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24/10/2013 | FRANCE | N°12-26162

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 24 octobre 2013, 12-26162


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 25 mai 2012), que M. X..., alors âgé de 24 ans, a été opéré le 24 octobre 1990 dans un centre de traumatologie et d'orthopédie, dépendant de l'union pour la gestion des établissements des caisses d'assurance maladie d'Alsace ; qu'à la suite de cette intervention, il a été victime d'une encéphalite anoxique post-anesthésique par arrêt cardio-respiratoire, entraînant de graves séquelles sous forme de troubles neuro-psychologiques, avec impossibilité d'exe

rcer une activité professionnelle et nécessité de l'assistance d'une tierce...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 25 mai 2012), que M. X..., alors âgé de 24 ans, a été opéré le 24 octobre 1990 dans un centre de traumatologie et d'orthopédie, dépendant de l'union pour la gestion des établissements des caisses d'assurance maladie d'Alsace ; qu'à la suite de cette intervention, il a été victime d'une encéphalite anoxique post-anesthésique par arrêt cardio-respiratoire, entraînant de graves séquelles sous forme de troubles neuro-psychologiques, avec impossibilité d'exercer une activité professionnelle et nécessité de l'assistance d'une tierce personne dans la vie quotidienne ; qu'à cette époque, il était salarié de la société Henkel France, qui avait souscrit pour ses employés une assurance de prévoyance de groupe auprès de la société GAN, aux droits de laquelle vient la société Groupama GAN vie (l'assureur) ; que M. X..., assisté de son épouse, Mme Y... en qualité de curatrice, ainsi que Mme Y..., agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de représentante légale de leur fils mineur Eric X..., ont saisi un tribunal aux fins d'indemnisation de leurs préjudices ;
Attendu que les deux premières branches du premier moyen ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi :
Sur la troisième branche du premier moyen, telle que reproduite en annexe :
Attendu que l'assureur fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à l'imputation des indemnités journalières versées à M. X... sur les sommes versées à ce dernier en réparation de son préjudice ;
Mais attendu que le rejet des deux premières branches du moyen rend inopérante la troisième branche de celui-ci, en ce qu'il se fonde sur un motif surabondant ;
Et sur le second moyen :
Attendu que l'assureur fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à l'imputation des indemnités journalières versées à M. X... sur les sommes versées à ce dernier en réparation de son préjudice, alors, selon le moyen :
1°/ que les indemnités journalières de maladie et les prestations d'invalidité versées par les sociétés d'assurance régies par le code des assurances sont réputées avoir le caractère de prestations indemnitaires ; qu'en l'espèce, il n'était pas contesté que l'assureur avait versé à M. X... des indemnités journalières afin de compenser la privation de revenus consécutive à son incapacité temporaire, ce qui fondait son recours subrogatoire ; qu'en décidant que les indemnités journalières versées par l'assureur ne revêtaient pas un caractère indemnitaire, au motif erroné que les dispositions de la loi du 5 juillet 1985 ne concernaient que les victimes d'accident de la circulation, la cour d'appel a violé les articles 28 et 29 de la loi du 5 juillet 1985 et L. 131-2 du code des assurances ;
2°/ qu'une prestation d'assurance, même fixée selon des bases prédéterminées, n'est pas nécessairement forfaitaire et revêt un caractère indemnitaire dès lors qu'elle est dépendante, dans ses modalités de calcul et d'attribution, de celles de la réparation du préjudice selon le droit commun ; que la perte de revenus actuels est déterminée selon la perte effective de revenus de la victime pendant la durée de son incapacité temporaire ; qu'en l'espèce l'assureur faisait valoir que les conditions particulières du contrat d'assurance prévoyaient que le calcul des prestations servies en cas d'incapacité temporaire était fonction de la situation propre de l'assuré, notamment en ce qu'elles n'avaient pas vocation à lui procurer de revenus supplémentaires à ses revenus d'activité ; que la cour d'appel a constaté que les indemnités journalières versées à M. X... avaient été calculées en se fondant sur le salaire de base de l'assuré, sous déduction des prestations de la sécurité sociale et avec un plafonnement ; qu'en décidant néanmoins que les indemnités journalières litigieuses étaient de nature forfaitaire, tandis qu'il résultait de ses constatations qu'elles avaient été calculées sur des bases prédéterminées, selon des modalités de calcul identiques à celle du droit commun, la cour d'appel a violé l'article L. 131-2 du code des assurances ;
