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06/11/2013 | FRANCE | N°12-17586

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 novembre 2013, 12-17586


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., soutenant avoir été engagée par Mme Y... en qualité d'employée de maison et pour garder les enfants de cette dernière, a saisi la juridiction prud'homale afin de faire reconnaître l'existence d'un contrat de travail et obtenir le paiement de diverses sommes et la remise de différents documents ;
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes, alors, selon le moyen, qu'en s'abstenan

t de rechercher, comme l'y avait pourtant invitée Mme X..., si la somme...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., soutenant avoir été engagée par Mme Y... en qualité d'employée de maison et pour garder les enfants de cette dernière, a saisi la juridiction prud'homale afin de faire reconnaître l'existence d'un contrat de travail et obtenir le paiement de diverses sommes et la remise de différents documents ;
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes, alors, selon le moyen, qu'en s'abstenant de rechercher, comme l'y avait pourtant invitée Mme X..., si la somme de 35 euros que lui avait versée Mme Y... au mois d'octobre 2009, et dont la cour d'appel a constaté l'existence, n'était pas la contrepartie d'un travail salarié effectué par Mme X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'entrer dans le détail de l'argumentation des parties, a estimé que la preuve n'était pas rapportée de l'existence d'un contrat de travail au cours de la période du 12 octobre au 30 décembre 2009 et a ainsi légalement justifié sa décision ;
Mais sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 1221-1 du code du travail ;
Attendu que pour débouter Mme X... de ses demandes relatives à la période des 31 décembre 2009 et 1er janvier 2010, l'arrêt retient que Mme Y..., qui allait passer le réveillon à l'extérieur, a demandé à Mme X... de garder ses enfants et lui a payé une certaine somme, qu'il existe ainsi un travail et une rémunération, que toutefois le contrat de travail requiert un troisième élément, le lien de subordination défini comme l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné, qu'il n'est pas contesté que Mme X... a pris la décision de garder les enfants chez elle le 1er janvier 2009 sans en référer préalablement à Mme Y... ne faisant que l'en aviser a posteriori pour qu'elle vienne les reprendre chez elle, que cette circonstance démontre l'absence de lien de subordination ;

