LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon le jugement attaqué, que M. X..., éleveur, qui se fournissait auprès de la société Aliments Lagrost (la société) pour l'engraissement de son bétail, ayant constaté, courant septembre 2008, la mort de deux bovins, par acidose, a assigné la société en réparation de son préjudice ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1354 du code civil, ensemble l'article 1147 du même code ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que le comportement d'une partie ne peut être retenu contre elle que s'il porte sur un point de fait et non sur un point de droit ;
Attendu que, pour condamner la société à verser à M. X... une somme à titre de dommages-intérêts, le jugement retient que, dès la constatation de la mort du premier bovin, la société a demandé une autopsie de l'animal, à laquelle il a été procédé, qu'au vu des résultats de cette autopsie, elle a procédé à la livraison d'une nouvelle composition d'aliment et qu'elle a ainsi reconnu sans ambiguïté une part de responsabilité dans l'état sanitaire des animaux qu'elle contribuait à alimenter ;
Qu'en statuant ainsi, la juridiction de proximité a violé les textes susvisés ;
Et sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 1315 du code civil ;
Attendu que, selon ce texte, le silence opposé à l'affirmation d'un fait ne vaut pas à lui seul reconnaissance de ce fait ;
Attendu que pour se prononcer comme il a été dit, le jugement énonce que la société Aliments Lagrost n'avait pas contesté la mention par M. X... d'une proposition amiable de dédommagement qu'elle aurait présentée dans les jours qui ont suivi le deuxième décès ;
Qu'en statuant ainsi, la juridiction de proximité a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la deuxième branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il annule le rapport d'expertise de M. Y..., le jugement rendu le 5 mars 2012, entre les parties, par la juridiction de proximité de Mâcon ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant la juridiction de proximité de Chalon-sur-Saône ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix juillet deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Ricard, avocat aux Conseils, pour la société Aliments Lagrost.
Il est fait grief au jugement attaqué d'avoir condamné la SARL Aliments Lagrost à payer à Monsieur Bernard X... la somme de 1.072,33 euros ;
AUX MOTIFS QUE « dès la constatation du décès du premier bovin, la SARL Aliments Lagrost a demandé une autopsie sur l'animal, à laquelle il a été procédé ; qu'au vu des résultats la SARL Aliments Lagrost a procédé à la livraison d'une nouvelle composition d'aliment ; qu'elle a ainsi reconnu sans ambiguïté une part de responsabilité dans l'état sanitaire des animaux qu'elle contribuait à alimenter ; quelle n'a pas contesté la mention par Monsieur Bernard X... d'une proposition amiable de dédommagement qu'elle aurait présentée dans les jours qui ont suivi le deuxième décès ;qu'il est dés lors établi que la SARL Aliment Lagrost a une part de responsabilité dans le décès des bovins de Monsieur Bernard X... ; que la SARL Aliments Lagrost doit contribuer à la réparation du préjudice subi par Monsieur Bernard X... pour un tiers ; qu'elle sera condamné à lui payer la somme de 1.072,33 euros » (Jugement, p. 4, 4ème et 5ème §) ;
ALORS QUE une reconnaissance de responsabilité, en ce qu'elle porte sur un point de droit, ne saurait constituer un aveu opposable à son auteur de nature à engager sa responsabilité ; qu'en déduisant de la livraison, par la SARL Aliments Lagrost d'une nouvelle composition d'aliment suite aux résultats de l'autopsie procédée sur le bovin décédé, la reconnaissance d'une part de responsabilité de la société dans le décès des animaux, la juridiction de proximité a violé l'article 1354 du code civil, ensemble l'article 1147 du même code ;
ALORS, en tout état de cause, QU'une reconnaissance de responsabilité doit être non équivoque ; qu'en estimant que, par la livraison d'une nouvelle composition d'aliment consécutive aux résultats d'une autopsie de l'animal, la SARL Aliments Lagrost a reconnu sans ambiguïté une part de responsabilité dans l'état sanitaire des animaux qu'elle contribuait à alimenter, la juridiction de proximité, qui n'a pas caractérisé une reconnaissance claire et non équivoque de responsabilité, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
ALORS QUE l'absence de contestation d'un fait n'emporte pas reconnaissance celui-ci ; qu'en considérant, pour retenir une part de responsabilité de la société Aliments Lagrost dans le décès des bovins, que cette dernière n'avait pas contesté la mention par Monsieur X... d'une proposition amiable de dédommagement qu'elle aurait présentée dans les jours qui ont suivi le deuxième décès, la juridiction de proximité a violé l'article 1315 du code civil.