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26/06/2013 | FRANCE | N°12-12931

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 juin 2013, 12-12931


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :
Vu l'article 1134 du code civil,
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 8 avril 1994 par la société Ascom, aux droits de laquelle se trouve la société Duons SE, et occupait en dernier lieu les fonctions de directeur commercial ; que le 30 novembre 2008, il est passé au service de la société Airmedis ; que par lettre du 31 août 2009, il a été licencié pour faute grave par la société Airmedis ; que, contestant le transfert de son contrat de travail et

la légitimité de son licenciement, M. X... a saisi la juridiction prud'homale...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :
Vu l'article 1134 du code civil,
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 8 avril 1994 par la société Ascom, aux droits de laquelle se trouve la société Duons SE, et occupait en dernier lieu les fonctions de directeur commercial ; que le 30 novembre 2008, il est passé au service de la société Airmedis ; que par lettre du 31 août 2009, il a été licencié pour faute grave par la société Airmedis ; que, contestant le transfert de son contrat de travail et la légitimité de son licenciement, M. X... a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes dirigées à l'encontre de la société Duons SE et de M. Y... en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Airmedis ;
Attendu que, pour décider de l'application volontaire des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail et mettre hors de cause la société Duons SE, l'arrêt retient que le salarié en sa qualité de cadre dirigeant avait nécessairement contribué au projet de transfert de l'activité en cause, que ses fonctions de directeur commercial s'étaient poursuivies au sein de la société Airmedis suivant la même rémunération et sans contestation de sa part, et que le 24 avril 2009, il écrivait un courriel indiquant que la société Airmedis reprenait les engagements de la société Ascom ;
Attendu, cependant, que lorsque les conditions d'application de l'article L. 1224-1 du code du travail ne sont pas réunies, le transfert du salarié d'une entreprise à une autre constitue une modification du contrat de travail qui ne peut intervenir sans son accord exprès, lequel ne peut résulter de la seule poursuite de ce contrat ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, sans constater que le salarié avait donné son accord exprès au transfert de son contrat de travail à la société Airmedis, la cour d'appel a violé l'article susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a mis hors de cause la société Duons SE, l'arrêt rendu le 30 novembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne la société Duons SE aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Duons SE à verser à M. X... la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six juin deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que l'article L. 1224-1 du Code du travail s'applique ET D'AVOIR mis hors de cause la société DUONS SE, venant aux droits de la société ASCOM ;
AUX MOTIFS QUE « sur le transfert de son contrat de travail, (¿) l'appelant fait valoir que le transfert de son contrat de travail lui a été imposé ; qu'il conteste l'application de l'article L. 1224-1 du (Code) du travail notamment au motif de l'absence d'une entité économique autonome du fait de l'absence de personnel dédié à l'activité IAS ; mais (¿) qu'il résulte des pièces du dossier que Philippe X... était cadre dirigeant de la société ASCOM ; qu'il faisait partie du Codir de la société ; qu'il était donc nécessairement, sinon directement à l'origine du projet, à tout le moins parfaitement informé des conditions et des conséquences de son transfert au sein de la société AIRMEDIS, dans le cadre du transfert de l'activité IAS ; qu'il convient de relever que ce projet de transfert a été soumis au comité d'entreprise d'ASCOM SAS dans le cadre d'une information et d'une consultation globale, incluant également la mise en oeuvre d'un licenciement collectif pour motif économique ; que Philippe X... ne peut valablement soutenir que la société lui aurait imposé d'autorité un transfert auquel il a, en sa qualité de dirigeant, contribué et qui lui a manifestement évité d'être licencié ; qu'il ne peut davantage soutenir qu'il ignorait la position de l'inspecteur du travail au sujet des transferts ; (¿) que la continuité de la relation de travail au sein de la société AIRMEDIS où il occupait les fonctions de directeur et de marketing et commercial avec la même rémunération n'a pas été contestée ; qu'il écrivait le 24 avril 2009 : « ce mail pour te confirmer qu'AIRMEDIS reprend les engagements d'ASCOM en tous points » ; que ces éléments établissent l'application volontaire de l'article L. 1224-1 du Code du travail ; qu'il y a donc lieu de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a retenu l'application de cet article et mis hors de cause la société SASU DUONS SE » (arrêt, p. 6) ;
