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29/05/2013 | FRANCE | N°12-14754

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 29 mai 2013, 12-14754


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 2 février 2012), que M. X... a été engagé, à compter du 2 juillet 1984, par la société Debrie international devenue société CTM Debrie puis Debrie technologies, en qualité d'agent de maîtrise ; qu'il occupait en dernier lieu les fonctions de responsable des achats de pièces techniques ; que victime d'un accident du travail, il a été arrêté du 5 décembre 2005 au 31 mai 2008 ; qu'à l'issue de deux visites médicales de reprise, le médecin du travail a le 23

juin 2008 émis l'avis suivant : « apte à la reprise au poste d'acheteur tech...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 2 février 2012), que M. X... a été engagé, à compter du 2 juillet 1984, par la société Debrie international devenue société CTM Debrie puis Debrie technologies, en qualité d'agent de maîtrise ; qu'il occupait en dernier lieu les fonctions de responsable des achats de pièces techniques ; que victime d'un accident du travail, il a été arrêté du 5 décembre 2005 au 31 mai 2008 ; qu'à l'issue de deux visites médicales de reprise, le médecin du travail a le 23 juin 2008 émis l'avis suivant : « apte à la reprise au poste d'acheteur technique tel que présenté le 9 juin sur place et décrit dans les courriers du 12 mai et du 13 juin 2008, il s'agit d'un poste de bureau, ne doit pas avoir à faire de déplacements en atelier que ce soit dans l'entreprise ou à l'extérieur chez les fournisseurs » ; que le poste d'acheteur technique a été proposé au salarié, avec une modification des horaires de travail notifiée le 25 juin 2008 ; que par lettre du 20 octobre 2008, estimant faire l'objet d'une modification unilatérale de son contrat de travail et de faits de harcèlement moral, le salarié a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur, puis saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que la prise d'acte de rupture du contrat de travail par le salarié produit les effets d'un licenciement abusif et de le condamner à payer à celui-ci diverses sommes à titre de rappel de salaire, de congés payés, d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1°/ que l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise, doit impérativement se conformer à l'avis rendu par le médecin du travail lors de la visite médicale de reprise, seul habilité à apprécier l'aptitude du salarié à occuper un poste de travail ; qu'il en résulte que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par le salarié ne peut pas produire les effets d'un licenciement abusif dès lors que la modification du contrat de travail invoquée par le salarié au soutien de sa prise d'acte n'est que la conséquence de la mise en oeuvre de l'avis émis par le médecin du travail lors de la visite médicale de reprise auquel l'employeur est tenu de se conformer ; que la cour d'appel a relevé que le salarié exerçait avant son accident du travail une fonction nécessitant de nombreux déplacements et que le poste qui lui avait été proposé par son employeur à la suite de l'avis du médecin du travail était un poste d'acheteur technique sédentaire ; que la cour d'appel a également constaté que l'employeur avait modifié l'organisation du temps de travail de son salarié, ce dernier étant auparavant au forfait jours, avec la liberté d'organiser librement son emploi du temps compte tenu du caractère non sédentaire de son activité ; que la cour d'appel aurait dû déduire de ses propres énonciations que la modification des horaires de travail et de la rémunération du salarié en raison de la suppression du forfait jours dont il bénéficiait avant son accident du travail, résultait de la mise en oeuvre par l'employeur des préconisations obligatoires du médecin du travail qui avait interdit à l'intéressé tout déplacement, en sorte que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail s'analysait en une démission ; que la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 1231-1 et L. 4121-1 du code du travail ;
2°/ qu'aux termes de l'article 625 du code de procédure civile, la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution de l'arrêt cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que la cassation à intervenir du chef de l'arrêt en ce qu'il a jugé que l'employeur avait modifié de manière illicite le contrat de travail du salarié, entraînera la cassation par voie de conséquence du chef de l'arrêt qui a considéré que la modification unilatérale du contrat de travail par l'employeur était constitutive de harcèlement moral par application de l'article 625 du code de procédure civile ;
