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30/09/2013 | FRANCE | N°12-12836

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 septembre 2013, 12-12836


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée le 8 avril 2004 par la société Cartier international en qualité de directrice générale du marketing, a été licenciée pour fautes lourdes le 21 mars 2008 ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande de dommages-intérêts pour pert

e de chance de réaliser une plus value sur ses stock-options, alors, selon le moyen :

1°/ que l...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée le 8 avril 2004 par la société Cartier international en qualité de directrice générale du marketing, a été licenciée pour fautes lourdes le 21 mars 2008 ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande de dommages-intérêts pour perte de chance de réaliser une plus value sur ses stock-options, alors, selon le moyen :

1°/ que la privation de la faculté de lever les options en cas de licenciement, quelle qu'en soit la cause et la qualification, constitue une sanction pécuniaire prohibée dès lors qu'elle résulte de la décision et de l'initiative de l'employeur et que les stock-options, accordées à l'occasion et en contrepartie du travail du salarié, constituent un élément de sa rémunération ; qu'en décidant néanmoins que le licenciement de Mme X...pour cause réelle et sérieuse la privait du droit de revendiquer des dommages-intérêts pour perte de chance du fait de l'impossibilité de réaliser les stock-options, la cour d'appel a violé l'article L. 1331-2 du code du travail ;

2°/ que si la présence dans l'entreprise peut être érigée en condition d'ouverture d'un droit à un élément de la rémunération, son défaut ne peut pas entraîner la perte d'un droit déjà acquis ; qu'en l'espèce, en contrepartie du départ de Mme X...du groupe L'Oréal auprès duquel elle bénéficiait de stock-options, il avait été prévu dans le contrat de travail de Mme X...que celle-ci bénéficierait dès son embauche de stock-options, promesse faite sans aucune condition de présence et réalisée par l'attribution d'options à la date du 23 août 2004, date de sa prise de fonction ; que dès lors, l'attribution de stock-options ayant son fondement dans les clauses du contrat de travail constituait un droit acquis à Mme X...qui ne pouvait en être privée par une condition de présence, valant renonciation, contenue dans le règlement du Stock-options Plan de la société émettrice ; qu'en déniant à Mme X...tout droit à indemnisation pour la perte des options d'achat qui était consécutive à son licenciement, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu que c'est à bon droit que la cour d'appel ayant constaté que le licenciement de la salariée était intervenu pour cause réelle et sérieuse en a déduit qu'elle ne pouvait revendiquer aucune indemnisation de la perte de chance du fait de l'impossibilité de réaliser ses stock-options ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le deuxième moyen :

Vu l'article 1382 du code civil ;

Attendu que pour débouter la salariée de sa demande de dommages-intérêts en raison des circonstances vexatoires du licenciement, l'arrêt énonce que la préméditation du licenciement et l'intention de nuire à la salariée n'ont pas été démontrées ;

Qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, la cour d'appel a privé da décision de base légale ;

Et sur le troisième moyen :

Vu l'article L. 1234-5 du code du travail ;

Attendu que, pour débouter la salariée de sa demande de prime annuelle sur objectifs calculée prorata temporis au titre de l'année 2008-2009, l'arrêt retient que, n'ayant pas travaillé pendant les trois mois de son préavis, elle ne pouvait prétendre avoir rempli ses objectifs et bénéficier d'une prime à ce titre ;

Qu'en statuant ainsi, après avoir écarté la faute grave et alors que l'inexécution du préavis n'entraîne aucune diminution des salaires et avantages que le salarié aurait perçus s'il avait accompli son travail, la cour d'appel, qui a relevé que les objectifs avaient été atteints et que le contrat de travail n'exigeait pas la présence de la salariée dans l'entreprise à la date de clôture de l'exercice, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute la salariée de ses demandes de dommages-intérêts en raison des circonstances du licenciement et en paiement de la prime annuelle sur objectifs au titre de l'exercice 2008-2009 calculée prorata temporis, l'arrêt rendu le 1er décembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Cartier international aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Cartier international à payer à Mme X...la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente septembre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour Mme X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le licenciement de Mme X...est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

Aux motifs que le 8 février 2008, la société Cartier International SNC a convoqué Annalisa X...à se présenter le 25 février 2008 à un entretien préalable à une mesure de licenciement envisagée. Cette convocation comportait également la confirmation de la mise à pied à titre conservatoire qui lui avait été notifiée verbalement. Une nouvelle convocation à entretien préalable a été adressée à la salariée pour le 13 mars 2008.

