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13/06/2013 | FRANCE | N°12-18499

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 13 juin 2013, 12-18499


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Nîmes, 31 janvier 2012), que M. X..., ayant acquis un bâtiment ancien dont il a entrepris la rénovation, a assigné M. et Mme Y... et M. et Mme Z..., les propriétaires successifs du fonds supérieur, en réparation de troubles anormaux de voisinage caractérisés par l'éboulement du talus supérieur ; qu'un jugement avant dire droit a ordonné une mesure d'expertise ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal :

Attendu que M. et Mme Y... font gri

ef à l'arrêt de condamner M. et Mme Z... à exécuter les travaux préconisés par l'...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Nîmes, 31 janvier 2012), que M. X..., ayant acquis un bâtiment ancien dont il a entrepris la rénovation, a assigné M. et Mme Y... et M. et Mme Z..., les propriétaires successifs du fonds supérieur, en réparation de troubles anormaux de voisinage caractérisés par l'éboulement du talus supérieur ; qu'un jugement avant dire droit a ordonné une mesure d'expertise ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal :

Attendu que M. et Mme Y... font grief à l'arrêt de condamner M. et Mme Z... à exécuter les travaux préconisés par l'expert pour stabiliser le terrain, et de les condamner à relever et garantir M. et Mme Z... à hauteur du coût TTC de ces travaux, alors ,selon le moyen :

1°/ que la responsabilité pour trouble anormal de voisinage suppose la preuve de l'anormalité du trouble invoqué ; que la seule présence d'éboulements est insuffisante à établir l'anormalité du trouble ; qu'en condamnant cependant M. et Mme Z... à exécuter les travaux préconisés par l'expert pour stabiliser le terrain et mettre fin aux troubles anormaux du voisinage, sans préciser en quoi les éboulements constatés avaient excédé les inconvénients normaux de voisinage que subit naturellement un fonds situé en contrebas d'un autre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ;

2°/ que la responsabilité pour trouble anormal de voisinage suppose qu'un trouble anormal soit imputable au fonds voisin ou à une activité réalisée sur ce fonds ; qu'en condamnant M. et Mme Z... à exécuter les travaux préconisés par l'expert pour stabiliser le terrain et mettre fin aux troubles anormaux du voisinage, tout en constatant que l'accélération du phénomène d'éboulement trouvait sa cause dans les travaux entrepris sur son fonds par M. X..., et sans constater que les troubles anciens étaient anormaux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ;

3°/ que le propriétaire d'un terrain n'est responsable que des dommages causés par le fait de celui-ci ; qu'un fonds supérieur n'est pas l'instrument du dommage causé par un éboulement lorsque ce dernier ne trouve pas sa cause dans la configuration naturelle des lieux, mais dans l'aménagement du fonds inférieur ; qu'en condamnant M. et Mme Z... à exécuter les travaux préconisés par l'expert à la suite d'éboulements, alors qu'il résultait de ses propres constatations que l'instabilité du fonds supérieur était due à la création de parois de terres verticales permettant d'insérer une cuve à vin en béton partiellement enterrée, de sorte que le fonds supérieur n'avait pas été l'instrument du dommage, la cour d'appel a violé, ensemble, l'article 1384, alinéa 1er, du code civil ;