3°/ que subsidiairement, aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, constitue un harcèlement moral des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'une modification du contrat de travail consécutive à la mise en oeuvre des préconisations impératives du médecin du travail n'est pas constitutive de faits de harcèlement moral ; qu'à supposer que la cassation par voie de conséquence ne soit pas accueillie, en retenant que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail devait produire les effets d'un licenciement abusif aux motifs que l'employeur s'était rendu coupable de harcèlement moral en raison de la modification unilatérale du contrat de travail du salarié qui n'était, en réalité, que la conséquence de la mise en oeuvre des préconisations impératives du médecin du travail par l'employeur, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1231-1 du code du travail ;
4°/ que le simple retard dans l'établissement d'une attestation permettant au salarié de bénéficier des indemnités journalières n'est pas constitutif de faits répétés laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 1152-1 du code du travail ;
5°/ qu'aux termes de l'article L. 1154-1 du code du travail, lorsque le salarié concerné établit des faits précis qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs de harcèlement moral et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'à supposer même que l'on puisse considérer que le salarié établit des faits de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel qui a relevé que le salarié exerçait avant son accident du travail la fonction de responsable des achats et des pièces techniques qui nécessitait de nombreux déplacements et que le poste qui lui avait été proposé par son employeur à la suite de l'avis du médecin du travail était un poste d'acheteur technique sédentaire, aurait dû déduire de ses propres énonciations que la modification du contrat de travail constatée ne résultait que de la mise en oeuvre obligatoire par l'employeur des préconisations du médecin du travail, en sorte que l'employeur justifiait bien d'éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres énonciations, a violé les articles L. 1154-1 et L. 1231-1 du code du travail ;
Mais attendu, d'abord, que toute modification du contrat de travail, même consécutive à des préconisations du médecin du travail, doit faire l'objet d'un accord exprès du salarié ;
Attendu, ensuite, qu'ayant exactement retenu que le poste proposé au salarié emportait une modification de son contrat de travail au regard de la baisse de sa rémunération et constaté que l'intéressé n'avait pas donné son accord à cette modification, la cour d'appel qui a relevé que l'employeur lui avait reproché le non-respect de ses nouveaux horaires de travail et avait établi avec retard les attestations de salaires nécessaires pour percevoir les indemnités journalières de la sécurité sociale, a pu en déduire que l'ensemble de ces faits faisait présumer l'existence d'un harcèlement moral dont l'employeur n'apportait pas la démonstration contraire ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié diverses sommes à titre d'indemnités de rupture sur le fondement de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie, alors, selon le moyen, qu'aux termes de l'article R. 3243-1, 3° du code du travail relatif au bulletin de paie, interprété à la lumière de la Directive européenne 91/ 533/ CEE du Conseil du 14 octobre 1991, la mention d'une convention collective sur un bulletin de paie vaut présomption de l'applicabilité de la convention collective à l'égard du salarié, l'employeur étant admis à apporter la preuve contraire ; qu'à supposer même que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produise les effets d'un licenciement abusif, en affirmant que la volonté claire et non équivoque de l'employeur de faire une application volontaire au salarié non cadre de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie se déduisait de la seule mention sur les bulletins de salaire du salarié de cette convention, bien que cette mention ne constituait qu'une simple présomption d'applicabilité, ce que l'employeur contestait fermement, la cour d'appel a violé l'article R. 3243-1, 3° du code du travail interprété à la lumière de la Directive européenne 91/533/ CEE du Conseil du 14 octobre 1991 ;
Mais attendu qu'ayant relevé que les bulletins de salaire du salarié faisaient mention de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie, la cour d'appel, appliquant la présomption simple attachée à cette mention a, en l'absence d'éléments contraires produits par l'employeur, fait une exacte application de l'article R. 3243-1 3° du code du travail ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Debrie technologies aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Debrie technologies et la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf mai deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour la société Debrie technologies