Le 28 février 2008, la société Cartier international SA a mis fin, selon la procédure ordinaire, à son contrat de travail soumis au droit suisse, avec effet au 30 avril 2008, en la dispensant d'effectuer son préavis. La rupture de ce contrat est fondée sur la perte de confiance.

Le 21 mars 2008, la société Cartier International SNC lui a notifié son licenciement pour fautes lourdes pour les motifs suivants :

- une facturation selon un processus irrégulier intervenu dans l'urgence au profit de la société Mazarine, prestataire du groupe Cartier, pour un montant d'environ 120. 000 ¿ ayant donné lieu à l'établissement à la même date de six factures correspondant à des travaux inexistants ou déjà facturés en 2007 ou bien inclus dans l'exécution du contrat, ces faits révélant une intention de nuire,

- des abus d'autorité destinés à dissimuler les agissements fautifs qui se sont manifestés par :

. l'obligation faite à Virginie Y...d'exiger de la société Profirst le fractionnement de sa facture de 125. 000 ¿ environ correspondant à sa prestation au séminaire de Deauville en septembre 2007 en 5 factures toutes datées du 24 octobre, et la menace faite au représentant de cette société de ne plus continuer à travailler avec lui en 2008 s'il continuait à attribuer un intitulé identique à ses factures ainsi fractionnées, ceci afin de ne pas dépasser le plafond de la délégation de signature qui lui avait été accordé et de dissimuler au président de Cartier le montant réel des prestations dont elle avait la responsabilité dans l'atelier de Deauville,

. l'obligation faite à deux consultants missionnés pour une réflexion stratégique de facturer la société Mazarine afin que celle-ci refacture Cartier et l'obligation faite aux employés au courant de ne jamais en parler au président,

. l'obligation faite à l'une des salariées placées sous son autorité d'appeler à la fin de l'année tous les prestataires de Cartier pour 3/ 12 leur faire passer le message selon lequel elle attendait ses cadeaux de fin d'année,

. l'obligation faite à des salariés placés sous son autorité de tenir une réunion de travail à son domicile vers 20 heures, après les avoir fait attendre devant son immeuble pendant près d'une heure et l'obligation qu'elle leur a imposée de n'informer personne de cette réunion ¿

Le grief invoqué par l'employeur tiré des abus d'autorité commis par Annalisa X...pour dissimuler des agissements fautifs n'est pas justifié.

La société Cartier International fait également valoir l'acceptation fautive par la salariée, dans l'intention de nuire à la société, de prestations « supplémentaires » d'un montant de 120. 000 ¿ HT faisant l'objet de 6 factures, fractionnées pour demeurer dans la limite de la délégation de 25. 000 ¿ qui lui était accordée, présentées par la société Mazarine concernant des travaux inexistants ou des travaux déjà facturés en 2007 ou encore inclus dans l'exécution du contrat.

Aucune délégation de pouvoirs au bénéfice d'Annalisa X...n'a été versée aux débats. Toutefois, l'intéressée reconnaît qu'elle bénéficiait du pouvoir d'engager la société Cartier International SNC dans la limite de 25. 000 ¿.

Il n'est pas contesté que l'agence de communication Mazarine est issue d'un service interne du groupe Cartier qui a externalisé différentes fonctions. Celles-ci ont été confiées à la société Mazarine, cédées à Paul-Emmanuel A..., à qui elles procurent plus de 55 % de son chiffre d'affaires.

