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25/09/2013 | FRANCE | N°12-24588

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 25 septembre 2013, 12-24588


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 18 avril 2012), que Pierre X..., né le 27 juillet 1989, a été reconnu à sa naissance par sa mère, Mme A... ; qu'il a été reconnu par M. Y... le 10 janvier 1992, postérieurement à son mariage avec Mme A... le 2 juin 1990 ; qu'un jugement du 21 décembre 2001 a annulé la reconnaissance faite par M. Y..., l'expertise diligentée ayant établi qu'il n'était pas le père de Pierre X... ; que le 13 novembre 2007, M. Pierre X...
A... a été placé sous tutelle en r

aison de l'altération de ses facultés, sa mère étant nommée administratrice...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 18 avril 2012), que Pierre X..., né le 27 juillet 1989, a été reconnu à sa naissance par sa mère, Mme A... ; qu'il a été reconnu par M. Y... le 10 janvier 1992, postérieurement à son mariage avec Mme A... le 2 juin 1990 ; qu'un jugement du 21 décembre 2001 a annulé la reconnaissance faite par M. Y..., l'expertise diligentée ayant établi qu'il n'était pas le père de Pierre X... ; que le 13 novembre 2007, M. Pierre X...
A... a été placé sous tutelle en raison de l'altération de ses facultés, sa mère étant nommée administratrice légale sous contrôle judiciaire ; que le 13 juin 2008, cette dernière, en sa qualité de tutrice, a fait assigner M. Z... en déclaration judiciaire de paternité ; que le tribunal a ordonné une mesure d'expertise génétique, qui n'a pu être mise en oeuvre, M. Z... n'ayant pas déféré aux convocations ;
Sur le moyen unique, pris en ses trois premières branches, ci-après annexé :
Attendu que M. Z... fait grief à l'arrêt de dire qu'il est le père de Pierre X...
A..., né le 27 juillet 1989, et d'ordonner les mesures de publicité prévues par la loi ;
Attendu que, l'expertise biologique étant de droit en matière de filiation, sauf s'il existe un motif légitime de ne pas y procéder, c'est par une appréciation souveraine et exempte de dénaturation des éléments de preuve soumis à son examen, que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de s'expliquer sur les éléments de preuve qu'elle décidait d'écarter, a estimé que le refus sans motif légitime de M. Z... de se soumettre à l'expertise biologique ordonnée, conjugué à la preuve de relations intimes des parties au cours de la période de conception de l'enfant, constituait un aveu de sa paternité ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le moyen unique, pris en ses trois dernières branches, ci-après annexé :
Attendu que M. Z... fait le même grief à l'arrêt ;
Attendu, d'une part, que, les actions relatives à la filiation ne pouvant faire l'objet de renonciation, la cour d'appel a, à bon droit, retenu que Mme A... ne pouvait avoir valablement renoncé, au nom de son enfant, à rechercher si M. Z... était le père de ce dernier ;
Et attendu, d'autre part, que, l'action ayant été engagée par M. Pierre X...

