LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° M 12-17-285 à C 12-17.300 et S 12-17.313 à X 12-17.318 ;
Sur le moyen unique commun aux pourvois :
Vu les articles L. 1242-3, L. 1245-1, L. 5134-41 et L. 5134-47 du code du travail, alors applicables ;
Attendu qu'il résulte de ces deux premiers textes que le contrat d'avenir à durée déterminée conclu au titre des dispositions légales destinées à favoriser le recrutement de certaines catégories de personnes sans emploi, doit remplir les conditions prévues à l'article L. 5134-47 du code du travail, à défaut de quoi il doit être requalifié en contrat à durée indéterminée ; que selon ce dernier texte, le contrat prévoit des actions de formation et d'accompagnement au profit de son titulaire qui peuvent être menées pendant le temps de travail et en dehors de celui-ci ;
Attendu, selon les arrêts attaqués, que Mme X... et 21 autres salariés ont été engagés en février et mars 2008 par la caisse des écoles de la commune de Saint-Louis (caisse des écoles) dans le cadre de contrats d'avenir à durée déterminée d'un an qui ont pris fin à l'échéance prévue ; que les salariés ont saisi la juridiction prud'homale d'une demande de requalification de leur contrat en un contrat à durée indéterminée ;
Attendu que pour les débouter de leur demande, la cour d'appel, après avoir énoncé l'obligation légale de formation contenue à l'ancien article L. 322-4-12 du code du travail, a retenu que la caisse des écoles justifiait de la mise en place d'une formation avec l'association ADIFE, que, pour tardive qu'elle soit, la formation était néanmoins réelle, le parcours mis en place de 200 heures individuelles étant en partie réalisable avant le terme du contrat, qu'un nombre significatif des salariés y ont participé au moins en partie, que l'absence de mise en oeuvre du « parcours d'insertion professionnelle d'une durée d'un mois en entreprise », prévue au contrat, ne constituait pas la violation d'une obligation légale de nature à remettre en cause la qualification du contrat d'avenir et que ces éléments imposent de retenir une mise en oeuvre du contrat d'avenir susceptible d'amélioration mais non une inexécution fautive majeure ou une exécution de mauvaise foi de la part de la caisse des écoles ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants tirés de l'absence de mauvaise foi de l'employeur, alors qu'il résultait de ses propres constatations une carence partielle de la caisse des écoles dans l'exécution de son obligation de formation, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils déboutent les salariés de leur demande de requalification du contrat d'avenir en un contrat à durée indéterminée, les arrêts rendus le 26 octobre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée ;
Condamne la caisse des écoles de la commune de Saint-Louis aux dépens ;
Vu l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne la caisse des écoles de la commune de Saint-Louis à payer à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray la somme de 3 000 euros à charge pour cette dernière de renoncer à percevoir l'indemnité prévue par l'Etat ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq septembre deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen commun produit aux pourvois par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour Mme X... et les 21 autres salariés.
