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16/10/2013 | FRANCE | N°12-11971

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 octobre 2013, 12-11971


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué statuant en référé (Amiens, 15 novembre 2011), qu'engagé le 3 juillet 2002 par la société Saverglass, M. X..., qui exerçait en dernier les fonctions de préparateur écran, a été licencié pour faute grave par une lettre du 11 février 2011 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes tendant à obtenir sa réintégration sous astreinte et le paiement des salaires dus depuis la mise à pied conservatoire, jusqu'à l

a réintégration, alors, selon le moyen :
1°/ que l'autorisation administrative de li...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué statuant en référé (Amiens, 15 novembre 2011), qu'engagé le 3 juillet 2002 par la société Saverglass, M. X..., qui exerçait en dernier les fonctions de préparateur écran, a été licencié pour faute grave par une lettre du 11 février 2011 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes tendant à obtenir sa réintégration sous astreinte et le paiement des salaires dus depuis la mise à pied conservatoire, jusqu'à la réintégration, alors, selon le moyen :
1°/ que l'autorisation administrative de licenciement est obligatoire lorsque le salarié a fait la preuve que l'employeur a eu connaissance de l'imminence de sa candidature aux élections de délégués du personnel ou de membres du comité d'entreprise, avant que le candidat ait été convoqué à l'entretien préalable au licenciement ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que la procédure de licenciement avait été engagée le 4 février 2011, date de la convocation à l'entretien préalable, au titre de faits qui s'étaient déroulés le 17 décembre 2010, soit près de deux mois auparavant, et ce, alors que le licenciement a été prononcé pour faute grave le 11 février, et qu'en outre, d'une part, le 9 février précédent, l'employeur avait informé les représentants des syndicats représentatifs de l'organisation prochaine des élections professionnelles, d'autre part, le protocole d'accord électoral avait été signé le 22 février, et enfin, la liste des candidats présentés par la CGT le 15 mars comportait le nom de M. X... malgré son licenciement ; qu'il résulte en outre de l'arrêt que la lettre de licenciement avait reproché au salarié d'avoir « pris publiquement à partie de façon véhémente et agressive un directeur de division et un responsable de production et de développement et d'avoir ainsi mis en cause de manière agressive et irrespectueuse l'autorité et la probité de sa hiérarchie » ; que la lettre de licenciement, produite aux débats, qui fixe les termes du litige, révèle que l'employeur reprochait à M. X... d'avoir, d'une part, pour la « énième fois, remis en question les modalités de calcul de l'intéressement », d'avoir également parlé «d'injustice», les salariés du secteur Parachèvement étant susceptibles de percevoir seulement 96 % du niveau d'intéressement possible, et, d'autre part, d'avoir exigé « que l'entreprise prenne en charge les coûts de garde lorsque les salariés étaient retardés par les mauvaises conditions climatiques » ; que la lettre de licenciement précise que ce n'était « pas la première fois que vous vous livrez à des débordements et des mises en causes agressives de la hiérarchie », et qu'ainsi, le 8 décembre 2010, le salarié avait « interpellé longuement (son) chef de secteur M. Y... en remettant en cause de manière virulente une fois de plus les modalités de calcul de l'intéressement » ; qu'en s'abstenant de rechercher s'il ne résultait pas de ces circonstances de fait, relevées tant par l'arrêt que par la lettre de licenciement, que l'employeur avait, à la date de la convocation à l'entretien préalable au licenciement, connaissance de l'imminence de la candidature de M. X... aux élections professionnelles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2411-7 et L. 2411-10 du code du travail ;
