LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 270 et 271 du code civil ;
Attendu que pour attribuer à Mme X... une prestation compensatoire de 115 000 euros, l'arrêt attaqué retient, s'agissant de la situation patrimoniale de M. Y..., qu'il est propriétaire en propre d'une maison à Montmeyran en indivision avec ses deux soeurs, de l'ancien domicile conjugal et d'un ensemble immobilier en indivision à Chabeuil ;
Qu'en statuant ainsi, sans procéder à une évaluation au moins sommaire de ce patrimoine, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné M. Y... à payer à Mme X... une prestation compensatoire de 115 000 euros, l'arrêt rendu le 13 décembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze septembre deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par Me Jacoupy, avocat aux Conseils, pour Mme X....
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué de n'avoir condamné Monsieur Y... à payer à Madame X... qu'une somme de 115.000 euros
en capital à titre de prestation compensatoire,
AUX MOTIFS QUE
« Il est de jurisprudence constante que la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre, en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible.
En l'espèce, les situations respectives des deux époux sont les suivantes :
A - Monsieur Bernard Y...
né le 27 mars 1948, 63 ans, marié le 20 août 1994, durée 16 ans ordonnance de non-conciliation du 20 mars 2007, Assignation du 31 juillet 2009, divorce le 19 octobre 2010, Directeur général adjoint d'hôpital jusqu'au 31 décembre 2011, traitement 2009 : 89 047 euros : 12 = 7 420,59 euros par mois traitement 2010 : 89 775 euros : 12 = 7 480,25 euros par mois plus revenus fonciers 754 euros par mois,
déclare qu'il aura à compter du 1er janvier 2010 une retraite de 3 100 euros par mois.
Compte à terme : 90 212 euros Assurance vie : 383 euros Pension CNRACC : 3.862 euros par an. Verse 1 300 euros à Madame Maïssa X... constituée du devoir de secours, Verse 500 euros par mois à l'un de ses deux enfants Myriam Y...,
Propriétaire en propre :
- maison de Montmeyran (Drôme) donnée en avancement d'hoirie en indivision avec ses deux soeurs, - ancien domicile conjugal, - ensemble immobilier en indivision à Chabeuil (Drôme), - maison d'Allex (Drôme), espérance successorale....
- impôt sur le revenu et taxes foncières, Traitement cardiaque,
B - Madame Maïssa X...
née le 27 décembre 1951, 59 ans, mariée le 20 août 1994, durée 16 ans ordonnance de non-conciliation du 20 mars 2007, Assignation du 31 juillet 2009, divorce le 19 octobre 2010,
bénéficiaire jusqu'au divorce d'une pension de 1 300 euros au titre du devoir de secours plus gîtes, Exploitante de gîtes et de chambres d'hôte, Activité estimée déficitaire par elle.
Retraite prévisible : 400 euros par mois en 2012, Faibles montants sur ses comptes personnels (- 149,41 euros, + 540,06 euros, +1346,48 euros).
Occupe un des deux gîtes de son entreprise comme logement principal.
La Cour dispose d'éléments d'appréciation suffisants pour confirmer le jugement du 19 octobre 2010 qui a condamné Monsieur Bernard Y... à payer à Madame Maïssa X... la somme de 115.000 euros au titre de prestation compensatoire, les appels principal et incident ne sont pas admis »,
ET AUX MOTIFS, ADOPTES DU PREMIER JUGE, QUE
« Attendu qu'il ressort du dossier que le mariage des époux Y... aura duré 16 ans, la vie commune ayant duré environ 13 ans ;
Que cette union est intervenue alors que Madame Maïssa X... était âgée d'environ 42 ans ; Que Madame Maïssa X... dit avoir travaillé avant cette union ; Que cependant, elle ne fournit aucun élément précis quant à sa carrière professionnelle avant son mariage avec Monsieur Bernard Y..., si ce n'est le montant de sa pension de retraite qui s'élèvera à 400 euros par mois ;
Qu'au cours du mariage elle a créé avec son mari une activité de location de gîtes et de chambres d'hôtes ; Que cette activité déficitaire devrait s'arrêter à la fin de l'année 2010 ;
Qu'au regard de son âge, 58 ans, aucune reconversion professionnelle ne peut sérieusement être envisagée ;
Qu'ainsi après le divorce, Madame Maïssa X... ne disposera, comme seuls revenus, que de la pension de retraite ci-dessus visée ;
Qu'il ressort de son attestation sur l'honneur, qu'elle n'est propriétaire d'aucun bien immobilier ;
Attendu que Monsieur Bernard Y..., âgé de 62 ans, est directeur hospitalier, employé par le centre hospitalier de SAINT ÉTIENNE ; Qu'a ce titre, il a perçu, pour l'année 2009, une rémunération imposable de 89.047 euros (dont 9.702 euros en avantage en nature) ; Qu'il perçoit aussi une pension annuelle de 3.713 euros par mois, outre des revenus locatifs ;
Que Monsieur Bernard Y... est titulaire, en propre, de divers droits immobiliers dont l'un porte sur un ensemble immobilier évalué à 620.000 euros, qui a été rénové au moyen de fonds communs ; Que Monsieur Bernard Y... a évalué à la somme de 320.000 euros la récompense due par lui à la communauté ;
Qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments, que le divorce engendrera, au préjudice de Madame Maïssa X..., une disparité au sens du texte précité ;
Que cette disparité justifie une prestation compensatoire de 115.000 euros ; Que cette dernière sera versée en capital par Monsieur Bernard Y... ».
ALORS QUE,
Pour fixer la prestation compensatoire, le juge doit procéder à une évaluation au moins sommaire du patrimoine des époux ; qu'ainsi, en se bornant à relever que Monsieur Y... était propriétaire en propre d'une maison à Montmeyran en indivision avec ses deux soeurs, de l'ancien domicile conjugal, d'un ensemble immobilier en indivision à Chabeuil, sans procéder à une évaluation au moins sommaire de chacun de ces biens, la Cour d'Appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 270 et 271 du Code Civil.