1./ ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe du contradictoire ; qu'il ne peut ni relever d'office un moyen de droit ni retenir un fait qui n'a pas été spécialement invoqué par les parties au soutien de leurs prétentions, sans provoquer au préalable leurs observations ; que pour mettre hors de cause la société DUONS SE, venant aux droits de la société ASCOM, et juger que l'article L. 1224-1 du Code du travail s'appliquait en relevant d'office un moyen tiré de l'application volontaire de ce texte au motif que le salarié avait écrit le 24 avril 2009 un mail (à un client) confirmant que la société AIRMEDIS reprenait les engagements de la société ASCOM, quand aucune des parties ne soutenait qu'il y avait eu application volontaire de l'article L. 1224-1 du Code du travail et que l'exposant, qui contestait le transfert, n'avait produit le mail du 24 avril 2009 que pour contester son avertissement du 27 avril 2009 ; qu'en relevant d'office ce moyen, sans inviter au préalable les parties à s'expliquer, la Cour d'appel a violé, ensemble, les articles 4, 7 et 16 du Code de procédure civile ;
2./ ALORS, A TITRE SUBSIDIAIRE, QUE, lorsque les conditions posées par l'article L. 1224-1 du Code du travail ne sont pas remplies, le transfert du contrat de travail du salarié ne peut intervenir qu'avec son accord exprès ; que, pour mettre hors de cause la société DUONS SE, venant aux droits de la société ASCOM, et juger qu'il y avait application volontaire de l'article L. 1224-1 du Code du travail, la Cour d'appel, qui s'est bornée en l'espèce à énoncer, de manière inopérante, que le salarié était cadre dirigeant, faisait partie du Codir de la société ASCOM, qu'il ne pouvait ignorer le projet de transfert soumis au comité d'entreprise de la société ASCOM dans le cadre d'une information et d'une consultation globale des salariés, et la position de l'inspecteur du travail à ce sujet, qui avait continué à occuper au sein de la société AIRMEDIS les fonctions de directeur commercial avec la même rémunération, ou encore qu'il avait écrit le 24 avril 2009 un mail (à un client) indiquant que la société AIRMEDIS reprenait les engagements de la société ASCOM (devenue DUONS), quand ces motifs étaient impropres à caractériser l'accord exprès que le salarié aurait donné à son employeur en vue du transfert de son contrat de travail au profit de la société AIRMEDIS, que dès lors, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1224-1 du Code du travail et 1134 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que l'article L. 1224-1 du Code du travail s'appliquait au transfert du contrat de travail de M. X... de la société ASCOM à la société AIRMEDIS ET D'AVOIR mis hors de cause la société DUONS SE, venant aux droits de la société ASCOM ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur le transfert de son contrat de travail, (¿) l'appelant fait valoir que le transfert de son contrat de travail lui a été imposé ; qu'il conteste l'application de l'article L. 1224-1 du (Code) du travail notamment au motif de l'absence d'une entité économique autonome du fait de l'absence de personnel dédié à l'activité IAS ; mais (¿) qu'il résulte des pièces du dossier que Philippe X... était cadre dirigeant de la société ASCOM ; qu'il faisait partie du Codir de la société ; qu'il était donc nécessairement, sinon directement à l'origine du projet, à tout le moins parfaitement informé des conditions et des conséquences de son transfert au sein de la société AIRMEDIS, dans le cadre du transfert de l'activité IAS ; qu'il convient de relever que ce projet de transfert a été soumis au comité d'entreprise d'ASCOM SAS dans le cadre d'une information et d'une consultation globale, incluant également la mise en oeuvre d'un licenciement collectif pour motif économique ; que Philippe X... ne peut valablement soutenir que la société lui aurait imposé d'autorité un transfert auquel il a, en sa qualité de dirigeant, contribué et qui lui a manifestement évité d'être licencié ; qu'il ne peut davantage soutenir qu'il ignorait la position de l'inspecteur du travail au sujet des transferts ; (¿) que la continuité de la relation de travail au sein de la société AIRMEDIS où il occupait les fonctions de directeur et de marketing et commercial avec la même rémunération n'a pas été contestée ; qu'il écrivait le 24 avril 2009 : « ce mail pour te confirmer qu'AIRMEDIS reprend les engagements d'ASCOM en tous points » ; que ces éléments établissent l'application volontaire de l'article L. 1224-1 du Code du travail ; qu'il y a donc lieu de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a retenu l'application de cet article et mis hors de cause la société SASU DUONS SE » (arrêt, p. 6) ;