2°/ que le juge ne peut dénaturer les termes clairs et précis d'un écrit, en en omettant le contenu tout en ayant visé ce document dans sa décision ; qu'en considérant que le rapport de l'inspecteur du travail ne démontrait pas que l'employeur connaissait l'imminence de la candidature de M. X... aux élections dès lors qu'il concluait qu'il appartiendrait au juge de se prononcer sur la connaissance ou non par la direction de l'entreprise de l'imminence de la candidature du salarié, la cour d'appel, qui a ainsi omis les termes du rapport précité selon lesquels, en premier lieu, de nombreuses personnes de l'équipe de M. X... du secteur « parachèvement » étaient informées de l'adhésion de celui-ci, depuis septembre 2010, au syndicat CGT « et de son souhait d'être candidat aux élections des DP et du CE. Pour certains, il s'agit d'une rumeur connue de tous, pour d'autres, cela est une évidence », en deuxième lieu, que, selon ce qu'avait déclaré le supérieur hiérarchique aux « écrans », M. X... faisait de la propagande syndicale dans les ateliers et « à première vue, il se présente aux élections », en troisième lieu, qu'il lui était également reproché de passer trop de temps à discuter, pendant son temps de travail, avec les délégués syndicaux CGT de l'entreprise, et enfin que, « Compte tenu du nombre de personnes à élire pour le premier collège lors des prochaines élections du CE et des DP (huit titulaires et huit suppléants pour les DP ; cinq titulaires et cinq suppléants pour le CE), la candidature de M. X... à ces élections apparaît logique au regard de son activité syndicale dans l'établissement », la cour d'appel a dénaturé le rapport d'enquête de l'inspecteur du travail, en violation de l'article 1134 du code civil ;
3°/ que les exposants avaient soutenu, dans leurs conclusions d'appel, en s'appuyant sur le rapport d'enquête de l'inspecteur du travail ainsi que sur la lettre de licenciement précitée, qu'il existait un faisceau d'indices suffisant pour démontrer la connaissance de l'employeur de l'imminence de la candidature dès lors que le salarié participait aux activités revendicatives de la CGT depuis le mois de septembre 2007 en particulier en allant à des réunions de négociations avec la direction aux côtés de ce syndicat, qu'en outre, la lettre de licenciement lui avait reproché son activité revendicative relative à l'intéressement et aux frais de garde d'enfants pendant le travail était effectué jusqu'à la nuit, était retardé par les conditions climatiques, que, par ailleurs, le processus d'organisation des élections avait débuté peu après l'engagement de la procédure de licenciement et que M. X... avait été inscrit comme candidat sur les listes CGT, et qu'enfin, le licenciement avait été prononcé pour faute grave près de deux mois après les faits imputés à faute, ce dont il résultait que le motif du licenciement résidait, non pas dans ces faits, mais dans la volonté de l'employeur de déstabiliser la CGT juste avant les élections et d'empêcher M. X... de se présenter comme candidat, et ce d'autant plus que, le jour de son licenciement, une autre procédure de licenciement avait été engagée à l'encontre des deux délégués syndicaux de la CGT de l'entreprise, soit en lien, là encore, avec les prochaines élections ; que les exposants avaient enfin soutenu, dans leurs conclusions précitées, que les salariés qui avaient indiqué dans leurs attestations ne pas être au informé de l'imminence de la candidature de M. X... travaillaient en horaire décalé par rapport à lui, et que, par conséquent, il ne les croisait jamais, de sorte que leurs attestations ne pouvaient pas être prises en considération ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs en méconnaissance de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que c'est par une interprétation souveraine du rapport de l'inspecteur du travail que son ambiguïté rendait nécessaire et sans avoir à suivre les parties dans le détail de leur argumentation, que la cour d'appel a retenu que si certains de ses collègues affirmaient savoir que le salarié serait candidat aux élections professionnelles, aucun élément ne démontrait que l'employeur avait eu connaissance de l'imminence de sa candidature avant l'envoi de la convocation à l'entretien préalable de licenciement ; qu'elle a pu en déduire que le trouble manifestement illicite auquel le salarié lui demandait de mettre fin, n'était pas caractérisé ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes tendant à obtenir sa réintégration sous astreinte et le paiement

des salaires dus depuis la mise à pied conservatoire, jusqu'à la réintégration, alors, selon le moyen :
