LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la société G4S Aviation Security France de son désistement du pourvoi incident ;
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2141-5 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé en qualité d'agent d'exploitation à compter du 25 mai 1994 par la société International Aviation Security, aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la société G4S Aviation Security France ; qu'estimant être victime d'une discrimination liée au mandat de délégué syndical qu'il exerce depuis 1998, il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande pour discrimination syndicale ;
Attendu que, pour le débouter de sa demande, l'arrêt retient que l'analyse du tableau versé aux débats par le salarié révèle que si certains salariés, bénéficiant du statut de salarié protégé, n'ont également pas connu d'évolution de leur carrière, tel un salarié engagé en 1994 comme agent de sécurité, toujours coordinateur, de même que deux autres salariés protégés engagés en 1994 et en 1997, en revanche deux autres salariés ont été promus ;
Qu'en statuant ainsi, alors, d'une part, que l'existence d'une discrimination n'implique pas nécessairement une comparaison avec la situation d'autres salariés, d'autre part, que la seule circonstance que des salariés exerçant des mandats syndicaux aient pu bénéficier de mesures favorables n'est pas de nature à exclure en soi l'existence de toute discrimination à l'égard d'autres salariés, et alors qu'il résultait de ses constatations que le salarié produisait notamment une lettre en date du 26 octobre 2005 adressée à l'employeur, au terme de laquelle il faisait valoir qu'il était le seul parmi les coordinateurs en poste à cette fonction en 1997 à ne pas avoir été nommé chef d'équipe, alors même qu'il n'avait fait l'objet d'aucune sanction, ainsi qu'un tableau comparatif des dates de passage de vingt-cinq salariés, promus du poste de coordinateur à celui de chef d'équipe, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations dont il résultait des éléments de nature à laisser supposer l'existence d'une discrimination, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de ses demandes relatives à la discrimination, tant de rappel de salaire et congés payés afférents que de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 31 mai 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société G4S Aviation Security France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société G4S Aviation Security France à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente octobre deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Gaschignard, avocat aux Conseils, pour M. X..., demandeur au pourvoi principal
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de ses demandes relatives à la discrimination, tant de rappel de salaire et congés payés afférents que de dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS QUE M. X... fait valoir qu'il a subi une discrimination syndicale en ce que sa carrière a cessé de progresser à compter de sa désignation en tant que délégué syndical en 1998, sa dernière promotion datant de 1997 ; QUE pour étayer ses affirmations, M. X... produit notamment une lettre de son conseil faisant valoir qu'il est le seul parmi les coordinateurs en poste à cette fonction en 1997 à ne pas avoir été nommé chef d'équipe, ainsi qu'un tableau comparatif des dates de passage de vingt-cinq salariés passés du poste de coordinateur à celui de chef d'équipe ; que la SASU Aviation Security invoque l'absence de corrélation entre l'évolution professionnelle de M. X... et ses mandats et fait valoir que certains salariés ont fait l'objet de promotions alors même qu'ils étaient salariés protégés ; que l'analyse du tableau versé aux débats par Monsieur X... révèle que si certains salariés, bénéficiant du statut protégé n'ont également pas connu d'évolution de leur carrière, tels M. Y..., engagé comme agent de sécurité en 1994, toujours coordinateur, de même que M. Z... également engagé en 1994, Mme A..., engagée en 1997, d'autres comme M. B..., ou M. C... ont été promus ; qu'en l'état des explications et pièces fournies, la matérialité d'éléments de fait prévis et concordants laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte au sens des textes ci-dessus n'est pas démontrée ;
1° ALORS QUE dès lors que le salarié apporte des éléments de nature à laisser supposer l'existence d'une discrimination prohibée, il appartient à l'employeur de prouver que ses décisions étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en déboutant le salarié de ses demande au motif que les éléments de fait produits par celui-ci n'auraient pas été suffisamment « précis et concordants » la cour d'appel a violé les articles L. 1334-1 du code du travail et 1315 du code civil ;
2° ALORS QUE le salarié faisait valoir qu'il n'avait bénéficié d'aucune promotion depuis dix ans, que vingt-cinq autres salariés avaient été promus au cours de cette période du grade de coordinateur à celui de chef d'équipe dont quinze au cours des seules années 2000 à 2004, la plupart du temps entrés après lui dans l'entreprise, que cinq représentants syndicaux avaient quitté cette dernière ; qu'en déboutant le salarié de ses demandes au motif inopérant que deux salariés protégés avaient bénéficié d'une promotion ¿ ce dont pouvait tout au plus résulter que tous les salariés protégés n'étaient pas nécessairement logés à la même enseigne¿ et sans comparer l'évolution de la carrière du salarié avec celle de ses collègues recrutés aux mêmes fonctions que lui ni rechercher si l'absence de toute promotion pendant dix ans n'était pas de nature à laisser supposer une discrimination à raison de l'exercice de son mandat syndical, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1332-1 et L. 1134-1 du code du travail ;
3° ALORS au surplus QUE le salarié faisait valoir que cinq autres salariés protégés avaient préféré quitter l'entreprise faute d'espérer encore une évolution de leur carrière cependant que les deux salariés protégés dont l'employeur vantait la situation avaient eux-mêmes été victimes de discrimination pour n'avoir bénéficié que très tardivement de promotions; qu'en écartant toute discrimination possible au seul constat que ces deux derniers salariés avaient bénéficié d'une promotion sans rechercher si ces salariés avaient été promus de façon normale, au terme de la durée moyenne d'exercice des mêmes fonctions par l'ensemble des salariés, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1332-1 et L. 1134-1 du code du travail.