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10/07/2013 | FRANCE | N°12-28093

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 juillet 2013, 12-28093


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance d'Asnières-sur-Seine, 5 novembre 2012) que le Syndicat national de l'assurance et de l'assistance CFTC (SN2A-CFTC), a, le 15 juin 2012, informé l'union économique et sociale (UES) formée par les sociétés IHS, Europ assistance holding, Europ assistance France, Europ télé assistance, Europ assistance et E3 de la désignation de Mme X... en qualité de représentant syndical au comité d'entreprise de l'UES ; que les sociétés c

omposant l'UES ont saisi le tribunal d'instance pour faire annuler cette dé...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance d'Asnières-sur-Seine, 5 novembre 2012) que le Syndicat national de l'assurance et de l'assistance CFTC (SN2A-CFTC), a, le 15 juin 2012, informé l'union économique et sociale (UES) formée par les sociétés IHS, Europ assistance holding, Europ assistance France, Europ télé assistance, Europ assistance et E3 de la désignation de Mme X... en qualité de représentant syndical au comité d'entreprise de l'UES ; que les sociétés composant l'UES ont saisi le tribunal d'instance pour faire annuler cette désignation, au motif que ce syndicat n'ayant pas eu d'élu au comité d'entreprise lors des dernières élections, ne remplissait pas les conditions prévues à l'article L. 2324-2 du code du travail pour y désigner un représentant ;

Attendu que le syndicat fait grief au jugement d'annuler cette désignation, alors, selon le moyen, que saisi d'une exception d'incompatibilité avec les engagements internationaux de la France de l'article L. 2324-2 du code du travail réservant aux seuls syndicats ayant obtenu des élus au comité d'entreprise le droit d'y désigner leurs représentants, le tribunal, en disant que ces dispositions n'étaient pas contraires aux articles 11 et 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sans rechercher si tel était le cas au regard des autres engagements internationaux de la France tels que les articles 5 et 6 de la Charte sociale européenne, 5 de la convention n° 135 de l'OIT, 3 et 8 de la convention n° 27 de l'OIT, 4 de la convention n° 98 de l'OIT et 12 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 12 du code de procédure civile ;

Mais attendu, d'abord, que selon l'article 52 § 5 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'invocation devant le juge des dispositions de la Charte qui contiennent des principes n'est admise que pour l'interprétation et le contrôle de la légalité des actes des Etats membres lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union ;

Attendu, ensuite, que le tribunal, après avoir écarté à bon droit une contrariété de l'article L. 2324-2 du code du travail avec les exigences des articles 11 et 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, n'avait pas à rechercher si ce texte n'était pas contraire aux autres engagements internationaux de la France ;

Qu'il s'ensuit que le moyen, inopérant en ce qu'il fait grief au jugement de ne pas avoir recherché si les dispositions légales critiquées n'étaient pas contraire à l'article 12 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix juillet deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour le Syndicat national de l'assurance et de l'assistance CFTC et Mme X...

Le moyen reproche au jugement attaqué D'AVOIR écarté l'exception de non-conventionalité soulevée par le Syndicat SN2A-C.F.T.C. et Mme X... et D'AVOIR prononcé l'annulation de la désignation de Mme X... en qualité de représentant syndical SN2A-C.F.T.C. au comité d'entreprise de l'UES Europ Assistance.

AUX MOTIFS QUE l'article 55 de la Constitution du 4 octobre 1958 rappelle que « les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie » et le juge judiciaire doit assurer le contrôle du respect des engagements internationaux souscrits par la France ; qu'en l'espèce, le syndicat National de l'Assurance et de l'Assistance CFTC (SN2A-CFTC) et Mme X... soulèvent la non-conventionalité de l'article L 2324-2 du code du travail, lequel serait contraire aux articles 11 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme relatifs d'une part à la liberté de réunion et d'association, et, par extension, à la liberté syndicale, et d'autre part, à l'interdiction de la discrimination ; que l'article L 2324-2 du code du travail dispose que « Sous réserve des dispositions applicables dans les entreprises de moins de trois cents salariés, prévues à l'article L. 2143-22, chaque organisation syndicale ayant des élus au comité d'entreprise peut y nommer un représentant. Il assiste aux séances avec voix consultative. Il est choisi parmi les membres du personnel de l'entreprise et doit remplir les conditions d'éligibilité au comité d'entreprise fixées à l'article L. 2324-15 » ; que cette règle légale impose en effet aux syndicats une condition d'obtention d'élus au comité d'entreprise pour pouvoir y nommer un représentant ; que cependant, l'article 11 de la Convention européenne des droits de l'homme qui dispose en son alinéa 1er que « toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association, y compris le droit de fonder avec d'autres des syndicats et de s'affilier à des syndicats pour la défense de ses intérêts » n'interdit nullement à un État de prévoir des modalités d'exercice du droit syndical dès lors que celles-ci sont objectives, c'est-à-dire en l'espèce, la condition de représentativité au sein de l'entreprise ; que s'agissant de l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, celui-ci pose le principe de l'interdiction de la discrimination ; que si ce texte préconise un traitement égal entre deux syndicats en situation égale, il n'interdit pas davantage à la loi de prévoir un traitement différent pour deux syndicats en situation différente dès lors que cette différence découle d'une condition objective ; qu'en effet, force est de constater qu'en l'espèce, le syndicat SN2A-CFTC ne dispose pas d'élus au sein du comité d'entreprise de l'UES « Europ Assistance » ; qu'il ne saurait dès lors se prévaloir des mêmes droits qu'un autre syndicat qui a des élus ; que le syndicat SN2A ne saurait en outre arguer de la privation de ses droits par l'impossibilité d'accéder à l'information qui lui permettrait de participer efficacement aux négociations, dès lors que la loi prévoit d'autres moyens d'action au sein de l'entreprise, de sorte qu'il n'y a aucune rupture d'égalité de traitement ; qu'ainsi, il n'est pas contesté en l'espèce que l'UES a plus de trois cents salariés ; qu'il n'est pas davantage contesté que le syndicat SN2A-CFTC n'a aucun élu au comité d'entreprise de l'UES « Europe Assistance » ; qu'en conséquence, il y a lieu de faire application de l'article L 2324-2 du code du travail, de faire droit à la demande des sociétés IHS, Europ Assistance Holding, Europ Assistance France, Europ Télé Assistance, Europ Assistance et E3, et de prononcer l'annulation de la désignation de Mme X... en qualité de représentant syndical au comité d'entreprise ;

ALORS QUE, saisi d'une exception d'incompatibilité avec les engagements internationaux de la France de l'article L 2324-2 du code du travail réservant aux seuls syndicats ayant obtenu des élus au comité d'entreprise le droit d'y désigner leurs représentants, le tribunal, en disant que ces dispositions n'étaient pas contraires aux articles 11 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sans rechercher si tel était le cas au regard des autres engagements internationaux de la France tels que les articles 5 et 6 de la Charte sociale européenne, 5 de la convention n° 135 de l'OIT, 3 et 8 de la convention n° 27 de l'OIT, 4 de la convention n° 98 de l'OIT et 12 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 12 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-28093
Date de la décision : 10/07/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance d'Asnières-sur-Seine, 05 novembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 jui. 2013, pourvoi n°12-28093


Composition du Tribunal
Président : M. Béraud (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Fabiani et Luc-Thaler

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.28093
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