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25/09/2013 | FRANCE | N°12-16168

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 25 septembre 2013, 12-16168


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué que, M. X... engagé le 1er juin 1989 en qualité de vendeur par la société Maison Carrée, aux droits de laquelle se trouve la société Astragale, a été licencié pour faute grave, le 24 octobre 2006 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire son licenciement fondé sur une faute grave et de le débouter de l'ensemble de ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en s'appuyant sur les déclarations de MM. Y... et Z... pour ret

enir la réalité du vol imputé à M. X..., sans tenir compte, ainsi qu'elle y était ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué que, M. X... engagé le 1er juin 1989 en qualité de vendeur par la société Maison Carrée, aux droits de laquelle se trouve la société Astragale, a été licencié pour faute grave, le 24 octobre 2006 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire son licenciement fondé sur une faute grave et de le débouter de l'ensemble de ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en s'appuyant sur les déclarations de MM. Y... et Z... pour retenir la réalité du vol imputé à M. X..., sans tenir compte, ainsi qu'elle y était cependant invitée, des résultats de l'enquête policière diligentée à cette occasion et dont résultait le caractère mensonger desdites déclarations, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1 et L. 1235-1 du code du travail ;
2°/ que les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que, dans une attestation, Mme Hélène A..., salariée de la société Astragale de septembre 2005 à juin 2009, déclarait : « Au cours de la période précédant le licenciement du salarié , M. Bernard B... m'a fait faire une attestation sous contrainte à l'encontre de M. X... Richard déclarant avoir vu celui-ci voler de la marchandise dans le magasin en contrepartie d'un licenciement « à l'amiable ».(..) Et j'ai appris qu'à l'encontre de M. X... Richard, les employés ayant fait une déposition ont tous reçu une prime de 600 euros, sauf moi, ce qui m'a fait conclure qu'il s'agissait d'un coup monté. Cette somme a été versée sous forme de prime dans le mois qui a suivi l'arrestation de M. X... Richard » ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans examiner l'attestation de Mme A... que le salarié versait aux débats pour établir que l'accusation de vol portée à son encontre avait été montée de toutes pièces, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que la faute grave n'est caractérisée que si le comportement du salarié rend impossible son maintien dans l'entreprise ; qu'en se fondant, pour caractériser la faute grave, sur le vol d'un blouson prétendument commis le 5 octobre 2006, quand un tel fait, isolé, n'avait causé aucun préjudice à l'employeur et concernait un salarié qui comptait plus de vingt deux ans d'ancienneté et dont le comportement antérieur était irréprochable, ce dont il résulte que le vol reproché au salarié n'était pas, compte tenu des circonstances de la cause, d'une importance telle qu'il rendait impossible son maintien dans l'entreprise, la cour d'appel a violé, ensemble, les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
Mais attendu qu'après avoir constaté, par une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve soumis à son examen, que le fait de vol de marchandise reproché au salarié était établi, la cour d'appel a pu décider que cet agissement frauduleux, nonobstant l'ancienneté du salarié et l'absence de reproche antérieur, rendait impossible son maintien dans l'entreprise et constituait une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Vu les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande au titre du harcèlement, la cour d'appel a retenu que les allégations de harcèlement moral que le salarié aurait subi de la part de son employeur n'étaient pas de nature à l'exonérer des agissements évoqués à l'appui de la mesure de licenciement ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si indépendamment des faits à l'origine de son licenciement, le salarié n'avait pas été victime de la part de son employeur d'agissements constitutifs d'un harcèlement moral, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande au titre du harcèlement moral, l'arrêt rendu le 6 décembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne la société Astragale aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Astragale et condamne celle-ci à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq septembre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit le licenciement de Monsieur X... justifié par l'existence d'une faute grave et de l'avoir, en conséquence, débouté de ses demandes en paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'une indemnité compensatrice de préavis, d'une indemnité conventionnelle de licenciement, d'un rappel de salaire au titre de la période de mise à pied, d'une indemnité pour mise à pied abusive et de dommages et intérêts pour accusations vexatoires et harcèlement;