La société Cartier et l'agence Mazarine sont liées par deux contrats-cadres. L'un daté du 12 mai 2004 et renégocié le 11 mai 2007 confiait à la seconde la conception et la réalisation de l'édition des catalogues, brochures, cartes de voeux et d'invitations ¿ L'autre en date du 3 avril 2006 lui confie la mise en scène des produits de la marque Cartier dans le cadre d'une mission de conception, de réalisation et de suivi de visuels.

Les 6 factures litigieuses, toutes émises le 28 janvier 2008, s'inscrivent dans le cadre de prestations hors contrat donnant lieu, selon Annalisa X..., confirmée par Paul-Emmanuel A..., à une facturation supplémentaire en fin d'année.

La gestion du budget de communication et le suivi des facturations incombaient à Corinne Z....

Le 24 janvier 2008, l'agence Mazarine a présenté 5 devis pour des montants compris entre 15. 000 ¿ HT et 35. 000 ¿ HT, puis le 28 janvier 2008, 6 factures correspondant à ces devis pour des montants compris entre 15. 000 ¿ HT et 30. 000 ¿ HT.

Préalablement, Corinne Z...avait envoyé à Annalisa X..., le 15 janvier 2008, un courriel lui exprimant son désaccord sur le versement d'une prime à la société Mazarine en raison du renouvellement dans de très bonnes conditions du contrat édition, de l'inexistence de « sujet majeur » justifiant un bonus et de l'absence de budget et 4/ 12 avait alerté le directeur des ressources humaines qui lui avait conseillé d'exécuter les instructions de sa supérieure hiérarchique tout en le tenant au courant de celles-ci.

Le 16 janvier 2008, Corinne Z...a adressé à Annalisa X...un courriel ainsi libellé, après lui avoir fait part d'une enveloppe supplémentaire d'environ 700. 000 ¿ : « Aussi pour Mazarine, nous avons une fenêtre et tu peux envisager une enveloppe « bonus ». Nous lui avons donné je crois 150 K ¿ FY 07 et 120 K ¿ FY 06. Comme je te l'ai dit, cette année a été moins chargée en lourds projets. Que penses-tu que nous puissions allouer ? 100 K ¿ ?- Merci de ta réponse ».

Dans une lettre du 20 février 2008, Paul-Emmanuel A..., président de la société Mazarine, se défend d'avoir participé « à la réalisation de factures douteuses pour un montant de 120. 000 ¿ au cours du mois de janvier 2008 » et explique qu'à la veille de la clôture annuelle de l'exercice comptable de la société Cartier, le 31 mars, des régularisations étaient habituellement sollicitées pour des travaux réalisés au-delà des prévisions initiales. Il précise que les 6 factures litigieuses concernent les prestations suivantes :

- films institutionnels 15 K ¿ ;
- évolution campagne écrin 30 K ¿ ;
- campagne multi-produits Plv 20 K ¿ ;
- campagne Bridal 20 K ¿ ;
- positionnement horloger 20 K ¿ ;
- Instants précieux15 K ¿ ;
- que l'étude d'horlogerie était prévue pour 35 K ¿, que la facture « Instants précieux » ne devait pas être facturée et que c'est à la demande des services de la société Cartier que la facture horlogerie a été réduite à 20 K ¿ et les recherches de « moment précieux » facturées par compensation.

Dans sa lettre du 20 mai 2008, il confirme les efforts supportés par Mazarine, les dépassements de travaux et prestations ayant donné lieu à compensation qu'Annalisa X...accordait discrétionnairement, mais accepte cependant de renoncer au règlement de la somme de 120. 000 ¿.

¿

Le dirigeant de cette société, bien qu'ayant renoncé au paiement des 6 factures litigieuses, a toujours maintenu que celles-ci, à l'exception de la facture « Instants précieux », correspondaient à des prestations excédant les prévisions des contrats-cadres.