Mais attendu que l'arrêt retient que les conditions générales du contrat indiquent expressément (article 6) que l'indemnité a un caractère forfaitaire, qu'elle ne tient compte ni de l'âge ni de la profession de l'assuré ; que les conditions particulières précisent, en ce qui concerne l'incapacité temporaire, que le montant des indemnités journalières est de 80 % de la trois cent soixante cinquième partie du traitement de base, sous déduction des prestations de la sécurité sociale, avec majoration éventuelle de 5 % par enfant à charge plafonnée à 10 %, le traitement de base étant lui-même défini comme le salaire brut de l'assuré, limité au montant du salaire plafond annuel de la Convention collective nationale des cadres du 14 mars 1947, ce dont il résulte que les modalités de calcul sont indépendantes de la réparation du préjudice de l'assuré évalué en droit commun ;
Que de ces constatations et énonciations, procédant de son appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a exactement déduit que les prestations litigieuses étaient forfaitaires, et donc exclusives de tout recours subrogatoire ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Groupama GAN vie aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Groupama GAN vie, la condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin la somme de 2 500 euros, aux consorts X... et à Mme Y..., ès qualités, la somme globale de 3 000 euros et à l'UGECAM d'Alsace la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre octobre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils, pour la société Groupama GAN vie
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société Groupama Gan Vie de sa demande tendant à l'imputation des indemnités journalières versées à M. Damien X... sur les sommes versées à ce dernier en réparation de son préjudice ;
AUX MOTIFS PROPRES QU' aux termes de l'article 17 des conditions générales du contrat d'assurance-groupe du Gan, l'assuré conserve intégralement le bénéfice de son recours à l'encontre des tiers responsables de l'accident, ce qui exclut nécessairement un recours subrogatoire par l'assureur qui devrait s'imputer sur l'indemnisation allouée à l'assuré ; qu'il est vrai que cette renonciation à un recours subrogatoire ne vise expressément que les prestations versées par suite d'infirmité permanente ; qu'en tout état de cause, les dispositions de la loi du 5 juillet 1985 invoquées par le Gan ne concernent que les victimes d'accidents de la circulation, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, s'agissant d'une faute médicale (cf. arrêt, p. 5 § 6 à 8) ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU' il résulte de l'article 17 des conditions générales du contrat d'assurance-groupe qu' « en cas d'accident donnant lieu au paiement de l'indemnité prévue à l'article 6 ci-dessus par suite d'infirmité permanente ou partielle, l'assuré (¿) conserve intégralement le bénéfice de son recours à l'encontre des tiers responsables de l'accident » ; qu'il résulte de cette clause que la compagnie a renoncé à un recours contre un tiers concernant les indemnités versées au titre ci-dessus et donc que l'assuré en conserve l'entier bénéfice et aucune des dispositions des conditions particulières invoquées par elle ne contredit les énonciations de la clause cidessus (cf. jugement, p. 4 § 8 et 9) ;
1°) ALORS QUE nul ne peut valablement renoncer à un droit d'ordre public avant qu'il ne soit acquis ; que l'assureur dispose d'un recours subrogatoire d'ordre public pour les indemnités journalières de maladie et les prestations d'invalidité qu'il a versées à son assuré ; qu'en l'espèce, la société Groupama Gan Vie faisait valoir qu'elle disposait, en vertu de la loi, d'un recours subrogatoire au titre des indemnités versées à M. X... pour son incapacité temporaire et qu'elle n'avait pas renoncé à ce recours (concl., p. 4) ; qu'en décidant que la société Gan avait renoncé à son recours subrogatoire par la stipulation d'une renonciation à recours dans l'article 17 de l'annexe aux conditions générales du contrat d'assurance groupe souscrit en 1983 par la société Henkel France, tandis que cette renonciation à une prérogative d'ordre public n'avait pu intervenir par anticipation, la cour d'appel a violé l'article 29 de la loi du 5 juillet 1985 ;
2°) ALORS QUE, EN TOUTE HYPOTHESE, l'article 17 de l'annexe aux conditions générales du contrat d'assurance groupe prévoyait qu'« en cas d'accident donnant lieu au paiement de l'indemnité prévue à l'article 6 cidessus par suite d'infirmité permanente totale ou partielle, l'assuré ou ses ayants droit conservent intégralement le bénéfice de leur recours à l'encontre des tiers responsables de l'accident » ; que cette disposition contractuelle, à supposer qu'elle caractérise une renonciation à recours de l'assureur, ne concernait que l'indemnité versée au titre de l'incapacité permanente, et non au titre de l'incapacité temporaire ; qu'en déboutant la société Gan de son recours subrogatoire au motif que l'article 17 de l'annexe aux conditions générales excluait nécessairement un tel recours, la cour d'appel a dénaturé cette clause claire et précise du contrat et violé l'article 1134 du code civil ;