Aux motifs que : «la société ASTRAGALE démontre que, depuis 2004, le taux de démarque au sein de son magasin était anormalement élevé en sorte que la direction s'orientait vers une vigilance accrue tant sur la clientèle que le personnel ; que, le 5 octobre 2006, les services de police étaient appelés par les responsables du magasin Sport 2000 de NIMES en raison de détournements de marchandises de la part de certains salariés lesquels étaient avérés ; que c'est peu après que la direction constatait la présence d'un carton dans le coffre du véhicule de fonction de Monsieur X... contenant un blouson de marque Quicksilver sans aucun justificatif d'achat et sans qu'il ait été officiellement sorti des stocks ; que les policiers enquêteurs ont émis l'hypothèse que, un tel agissement de la part d'un salarié alors qu'une arrestation venait d'intervenir peu avant sur le site était difficilement concevable, l'employeur se serait livré à une machination destinée à confondre Monsieur X... ; que les interrogations menées au cours de l'enquête avaient plus pour finalité d'établir la mauvaise foi de l'employeur que de constater la réalité des faits reprochés au salarié alors que leur matérialité ne faisait pas difficulté ; qu'aucun élément ne permet d'établir que l'employeur soit à l'origine de la présence du blouson litigieux dans le coffre du véhicule de fonction de Monsieur X... et aucun doute n'existant quant à la duplicité de l'employeur, il n'y a pas lieu de retenir ce même doute au bénéfice de Monsieur X... ; que la réalité des faits reprochés à Monsieur X..., dont il ne conteste pas la matérialité, découle des attestations versées aux débats par l'employeur et notamment : - Madame C..., commerciale, qui déclare : « j'atteste ..avoir appelé Monsieur Bernard B... le jeudi 28 septembre 2006 car j'ai vu Monsieur Richard X... qui mettait un vêtement dans un carton. Je me trouvais en hauteur dans le bureau de Monsieur
B...
qui surplombe la surface de vente. Ce comportement pas normal m'a fait descendre et j'ai vu Monsieur Richard X... remettre le carton à Jérôme D... dans l'entrée de la réserve. Les cartons devant repartir vides de la surface de vente, j'ai trouvé cela anormal et j'en ai informé Monsieur B.... Le 5 octobre, je n'étais pas au magasin mais en rendez-vous à l'extérieur avec Adidas » ; que Monsieur D... était l'un des salariés interpellés pour vol le 5 5 octobre 2006 et agissait selon le même processus que celui constaté le 5 octobre 2006, à savoir en sortant les cartons par la réserve ; que Monsieur Z..., responsable magasin, relate : « j'ai vu Monsieur X... Richard sortir un carton de la réserve et le mettre dans sa voiture.. » ; que celui-ci sera entendu pas moins de trois fois par les services de police pour confirmer ses déclarations ; que Monsieur Y..., chef de rayon, entendu par les mêmes enquêteurs, expliquait : « ..j'ai vu Monsieur X... sortir de la même porte avec un carton qu'il a déposé dans le coffre de sa voiture de fonction.. » ; qu'il précisait par la suite « ..j'ai fait le tour du rond point et je suis revenu sur le parking arrière jusqu'à la voiture de fonction de X..., j'ai regardé dedans et j'ai vu un carton sigle Nike. Je vais vous dire la vérité, j'ai même ouvert le coffre et j'ai vu qu'il y avait un blouson dedans.. » ; que Madame F... précise que Monsieur X... « se permettait fréquemment de désantivoler des articles en invoquant diverses raisons auprès des hôtesses de caisse. Depuis son départ, cette pratique a quasiment disparu.. » ; que le procès-verbal d'interpellation de Monsieur X... le 5 octobre 2006 par les services de police qui ont constaté la présence d'un carton contenant un blouson de marque Quick Silver dans le coffre du véhicule de Monsieur X... ; que Madame H... Stéphanie, vendeuse, dont Monsieur X... entend se prévaloir du témoignage, a précisé, tant dans son attestation que devant les services enquêteurs, que, le 5 octobre 2006, elle s'était absentée de la surface de vente, en sorte qu'elle n'avait