Les seuls contrats-cadres et éléments fournis par la société Cartier International ne permettent pas d'établir que l'ensemble des prestations facturées a déjà été rémunéré soit dans le cadre d'un contrat, soit par facture autorisée et acquittée.

Il en résulte que seule la facture « Instants précieux » est irrégulière comme ne correspondant pas à des prestations supplémentaires non comprises dans le contrat d'édition. Annalisa X...ne pouvait l'ignorer ainsi que cela ressort de la lettre de 5/ 12 Paul-Emmanuel A... du 20 février 2008 qui relate que les services de Cartier lui ont demandé de minorer la facture horlogerie et de compenser en facturant les recherches de « moment précieux ».

En acceptant le règlement d'une facture qu'elle savait ne pas correspondre à la réalité des prestations effectuées, Annalisa X...a commis une faute rendant impossible, sans préjudice pour l'entreprise, la relation de travail et autorisant l'employeur à prononcer le licenciement.

La preuve de l'intention de nuire prêtée à la salariée n'a en rien été apportée.

Par ailleurs, la faute n'a pu être commise qu'avec le concours de Corinne Z..., elle-même en référant au directeur des ressources humaines, ainsi qu'elle le reconnaît dans son attestation et qui, le 16 janvier 2008, lui a procuré les moyens financiers de la commettre.

Par ailleurs, le fait que la société Mazarine ait obtenu en 2006 et 2007, dans les mêmes conditions et sans réaction de la direction de la société Cartier, le paiement d'une facture de régularisation pour ces prestations supplémentaires n'a pas incité Annalisa X...à la vigilance. De telles circonstances sont de nature à priver la faute de son caractère de gravité et, dès lors, la mise à pied à titre conservatoire ne se justifiait pas.

La salariée est en conséquence bien fondée à solliciter un rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire, une indemnité compensatrice de préavis, les congés payés afférents, une indemnité compensatrice pour les congés payés perdus et une indemnité conventionnelle de licenciement. Ces différentes demandes n'ayant pas été discutées dans leur montant, il y a lieu d'y faire droit.

En revanche, le rejet de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse doit être confirmé.

Alors de première part que les lettres de M. A... des 20 février 2008 et 20 mai 2008, loin d'affirmer que la facture « Instants Précieux » ne correspondait pas à des travaux supplémentaires non compris dans le contrat d'édition, expliquaient que la société Mazarine avait l'habitude, lorsqu'elle avait fourni à la demande de Cartier des prestations qui n'étaient pas comprises dans le champ d'application des contrats-cadres et qui n'avaient pas fait l'objet d'un devis préalable, d'émettre en fin d'année des factures de « régularisation » soumises à l'accord du directeur général, que cette pratique n'avaient pas suscité de difficulté les années passées et que les six factures litigieuses correspondaient à des prestations bien réelles, y compris la facture « Instants précieux », même si « nous n'avions à l'origine pas prévu de vous la facturer » ; qu'en effet dans la lettre du 20 février 2008, M. A... précisait « à propos de la facture « Instants 6/ 12 précieux », je vous précise que nous n'avions à l'origine pas prévu de vous la facturer. ¿ Nous avions envoyé un devis de 35 K ¿ pour l'étude d'horlogerie. Ce sont vos services qui ont appelé mes équipes pour leur demander de minorer la facture horlogerie à 20 K ¿ et de facturer par compensation les recherches de « Moments précieux » ; que dans sa lettre du 20 mai 2008, M. A... précisait de même que « s'agissant plus particulièrement de la facture « Positionnement horloger masculin », mes services avaient dans un premier temps établi un devis de 35. 000 ¿ HT. Suite à une demande des services de Mme X..., cette facture a été limitée à 20. 000 ¿ HT. Nous avions en contrepartie émis une facture avec un autre libellé « Instants précieux », pour un montant de 15. 000 ¿ HT » (lettre du 20 mai 2008, p. 2 alinéa 9) ; qu'il résulte de ces déclarations concordantes, claires et précises sur ce point, qu'au lieu d'accepter une facturation unique majorant le coût d'une prestation et occultant l'existence d'une autre prestation, les deux étant réelles, Mme X...avait fait rabaisser de 35. 000 à 20. 000 ¿ la facturation de la prestation « positionnement horloger masculin », et fait établir une facturation de 15. 000 ¿ pour la prestation « Instants précieux » ; qu'en déclarant que le dirigeant de la société Mazarine avait maintenu que les six factures correspondaient à des prestations excédant les prévisions des contrats-cadres « à l'exception de la facture Instants précieux », et qu'il avait donc admis que la facture « Instants précieux » entrait dans les prévisions des contrats-cadres, pour en déduire que Mme X...avait accepté « une facture qu'elle savait ne pas correspondre à la réalité des prestations effectuées », la Cour d'appel a dénaturé les lettres de M. A... des 20 février 2008 et 20 mai 2008, et a ainsi violé l'article 1134 du Code civil.

