LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses cinq branches, ci-après annexé :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 7 février 2012), que par un acte sous seing privé du 23 juin 1994, M. X... s'est porté caution solidaire des engagements souscrits par une société, dont il était le dirigeant, envers la banque Dupuy de Parseval (la banque), dans la limite de 500 000 francs (76 224,51 euros) ; que le même jour et par un acte séparé Mme X..., son épouse commune en biens, a souscrit le même engagement; que la société garantie ayant été placée en liquidation judiciaire le 18 septembre 2002, les époux X... ont spontanément remboursé la banque du montant de sa créance le 4 juillet 2003 ; que le 12 novembre 2008 les époux X... ont assigné la banque pour obtenir le remboursement de la moitié de la somme qu'ils avaient payée ;
Attendu que les époux X... font grief à l'arrêt de rejeter cette demande ;
Attendu, d'une part, que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a, par une appréciation souveraine des éléments de preuve soumis à son examen, estimé que Mme X... s'était engagée en qualité de caution solidaire, dans la limite de 500 000 francs (76 224,51 euros) ;
Attendu, d'autre part, que les époux X... ayant soutenu que l'engagement de Mme X... avait été vicié par l'erreur qu'elle avait commise sur la nature de l'engagement souscrit et, subsidiairement, par le dol, la cour d'appel, répondant par là-même aux conclusions invoquées, a décidé, à bon droit, que la prescription avait commencé à courir à compter du jour où elle avait exécuté son engagement dès lors que c'est à cette date qu'elle aurait dû connaître le vice allégué ;
Attendu, enfin, qu'il ne résulte ni de l'arrêt, ni des conclusions, que les époux X... aient soutenu, devant les juges du fond, ne pas avoir donné leur consentement exprès au cautionnement consenti par l'autre ; que, dès lors, la cour d'appel n'était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les époux X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande des époux X... et les condamne à payer à la banque Dupuy de Parseval la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six novembre deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils pour M. et Mme X...
Le moyen de cassation fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir rejeté la demande de M. et Mme X... de condamnation de la Banque DUPUY de PARSEVAL à leur payer la somme de 71 633 euros, ainsi que des dommages-intérêts en réparation de leur préjudice moral et financier,
Aux motifs que «contrairement à ce que soutiennent les époux X..., il résulte clairement des deux actes de caution souscrits séparément le 23 juin 1994 et de la lettre adressée à la banque le 26 juin 2003, qu'ils ont entendu s'engager distinctement, personnellement et solidairement à hauteur de 500 000 francs chacun (76 224,51 euros).
En effet, Mme Y... épouse X... a rempli de sa main la mention suivante «Bon pour caution solidaire à concurrence de la somme de cinq cent mille francs (500 000 F), en principal, intérêts frais et accessoires dont je déclare connaître le taux et les modalités». Les époux X... ne peuvent sérieusement soutenir que Mme X... a cru qu'elle consentait à l'engagement de caution de son époux commun en biens, conformément aux dispositions de l'article 1415 du code civil, alors que l'acte fait expressément référence, à de très nombreuses reprise, à sa qualité de caution solidaire de tous les engagements de la société Sisteme, aux modalités de cet engagement et aux conséquences de la défaillance de la débitrice garantie.De plus la banque justifie l'envoi des lettres d'information annuelle de la caution à Mme Y... épouse X..., en 2001, 2002, qui font référence à son engagement de caution à hauteur de la somme de 76 224,51 euros et des encours d'endettement de la société Sisteme.Suite à la liquidation judiciaire de la société Sisteme, M. et Mme X... ont proposé de régler le montant de la créance déclarée au passif d'un montant de 147 857,10 euros pour être libérés de « leurs engagements de cautions personnelles et solidaires ». En exécutant volontairement, spontanément, et sans aucune réserve, le 4 juillet 2003, les deux engagements de caution, afin d'en être libérés, les époux X... ont agi en toute connaissance de cause et ne sauraient valablement se prévaloir d'un paiement indu.L'action en nullité pour vices du consentement est soumise à la prescription quinquennale prévue par l'article 1304 du code civil.Les époux X... fixent le point de départ de la prescription au 16 mars 2007, date du courrier adressé à la banque aux termes duquel ils font état d'un paiement indu