pu voir ce que faisait Monsieur X... qui était resté en magasin pendant dix minutes à un quart d'heure ; qu'enfin, l'interrogatoire de Monsieur X... au cours duquel, bien que ne déniant pas la présence du blouson litigieux dans son véhicule, explique qu'il s'agissait « d'un dépôt volontaire », ce qui ne résulte que de ses déclarations ; que, par ailleurs, les témoignages vantant les mérites et la moralité de l'intimé sont dénués de toute pertinence au regard des constatations qui précèdent ; qu'enfin, les allégations de harcèlement moral qu'il aurait subi de la part de son employeur ne sont pas de nature à exonérer Monsieur X... des agissements évoqués à l'appui de la mesure de licenciement ; que, dès lors que les faits de détournement de marchandise au préjudice de l'employeur sont retenus, le maintien de Monsieur X... dans l'entreprise pendant la durée de son préavis était impossible en dépit de son ancienneté » ;
Alors, d'une part, qu'en s'appuyant sur les déclarations de Messieurs Y... et Z... pour retenir la réalité du vol imputé à Monsieur X..., sans tenir compte, ainsi qu'elle y était cependant invitée, des résultats de l'enquête policière diligentée à cette occasion et dont résultait le caractère mensonger desdites déclarations, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1234-1 et L.1235-1 du code du travail ;
Alors, d'autre part, que les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que, dans une attestation, Madame Hélène A..., salariée de la société ASTRAGALE de septembre 2005 à juin 2009, déclarait : « Au cours de la période précédant le licenciement du salarié , Monsieur Bernard B... m'a fait faire une attestation sous contrainte à l'encontre de Monsieur X... Richard déclarant avoir vu celui-ci voler de la marchandise dans le magasin en contrepartie d'un licenciement « à l'amiable ».(..) Et j'ai appris qu'à l'encontre de Monsieur X... Richard, les employés ayant fait une déposition ont tous reçu une prime de 600 ¿, sauf moi, ce qui m'a fait conclure qu'il s'agissait d'un coup monté. Cette somme a été versée sous forme de prime dans le mois qui a suivi l'arrestation de Monsieur X... Richard » ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans examiner l'attestation de Madame A... que le salarié versait aux débats pour établir que l'accusation de vol portée à son encontre avait été montée de toutes pièces, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors, enfin et en tout état de cause, que la faute grave n'est caractérisée que si le comportement du salarié rend impossible son maintien dans l'entreprise ; qu'en se fondant, pour caractériser la faute grave, sur le vol d'un blouson prétendument commis le 5 octobre 2006, quand un tel fait, isolé, n'avait causé aucun préjudice à l'employeur et concernait un salarié qui comptait plus de vingt-deux ans d'ancienneté et dont le comportement antérieur était irréprochable, ce dont il résulte que le vol reproché au salarié n'était pas, compte tenu des circonstances de la cause, d'une importance telle qu'il rendait impossible son maintien dans l'entreprise, la cour d'appel a violé, ensemble, les articles L.1234-1, L.1234-5 et L.1234-9 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur X... de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour harcèlement moral;
Aux motifs que : « les allégations de harcèlement moral qu'il aurait subi de la part de son employeur ne sont pas de nature à exonérer Monsieur X... des agissements évoqués à l'appui de la mesure de licenciement » ;
Alors qu'en se bornant à relever que les allégations de harcèlement moral n'exonéraient pas le salarié des faits qui lui étaient reprochés à l'appui de son licenciement, sans rechercher, ainsi qu'elle y était cependant invitée, si, indépendamment de ces faits, Monsieur X... n'avait pas été victime, de la part de Monsieur Bernard B..., d'agissements constitutifs d'un harcèlement moral, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1152-1 et L.1154-1 du code du travail ;
Alors, à tout le moins, qu'en statuant comme elle l'a fait, sans analyser, même sommairement, les éléments de preuve produits par le salarié pour établir le harcèlement moral dont il avait été victime de la part de son employeur, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-16168
Date de la décision : 25/09/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 06 décembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 25 sep. 2013, pourvoi n°12-16168


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.16168
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