Mais attendu que l'arrêt retient qu'après avoir procédé à des constatations sur les lieux de l'état des parois de terre hautes de 4 mètres à 4 mètres 50 qui constituent les limites nord et est de la parcelle sur laquelle est édifiée le hangar ancien en cours de réhabilitation et après avoir eu connaissance d'un document graphique de bornage du 30 juin 2006, l'expert a relevé que les éboulements des talus étaient anciens et qu'ils empiétaient sur la parcelle de M. X..., mais que la paroi nord avait subi une accélération du phénomène en mai 2007 ; qu'il a estimé que le fait déclencheur et accélérateur de ces éboulements était les vibrations engendrées par les travaux entrepris en 2007, plus spécialement ceux de démolition de la cuve à vin en béton qui pouvait faire office de contrefort et de raidisseur horizontal par sa dalle haute, ce qui explique l'effondrement du mur dans sa partie supérieure et met en cause la réalisation des travaux de l'entreprise ; qu'il n'en demeure pas moins que les éboulements des talus situés sur le fonds supérieur qui étaient déjà survenus avant ces travaux, même s'ils se sont accélérés en mai 2007, et qui se sont manifestés par des empiétements sur la parcelle et se sont accumulés sur le bâtiment existant, nécessitent des travaux de stabilisation des talus pour prévenir leur renouvellement ; que le constat d'huissier de justice du 7 février 2011 produit par M. X... en appel atteste de la persistance des ravinements ou éboulements selon les conditions climatiques ; que le bâtiment touché par les éboulements et leur accumulation n'avait pas vocation à assurer la stabilisation des terres du fonds amont voisin ;

Que de ces constatations et énonciations procédant de son appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve, la cour d'appel, qui a effectué la recherche prétendûment omise, a pu décider que M. et Mme Z..., propriétaires actuels du fonds amont et des talus en cause, étaient tenus de procéder aux travaux nécessaires pour mettre fin aux troubles excédant les inconvénients normaux du voisinage constitués par l'éboulement de leur talus sur le fonds situé en aval ;

D'où il suit que le moyen, qui est inopérant en sa troisième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident, tel que reproduit en annexe :

Attendu que M. et Mme Z... font grief à l'arrêt de les condamner à exécuter les travaux préconisés par l'expert M. A... pour stabiliser leur talus, sauf à porter à six mois à compter de la signification du présent arrêt pour faire exécuter à peine d'astreinte les travaux mis à leur charge ;

Mais attendu qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des pièces de la procédure que M. et Mme Z... ont soutenu devant la cour d'appel que les éboulements constatés n'étaient pas de nature à causer un trouble anormal de voisinage, ou que le fonds supérieur n'avait pas été l'instrument d'un dommage au sens de l'article 1384, alinéa 1er, du code civil ;

D'où il suit que le moyen, nouveau, mélangé de fait et de droit, est, comme tel, irrecevable ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois principal et incident ;

Condamne M. et Mme Y..., M. Z... et Mme B... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne d'une part, M. et Mme Y... à payer à M. X... la somme de 3 000 euros, d'autre part, M. Z... et Mme B... à payer à M. X... la somme de 2 500 euros, rejette les autres demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize juin deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Y..., demandeurs au pourvoi principal

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait condamné les époux Z... à exécuter les travaux préconisés par l'expert pour stabiliser le terrain, et d'avoir condamné les époux Y... à relever et garantir Monsieur et Madame Z... à hauteur du coût TTC de ces travaux ;