Alors de deuxième part qu'il résulte des constatations de l'arrêt que « les seuls contrats-cadres et éléments fournis par la société Cartier International ne permettent pas d'établir que l'ensemble des prestations facturées a déjà été rémunérée soit dans le cadre d'un contrat, soit par facture autorisée et acquittée » (arrêt p. 7, alinéa 4) ; que la Cour d'appel ne pouvait donc affirmer que « la facture « Instants précieux » est irrégulière comme ne correspondant pas à des travaux supplémentaires non compris dans le contrat d'édition » sans rechercher, pour les comparer, quelle était la nature des prestations couvertes dans le contrat d'édition et la nature de la prestation faisant l'objet de la facture « Instants précieux » ; qu'en s'abstenant de faire cette recherche et en se reconnaissant dans l'impossibilité, en l'état des éléments fournis par Cartier, de faire la comparaison entre les prestations facturées au titre du contrat-cadre d'édition et les prestations visées 7/ 12 par la facture litigieuse « Instants précieux », seul moyen de conclure que Mme X...avait accepté que les mêmes prestations soient facturées deux fois, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1232-1 du Code du travail.

Alors de troisième part que Mme X...faisait valoir dans ses conclusions (p. 23-24) que les prestations afférentes à la facture « Instants précieux », loin d'être fictives ou couvertes par la facturation d'un contrat-cadre, avait pour objet l'évolution de la collection « Instants précieux » à un nouveau positionnement ; que Mme X...faisait valoir, s'appuyant sur le dossier remis par la société Mazarine à l'huissier commis judiciairement, que la prestation était matérialisée par 141 visuels (photos), avait fait l'objet de six présentations aux équipes Cartier, avait demandé 45 jours de travail à l'agence Mazarine, mais n'avait pu aboutir sur l'exercice 2007/ 2008 pour des raisons internes à Cartier, ce pourquoi la somme de 15. 000 ¿ avait été facturée comme « dédommagement », pour correspondre au mieux à la réalité ; qu'elle soutenait que l'absence de devis séparé s'expliquait seulement par ce que le montant avait été inclus par erreur par Mazarine dans le devis d'horlogerie, et qu'elle n'avait donc fait que corriger cette erreur en demandant des factures distinctes pour des prestations distinctes ; qu'en déclarant que « la facture « Instants précieux » est irrégulière comme ne correspondant pas à des travaux supplémentaires non compris dans le contrat d'édition » sans répondre à ces conclusions, sans analyser les pièces auxquelles elles se référaient ni soutenir cette affirmation d'éléments de fait caractérisant l'identité des prestations couvertes par la facture « Instants précieux » et les prestations facturées au titre d'un contrat-cadre, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.