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR dit que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par le salarié devait produire les effets d'un licenciement abusif et condamné l'employeur au paiement de différentes sommes à titre de rappel de salaire, de congés payés afférents, d'indemnités de rupture, et de dommages et intérêts pour licenciement abusif et pour harcèlement moral ;
AUX MOTIFS QUE « la lettre de prise d'acte par M. X... de la rupture de son contrat de travail est rédigée en ces termes : "le 5 décembre 2005, j'ai été victime d'un très grave accident du travail au sein de l'atelier de votre entreprise, lequel m'a coûté l'usage de la main gauche. Aussi ai-je été arrêté pendant plus de deux ans et demi. A l'issue des deux visites médicales de reprisé des 2 juin et 23 juin 2008, j'ai été reconnu apte au poste « d'acheteur technique » par le médecin du travail. Or, les conditions inacceptables dans lesquelles vous me contraignez à travailler depuis mon retour au sein de l'entreprise le 2 juin 2008, et les diverses modifications de mon contrat de travail que vous m'avez imposées, me contraignent à prendre acte de la rupture de mon contrat aux torts exclusifs de CTM Debrie. En effet, les diverses modifications de mon contrat de travail sont inacceptables. Comme je vous l'ai déjà indiqué notamment dans mon courrier dit 28 juillet 2008, le poste « d'acheteur technique » consiste à exécuter des tâches uniquement administratives, et est par conséquent très différent de celui que j'occupais avant mon accident. En effet, je vous rappelle à nouveau que mes fonctions consistaient à être responsable des achats des pièces techniques de chaudronnerie et de tôlerie, et responsable en atelier de l'avancement et de la fabrication des machines. Or, je n'effectue plus aucun déplacement auprès des fournisseurs, ce qui était pourtant l'une des mes prérogatives principale et n'ai plus aucun contrôle sur l'avancement et la fabrication des pièces puisque je n'ai plus accès à l'atelier. Par ailleurs, les fonctions d'acheteur technique que j'occupe aujourd'hui impliquent l'exécution de nouvelles tâches pour lesquelles je ne suis pas formé. Je n'ai notamment pas les compétences linguistiques et techniques requises pour mener à bien les missions qui me sont nouvellement confiées, tel que l'achat de produits informatique, ainsi que je l'ai encore rappelé dans mes courriers des 10 juin 2008 et 28 juillet 2008. Au surplus, je vous ai égalant fait part de mon refus d'être rétrogradé. Je ne vous reporte plus directement contrairement à ce qui était le cas avant l'accident, puisque je suis dorénavant placé sous la responsabilité de Monsieur Y.... Je refuse par conséquent ces modifications de mes fonctions et responsabilités. Vous avez également décidé de modifier unilatéralement l'organisation de ma durée de travail En effet, à compter du 1er juillet 2008, vous avez discrétionnairement pris l'initiative de remplacer mon forfait de 218 jours annuels travaillés contractuellement prévu par une durée hebdomadaire de travail de 38 h 30 avec horaire fixe. Je vous rappelle cependant que je n'ai jamais accepté une telle modification de mon contrat de travail, ainsi qu'en atteste l'avenant modifiant mon contrat daté du 25 juin 2008, que j'ai refusé, et mes correspondances des 28 juillet 2008 et 5 septembre 2008. Vous avez ensuite décidé de diminuer ma rémunération. Depuis le mois de juin 2008, soit depuis 5 mois, mon salaire mensuel de base n'est plus que de 2.810,75 € bruts, alors que celui-ci s'élevait à 3.162,13 € bruts auparavant. Je vous ai informé à de nombreuses reprises, notamment par courrier recommandé avec accusé de réception du 28 juillet 20t08 et du 19 septembre 2008, de mon refus catégorique d'accepter une diminution de ma rémunération. En vain. D'ailleurs et depuis le 29 août 2008, vous n'avez même plus pris la peine de me répondre. J'estime que ces modifications unilatérales de mon contrat ne sont plus supportables, alors et en outre que je suis au surplus la cible de diverses malveillances incompréhensibles. Votre harcèlement à mon encontre se traduit, à titre d'exemple, par le fait que vous êtes continuellement à l'affût du moindre faux pas que je pourrais commettre. Ainsi, vous guettez constamment mes heures d'entrée et de sortie, et me reprochez de ne pas respecter l'horaire hebdomadaire que vous souhaitez m'imposer discrétionnairement alors même que je suis contractuellement tenu par un forfait de 218 jours travaillés annuels me permettant d'organiser librement mon temps de travail à l'intérieur de mes