1°/ que selon l'article L. 1121-1 du code du travail, nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ; qu'un licenciement est nul lorsqu'il porte atteinte à une liberté fondamentale du salarié ; que tel est le cas lorsque le licenciement porte atteinte à l'exercice par le salarié de cette liberté, celui-ci jouissant, sauf abus, de sa liberté d'expression dans et hors de l'entreprise ; qu'en relevant que M. X... avait été en mesure d'user de sa liberté d'expression dès lors que la teneur de ses propos fondait le licenciement pour faute grave, quand il résultait de ces motifs que M. X... avait fait l'objet d'un licenciement sanctionnant l'exercice de sa liberté d'expression et que, par voie de conséquence, le salarié n'avait pu user librement de sa liberté d'expression, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations de fait, a violé les dispositions précitées de l'article L. 1121-1 du code du travail ;
2°/ que selon l'article R. 1455-6 du code du travail, la formation de référé peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; qu'en considérant qu'au stade de la procédure de référé, l'usage abusif ou non de la liberté d'expression reconnue à tout salarié en dehors comme dans le cadre du travail ne pouvait être caractérisé indépendamment de l'examen au fond de la légitimité du licenciement, quand il lui appartenait de rechercher, comme l'y invitait M. X... dans ses conclusions d'appel, si, compte tenu des termes de la lettre de licenciement qui lui avait reproché d'avoir critiqué l'employeur pour avoir calculé l'intéressement de façon défavorable aux salariés et pour avoir omis de prendre en charge les frais de garde d'enfants en cas de sortie tardive du travail pour des raisons climatiques, le licenciement n'avait pas sanctionné le libre exercice par le salarié de son droit d'expression, sous réserve d'un abus de sa part, lequel ne pouvait être caractérisé qu'en cas d'utilisation de termes excessifs, injurieux ou diffamatoires, la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé l'article R. 1455-6 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant constaté que le licenciement était fondé sur la manière véhémente et agressive dont le salarié avait publiquement exprimé certaines revendications et mis en cause la probité de sa hiérarchie, la cour d'appel, qui a ainsi fait ressortir un usage abusif de sa liberté d'expression par l'intéressé, a pu en déduire qu'aucun trouble manifestement illicite n'était caractérisé ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... et le syndicat CGT Saverglass aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize octobre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. X... et le syndicat CGT Saverglass
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté Monsieur X... (salarié) de sa demande tendant à ce qu'il soit ordonné à la société VERGLASS (employeur) de le réintégrer sous astreinte dans l'entreprise, et à ce que celle-ci soit condamnée à lui verser une provision sur le salaire dû au titre de la période allant du premier jour de la mise à pied conservatoire jusqu'à la date de la réintégration dans l'entreprise ;
AUX MOTIFS QUE Monsieur X..., engagé le 3 juillet 2002 par la société VERGLASS occupait en dernier lieu des fonctions de préparateur écran ; qu'il a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement fixé au 4 février 2011, par lettre du 26 janvier précédent, laquelle comportait la notification d'une mise à pied conservatoire ; que le salarié a été licencié pour faute grave par lettre du 11 février 2011, pour avoir, le 17 décembre 2011, alors qu'il se trouvait au restaurant d'entreprise en présence de nombreux salariés, pris publiquement à partie de façon véhémente et agressive un directeur de division et un responsable de production et de développement, avoir ainsi mis en cause de manière agressive et irrespectueuse l'autorité et la probité de sa hiérarchie ; que deux représentants du syndicat CGT ont remis à l'employeur le 3 février 2011 un courrier du 29 janvier 2011 par lequel ce syndicat demandait à l'inspecteur du travail l'ouverture d'une enquête sur les mesures de mise à pied conservatoire de Monsieur X... afin de prouver sa participation à la liste CGT des élections de la SA VERGLASS en tant que titulaire CE et DP ; que l'inspecteur du travail s'est rendu dans l'entreprise le 4 février suivant et qu'il a, le 7 février, communiqué à l'employeur le résultat de son enquête ; que le 9 février 2011 la société a informé les syndicats représentatifs dans l'entreprise de l'organisation prochaine des élections des délégués du personnel et du comité d'entreprise en mars et avril 2011 et les a invités