Alors de quatrième part que les principes de cohérence, d'interdiction de contredire au détriment d'autrui et de bonne foi interdisent à l'employeur de prendre contre un salarié une sanction pour une prétendue faute, tout en accordant une promotion à un autre salarié qui a prêté son concours à ladite faute, sans que cette discrimination puisse être justifiée par des éléments objectifs ; que les mêmes principes interdisent à l'employeur de sanctionner un salarié pour une prétendue complicité avec la tentative d'escroquerie d'une entreprise tierce qui aurait facturé des prestations fictives, lorsqu'il maintient sa confiance à cette entreprise en poursuivant ses relations avec elle et en s'abstenant de demander le remboursement des factures émises dans les mêmes conditions 8/ 12 par le passé ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel constate que la prétendue faute imputée à Mme X...« n'a pu être commise qu'avec le concours de Corinne Z..., elle-même en référant au directeur des ressources humaines ainsi qu'elle le reconnaît dans son attestation et qui, le 16 janvier 2008, lui a procuré les moyens financiers de la commettre » (arrêt, p. 7, al. 7) ; que la Cour d'appel constate encore que « la société Mazarine a (vait) obtenu en 2006 et 2007, dans les mêmes conditions et sans réaction de la direction de la société Cartier, le paiement d'une facture de régularisation pour ses prestations supplémentaires » (arrêt, p. 7, al. 8) ; que Mme X...faisait valoir, sans être contredite (conclusions, p. 26 alinéa 3 et p. 28 alinéa 5), qu'à la suite de son éviction, Mme Z...avait reçu une promotion et que Cartier avait poursuivi, comme par le passé, ses relations avec la société Mazarine, émettrice et seule bénéficiaire des facturations prétendument fictives, dont Mme X...ne tirait aucune profit ; qu'en présence de cette contradiction, il appartenait à la Cour d'appel de constater l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement qui présentait à l'égard de Mme X...un caractère discriminatoire non justifié par des circonstances objectives ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil et 1232-1 du Code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de Mme X...à des dommages-intérêts pour les circonstances vexatoires dans lesquelles était intervenu son licenciement,

Au motif que la préméditation du licenciement et l'intention de nuire à la salariée n'ayant pas été démontrées, le rejet de cette demande par le Conseil de prud'hommes sera confirmé (arrêt attaqué, p. 7, dernier alinéa).

Alors que les actes fautifs et vexatoires de l'employeur accompagnant le licenciement et distincts de celui-ci engage sa responsabilité et justifient l'octroi de dommages-intérêts au salarié, même si le licenciement n'a pas été prémédité ou si l'intention de nuire n'est pas établie ; qu'en rejetant la demande de Mme X...sans rechercher, comme elle y était invitée, si la société Cartier n'avait pas commis des fautes par son attitude brutale, interrompant une réunion de travail pour notifier à Mme X...une mise à pied conservatoire injustifiée tant dans son principe, en l'absence de faute grave, que dans sa durée de 47 jours, excédant les délais normaux de la procédure disciplinaire, lui interdisant de repasser dans son bureau reprendre ses effets personnels, ne les restituant que dix semaines après la mise à pied, accompagnant le prononcé de la mise à pied de la confiscation de son téléphone portable privé, ne le restituant que quatre mois plus tard, la radiant de sa mutuelle santé obligatoire avant même son licenciement, toutes circonstances qui caractérisaient des fautes de l'employeur indépendantes de la qualification du licenciement et engageaient sa responsabilité même en l'absence de préméditation et d'intention de nuire, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme X...de sa demande en paiement de la prime annuelle sur objectifs au titre de l'exercice 2008/ 2009 au prorata de la durée du préavis auquel elle avait droit et qui prenait fin au 26 juin 2008,

Aux motifs que son entretien annuel d'évaluation en date du 21 juin 2007 montre que ses objectifs quantitatifs ont été atteints et même dépassés. Le contrat de travail ne fixe aucun objectif qualitatif et n'exige pas la présence de la salariée dans l'entreprise à la date de la clôture de l'exercice, soit le 31 mars. Dans ces conditions, l'appelante est bien fondée dans sa demande de bonus d'un montant correspondant à 40 % de sa rémunération annuelle qui était, en son dernier état, de 256. 250 ¿.- En revanche, n'ayant pas travaillé pendant les trois mois de son préavis, elle ne peut prétendre avoir rempli ses objectifs et bénéficier d'une prime sur objectifs ; (arrêt attaqué, p. 8 alinéas 4, et 6)