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté les salariés de leurs demandes tendant au paiement d'une indemnité de requalification et d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article L. 322-4-12 ancien du Code du travail en sa version applicable au litige, le contrat d'avenir "prévoit obligatoirement des actions de formation et d'accompagnement au profit de son titulaire, qui peuvent être menées pendant le temps de travail et en dehors de celui-ci" ; qu'au regard de cette obligation légale, la Caisse des Ecoles justifie la mise en place d'une formation avec l'association ADIFE ; que la convention a été signée le 29 décembre 2008 et fait suite à une convention de subvention conclue avec l'Agence d'Insertion de la Réunion du 17 décembre précédent ; que le plafond de subvention contractuelle est de 60.900 euros ; que le parcours mis en place portait sur un total individuel de 200 heures à réaliser du 29 décembre au 28 février 2009 ; qu'il convient de relever que ces 200 heures étaient en partie réalisables avant le terme du contrat sur la base des 26 heures hebdomadaires travaillées, étant précisé que la formation pouvait aussi être mise en oeuvre en dehors du temps de travail ou durant les congés ; que la formation mise en place par la Caisse des Ecoles, pour tardive qu'elle soit, est néanmoins réelle ; que d'ailleurs, une partie significative des salaries y ont participé au moins en partie ; qu'au regard du planning produit, (chaque salarié) a assisté à (n) séances de formation sur (n) en janvier (voir tableau joint); que ce constat suffit à rejeter l'argument d'une carence totale de l'employeur même si, à l'évidence, une formation dès le début du contrat aurait été préférable ; que quant à l'inadaptation de la formation proposée, même à la supposer établie, elle reste sans effet juridique et ne peut légitimer une requalification du contrat ; que (la salariée) reproche encore à la Caisse des Ecoles le fait que le "parcours d'insertion professionnelle d'une durée d'un mois en entreprise" n'a pas été mis en oeuvre ; que la Caisse des Ecoles ne conteste pas sa carence de ce chef mais relève, avec pertinence, l'absence d'obligation légale ; qu'en effet, l'obligation résulte de l'article 11 du contrat et non des dispositions de l'article L. 322-4-12 précitée ou de tout autre article afférent au contrat d'avenir, La carence de l'employeur caractérise alors une inexécution du contrat et non la violation d'une obligation légale et impérative de nature à remettre en cause la qualification de contrat d'avenir ; que ces éléments imposent de retenir une mise en oeuvre du contrat d'avenir susceptible d'amélioration mais non une inexécution fautive majeure ou une exécution de mauvaise foi de la part de la Caisse des Ecoles ; que la demande de requalification est rejetée comme infondée ainsi que les demandes indemnitaires en découlant ; que l'inexécution du contrat par l'employeur quant à la période d'immersion en entreprise est fautive, même s'agissant d'une obligation de moyen, aucune tentative de mise en oeuvre de l'obligation n'étant même invoquée par la Caisse des Ecoles ; que le préjudice subi par (le salarié) du fait de cette inexécution tient notamment de la perte d'une chance de sortir du processus d'insertion ; que le préjudice subi est répare par l'octroi d'une indemnité de 1.000 euros ; que le jugement est confirmé sur le principe du préjudice distinct et les dépens ; qu'il est infirmé pour le reste dont l'indemnité allouée au titre de l'article 700 du Code de procédure civile laquelle est réduite à 150 euros eu égard aux frais engagés.
ALORS QUE le contrat d'avenir prévoit des actions de formation et d'accompagnement au profit de son titulaire ; qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que l'employeur n'avait signé une convention de formation que le 29 décembre 2008, soit à l'approche de l'expiration des contrats de travail, en sorte que les salariés n'avaient pu bénéficier de cette formation que partiellement ; qu'en rejetant pourtant leur demande de requalification en contrat de travail à durée indéterminée de droit commun, la Cour d'appel a violé l'article L.322-4-12 du Code du travail alors en vigueur.
ALORS de plus QUE les salariés faisaient état de l'inadéquation de la formation proposée ; qu'en jugeant que « l'inadaptation de la formation proposée (...) reste sans effet juridique et ne peut légitimer une requalification du contrat », la Cour d'appel a de nouveau violé l'article L.322-4-12 du Code du travail alors en vigueur.
ALORS encore QUE les salariés soutenaient dans leurs écritures d'appel que leur contrat de travail s'était poursuivi au-delà de leur terme, ce qui justifiait encore leur requalification en contrat de travail à durée indéterminée de droit commun ; qu'en s'abstenant de répondre à ce chef déterminant des écritures d'appel des salariés, la Cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.
ALORS enfin QUE les salariés faisaient encore état de la méconnaissance par leur employeur de l'engagement pris de leur faire bénéficier d'un parcours d'insertion professionnelle d'une durée d'un mois en entreprise ; qu'en affirmant que cette carence de l'employeur caractérisait une inexécution du contrat et non la violation d'une obligation légale, sans rechercher si cet engagement contractuel ne résultait pas des engagements pris par l'employeur dans le cadre de la convention conclue avec l'Etat, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L.322-4-12 du Code du travail alors en vigueur.