à venir négocier le protocole préélectoral ; que le 18 février, s'est tenue la réunion de négociation du protocole préélectoral, signé par la majorité des syndicats le 22 février ; que le 15 mars, l'employeur a reçu la liste des candidats de la CGT pour le premier tour des élections du 28 mars, Monsieur X... figurant sur cette liste en tant que candidat délégué du personnel malgré son licenciement du 11 février ; que Monsieur X... soutient qu'il bénéficiait du statut protecteur prévu par les article L.2411-7 alinéa 2 et L.2411-10 alinéa 2 du Code du travail à raison de la connaissance par son employeur de l'imminence de sa candidature à ces élections avant sa convocation à l'entretien préalable au licenciement ;
QU'il « ne résulte, ni de l'enquête de l'inspecteur du travail concluant qu'il appartiendra au juge de se prononcer sur la connaissance ou non par la direction de l'entreprise de l'imminence de la candidature du salarié, ni des attestations de salariés en sens contraire produites par les deux parties, attestant au demeurant pour leur propre compte de leur connaissance ou non de la prochaine candidature de Monsieur X... à ces élections, alors que Monsieur Y... en sa qualité de cadre, chef d'équipe du salarié selon l'employeur, atteste ne pas avoir eu connaissance de l'intention du salarié de se présenter aux élections et que Monsieur Z... présenté par le salarié comme son supérieur hiérarchique n'atteste pas, l'employeur affirmant au demeurant le simple statut d'agent de maîtrise de l'intéressé, la connaissance évidente à ce stade de la procédure, par l'employeur ou ses représentants, de l'imminence de la candidature du salarié aux élections de délégués du personnel et du comité d'entreprise ne peut être retenue ; qu'en l'état et à défaut de tout autre élément susceptible d'établir la connaissance de l'imminence de la candidature de l'intéressé aux élections professionnelles, l'existence d'un trouble manifestement illicite découlant de la violation du statut protecteur découlant de la violation du statut protecteur dont aurait bénéficié l'intéressé aux élections professionnelles, de nature à justifie la compétence de la formation de référé prud'homale pour ordonner la réintégration du salarié, ne peut être considéré comme établi » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE l'autorisation administrative de licenciement est obligatoire lorsque le salarié a fait la preuve que l'employeur a eu connaissance de l'imminence de sa candidature aux élections de délégués du personnel ou de membres du comité d'entreprise, avant que le candidat ait été convoqué à l'entretien préalable au licenciement ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que la procédure de licenciement avait été engagée le 4 février 2011, date de la convocation à l'entretien préalable, au titre de faits qui s'étaient déroulés le 17 décembre 2010, soit près de deux mois auparavant, et ce, alors que le licenciement a été prononcé pour faute grave le 11 février, et qu'en outre, d'une part, le 9 février précédent, l'employeur avait informé les représentants des syndicats représentatifs de l'organisation prochaine des élections professionnelles, d'autre part, le protocole d'accord électoral avait été signé le 22 février, et enfin, la liste des candidats présentés par la CGT le 15 mars comportait le nom de Monsieur X... malgré son licenciement ; qu'il résulte en outre de l'arrêt que la lettre de licenciement avait reproché au salarié d'avoir « pris publiquement à partie de façon véhémente et agressive un directeur de division et un responsable de production et de développement et d'avoir ainsi mis en cause de manière agressive et irrespectueuse l'autorité et la probité de sa hiérarchie » ; que la lettre de licenciement, produite aux débats, qui fixe les termes du litige, révèle que l'employeur reprochait à Monsieur X... d'avoir, d'une part, pour la « énième fois, remis en question les modalités de calcul de l'intéressement », d'avoir également parlé « d'injustice », les salariés du secteur Parachèvement étant susceptibles de percevoir seulement 96 % du niveau d'intéressement possible, et, d'autre part, d'avoir exigé « que l'entreprise prenne en charge les coûts de garde lorsque les salariés étaient retardés par les mauvaises conditions climatiques » ; que la lettre de licenciement précise que ce n'était « pas la première fois que vous vous livrez à des débordements et des mises en causes