AUX MOTIFS, A LES SUPPOSER ADOPTES, QU' « il convient dans un premier temps d'étudier les conditions de transfert du contrat de travail de Monsieur X... de la Société SASU DUONS SE à la Société AIRMEDIS et d'établir alors, si les dispositions de l'article L. 1224-1 du Code du travail s'appliquent en l'espèce ; (¿) qu'il ressort de l'entier dossier que l'activité IAS a été transférée de la Société SASU DUONS SE vers la Société AIRMEDIS ; que cette activité comprend la commercialisation de terminaux multimédia (bornes), des offres logicielles (trois produits génériques et trois applications spécifiques) notamment dans le domaine de la santé hospitalière ; (¿) que dans le cadre du transfert, la Société SASU DUONS SE a fourni à la Société AIRMEDIS du matériel commercial et électronique, des logiciels multimédia, des clients et des contrats afférents, des droits de propriété intellectuelle, ainsi que du personnel spécifique ; (¿) qu'alors, le Conseil constate que la cession entre les deux Sociétés comprenait notamment des éléments matériels, des éléments incorporels et du personnel, tous ces éléments caractérisant une entité économique autonome ; (¿) qu'il ressort de l'entier dossier également que cette activité était viable en principe, dans la nouvelle structure, la Société AIRMEDIS, des contrats ayant été signés, qu'il importe peu à ce titre que la Société AIRMEDIS ait cru bon transférer, à son tour, l'activité IAS vers une nouvelle structure et autre Société TMM ; (¿) qu'en conséquence de ce qui précède, les dispositions de l'article L. 1224-1 du Code du travail s'appliquaient au transfert du contrat de travail de Monsieur Philippe X..., de la Société SASU DUONES SE à la Société AIRMEDIS ; qu'ainsi, la Société SASU DUONS SE sera mise hors de cause dans le cadre de la présente procédure » (jugement, p. 4-5) ;
1./ ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner, d'une part, les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions et sans préciser, d'autre part, les éléments sur lesquels ils s'appuient pour justifier leur décision ; que l'article L. 1224-1 du Code du travail, interprété à la lumière de la directive n°2001/23/CE du 12 mars 2001 s'applique en cas de transfert d'une entité économique autonome qui conserve son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise lorsqu'un personnel est spécialement affecté à l'activité cédée et que cette activité est viable économiquement, avec une autonomie budgétaire et comptable et est distincte des autres activités de l'entreprise ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel ne pouvait mettre hors de cause la société DUONS SE (aux droits de la société ASCOM), ni juger que l'article L. 1224-1 du Code du travail s'appliquait au transfert du contrat de travail de M. X..., en se bornant en l'espèce à affirmer, de manière générale, qu'il résultait de l'entier dossier que la société ASCOM avait fourni à la société AIRMEDIS des clients, des contrats afférents, du personnel spécifique et que l'activité était viable, sans préciser quels contrats commerciaux auraient été transférés ni viser les pièces démontrant qu'un personnel était spécifique à l'activité cédée et sans examiner les éléments versés aux débats par le salarié, qui démontraient que la prétendue « activité Interactive Solutions » (IAS) n'était pas viable économiquement, n'avait aucune existence budgétaire et comptable avant le transfert, et avait été créée artificiellement par la société ASCOM à partir d'un personnel polyvalent réparti sur l'ensemble de la Division ASCOM-MPS pour faire l'économie de certains licenciements économiques ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
2./ ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE l'accord exprès du salarié est toujours exigé lorsque le transfert du contrat de travail s'accompagne d'une modification autre que le changement d'employeur telle la diminution de ses responsabilités ; qu'en l'espèce, pour mettre hors de cause la société DUONS SE (aux droits de la société ASCOM), et juger que l'article L. 1224-1 du Code du travail s'appliquait au transfert du contrat de travail de M. X..., la Cour d'appel ne pouvait se borner à énoncer que la cession d'activité entre la société ASCOM et la société AIRMEDIS comprenait des éléments matériels, incorporels et du personnel caractérisant l'existence d'une entité économique autonome, que la relation de travail avait continué au sein de la société AIRMEDIS où le salarié occupait des fonctions de directeur commercial avec la même rémunération et à relever que le salarié avait écrit le 24 avril 2009 un mail (à un client) confirmant que la société AIRMEDIS reprenait les engagements de la société ASCOM, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le transfert du contrat de travail du salarié au profit d'une entreprise plus petite ne s'accompagnait pas d'une diminution de fait de ses responsabilités et notamment de ses fonctions managériales de directeur commercial ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil, ensemble, les articles L. 1221-1 et L. 1224-1 11 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-12931
Date de la décision : 26/06/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 30 novembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 jui. 2013, pourvoi n°12-12931


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Coutard et Munier-Apaire, SCP Fabiani et Luc-Thaler

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.12931
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