LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par acte du 1er juillet 2003, les époux X... ont acquis des époux Y... le 1er juillet 2003 un fonds de commerce de bar-hôtel-journaux-brasserie à Mézières sur Seine, qui a été exploité, sous l'enseigne « Café de la gare », par Mme Z... épouse X... ; que celle-ci a engagé le 1er décembre 2004 Mme A... en qualité de cuisinière ; que l'activité de l'établissement ayant été interrompue par suite de difficultés économiques, cette dernière a cessé de travailler et de percevoir son salaire à compter du mois de juin 2008 ; que par jugement du 3 juin 2008, Mme X... a fait l'objet d'une liquidation judiciaire, M. B... étant désigné en qualité de liquidateur judiciaire ; que la poursuite de l'activité a été autorisée pour une durée de trois mois à compter du 3 septembre 2008 ; que cette période a été renouvelée pour trois mois supplémentaires ; que par arrêt du 27 septembre 2008, la cour d'appel de Versailles a prononcé la nullité de la vente du fonds de commerce ; que par jugement du 28 octobre 2008, a été prononcée la cessation totale de l'activité du « Café de la gare » ; qu'un mandataire a été désigné par ordonnance du président du tribunal de commerce du 9 juillet 2008 pour procéder au licenciement des deux salariées de l'établissement ; que par ordonnance du 10 décembre 2008, il a été mis fin à cette mission en raison du transfert des contrats de travail au profit des époux Y..., opéré par la nullité de la cession ; que ces derniers ont refusé de reprendre le contrat de travail de Mme A... ; que celle-ci a saisi la juridiction prud'homale aux fins, notamment, de résiliation judiciaire de son contrat de travail et de remise de documents sociaux conformes ;
Sur les premier et deuxième moyens :
Attendu qu'il n' y a pas lieu de statuer sur ces moyens, qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le troisième moyen :
Vu les articles L. 1234-19, D. 1234-6, D. 1234-7 et R. 1234-9 du code du travail ;
Attendu que l'arrêt ordonne au liquidateur judiciaire de remettre à la salariée un certificat de travail, un solde de tout compte et une attestation destinée à l'Assedic ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses énonciations qu'au moment de la rupture, le contrat de travail avait été transféré aux époux Y..., ce dont il résultait que la remise des documents sociaux leur incombait, en leur qualité d'employeur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il ordonne à M. B... ès qualités de remettre à Mme A... une attestation pour l'Assedic, un solde de tout compte et un certificat de travail, l'arrêt rendu le 2 novembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois juillet deux mille treize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas, avocat aux Conseils, pour M. B..., M. et Mme X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir fixé à 1 289,60 ¿ le montant des salaires restant dus au titre des mois de juin à septembre 2008 et fixé la créance de Madame Corinne A... au passif de la liquidation judiciaire de Madame X... au montant de 3719, 37 € au titre des heures complémentaires,
AUX MOTIFS QUE Madame A... réclame la somme de 1 224,87 € au titre de son salaire de juin 2008, celle de 1 292,82 €s au titre de juillet 2008, celle de 1 066, 37 € pour le mois d'août et celle de 1 971,05 € pour septembre soit un total de 5 555,11 € ; que les bulletins de salaires de ces 4 mois font apparaître des salaires nets de 894,41 € (juin), 943,61 € (juillet), 832,94 € (août) et 1 539,57 € (septembre) étant précisé qu'elle a perçu une indemnité de congés payés de 882,64 € au cours de ce mois ; qu'elle ne conteste pas avoir reçu du mandataire liquidateur deux versements d'un montant total de 2 130 € net soit 2 752,29 € brut ; que compte tenu de ces éléments, il lui reste dû une somme de 1 289,60 € au titre de la période ; qu'il y a lieu d'inscrire cette somme au passif de la liquidation Madame A... réclame une somme de 3 719,37 € en soutenant qu'elle a effectivement travaillé 151,67 heures par semaine alors que ses bulletins de salaire mentionnaient une durée de 140,83 heures ; que le salarié produit plusieurs attestations émanant de clients de l'établissement dont il résulte que Madame A... commençait chaque matin à 08 h 00 et finissait à 15 h 00 ; que l'employeur conteste la valeur de ces témoignages, qui pourtant émanent de tiers non placés dans un lien de subordination ou de dépendance par rapport à lui même ou à la salariée mais en même temps soutient que cette dernière travaillait 5 jours par semaine de 8 h 15 à 15 h 00 ce qui fait un total hebdomadaire de 34 h 10 et un total mensuel beaucoup plus proche des 151,67 h de droit commun que des 140, 83 h mentionnées sur les bulletins de salaire ; que quoiqu'il en soit, en l'absence de contrat écrit précisant le nombre d'heures effectuées le contrat de travail doit être présumé à temps plein et la durée doit être en conséquence fixée à 151,67 heures ; que Madame A... est donc fondée à demander à Madame X... de ce chef une somme de 3 719,37 € et que le jugement sera confirmé de ce chef,
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE Madame A... déclare sans être contredite à la barre avoir effectué 151,67 heures de travail par mois soit 39 heures par semaine, ce qui aurait dû induire un contrat à temps plein et non à temps partiel ; que le conseil se forme la conviction que Madame A... a bien effectué des heures complémentaires à son contrat de travail initialement prévu et lui accordera la somme de 3 719,37 € à titre de paiement des heures complémentaires effectuées,