agressives de la hiérarchie », et qu'ainsi, le 8 décembre 2010, le salarié avait « interpellé longuement (son) chef de secteur Monsieur Christophe Y... en remettant en cause de manière virulente une fois de plus les modalités de calcul de l'intéressement » ; qu'en s'abstenant de rechercher s'il ne résultait pas de ces circonstances de fait, relevées tant par l'arrêt que par la lettre de licenciement, que l'employeur avait, à la date de la convocation à l'entretien préalable au licenciement, connaissance de l'imminence de la candidature de Monsieur X... aux élections professionnelles, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.2411-7 et L.2411-10 du Code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE le juge ne peut dénaturer les termes clairs et précis d'un écrit, en en omettant le contenu tout en ayant visé ce document dans sa décision ; qu'en considérant que le rapport de l'inspecteur du travail ne démontrait pas que l'employeur connaissait l'imminence de la candidature de Monsieur X... aux élections dès lors qu'il concluait qu'il appartiendrait au juge de se prononcer sur la connaissance ou non par la direction de l'entreprise de l'imminence de la candidature du salarié, la Cour d'appel, qui a ainsi omis les termes du rapport précité selon lesquels, en premier lieu, de nombreuses personnes de l'équipe de Monsieur X... du secteur « parachèvement » étaient informées de l'adhésion de celui-ci, depuis septembre 2010, au syndicat CGT « et de son souhait d'être candidat aux élections des DP et du CE. Pour certains, il s'agit d'une rumeur connue de tous, pour d'autres, cela est une évidence », en deuxième lieu, que, selon ce qu'avait déclaré le supérieur hiérarchique aux « écrans », Monsieur X... faisait de la propagande syndicale dans les ateliers et « à 1ère vue, il se présente aux élections », en troisième lieu, qu'il lui était également reproché de passer trop de temps à discuter, pendant son temps de travail, avec les délégués syndicaux CGT de l'entreprise, et enfin que, « Compte tenu du nombre de personnes à élire pour le 1er collège lors des prochaines élections du CE et des DP (8 titulaires et 8 suppléants pour les DP ; 5 titulaires et 5 suppléants pour le CE), la candidature de Monsieur X... à ces élections apparaît logique au regard de son activité syndicale dans l'établissement », la Cour d'appel a dénaturé le rapport d'enquête de l'inspecteur du travail, en violation de l'article 1134 du Code civil ;
ET ALORS ENFIN QUE les exposants avaient soutenu, dans leurs conclusions d'appel, en s'appuyant sur le rapport d'enquête de l'inspecteur du travail ainsi que sur la lettre de licenciement précitée, qu'il existait un faisceau d'indices suffisant pour démontrer la connaissance de l'employeur de l'imminence de la candidature dès lors que le salarié participait aux activités revendicatives de la CGT depuis le mois de septembre 2007 en particulier en allant à des réunions de négociations avec la direction aux côtés de ce syndicat, qu'en outre, la lettre de licenciement lui avait reproché son activité revendicative relative à l'intéressement et aux frais de garde d'enfants pendant le travail était effectué jusqu'à la nuit, était retardé par les conditions climatiques, que, par ailleurs, le processus d'organisation des élections avait débuté peu après l'engagement de la procédure de licenciement et que Monsieur X... avait été inscrit comme candidat sur les listes CGT, et qu'enfin, le licenciement avait été prononcé pour faute grave près de deux mois après les faits imputés à faute, ce dont il résultait que le motif du licenciement résidait, non pas dans ces faits, mais dans la volonté de l'employeur de déstabiliser la CGT juste avant les élections et d'empêcher Monsieur X... de se présenter comme candidat, et ce d'autant plus que, le jour de son licenciement, une autre procédure de licenciement avait été engagée à l'encontre des deux délégués syndicaux de la CGT de l'entreprise, soit en lien, là encore, avec les prochaines élections ; que les exposants avaient enfin soutenu, dans leurs conclusions précitées, que les salariés qui avaient indiqué dans leurs attestations ne pas être au informé de l'imminence de la candidature de Monsieur X... travaillaient en horaire décalé par rapport à lui, et que, par conséquent, il ne les croisait jamais, de sorte que leurs attestations ne pouvaient pas être prises en considération ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs en méconnaissance de l'article 455 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté Monsieur X... (salarié) de sa demande tendant à ce qu'il soit ordonné à la société VERGLASS (employeur) de le réintégrer sous astreinte dans l'entreprise et à ce que celle-ci soit condamné à lui verser une provision sur le salaire dû au titre de la période allant du premier jour de la mise à pied conservatoire jusqu'à la date de la réintégration dans l'entreprise ;
