas contesté que l'employeur à interdit à Melle X... de prendre son poste au magasin de Mourenx le 30 avril 2012 ; qu'aucun avenant au contrat de travail modifiant le lieu de travail n'a été signé par Melle X... ; que, même si par courrier en date du 4 avril 2012, signé par le président du CHSCT était joint un avenant au contrat de travail, il demeure que le CHSCT n'a pas le pouvoir de décider la mutation d'un salarié ; décision qui n'est que du ressort de l'employeur ; que dans cette situation, au 30 avril 2012, Melle X... était en droit de se présenter sur son lieu habituel de travail de Mourenx ; que la modification du lieu de travail et dans le cadre d'un poste de caissière employée à temps partiel constitue une modification importante du contrat de travail ; que la SNC LIDL doit rétablir la salariée dans ses droits ; qu'il convient donc d'ordonner à la SNC LIDL de payer à Melle X..., avec remise du bulletin de salaire correspondant, la somme de 1.800,00 euros pour la période du 30 mai au 21 juin 2012, date de la rupture de son contrat de travail par l'employeur ; que « pour assurer l'exécution de la décision », pour reprendre les termes de l'article 33 de la loi du 09 juillet 1991 sur les procédures civiles d'exécution, la formation de référé assortira sa condamnation de paiement des salaires et de délivrance du bulletin de salaire d'une astreinte de 50 euros par jour de retard, à compter de la réception par la société défenderesse de la notification de la présente ordonnance, se conseil se réservant la faculté de la liquider éventuellement » ;
1) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens qu'il a relevés d'office, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que si, lorsque la procédure est orale, les moyens soulevés d'office sont présumés avoir été débattus contradictoirement à l'audience, il peut être apporté la preuve contraire ; qu'en l'espèce, le conseil de prud'hommes a constaté qu'à l'appui de sa demande, Melle X... soutenait qu'elle n'avait pas signé d'avenant à son contrat de travail avalisant sa mutation sur l'établissement de Jurançon et qu'elle avait été empêchée d'exécuter son travail sur le site de Mourenx ; qu'il a également constaté qu'en réponse, la SNC Lidl faisait valoir que la mutation de Melle X... sur le site de Jurançon avait été décidée, à l'aune des conclusions de l'enquête du CHSCT, sur le fondement des stipulations de son contrat de travail et que la salariée s'était opposée à cette décision de mutation en ne gagnant pas son nouveau poste ; qu'il s'en évinçait que les moyens débattus entre les parties à l'audience ne concernaient que l'acceptation, ou non, par Melle X... de sa mutation au sein de l'établissement de Jurançon ; que le juge des référés a rappelé les prétentions et moyens développés par les parties à l'audience et dans les conclusions de l'employeur, ceux-ci ne comportant aucun moyen tiré de la qualité du signataire de la lettre informant la salariée de sa mutation ; qu'en relevant dès lors d'office, sans recueillir les observations préalables des parties, le moyen tiré de ce que le contrat de travail avait été irrégulièrement modifié dans la mesure où la lettre portant information de la décision de changement de lieu de travail avait été signée par le président du CHSCT, le juge des référés du conseil de prud'hommes a violé le principe du contradictoire, ensemble l'article 16 du code de procédure civile ;
2) ALORS QUE les juges du fond doivent répondre aux conclusions dont ils sont saisis et que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motif ; qu'en l'espèce, la SNC Lidl invoquait l'incompétence de la formation des référés du conseil de prud'hommes en l'absence d'urgence, Melle X... ayant été licenciée concomitamment à l'introduction de la demande de rappel de salaires (conclusions p. 5 § 9) ; que le conseil de prud'hommes a cependant condamné l'employeur sur le fondement de l'article R 1455-5 du code du travail à verser à la salariée un rappel de salaire pour la période ayant précédé son licenciement ; qu'en statuant ainsi, sans aucunement répondre au moyen de la SNC Lidl qui faisait valoir l'absence d'urgence, le juge des référés du conseil de prud'hommes a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3) ALORS QUE ce n'est qu'en l'absence de contestation sérieuse de l'employeur que la formation des référés peut ordonner toute mesure urgente à la demande du salarié, ou accorder à ce dernier une provision ; que se heurte à une contestation sérieuse la demande de rappel de salaire dont l'examen du bien-fondé suppose l'appréciation de la régularité de la mise en oeuvre d'une clause de mobilité ; qu'en l'espèce, il était constant que le contrat stipulait une clause de mobilité prévoyant la possibilité d'une mutation sur un autre magasin, sans avoir à recueillir l'accord du salarié, du moment que c'était dans un rayon de 25 km ; que pour affirmer que le droit de Mme X... à rappel de salaire n'était pas sérieusement contestable, le juge des référés n'a à aucun moment fait ressortir que la mutation décidée ne correspondait pas à cette prévision contractuelle ; qu'il a, différemment, relevé le CHSCT n'avait pas le pouvoir de décider de la mutation d'un salarié, décision relevant du ressort du seul employeur, et que le courrier de mutation était signé par le président du CHSCT ; qu'en se déterminant de la sorte, quand la mutation de Melle X..., décidée sur les préconisations du CHSCT, entrait dans les prévisions de sa clause de mobilité et avait été décidée par un représentant de l'employeur, peu important que, par erreur, après avoir indiqué son nom, il ait mentionné sa qualité de président du CHSCT, le juge des référés du conseil de prud'hommes a tranché une contestation sérieuse sur la validité de la mutation dont avait fait l'objet Mme X..., et a ce faisant violé les articles L. 1221-1, R.1455-5 et R.1455-7 du code du travail ;
4) ALORS QUE ne constitue pas une modification du contrat de travail, mais un simple changement des conditions de travail, la mutation du salarié correspondant aux stipulations contractuelles ; qu'en l'espèce, en affirmant, pour faire droit à la demande de rappel de salaire, que la modification du lieu de travail et dans le cadre d'un poste de caissière à temps partiel constitue une modification importante du contrat de travail, et qu'aucun avenant au contrat de travail modifiant le lieu de travail n'avait été signé par Mademoiselle X..., le juge des référés du conseil de prud'hommes a violé les articles L. 1221-1, R.1455-5 et R.1455-7 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-26532
Date de la décision : 11/12/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Pau, 10 août 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 déc. 2013, pourvoi n°12-26532


Composition du Tribunal
Président : M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.26532
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