AUX MOTIFS QU'après avoir procédé à des constatations sur les lieux de l'état des parois de terre hautes de 4m à 4m50 qui constituent les limites Nord et Est de la parcelle sur laquelle est édifiée le hangar ancien en cours de réhabilitation et après avoir eu connaissance d'un document graphique de bornage du 30 juin 2006, l'expert a relevé que les éboulements des talus étaient anciens et qu'ils empiétaient sur la parcelle de Monsieur X..., mais que la paroi Nord a subi une accélération du phénomène en mai 2007 ; qu'il a estimé que le fait déclencheur et accélérateur de ces éboulements sont les vibrations engendrées par les travaux entrepris en 2007, plus spécialement ceux de démolition de la cuve à vin en béton qui pouvait faire office de contrefort et de raidisseur horizontal par sa dalle haute, ce qui explique l'effondrement du mur dans sa partie supérieure et met en cause la réalisation des travaux de l'entreprise ; mais qu'il n'en demeure pas moins que les éboulements des talus situés sur le fonds supérieur qui étaient déjà survenus avant ces travaux, même s'ils se sont accélérés en mai 2007, et qui se sont manifestés par des empiétements sur la parcelle et se sont accumulés sur le bâtiment existant, nécessitent des travaux de stabilisation des talus pour prévenir leur renouvellement ; que le constat d'huissier du 7 février 2011 produit par Monsieur X... en appel atteste de la persistance des ravinements ou éboulements selon les conditions climatiques ; que le Tribunal a donc exactement retenu que les propriétaires actuels du fonds amont et des talus en cause sont tenus de procéder aux travaux nécessaires pour mettre fin aux troubles anormaux du voisinage constitués par leur éboulement sur le fonds situé en aval ; que les époux Z... qui ont acquis le fonds supérieur par acte du 13 septembre 2007 ne peuvent opposer à Monsieur X... que la prescription trentenaire est acquise dès lors que la construction l'est et que le fonds inférieur recevait naturellement les eaux et assurait une retenue des terres, alors que le bâtiment touché par les éboulements et leur accumulation n'avait pas vocation à assurer la stabilisation des terres du fonds amont voisin et que nul ne doit causer à autrui aucun trouble anormal de voisinage ;

1° ALORS QUE la responsabilité pour trouble anormal de voisinage suppose la preuve de l'anormalité du trouble invoqué ; que la seule présence d'éboulements est insuffisante à établir l'anormalité du trouble ; qu'en condamnant cependant les époux Z... à exécuter les travaux préconisés par l'expert pour stabiliser le terrain et mettre fin aux troubles anormaux du voisinage, sans préciser en quoi les éboulements constatés avaient excédé les inconvénients normaux de voisinage que subit naturellement un fonds situé en contrebas d'un autre, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ;

2° ALORS QUE la responsabilité pour trouble anormal de voisinage suppose qu'un trouble anormal soit imputable au fonds voisin ou à une activité réalisée sur ce fonds ; qu'en condamnant les époux Z... à exécuter les travaux préconisés par l'expert pour stabiliser le terrain et mettre fin aux troubles anormaux du voisinage, tout en constatant que l'accélération du phénomène d'éboulement trouvait sa cause dans les travaux entrepris sur son fonds par Monsieur X..., et sans constater que les troubles anciens étaient anormaux, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ;

3° ALORS QU'en toute hypothèse, le propriétaire d'un terrain n'est responsable que des dommages causés par le fait de celui-ci ; qu'un fonds supérieur n'est pas l'instrument du dommage causé par un éboulement lorsque ce dernier ne trouve pas sa cause dans la configuration naturelle des lieux, mais dans l'aménagement du fonds inférieur ; qu'en condamnant les époux Z... à exécuter les travaux préconisés par l'expert à la suite d'éboulements, alors qu'il résultait de ses propres constatations que l'instabilité du fonds supérieur était due à la création de parois de terres verticales permettant d'insérer une cuve à vin en béton partiellement enterrée, de sorte que le fonds supérieur n'avait pas été l'instrument du dommage, la Cour d'appel a violé, ensemble, l'article 1384 alinéa 1er du Code civil.
Moyen produit par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils, pour M. Z... et Mme B..., demandeurs au pourvoi incident

Les époux Z... font grief à l'arrêt confirmatif attaqué de les avoir condamnés à exécuter les travaux préconisés par l'expert A... pour stabiliser leur talus, sauf à porter à 6 mois à compter de la signification du présent arrêt pour faire exécuter à peine d'astreinte les travaux mis à leur charge ;