AUX MOTIFS QUE Monsieur X..., engagé le 3 juillet 2002 par la société VERGLASS occupait en dernier lieu des fonctions de préparateur écran ; qu'il a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement fixé au 4 février 2011, par lettre du 26 janvier précédent, laquelle comportait la notification d'une mise à pied conservatoire ; que le salarié a été licencié pour faute grave par lettre du 11 février 2011, pour avoir, le 17 décembre 2011, alors qu'il se trouvait au restaurant d'entreprise en présence de nombreux salariés, pris publiquement à partie de façon véhémente et agressive un directeur de division et un responsable de production et de développement, avoir ainsi mis en cause de manière agressive et irrespectueuse l'autorité et la probité de sa hiérarchie ; que la connaissance par l'employeur de l'imminence de la candidature de Monsieur

X... aux élections n'est pas établie ; que, subsidiairement, le salarié a été en mesure d'user de sa liberté d'expression puisque la teneur de ses propos fonde le licenciement pour faute grave, qu'au stade de la procédure de référé l'usage abusif ou non de la liberté d'expression reconnue à tout salarié en dehors comme dans le cadre du travail ne peut être caractérisé indépendamment de l'examen au fond de la légitimité du licenciement ; qu'aucun élément du dossier ne permet de retenir un trouble manifestement illicite résultant de la violation d'une liberté publique à raison du licenciement disciplinaire ;
ALORS, D'UNE PART, QUE, selon l'article L.1121-1 du Code du travail, nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ; qu'un licenciement est nul lorsqu'il porte atteinte à une liberté fondamentale du salarié ; que tel est le cas lorsque le licenciement porte atteinte à l'exercice par le salarié de cette liberté, celui-ci jouissant, sauf abus, de sa liberté d'expression dans et hors de l'entreprise ; qu'en relevant que Monsieur X... avait été en mesure d'user de sa liberté d'expression dès lors que la teneur de ses propos fondait le licenciement pour faute grave, quand il résultait de ces motifs que Monsieur X... avait fait l'objet d'un licenciement sanctionnant l'exercice de sa liberté d'expression et que, par voie de conséquence, le salarié n'avait pu user librement de sa liberté d'expression, la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations de fait, a violé les dispositions précitées de l'article L.1121-1 du Code du travail ;
ET ALORS, D'AUTRE PART, QUE, selon l'article R.1455-6 du Code du travail, la formation de référé peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; qu'en considérant qu'au stade de la procédure de référé, l'usage abusif ou non de la liberté d'expression reconnue à tout salarié en dehors comme dans le cadre du travail ne pouvait être caractérisé indépendamment de l'examen au fond de la légitimité du licenciement, quand il lui appartenait de rechercher, comme l'y invitait Monsieur X... dans ses conclusions d'appel, si, compte tenu des termes de la lettre de licenciement qui lui avait reproché d'avoir critiqué l'employeur pour avoir calculé l'intéressement de façon défavorable aux salariés et pour avoir omis de prendre en charge les frais de garde d'enfants en cas de sortie tardive du travail pour des raisons climatiques, le licenciement n'avait pas sanctionné le libre exercice par le salarié de son droit d'expression, sous réserve d'un abus de sa part, lequel ne pouvait être caractérisé qu'en cas d'utilisation de termes excessifs, injurieux ou diffamatoires, la Cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé l'article R.1455-6 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-11971
Date de la décision : 16/10/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 15 novembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 oct. 2013, pourvoi n°12-11971


Composition du Tribunal
Président : M. Béraud (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.11971
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