journées. Vous êtes méprisant à mon égard et me signifiez régulièrement que je ne suis plus d'aucune utilité pour la société depuis mon accident, ce qui est plus qu'humiliant et provoque ma colère légitime compte tenu de toutes les souffrances endurées depuis cette date. Vous ne respectez pas vos obligations d'employeur. A la suite de mon arrêt maladie du 27 juin 2008 au 10 août 2008, vous n'avez pas daigné, en dépit de mes relances, adresser à la Caisse primaire d'assurance maladie mon relevé de salaire comme vous étiez pourtant tenu de le faire. Aussi, ai-je été contraint de demander le document directement auprès du service comptable afin de pouvoir le renvoyer moi-même. Au surplus, le document a été retourné par la Caisse primaire d'assurance maladie au motif qu'il n'avait pas été convenablement rempli par vos soins. En conséquence, et par votre faute, je viens seulement d'obtenir le versement des indemnités journalières pour une absence qui date d'il y a plusieurs mois. Au mois d'août 2008 vous ne m'avez pas remboursé mes frais de transport et m'avez privé du bénéfice des tickets restaurant, et ce sans aucune explication. Enfin, vous avez, à plusieurs reprises, opéré des retenues sur mon salaire parfaitement injustifiées, et n'avez pas souhaité procéder aux régularisations nécessaires réclamées dans mes différents courriers. Au mois de juin 2008, vous ne m'avez pas rémunéré la période du au 16 juin durant laquelle je me trouvais pourtant à la disposition de la Société et avez retenu sur mon salaire la somme de 1476.29 € bruts. Aux mois de juillet et août 2008, vous avez respectivement retenu sur mon salaire les sommes de 244,46 € bruts et 209,06 € bruts au titre d'un prétendu « trop-perçu » totalement fantaisiste ; au mois d'août 2008, vous avez, sans aucune justification, retenu sur mon salaire la somme de 81,44 € bruts correspondant à 4 heures de travail ; de la même manière au mois de septembre 2008, j'ai pu constater que vous aviez retenu sur mon salaire la somme de 1.48,24 € bruts correspondant à 8 heures de travail. Cet acharnement à mon encontre me cause un grave préjudice matériel, moral et psychologique dûment constaté par mon médecin. Je n'ai donc d'autre choix que de prendre acte de la rupture de mon contrat de travail aux torts exclusifs de CTM Débris, à compter de ce jour, ne supportant plus cette situation plus qu'anormale et choquante » ; que lorsque le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit dans le cas contraire d'une démission ; que Monsieur X... soutient en premier lieu que son employeur a modifié unilatéralement son contrat de travail en modifiant ses fonctions, sa position hiérarchique l'organisation de la durée de son travail et sa rémunération ; que la société Debrie technologies conteste ces modifications et fait valoir qu'elle n'a fait que se conformer aux prescriptions du médecin du travail; qu'il ressort des pièces versées aux débats que M. X... exerçait avant son accident du travail la fonction de responsable des achats des pièces techniques, fonction qui nécessitait de nombreux déplacements et que le poste qui lui a été proposé par son employeur, suite à l'avis du médecin du travail, était un poste d'acheteur technique sédentaire; que cette différence n'implique pas une modification des fonctions du salarié, le poste proposé correspondant à sa qualification au regard des fonctions qu'il exerçait auparavant ; qu'en outre, la position hiérarchique de M, X... n'a pas été modifiée dans la mesure où si, dans ses nouvelles fonctions, il ne rapportait plus directement au dirigeant de la société mais à M. Z..., ce dernier n'occupait pas avant l'accident du travail de M. X..., la même position hiérarchique que lui, étant cadre et non agent de maîtrise ; qu'en revanche, il résulte des éléments du dossier que l'employeur a modifié l'organisation du temps de travail de son salarié, ce dernier étant auparavant au "forfait jours", avec la liberté d'organiser librement son emploi du temps compte tenu du caractère non sédentaire de son activité, et s'étant vu imposer une durée hebdomadaire de 38 H30 avec des horaires fixes ; que cette modification portait sur l'économie du contrat de travail de Monsieur X... et qu'elle constitue une modification de ce contrat, ce que l'employeur a lui même reconnu dans son courrier du 25 juin 2008 précité ; qu'en outre, il résulte des bulletins de salaire de M. X... qu'alors qu'il percevait un salaire brut mensuel de base de 3.162,13 €, outre une prime d'ancienneté de 277,18 €, il a perçu à compter du mois de juin 2008 non pas comme le soutient l'employeur dans ses écritures une rémunération tenant "compte d'un calcul prorata temporis des heures de travail effectuées " mais un salaire brut mensuel de base de 2.810,75 €, sa prime d'ancienneté