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25/06/2013 | FRANCE | N°12-84650

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 25 juin 2013, 12-84650


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- Mme Aurélie X...,
- Mme Aurélie Y..., épouse Z...,
- Mme Elise A..., épouse B...,
- Mme Laurence C...,
- Mme Elisa D...,
- Mme Sandrine E...,
- La société Agir recouvrement, parties civiles,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'ANGERS, chambre correctionnelle, en date du 5 avril 2012, qui les a déboutés de leurs demandes après relaxe de M. Laurent F..., des chefs de harcèlement moral et appels téléphoniques malveillants ;
r> Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu le mémoire commun aux demanderesses et le mémo...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- Mme Aurélie X...,
- Mme Aurélie Y..., épouse Z...,
- Mme Elise A..., épouse B...,
- Mme Laurence C...,
- Mme Elisa D...,
- Mme Sandrine E...,
- La société Agir recouvrement, parties civiles,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'ANGERS, chambre correctionnelle, en date du 5 avril 2012, qui les a déboutés de leurs demandes après relaxe de M. Laurent F..., des chefs de harcèlement moral et appels téléphoniques malveillants ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu le mémoire commun aux demanderesses et le mémoire en défense produits ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, des articles 111-4 et 222-33-2 du code pénal, 593 du code de procédure pénale, violation des droits de la défense, contradiction et défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a renvoyé un salarié (M. F...) des fins de la poursuite du chef du délit de harcèlement moral et débouté les parties civiles (les demanderesses) de leurs demandes de dommages-intérêts ;

"aux motifs qu'il ressortait de l'ensemble des témoignages des salariés de l'entreprise que M. F... avait une haute conscience de lui-même, de sa virilité et du fait qu'il plaisait naturellement aux femmes ; qu'il en ressortait aussi qu'il était manifestement incapable de regarder une personne de sexe féminin sans envisager d'avoir avec elle une relation sexuelle et que, sur ce plan, il n'avait par ailleurs aucune difficulté particulière à entretenir plusieurs liaisons en même temps, usant de son charme, de ses facilités financières ou encore de la confiance que pouvait avoir en lui son employeur ; qu'il en ressortait enfin qu'il savait - s'il se heurtait à un échec ou à une rupture - user de mauvais moyens (pleurs ou chantage) propres à culpabiliser ses partenaires et à les rendre responsables de son malheur, au demeurant tout relatif puisque habile à suivre plusieurs liaisons en même temps ; qu'en conséquence, même si M. F... avait eu envers Mmes Y... et X... essentiellement une attitude particulièrement désagréable, pour ne pas dire vexatoire et déstabilisante, force était de relever que, pour elles comme pour les autres salariées, n'était pas rapportée la preuve que son comportement eût entraîné pour chacune une dégradation de leurs conditions de travail ou qu'il eût altéré leur santé physique ou mentale ;

"1) alors que, en énonçant que le prévenu avait usé envers ses collègues féminines de moyens tels que pleurs et chantage destinés à les culpabiliser et plus spécialement envers Mmes Y... et X... essentiellement une attitude particulièrement désagréable, pour ne pas dire vexatoire et déstabilisante, ce qui démontrait nécessairement une répercussion psychologique importante chez celles qui les avaient subis, pour en déduire cependant que la preuve n'était pas rapportée que son comportement, pour chacune d'elles, eût altéré sa santé physique ou mentale, la cour d'appel a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations ;

"2) alors que, après avoir relevé que le prévenu avait eu envers Mmes Y... et X... essentiellement une attitude particulièrement désagréable, pour ne pas dire vexatoire et déstabilisante, la cour d'appel ne pouvait, sans contredire les pièces de la procédure, énoncer ensuite que la preuve n'était pas rapportée que son comportement eût entraîné, pour chacune d'elles, une dégradation de ses conditions de travail ou qu'il eût altéré sa santé physique ou mentale, dès lors que les déclarations des témoins figurant au dossier de la procédure établissaient que non seulement les jeunes femmes, sur leur lieu de travail, étaient en pleurs après les appels téléphoniques du prévenu, qui les menaçait notamment de porter atteinte à leur intégrité physique (Mme H... responsable du service comptabilité, (Mmes I... et J...) mais précisaient encore qu'elles avaient peur du chantage qu'il exprimait quant au maintien de leur emploi (Mme K...)" ;

Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;

Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'à la suite d'une plainte avec constitution de partie civile de la société Agir recouvrement contre M. Laurent F..., délégué commercial dans cette société, mis en cause par plusieurs salariées se plaignant du comportement de ce dernier auprès de l'employeur, une information a été ouverte des chefs, en particulier, de harcèlement moral et d'appels téléphoniques malveillants ;

Attendu qu'à l'issue de l'information, le juge d'instruction a renvoyé M. F... devant le tribunal correctionnel sous la prévention de harcèlement moral envers, notamment, Mmes Y... et X..., ainsi que d'appels téléphoniques malveillants au préjudice, en particulier, de Mmes Y..., X..., et D... ; que le tribunal a déclaré le prévenu partiellement coupable des faits ; que l'intéressé, le ministère public et plusieurs parties civiles ont interjeté appel de cette décision ;

Attendu que, pour relaxer le prévenu du chef de harcèlement moral à l'égard de Mmes Y... et X..., l'arrêt retient que, si M. F... a eu envers celles-ci une attitude particulièrement désagréable, pour ne pas dire vexatoire et déstabilisante, la preuve n'est pas rapportée que son comportement ait entraîné pour chacune d'elles une dégradation de leurs conditions de travail ou qu'il ait altéré leur santé physique ou morale ;

Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors qu'il ressortait de ses propres constatations que les agissements de M. F... avaient déstabilisé Mmes Y... et X..., ce qui impliquait, pour ces dernières, des répercussions psychologiques de nature à dégrader leurs conditions de travail, ainsi qu'elles le faisaient valoir dans leurs conclusions, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin d'examiner le second moyen de cassation proposé :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Angers, en date du 5 avril 2012, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Poitiers, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Angers et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Straehli conseiller rapporteur, Mme Guirimand, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Randouin ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 12-84650
Date de la décision : 25/06/2013
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 05 avril 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 25 jui. 2013, pourvoi n°12-84650


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (premier président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.84650
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