Qu'en statuant ainsi, par un motif inopérant, alors qu'elle avait relevé que Mme Y... avait confié la garde de ses enfants à Mme X... moyennant le paiement d'une rémunération pendant la période considérée, ce dont il résultait l'existence d'un contrat de travail, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur la deuxième branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute Mme X... de ses demandes relatives à la période du 31 décembre 2009 au 1er janvier 2010, l'arrêt rendu le 19 mai 2011, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande de la SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six novembre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, avocat aux Conseils, pour Mme X....
Le moyen reproche à l'arrêt partiellement confirmatif attaqué D'AVOIR retenu l'absence de contrat de travail liant madame Y... à madame X... et d'avoir en conséquence débouté cette dernière de ses demandes ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE madame Y... tient un salon d'antiquités et a trois jeunes enfants ; qu'elle reconnaît avoir demandé à madame X... de les garder du 31 décembre 2009 à 8 heures 00 au 1er janvier 2010 à 16 heures 00 ; que pour la période antérieure, elle conteste que celle-ci ait eu la moindre activité pour son compte, alors que, selon madame X..., elle a fait du ménage et a gardé les enfants, deux fois par semaine, de 13 heures 30 à 15 heures 30 : les 12, 15, 21, 23, 26 et 29 octobre 2009, les 2, 5, 9, 12, 16, 19, 23, 26 novembre 2009, les 3, 7, 10, 14 et 17 décembre 2009, puis du 19 à 19 heures 00 jusqu'au 24 à 12 heures 00, et enfin du 26 à 12 heures 00 au 1er janvier 2010 à 16 heures 30 ; que c'est à tort que le conseil de prud'hommes a appliqué le principe de la preuve partagée pour statuer sur le rappel de salaire pendant la période revendiquée ; que c'est en effet l'existence même du contrat qui est contestée pour celle allant jusqu'au 30 décembre 2009 ; que la charge de la preuve repose donc exclusivement sur madame X... ; qu'en définitive, il convient de distinguer deux périodes : du 12 octobre au 30 décembre 2009, les 31 décembre 2009 et 1er janvier 2010 ; que pour la première période madame X... produit trois attestations ; que celle de madame Z... est totalement référendaire : elle ne fait que rapporter ce que lui a dit madame X... ; que celle de madame A... ne sera pas retenue pour les trois raisons suivantes : elle est aussi référendaire, ce témoin ne faisant que rapporter ce que lui disait madame X..., qu'il s'agit de la belle-fille en réalité la fille de celle-ci puisqu'elle dit « madame X... m'a téléphoné à la clinique le 23 décembre 2009 pour prendre de mes nouvelles et apprendre la naissance de son petit-fils », que la signature de l'attestation est très différente de celle figurant sur la carte d'identité du témoin, établie en 2004, alors qu'elle était déjà mariée à monsieur A... ; qu'il reste celle de madame B... qui est aussi référendaire, sauf lorsqu'elle dit qu'elle a accompagné madame X... chez madame Y... à partir du 19 décembre au soir, ajoutant qu'elle a rendu trois fois visite à celle-ci au domicile de son employeur, qui n'était pas là ; qu'elle produit encore une annonce qu'elle aurait écrit le 9 septembre 2009 pour offrir ses services en ménage et garde d'enfants, mais qui ne prouve pas une embauche par madame Y... ; qu'elle produit encore : un carnet sur lequel elle a noté des jours, des heures et des sommes reçues, la photo des trois enfants de l'appelante ; que ces dernières pièces ne sont pas probantes : le carnet est unilatéral, elle a pu prendre la photo le 31 décembre ou le 1er janvier qu'elle fournit enfin son relevé téléphonique prouvant qu'elle est entrée en communication avec le 06. 07. 60. 56. 57 qui est le numéro de portable de madame Y..., un certain nombre de fois entre le 20 octobre 2009 et le 6 janvier 2010, correspondant aux jours de travail revendiqués ; que madame Y... produit quant à elle les attestations de madame C... qui dit que lorsqu'elle s'est rendue à Tours chez madame Y..., elle n'a jamais vu madame X..., mais mademoiselle D..., une jeune fille au pair qui s'occupe des enfants : mademoiselle Isabelle D..., une étudiante cubaine qui habite chez elle et qui dit s'occuper des enfants quand madame Y... est absente, mademoiselle de E...
F..., amie de la précédente, qui dit qu'elle est souvent allée lui rendre visite à compter d'octobre 2009 et qu'elle n'a jamais vu une autre personne s'occuper des enfants ; qu'en outre, il résulte des horaires d'ouverture du magasin d'antiquités de madame
Y...