étant inchangée; que l'employeur a ainsi modifié unilatéralement le contrat de travail du salarié ; que Monsieur X... reproche également à son employeur des faits de harcèlement moral à son égard; qu'il soutient que dès lors qu'il a repris son activité, son employeur n'a cessé de le harceler afin qu'il donne sa démission, étant à l'affût du moindre faux pas de sa part, guettant ses heures d'entrée et de sortie et lui reprochant de ne pas respecter ses horaires de travail alors qu'il bénéficiait d'un forfait annuel de 218 jours travaillés lui permettant d'organiser librement son emploi du temps ; que son employeur a modifié son contrat de travail pour les motifs indiqués ci-dessus ; qu'il n'a pas adressé l'attestation de salaire destiné à l'organisme de sécurité sociale lui permettant de percevoir ses indemnités journalières, lors de son arrêt de travail du 27 juin au 10 août 2008, document que l'employeur enverra tardivement après de multiples relances; que son employeur a opéré sur son salaire des retenues injustifiées et que ses frais de transport ne lui ont pas été remboursés; que le harcèlement moral dont il a été victime a entraîné une dégradation de son état de santé ; qu'il résulte des éléments du dossier que la société CTM Debrie a modifié le contrat de travail de Monsieur X... sans son consentement, qu'il a formulé à son encontre des observations écrites concernant la non observation des nouveaux horaires de travail qu'il lui avait imposés, qu'il a rempli avec retard l'attestation de salaire permettant à Monsieur X... de percevoir des indemnités journalières ; que ce dernier établit en conséquence des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L.1152-1 du Code du travail ; que la société Debrie technologies ne justifie pas par des éléments objectifs que ces faits sont étrangers à tout harcèlement et que le harcèlement dont se prévaut Monsieur X... est en conséquence établi ; que l'employeur qui a modifié sans son consentement le contrat de travail de Monsieur X... et qui s'est rendu coupable de harcèlement moral à l'encontre de ce dernier, a commis des manquements à ses obligations contractuelles d'une gravité suffisante pour justifier la prise d'acte par le salarié de la rupture de son contrat de travail, laquelle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que le jugement déféré sera infirmé en ce sens ; qu'il convient de faire droit à la demande de Monsieur X... en paiement de rappel de salaire calculés sur la différence de son salaire brut mensuel contractuel, d'un montant de 3.162, 13 € et le salaire qui lui a été versé à compter du mois de juin 2008, d'un montant de 2.810,75 € ; qu'il y a lieu d'allouer à Monsieur X... les sommes suivantes : 1.827,67 € à titre de rappel de salaire de juin 2008, 182,76 € au titre des congés payés afférents, 595, € titre de rappel de salaire de juillet 2008, 59,58 € au titre des congés payés afférents, 641,88 € à titre de rappel de salaire d'août 2008, 64,18 € au titre des congés payés afférents, 425, 50 € à titre de rappel de salaire de septembre 2008, 42,55 € au titre des congés payés afférents, 357,10 € à titre de rappel de salaire d'octobre 2008, 35,71 € au titre des congés payés afférents ; que Monsieur X... sollicite le paiement d'une indemnité compensatrice de préavis égale à six mois de salaire conformément aux dispositions de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie mentionnée sur ses bulletins de salaire alors que la société Debrie technologies soutient au contraire que le salarié qui occupait des fonctions d'agent de maîtrise, doit se voir appliquer la convention collective des OETAM de la métallurgie ; qu'il est constant que les bulletins de salaire de Monsieur X... font mention de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie, ce qui démontre la volonté claire et non équivoque de l'employeur de faire application volontaire à Monsieur X... de la convention collective précitée, nonobstant le fait qu'il n'avait pas la qualité de cadre ; qu'il convient en conséquence de faire droit à la demande de Monsieur X... et de lui allouer, en application de l'article 27 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie, et compte tenu du fait que Monsieur X..., né en 1948, était âgé au moins 55 ans au moment de son licenciement, la somme de 20.635 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis sur la base d'un salaire brut mensuel de 3.439,31 €, outre la somme de 2.063, 58 € au titre des congés payés afférents ; que le jugement déféré sera infirmé en ce sens ; qu'en application de l'article 29 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie, il y a lieu de faire droit à la demande de Monsieur X... et de lui allouer la somme de 40.508 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ; qu'au