Alors que le salarié licencié à tort pour une faute grave ou lourde déclarée ensuite injustifiée, qui n'exécute pas son préavis par le fait de l'employeur, a droit à tous les éléments de rémunération qui lui auraient normalement été acquis s'il avait travaillé durant le préavis ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que Mme X...avait réalisé, voire dépassé ses objectifs depuis son entrée dans la société et avait donc perçu à ce titre un bonus correspondant à 40 % de sa rémunération de base annuelle jusqu'à la date de son licenciement ; que dès lors, l'inexécution du préavis du fait de l'employeur qui l'avait licenciée à tort pour faute lourde ne pouvait la priver de la prime annuelle sur objectifs qu'elle avait toujours perçue antérieurement ; qu'en rejetant la demande de ce chef, la Cour d'appel a violé l'article L. 1234-5 du Code du travail.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme X...de ses demandes de dommages-intérêts pour perte de chance de réaliser une plus-value sur les stock-options Richemont.

Aux motifs que d'août 2004 à juin 2006, Annalisa X...a bénéficié de l'attribution de 100. 000 stock-options qu'elle a perdues à la suite de son licenciement. Elle estime son manque à gagner à 7. 400. 000 ¿. ¿ Toutefois elle ne demande pas l'exécution du plan de stock-options du groupe Richemont mais la réparation par la société Cartier International SNC du dommage qu'elle lui a causé en la privant par sa faute de réaliser une plus-value. Son action qui est née à l'occasion de l'exécution de son contrat de travail est en conséquence recevable. Cependant, son licenciement reposant sur une cause réelle et sérieuse la prive du droit de revendiquer des dommages-intérêts pour le motif de perte de chance subie du fait de l'impossibilité de réaliser ses stock-options. (arrêt attaqué, p. 8, al. 1, 2 et 3)

Alors d'une part que la privation de la faculté de lever les options en cas de licenciement, quelle qu'en soit la cause et la qualification, constitue une sanction pécuniaire prohibée dès lors qu'elle résulte de la décision et de l'initiative de l'employeur et que les stock-options, accordées à l'occasion et en contrepartie du travail du salarié, constituent un élément de sa rémunération ; qu'en décidant néanmoins que le licenciement de Mme X...pour cause réelle et sérieuse la privait du droit de revendiquer des dommages-intérêts pour perte de chance du fait de l'impossibilité de réaliser les stockoptions, la Cour d'appel a violé l'article L. 1331-2 du Code du travail ;

Alors d'autre part que si la présence dans l'entreprise peut être érigée en condition d'ouverture d'un droit à un élément de la rémunération, son défaut ne peut pas entraîner la perte d'un droit déjà acquis ; qu'en l'espèce, en contrepartie du départ de Mme X...du groupe L'Oréal auprès duquel elle bénéficiait de stock-options, il avait été prévu dans le contrat de travail de Mme X...que celle-ci bénéficierait dès son embauche de stock-options, promesse faite sans aucune condition de présence et réalisée par l'attribution d'options à la date du 23 août 2004, date de sa prise de fonction ; que dès lors, l'attribution de stock-options ayant son fondement dans les clauses du contrat de 12/ 12 travail constituait un droit acquis à Mme X...qui ne pouvait en être privée par une condition de présence, valant renonciation, contenue dans le règlement du Stock-Options Plan de la société émettrice ; qu'en déniant à Mme X...tout droit à indemnisation pour la perte des options d'achat qui était consécutive à son licenciement, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-12836
Date de la décision : 30/09/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 01 décembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 sep. 2013, pourvoi n°12-12836


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Richard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.12836
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