qu'ils vont du mardi au samedi ; qu'il est donc fermé le lundi ; que madame X... dit qu'elle travaillait deux jours par semaine, dont le lundi qu'une bonne moitié des jours revendiqués sont des lundis ; qu'il est donc étonnant que madame Y... ait fait appel à une femme de ménage garde d'enfants le jour où la fermeture de son magasin lui permettait de vaquer elle-même à ses occupations ; qu'en outre, madame X... soutient qu'en octobre il lui était dû 105, 72 euros alors qu'elle n'a perçu que 35 euros, un solde de 70, 72 euros lui étant dû ; que là aussi, il est surprenant qu'elle ait continué de travailler pour un employeur qui, dès le premier mois, se serait révélé être un mauvais payeur ; que si l'on ajoute que mademoiselle D... était à même de s'occuper des enfants, et que madame X... avait fait la connaissance de madame Y... au magasin, ce qui peut expliquer les appels téléphoniques, il existe un doute sur l'existence du contrat de travail pendant cette période ; que le rappel sera donc rejeté ; sur la deuxième période, que madame Y..., qui allait passer le réveillon chez madame C... et mademoiselle D... étant absente du 26 décembre au 2 janvier, a demandé à madame X... de garder ses enfants pendant celle-ci, et lui a payé 350 euros par virement du 7 janvier 2010 ; qu'il existe ainsi un travail (la garde des petits) et une rémunération (les 350 euros) ; que toutefois le contrat de travail requiert un troisième élément, le lien de subordination, défini comme l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que le conseil de prud'hommes l'a déduit du fait que madame X... n'a pas le statut de travailleur indépendant ; que cela est vrai, mais ne signifie pas qu'il s'agissait nécessairement d'un contrat de travail, pouvant aussi bien s'agir d'une prestation de services ; qu'il n'est pas contesté que madame X... a pris la décision de garder les enfants chez elle le 1er janvier 2009, sans en référer préalablement à madame Y..., ne faisant que l'en aviser a posteriori pour qu'elle vienne les reprendre chez elle ; que cette circonstance démontre l'absence de lien de subordination ; qu'il n'y a donc pas non plus de contrat de travail pendant cette deuxième période ; que les réclamations seront rejetées (arrêt, p. 3 et p. 4, § 1 à 10) ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE madame Isabelle Y... conteste avoir engagé madame Dominique X... pour la période allant du 12 octobre au 30 décembre 2009, mais reconnaît un travail occasionnel du 31 décembre 2009 à 8 heures au 1er janvier 2010 à 16 heures ; que madame Dominique X... communique un carnet manuscrit où est indiqué les jours et heures de travail chez madame Isabelle Y... ; qu'elle communique aussi des attestations de mesdames B... et Z... qui seront successivement analysées, l'attestation que madame Dominique X... se fait à elle-même ne pouvant bien évidement être retenue ; que l'attestation de madame Z... ne peut être retenue puisque celle-ci ne fait que répéter les dires de madame Dominique X... : elle est référendaire ; que l'attestation de madame B... ne peut être retenue aussi pour les mêmes raisons, puisqu'elle n'a pu être directement témoin du travail de madame X... ; que reste le carnet manuscrit de madame Dominique X..., qui n'est pas un élément pouvant à lui seul attester son activité chez madame Isabelle Y..., la demanderesse ne pouvant se faire preuve à elle-même ; que madame Dominique X... sera donc déboutée de ses demandes de rappel de salaires pour les mois d'octobre à décembre 2009 (jugement, p. 6, § 2 à 8) ;
ALORS, D'UNE PART, QU'une relation de travail est caractérisée lorsqu'une personne s'engage à fournir un travail rémunéré à une autre personne qui s'oblige à exécuter celui-ci en respectant les instructions qui lui sont données ; que la cour d'appel ayant constaté que le soir du réveillon de l'année 2009, madame X..., qui ne bénéficiait pas du statut de travailleur indépendant, avait gardé les enfants de madame Y... pendant une plage horaire et pour une rémunération fixées par celle-ci, ne pouvait exclure l'existence d'un contrat de travail par la seule considération que le 1er janvier 2010 madame X... aurait pris la décision de garder les enfants de madame Y... chez elle sans en référer à cette dernière ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article L. 1221-1 du code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en affirmant que madame X... aurait pris la décision de garder les enfants de madame Y... chez elle sans en référer à cette dernière, pour en déduire l'absence de lien de subordination entre elles, sans préciser d'où elle tirait cette affirmation, la cour d'appel a méconnu l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS, ENFIN, QU'en s'abstenant de rechercher, comme l'y avait pourtant invitée madame X..., si la somme de 35 euros que lui avait versée madame Y... au mois d'octobre 2009, et dont la cour d'appel a constaté l'existence, n'était pas la contrepartie d'un travail salarié effectué par madame X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221- 1du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-17586
Date de la décision : 06/11/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 19 mai 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 nov. 2013, pourvoi n°12-17586


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.17586
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