A...
, représenté par Mme
A...
en sa qualité de tutrice, la cour d'appel en a exactement déduit que celui-ci ne pouvait se voir opposer les contradictions apparentes de sa mère ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Z... aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande de M. Z... et le condamne à payer à Me Spinosi, avocat de Mme
A...
, la somme de 2 500 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq septembre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour M. Z...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR déclaré que monsieur Jacques Z... est le père naturel de Pierre X...
A..., né le 27 juillet 1989 à SAINTES, et ordonné les mesures de publicité prévues par la loi.
AUX MOTIFS PROPRES QUE monsieur Z... fait valoir que madame A... a, dans un courrier du 11 décembre 1990 qu'elle lui a adressé, expressément mentionné que la paternité de son fils Pierre ne pouvait " absolument pas " être attribuée à son correspondant " malgré nos relations de l'époque " ; que madame A... a ensuite signé le 15 octobre 1990 une transaction par laquelle elle renonçait à introduire une action à fins de subsides à l'encontre de monsieur Z... moyennant la somme de 300. 000 euros et qu'elle se " portait fort " pour toute personne pouvant avoir l'autorité parentale et pour l'enfant lui-même ; que par son action présente, elle se contredirait au détriment de monsieur Z... et de sa famille ; que la Cour constate que madame A..., dans cette transaction, a certainement renoncé momentanément à l'action à fins de subsides qu'elle envisageait d'entreprendre mais pas à une action en recherche de paternité ; qu'elle ne pouvait de plus valablement renoncer au nom de son enfant à rechercher si monsieur Z... était le père moyennant une somme d'argent, l'état des personnes, donc leur filiation, étant indisponible ; que dans l'action qu'elle présente elle agit au nom de Pierre X... et ne peut, en cette qualité, se voir opposer la transaction de 1990 à laquelle son fils n'était pas partie ; que s'agissant du courrier où elle affirme que monsieur Z... ne peut absolument pas être de père de Pierre, il n'a aucune valeur scientifique d'autant que les deux parties reconnaissent avoir entretenu des relations sexuelles avant la naissance de l'enfant ; qu'enfin l'adage suivant lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui a une exacte application en l'espèce les contradictions apparentes de Madame A... ne pouvant être opposées à son enfant ; que si un doute existait seule l'expertise génétique aurait été en mesure de le lever et c'est à juste titre que le Tribunal de Grande Instance de NIORT a considéré que l'attitude de monsieur Z..., qui refuse de se prêter à cette comparaison est la preuve de sa paternité ; que le respect de la vie privée et la situation matrimoniale de l'appelant ne peuvent qu'être opposées à l'intérêt de Pierre-X... ; que le jugement sera confirmé.
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE conformément aux dispositions de l'article 327 du Code Civil, que la paternité hors mariage peut être judiciairement déclarée ; que conformément aux dispositions de l'article 310-3 alinéa 2 du Code civil, si une action est engagée, la filiation se prouve et se conteste par tous moyens, sous réserve de la recevabilité de l'action ; que l'expertise biologique est de droit en matière de filiation, sauf s'il existe un motif légitime de ne pas y procéder ; que, par jugement en date du 26 janvier 2009, le Tribunal de Grande Instance de Niort a déclaré recevable l'action et ordonné avant dire droit une mesure d'expertise génétique confiée au Docteur B...; que si monsieur Z... a relevé appel de cette décision, cette affaire a ensuite fait l'objet d'une radiation ; que le Tribunal a, par son jugement, devenu définitif, écarté l'existence de circonstances susceptibles de constituer un motif légitime de ne pas faire droit à la demande d'expertise formée par madame A... ès qualité de tutrice de son fils majeur Pierre X... ; que, sur le fond, madame A... verse aux débats des attestations émanant de madame Régine C..., sa mère, et de Mme Monique D...qui établissent que monsieur Z... et Madame A... ont entretenu une liaison pendant la période de conception de l'enfant ; que le fait qu'il s'agisse d'un membre de la famille et d'une amie ne saurait constituer en soi un élément de nature à faire douter de l'existence de ces relations ; qu'au demeurant, monsieur Z... ne conteste pas avoir entretenu des relations intimes avec madame A... au cours de la période de conception de l'enfant ; que s'il prétend que celle-ci, pendant cette même période, a entretenu des relations avec d'autres hommes il ne verse aux débats aucune pièce de nature à le démontrer ; que d'autre part, bien que prétendant ne pas être le père de Pierre X...
A..., il convient de constater que, convoqué à deux reprises par l'expert, il n'a déféré à aucune convocation ; que la protection de sa vie privée invoquée pour justifier son refus de se soumettre à l'expertise ne peut être constitutif d'un motif légitime ; que, comme l'a indiqué le Tribunal de Grande Instance dans son jugement en date du 26 janvier 2009, le fait que monsieur Z... soit engagé dans les liens du mariage et père de famille ne saurait être considéré comme un juste motif d'opposition à l'exécution de la mesure d'expertise, sauf à l'exclure dans tous les cas où une personne est présentée comme le fruit d'une relation extraconjugale et alors, au surplus, que le défendeur n'a pas hésité à entretenir une telle relation ; qu'ainsi le refus par monsieur Z... de se soumettre à la mesure d'expertise génétique doit être assimilé à un aveu de paternité et qu'il convient en conséquence de dire que monsieur Jacques Z... est le père de Pierre X...
A....