AUX MOTIFS QU'après avoir procédé à des constatations sur les lieux de l'état des parois de terre hautes de 4m à 4m50 qui constituent les limites Nord et Est de la parcelle sur laquelle est édifiée le hangar ancien en cours de réhabilitation et après avoir eu connaissance d'un document graphique de bornage du 30 juin 2006, l'expert a relevé que les éboulements des talus étaient anciens et qu'ils empiétaient sur la parcelle de M. X..., mais que la paroi Nord a subi une accélération du phénomène en mai 2007, qu'il a estimé que le fait déclencheur et accélérateur de ces éboulements sont les vibrations engendrées par les travaux entrepris en 2007, plus spécialement ceux de démolition de la cuve à vin en béton qui pouvait faire office de contrefort et de raidisseur horizontal par sa dalle haute, ce qui explique l'effondrement du mur dans sa partie supérieure et met en cause la réalisation des travaux de l'entreprise ; mais qu'il n'en demeure pas moins que les éboulements des talus situés sur le fonds supérieur qui étaient déjà survenus avant ces travaux, même s'ils se sont accélérés en mai 2007, et qui se sont manifestés par des empiétements sur la parcelle et se sont accumulés sur le bâtiment existant, nécessitent des travaux de stabilisation des talus pour prévenir leur renouvellement ; le constat d'huissier du 7 février 2011 produit par M. X... en appel atteste de la persistance des ravinements ou éboulements selon les conditions climatiques , le Tribunal a donc exactement retenu que les propriétaires actuels du fonds amont et des talus en cause sont tenus de procéder aux travaux nécessaires pour mettre fin aux troubles anormaux du voisinage constitués par leur éboulement sur le fonds situé en aval ; que les époux Z... qui ont acquis le fonds supérieur par acte du 13 septembre 2007 ne peuvent opposer à M. X... que la prescription trentenaire est acquise dès lors que la construction l'est et que le fonds inférieur recevait naturellement les eaux et assurait une retenue des terres, alors que le bâtiment touché par les éboulements et leur accumulation n'avait pas vocation à assurer la stabilisation des terres du fonds amont voisin et que nul ne doit causer à autrui aucun trouble anormal de voisinage ;

1°) ALORS QUE la responsabilité pour trouble anormal de voisinage suppose la preuve de l'anormalité du trouble invoqué ; qu'en énonçant, pour condamner les époux Z... à exécuter les travaux préconisés par l'expert pour stabiliser le terrain et mettre fin aux troubles anormaux du voisinage, que ces derniers étaient constitués par des éboulements sur le fonds situé en aval, sans préciser en quoi les éboulements constatés excédaient les inconvénients normaux de voisinage que subit naturellement un fonds situé en contrebas d'un autre, la cour d'appel a violé le principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ;

2°) ALORS QUE la responsabilité pour trouble anormal de voisinage suppose qu'un trouble anormal soit imputable au fonds voisin ou à une activité réalisée sur ce fonds ; qu'en énonçant, après avoir constaté que le fait déclencheur et accélérateur des éboulements résidait dans les travaux entrepris sur son fonds par M. X..., que les éboulements des talus situés sur le fonds supérieur étaient déjà survenus avant ces travaux, sans constater que ces troubles anciens étaient anormaux et liés à une activité réalisée sur le fonds des époux Z..., la cour d'appel a violé le principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ;

3°) ALORS QU'en toute hypothèse, le propriétaire d'un terrain qui s'est éboulé sur le fonds voisin n'est responsable, en tant que gardien du terrain, que des dommages causés par l'éboulement dès lors que ce dernier résulte de son instabilité naturelle ; que la cour d'appel qui, bien qu'elle ait constaté que l'instabilité du fonds supérieur était due à la création de parois de terres verticales permettant d'insérer une cuve à vin en béton partiellement enterrée, a néanmoins condamné les époux Z... à exécuter les travaux préconisés par l'expert à la suite d'éboulements, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations desquelles il résultait que le fonds supérieur des époux Z..., fragilisé par l'aménagement du fonds inférieur, n'avait pas été l'instrument du dommage causé par l'éboulement et a ainsi violé l'article 1384, alinéa 1er, du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 12-18499
Date de la décision : 13/06/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 31 janvier 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 13 jui. 2013, pourvoi n°12-18499


Composition du Tribunal
Président : M. Bizot (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.18499
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