moment de la rupture de son contrat de travail, Monsieur X... avait au moins deux années d'ancienneté et que la société employait habituellement au moins onze salariés ; qu'en application de l'article L. 1235-3, M. X... peut prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui ne peut être inférieure au montant des salaires bruts qu'il a perçus pendant les six derniers mois précédant son licenciement ; qu'en raison de l'âge du salarié au moment de son licenciement (60 ans), de son ancienneté dans l'entreprise, du montant de la rémunération qui lui été versée, de son aptitude à trouver un emploi ainsi que des justificatifs produits, il convient de lui allouer en réparation du préjudice matériel et moral subi la somme de 40.000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que le jugement déféré sera infirmé en ce sens ; que compte tenu du harcèlement moral dont Monsieur X... a été victime de la part de son employeur, il y a lieu de lui allouer, au vu des circonstances de la cause, la somme de 2.000 € net en réparation de son préjudice distinct de celui résultant de la rupture de son contrat de travail ; que le jugement entrepris sera infirmé en ce sens ; qu'il convient d'ordonner le remboursement par la société Debrie technologie aux organismes concernés les indemnités de chômage qu'ils ont versés à Monsieur X... dans la limite de six mois » ;
ALORS QUE l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise, doit impérativement se conformer à l'avis rendu par le médecin du travail lors de la visite médicale de reprise, seul habilité à apprécier l'aptitude du salarié à occuper un poste de travail ; qu'il en résulte que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par le salarié ne peut pas produire les effets d'un licenciement abusif dès lors que la modification du contrat de travail invoquée par le salarié au soutien de sa prise d'acte n'est que la conséquence de la mise en oeuvre de l'avis émis par le médecin du travail lors de la visite médicale de reprise auquel l'employeur est tenu de se conformer ; que la Cour d'appel a relevé que le salarié exerçait avant son accident du travail une fonction nécessitant de nombreux déplacements et que le poste qui lui avait été proposé par son employeur à la suite de l'avis du médecin du travail était un poste d'acheteur technique sédentaire ; que la Cour d'appel a également constaté que l'employeur avait modifié l'organisation du temps de travail de son salarié, ce dernier étant auparavant au forfait jours, avec la liberté d'organiser librement son emploi du temps compte tenu du caractère non sédentaire de son activité ; que la Cour d'appel aurait dû déduire de ses propres énonciations que la modification des horaires de travail et de la rémunération du salarié en raison de la suppression du forfait jours dont il bénéficiait avant son accident du travail, résultait de la mise en oeuvre par l'employeur des préconisations obligatoires du médecin du travail qui avait interdit à l'intéressé tout déplacement, en sorte que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail s'analysait en une démission; que la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L.1231-1 et L. 4121-1 du Code du travail ;
ET ALORS QU'aux termes de l'article 625 du Code de procédure civile, la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution de l'arrêt cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que la cassation à intervenir du chef de l'arrêt en ce qu'il a jugé que l'employeur avait modifié de manière illicite le contrat de travail du salarié, entraînera la cassation par voie de conséquence du chef de l'arrêt qui a considéré que la modification unilatérale du contrat de travail par l'employeur était constitutive de harcèlement moral par application de l'article 625 du Code de procédure civile ;
ALORS, en outre, et subsidiairement, QU'aux termes de l'article L.1152-1 du Code du travail, constitue un harcèlement moral des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'une modification du contrat de travail consécutive à la mise en oeuvre des préconisations impératives du médecin du travail n'est pas constitutive de faits de harcèlement moral ; qu'à supposer que la cassation par voie de conséquence ne soit pas accueillie, en retenant que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail devait produire les effets d'un licenciement abusif aux motifs que l'employeur s'était rendu coupable de harcèlement moral en raison de la modification unilatérale du contrat de travail du salarié qui n'était, en réalité, que la conséquence de la mise en oeuvre des préconisations impératives du médecin du travail par l'employeur, la Cour d'appel a violé les articles L.1152-1 et L.1231-1 du Code du travail ;