1°) ALORS QUE la preuve de la paternité ne peut résulter du simple refus d'accepter une expertise génétique à défaut de tous indices graves et concordants de la paternité ; qu'il en est ainsi a fortiori lorsque l'existence de relations intimes de la mère de l'enfant avec d'autres hommes durant la période de conception, rendant nécessairement équivoque cette prétendue paternité, le propre aveu de cette mère excluant toute paternité de la personne concernée et son mode de vie conjugués aux motifs de divorce retenus à son encontre ainsi que l'attitude du prétendu père vis-à-vis de l'enfant sont de nature à exclure cette paternité ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel additionnelles et récapitulatives, monsieur Z... avait fait valoir non seulement que le divorce de monsieur Y... et de madame A..., prononcé aux torts de cette dernière, avait apporté la preuve très nette de son habitude des sorties nocturnes, des hôtels et des discothèques (p. 3, dernier al.) mais aussi que deux attestations de messieurs E...et F..., établissant l'existence de relations intimes de madame A... avec d'autres hommes durant la période de conception de l'enfant Pierre X..., démontraient son mode de vie et permettaient d'affirmer que l'exposant ne pouvait pas être le père de cet enfant (p. 5, al. 1) et qu'en outre on ne pouvait relever aucun lien affectif, aucune vie commune ni aucune attitude de monsieur Z... à l'égard de cet enfant (p. 6, al. 8) ; qu'en se bornant à retenir que le refus de monsieur Z..., qui avait entretenu une liaison avec madame A... pendant la période de conception de son fils, de procéder à une expertise génétique était la preuve la preuve de sa paternité sans rechercher si ces différents éléments rapprochés du courrier de madame A... en date du 11 décembre 1990, selon lequel monsieur Z... ne pouvait « absolument » pas être le père de cet enfant, quand bien même cette déclaration n'aurait pas de valeur scientifique, et pris dans leur ensemble n'étaient pas de nature à exclure toute paternité de monsieur Z... et à tout le moins à justifier son refus d'une telle expertise, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 310-3, 311 et 327 du Code civil.
2°) ALORS QU'en tout état de cause, les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner et analyser tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'à l'appui de ses conclusions d'appel récapitulatives et additionnelles (p. 5, al. 1), monsieur Z... avait versé pour la première fois aux débats deux attestations de messieurs E...et F...en date des 11 novembre 1989 et 1er octobre 1989 témoignant de l'existence de relations intimes de madame A... en 1988, soit au cours de la période de conception de l'enfant Pierre X... ; qu'en ne s'expliquant pas sur ces pièces nouvelles, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
3°) ALORS QU'aux termes de la transaction que madame A... avait signée le 15 octobre 1990 avec monsieur Z..., celle-ci avait expressément reconnu « de façon formelle que la paternité ne pouvait être attribuée » à monsieur Z..., qu'elle renonçait « à son action » et qu'elle « se portait fort » pour toute personne pouvant avoir l'autorité parentale et pour l'enfant lui-même ; que madame A... avait ainsi renoncé définitivement à une action à fins de subsides ainsi qu'à une action en recherche de paternité de son fils à l'encontre de monsieur Z... ; qu'en affirmant que, dans cette transaction, madame A... avait renoncé « momentanément » à l'action à fins de subsides qu'elle envisageait d'entreprendre mais pas à une action en recherche de paternité, la Cour d'appel a dénaturé la transaction signée par madame A... le 15 octobre 1990 et violé l'article 1134 du Code civil.
4°) ALORS QU'il est toujours possible de renoncer à un droit une fois que celui-ci est né ; que le droit d'exercer une action en recherche de paternité du jeune Pierre X...
A... étant acquis, madame A... pouvait donc parfaitement valablement renoncer au nom de son enfant à rechercher si monsieur Z... était le père moyennant une somme d'argent, peu important que la filiation soit indisponible ; qu'en affirmant au contraire que madame A... ne pouvait renoncer au nom de son enfant à rechercher si monsieur Z... était le père moyennant une somme d'argent dès lors que l'état des personnes et donc leur filiation est indisponible, la Cour d'appel a violé les articles 310-3, 311 et 327 du Code civil.
5°) ALORS QUE nul ne peut se contredire au détriment d'autrui ; qu'ayant déclaré dans la transaction qu'elle avait signée le 15 octobre 1990, aux termes de laquelle elle avait reconnu « de façon formelle que la paternité ne pouvait être attribuée » à monsieur Z... et qu'elle renonçait « à son action », qu'elle « se portait fort » pour toute personne pouvant avoir l'autorité parentale et pour l'enfant lui-même, madame A... s'était nécessairement interdite d'agir en recherche de paternité au nom de son fils à l'encontre de l'exposant, quand bien même les contradictions apparentes de cette dernière ne pouvaient être opposées à son fils ; que son action en recherche de paternité au nom de ce dernier était donc irrecevable ; qu'en faisant néanmoins droit à l'action en recherche de paternité engagée par madame A... au nom de son fils, en sa qualité de tutrice, à l'encontre de monsieur Z... la Cour d'appel a violé le principe selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui ainsi que les articles 310-3, 311 et 327 du Code civil.
6°) ALORS QU'en toute hypothèse, madame A... s'étant, aux termes de la transaction du 15 octobre 1990, engagée à renoncer à l'action en recherche de paternité de son fils à l'encontre de monsieur Z... et à se porter fort pour toute personne pouvant avoir l'autorité parentale et pour son fils, ne pouvait, sans méconnaître cet engagement contractuel, agir en recherche de paternité en qualité de tutrice de ce dernier à l'encontre de l'exposant ; qu'ainsi en accueillant cette action de madame A... formée en méconnaissance de son engagement contractuel, la Cour d'appel a violé, au surplus, l'article 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 12-24588
Date de la décision : 25/09/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 18 avril 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 25 sep. 2013, pourvoi n°12-24588


Composition du Tribunal
Président : M. Charruault (président)
Avocat(s) : Me Spinosi, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.24588
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