ALORS QUE l'absence d'écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l'emploi est à temps complet ; que l'employeur peut renverser cette présomption, à charge pour lui de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en faisant application de la présomption de l'article L. 3123-14 du code du travail au motif qu'il n'existait pas de contrat de travail écrit, cependant qu'elle avait constaté que l'employeur rapportait la preuve que la salarié accomplissait un horaire de 140 h 83 tel que mentionné sur les bulletins de paie, la cour d'appel a violé l'article L. 3123-14 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir fixé la créance de Madame Corinne A... au passif de la liquidation judiciaire de Madame X... au montant de 8 297,94 € à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé,
AUX MOTIFS QUE Madame A... réclame une somme de 3 719,37 € en soutenant qu'elle a effectivement travaillé 151,67 heures par semaine alors que ses bulletins de salaire mentionnaient une durée de 140,83 heures ; que la salariée produit plusieurs attestations émanant de clients de l'établissement dont il résulte que Madame A... commençait chaque matin à 08 h 00 et finissait à 15 h 00 ; que l'employeur conteste la valeur de ces témoignages, qui pourtant émanent de tiers non placés dans un lien de subordination ou de dépendance par rapport à lui même ou à la salariée mais en même temps soutient que cette dernière travaillait 5 jours par semaine de 8 h 15 à 15 h 00 ce qui fait un total hebdomadaire de 34 h 10 et un total mensuel beaucoup plus proche des 151,67 h de droit commun que des 140, 83 h mentionnées sur les bulletins de salaire ; que quoiqu'il en soit, en l'absence de contrat écrit précisant le nombre d'heures effectuées le contrat de travail doit être présumé à temps plein et la durée doit être en conséquence fixée à 151, 67 heures ; que Madame A... est donc fondée à demander à Madame X... de ce chef une somme de 3 719,37 € et le jugement sera confirmé de ce chef,
ET AUX MOTIFS QUE si l'absence d'archives antérieures à 2007 ne permet pas de savoir si la déclaration d'embauche de Madame A... a bien été effectuée à l'Urssaf et si les mentions portées sur les bulletins de salaires semblent indiquer que la situation de la salariée était normale au regard des obligations de l'employeur vis-à-vis de cette administration, il n'en demeure pas moins que la dissimulation régulière d'une partie du salaire de Madame A... dont la preuve a été rapportée ci-dessus revêt un caractère intentionnel qui caractérise la dissimulation frauduleuse d'une partie de son travail ; que c'est donc à juste titre que le conseil de prud'hommes a condamné Madame X... à payer à la salariée l'indemnité prévue par l'article L. 8223-1 du code du travail,
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il apparaît qu'il y a manifestement un travail dissimulé de la part de la société exploitée par Madame X... et qu'en conséquence le conseil accordera à Madame A... une indemnité correspondant à six mois de salaire soit la somme de 8 294 €,
ALORS, D'UNE PART, QUE la dissimulation d'emploi salarié n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué ; que le caractère intentionnel du travail dissimulé ne se déduit pas de la seule absence des heures réellement effectuées par le salarié sur la fiche de paie ; qu'en se fondant sur l'absence des heures réellement effectuées par le salarié sur la fiche de paie pour en déduire que l'employeur avait agi de manière intentionnelle, la cour d'appel a violé les articles L. 8221-5 et L. 8223-1 du code du travail,
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 du code du travail ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 du même code a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire ; qu'en fixant la créance de Madame Corinne A... au passif de la liquidation judiciaire de Madame X... à la somme de 8 297,94 € à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé sans même préciser quel était le salaire brut mensuel de la salariée, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a privé sa décision de base légale au regard des articles précités.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir ordonné à Maître B... d'avoir à remettre à Madame A... un certificat de travail, un solde de tout compte, et une attestation Assedic,
AUX MOTIFS QU'il convient de faire injonction à Maître B... pris en sa qualité de mandataire liquidateur de Madame X... de remettre à Madame A... une attestation Assedic, un solde de tout compte et un certificat de travail,
ALORS ENFIN QUE seul l'employeur qui a prononcé la rupture peut délivrer les documents sociaux ; qu'ayant relevé que le mandataire liquidateur n'était pas responsable de la rupture du contrat de travail de Madame A... qu'elle imputait, à bon droit, aux époux Y... en les condamnant au paiement de diverses indemnités de rupture et dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel ne pouvait pas enjoindre à Maître B..., pris en sa qualité de mandataire liquidateur de Madame Chantal Z..., à remettre à Madame A... dans le mois suivant la notification de l'arrêt, un certificat de travail, un solde de tout compte, une attestation Assedic et des bulletins de salaires conformes aux dispositions du présent arrêt sans violer les articles L. 1234-19 et suivants du code du travail.