ALORS, par ailleurs, QUE le simple retard dans l'établissement d'une attestation permettant au salarié de bénéficier des indemnités journalières n'est pas constitutif de faits répétés laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article L.1152-1 du Code du travail ;
ALORS, en toute hypothèse, QU' aux termes de l'article L.1154-1 du Code du travail, lorsque le salarié concerné établit des faits précis qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs de harcèlement moral et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'à supposer même que l'on puisse considérer que le salarié établit des faits de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral, la Cour d'appel qui a relevé que le salarié exerçait avant son accident du travail la fonction de responsable des achats et des pièces techniques qui nécessitait de nombreux déplacements et que le poste qui lui avait été proposé par son employeur à la suite de l'avis du médecin du travail était un poste d'acheteur technique sédentaire, aurait dû déduire de ses propres énonciations que la modification du contrat de travail constatée ne résultait que de la mise en oeuvre obligatoire par l'employeur des préconisations du médecin du travail, en sorte que l'employeur justifiait bien d'éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que la Cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres énonciations, a violé les articles L.1154-1 et L.1231-1 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR condamné l'employeur au paiement de différentes sommes à titre d'indemnités de rupture sur le fondement de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie ;
AUX MOTIFS QUE « Monsieur X... sollicite le paiement d'une indemnité compensatrice de préavis égale à six mois de salaire conformément aux dispositions de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie mentionnée sur ses bulletins de salaire alors que la société Debrie technologies soutient au contraire que le salarié qui occupait des fonctions d'agent de maîtrise, doit se voir appliquer la convention collective des OETAM de la métallurgie ; qu'il est constant que les bulletins de salaire de Monsieur X... font mention de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie, ce qui démontre la volonté claire et non équivoque de l'employeur de faire application volontaire à Monsieur X... de la convention collective précitée, nonobstant le fait qu'il n'avait pas la qualité de cadre ; qu'il convient en conséquence de faire droit à la demande de Monsieur X... et de lui allouer, en application de l'article 27 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie, et compte tenu du fait que Monsieur X..., né en 1948, était âgé au moins 55 ans au moment de son licenciement, la somme de 20.635 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis sur la base d'un salaire brut mensuel de 3.439,31 €, outre la somme de 2.063,58 € au titre des congés payés afférents ; que le jugement déféré sera infirmé en ce sens ; qu'en application de l'article 29 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie, il y a lieu de faire droit à la demande de Monsieur X... et de lui allouer la somme de 40.508 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement » ;
ALORS QU'aux termes de l'article R. 3243-1, 3° du Code du travail relatif au bulletin de paie, interprété à la lumière de la Directive européenne 91/533/CEE du Conseil du 14 octobre 1991, la mention d'une convention collective sur un bulletin de paie vaut présomption de l'applicabilité de la convention collective à l'égard du salarié, l'employeur étant admis à apporter la preuve contraire ; qu'à supposer même que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produise les effets d'un licenciement abusif, en affirmant que la volonté claire et non équivoque de l'employeur de faire une application volontaire au salarié non cadre de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie se déduisait de la seule mention sur les bulletins de salaire du salarié de cette convention, bien que cette mention ne constituait qu'une simple présomption d'applicabilité, ce que l'employeur contestait fermement, la Cour d'appel a violé l'article R. 3243-1, 3° du Code du travail interprété à la lumière de la Directive européenne 91/533/ CEE du Conseil du 14 octobre 1991.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-14754
Date de la décision : 29/05/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 02 février 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 29 mai. 2013, pourvoi n°12-14754


Composition du Tribunal
Président : M. Chollet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Tiffreau, Corlay et Marlange

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.14754
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