de 75 000 euros.Or, c'est au plus tard lors de l'exécution de l'engagement de caution de Mme Y... épouse X..., le 4 juillet 2003, qu'il convient de se placer puisque c'est à ce moment là que celle-ci était en mesure de découvrir les vices du consentement dont elle se prévaut.Mme Y... épouse X... n'a invoqué la nullité de son engagement de caution que le 28 juin 2010, soit après l'expiration du délai quinquennal. Une telle demande est donc prescrite.Surabondamment, et dans l'hypothèse où le point de départ du délai de prescription serait fixé en mars 2007, il convient de rappeler que l'erreur et le dol doivent s'apprécier au moment de l'engagement, soit en juin 1994. Les difficultés psychologiques alléguées concernent une période bien postérieure et, en tout état de cause, ne justifient pas de la réalité des réticences dolosives ou d'une quelconque erreur, alors même que l'acte de cautionnement et les écrits subséquents susvisés ne laissent planer aucun doute sur la nature et la portée de l'engagement souscrit par Mme Y... épouse X...» (arrêt p. 5 et 6) ;
Alors que, d'une part, le juge est tenu de répondre aux moyens invoqués par les parties dans leurs conclusions d'appel ; qu'en l'espèce, les époux X... ont soutenu qu'à la date à laquelle les actes litigieux ont été signés, rien ne justifiait, compte tenu du montant des dettes de la société SISTEME à l'égard de la banque et des sûretés déjà obtenues par cette dernière, la signature d'engagements cumulatifs par chacun d'eux, et qu'aucun d'eux ne détenait de patrimoine propre, de sorte que, comme l'avait retenu le tribunal, l'acte signé par Mme X... était nécessairement le consentement au cautionnement de son mari ; qu'en décidant que chacun des époux s'était engagé distinctement, personnellement et solidairement à hauteur de 500 000 Frs chacun, sans répondre aux conclusions relatives aux sûretés déjà obtenues et à l'absence de patrimoine propre de chaque époux, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors que, d'autre part, l'action en répétition d'une somme indûment payée est soumise à la prescription trentenaire ; que pour rejeter la demande de Monsieur et Madame X..., présentée en 2007 et ayant fait l'objet d'une assignation devant le tribunal en 2008, de condamnation de la Banque DUPUY de PARSEVAL à leur rembourser la somme de 71 633 ¿ qu'ils lui ont indûment payée en juillet 2003, la cour d'appel a retenu que leur action était prescrite, violant ainsi les articles 1304 et 2262 du code civil ;
Alors qu'en troisième lieu, le délai de l'action en nullité pour erreur relative à la portée d'un engagement court à compter du jour de la découverte de cette erreur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a décidé que c'était au plus tard lors de l'exécution de l'engagement de caution de Mme X... qu'il convenait de se placer car cette dernière était alors en mesure de découvrir les vices du consentement dont elle se prévalait ; qu'en se plaçant ainsi à la date à laquelle les vices du consentement étaient susceptibles d'être découverts, et non à la date de découverte de ces vices, la cour d'appel a violé l'article 1304 du code civil
Alors qu'en outre, l'absence d'information sur la portée de l'engagement d'une caution profane peut caractériser un dol commis par le créancier ; que dans ses conclusions d'appel, Mme X... a soutenu qu'elle n'avait jamais été informée sur le fait que son cautionnement pouvait s'ajouter à celui de son mari, et qu'elle était une personne profane non rompue aux affaires commerciales ; qu'en décidant qu'elle ne justifiait pas d'une réticence dolosive ou d'une erreur, sans répondre au moyen invoquant l'absence d'information par la banque, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors qu'enfin, chaque époux ne peut engager que ses biens propres et ses revenus, par un cautionnement ou un emprunt, à moins que ceux-ci n'aient été contractés avec le consentement exprès de l'autre conjoint qui, dans ce cas, n'engage pas ses biens propres ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a rejeté la demande de condamnation de la banque à rembourser aux époux X... la somme de 71.633 ¿ après avoir retenu qu'ils s'étaient engagés distinctement, personnellement et solidairement à hauteur de 500 000 Frschacun ; que les époux X... ont fait valoir qu'ils n'avaient aucun patrimoine propre ; que l'engagement de chacun d'entre eux impliquait donc le consentement exprès de l'autre ; qu'en rejetant la demande de remboursement des époux X..., sans constater que chacun d'eux avait donné un consentement exprès au cautionnement de l'autre, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1415 du code civil.