3°) ALORS QUE le chapitre II de la loi du 5 juillet 1985, relatif aux « recours des tiers payeurs contre les personnes tenues à réparation d'un dommage résultant d'une atteinte à la personne », s'applique aux relations entre le tiers payeur et la personne tenue à réparation d'un dommage résultant d'une atteinte à la personne quelle que soit la nature de l'événement ayant occasionné ce dommage ; qu'en énonçant que « les dispositions de la loi du 5 juillet 1985 invoquées par le Gan ne concernent que les victimes d'accident de la circulation, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, s'agissant d'une faute médicale » (arrêt, p. 5 § 8), pour décider que la société Groupama Gan Vie ne pouvait pas exercer de recours subrogatoire fondé sur l'article 29 de la loi du 5 juillet 1985, la cour d'appel a violé l'article 28 de cette loi.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
:
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société Groupama Gan Vie de sa demande tendant à l'imputation des indemnités journalières versées à M. Damien X... sur les sommes versées à ce dernier en réparation de son préjudice ;
AUX MOTIFS QU' aux termes de l'article L. 131-2 du code des assurances, en matière d'assurance de personnes, l'assureur ne peut être subrogé dans les droits du cocontractant contre le tiers responsable que pour le remboursement des prestations contractuelles à caractère indemnitaire ; que les conditions générales du contrat Gan indiquent (article 6) que l'indemnité a un caractère forfaitaire, sans tenir compte de l'âge ni de la profession de l'assuré ; que les conditions particulières précisent en ce qui concerne l'incapacité temporaire que le montant des indemnités journalières est fixé à 80% de la 365ème partie du traitement de base, sous déduction des prestations de la sécurité sociale, avec majoration éventuelle de 5% par enfant à charge plafonnée à 10%, le traitement de base étant lui-même défini comme le salaire brut de l'assuré, limité au montant du salaire plafond annuel de la convention collective nationale des cadres du 14 mars 1947 ; qu'il en résulte que les modalités de calcul sont indépendantes de la réparation du préjudice de l'assuré évalué en droit commun et que les prestations versées par le Gan ont incontestablement un caractère forfaitaire et non indemnitaire (arrêt, p. 5 § 9 à 11 et p. 6 § 1) ;
1°) ALORS QUE les indemnités journalières de maladie et les prestations d'invalidité versées par les sociétés d'assurance régies par le code des assurances sont réputées avoir le caractère de prestations indemnitaires ; qu'en l'espèce, il n'était pas contesté que la société Groupama Gan Vie avait versé à M. X... des indemnités journalières afin de compenser la privation de revenus consécutive à son incapacité temporaire, ce qui fondait son recours subrogatoire ; qu'en décidant que les indemnités journalières versées par la compagnie Gan ne revêtaient pas un caractère indemnitaire, au motif erroné que les dispositions de la loi du 5 juillet 1985 ne concernaient que les victimes d'accident de la circulation, la cour d'appel a violé les articles 28 et 29 de la loi du 5 juillet 1985 et L. 131-2 du code des assurances ;
2°) ALORS QUE, EN TOUTE HYPOTHESE, une prestation d'assurance, même fixée selon des bases prédéterminées, n'est pas nécessairement forfaitaire et revêt un caractère indemnitaire dès lors qu'elle est dépendante, dans ses modalités de calcul et d'attribution, de celles de la réparation du préjudice selon le droit commun ; que la perte de revenus actuels est déterminée selon la perte effective de revenus de la victime pendant la durée de son incapacité temporaire ; qu'en l'espèce, la société Groupama Gan Vie faisait valoir que les conditions particulières du contrat d'assurance prévoyaient que le calcul des prestations servies en cas d'incapacité temporaire était fonction de la situation propre de l'assuré, notamment en ce qu'elles n'avaient pas vocation à lui procurer de revenus supplémentaires à ses revenus d'activité (concl., p. 5 § 8) ; que la cour d'appel a constaté que les indemnités journalières versées à M. X... avaient été calculées en se fondant sur le salaire de base de l'assuré, sous déduction des prestations de la sécurité sociale et avec un plafonnement (arrêt, p. 5 § 11) ; qu'en décidant néanmoins que les indemnités journalières litigieuses étaient de nature forfaitaire, tandis qu'il résultait de ses constatations qu'elles avaient été calculées sur des bases prédéterminées, selon des modalités de calcul identiques à celle du droit commun, la cour d'appel a violé l'article L. 131-2 du code des assurances.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 12-26162
Date de la décision : 24/10/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 25 mai 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 24 oct. 2013, pourvoi n°12-26162


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Baraduc et Duhamel, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.26162
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