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28/05/2013 | FRANCE | N°12-12672

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 mai 2013, 12-12672


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 29 novembre 2011), que M. X..., engagé le 27 janvier 2005 par la société Georges Michel consignation en qualité de responsable d'exploitation, a été licencié, le 30 septembre 2008, pour faute ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que la charge de la preuve de l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement n

e pèse spécialement sur aucune des parties ; qu'en l'espèce, en affirmant que ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 29 novembre 2011), que M. X..., engagé le 27 janvier 2005 par la société Georges Michel consignation en qualité de responsable d'exploitation, a été licencié, le 30 septembre 2008, pour faute ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que la charge de la preuve de l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement ne pèse spécialement sur aucune des parties ; qu'en l'espèce, en affirmant que l'employeur supportait seul la charge de la preuve, la cour d'appel a violé l'article L. 1235-1 du code du travail ;
2°/ que le manquement d'un salarié à son obligation de prendre soin de sa sécurité et de celle des autres salariés constitue une faute susceptible de justifier son licenciement ; qu'en considérant que le fait pour un salarié de se rendre sur des bateaux industriels de fret en bermuda et savates, sans aucun équipement de signalement ou de sécurité et sans alerter l'employeur sur un éventuel danger à ce titre, cependant que ce comportement était objectivement dangereux et constituait un manquement du salarié à ses obligations contractuelles, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1, L. 1235-1, L. 4122-1 et L. 4131-1 du code du travail ;
3°/ que les juges du fond, tenus de respecter le principe du contradictoire, sont notamment obligés, même dans les procédures orales, d'inviter préalablement les parties à présenter leurs observations sur les moyens et les faits tirés du dossier qu'ils envisagent de relever d'office ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que le second grief invoqué dans la lettre de licenciement de M. X..., à savoir ses manquements dans l'établissement de reporting, n'était pas fondé à raison du fait que l'une des pièces l'établissant, l'attestation de Mme Y..., n'était pas probante dès lors que cette dernière n'était pas un simple client mais exerçait un contrôle sur le travail de M. X... comme différentes preuves l'établissaient ; qu'en statuant ainsi, bien que M. X... n'ait jamais contesté la valeur de l'attestation de Mme Y..., ni soutenu qu'elle aurait exercé son autorité sur lui, ni fait état des éléments de fait retenus par la cour sur ce point dans ses conclusions d'appel reprises oralement à l'audience, la cour d'appel, qui a soulevé ce moyen d'office sans inviter préalablement les parties à s'en expliquer et sans permettre à l'exposante de se défendre sur ce point, a violé l'article 16, alinéa 3, du code de procédure civile ;
Mais attendu que c'est par une appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments produits devant elle, tant par le salarié que par l'employeur, que la cour d'appel a décidé, sans méconnaître le principe de contradiction et dans l'exercice des pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail, que le licenciement du salarié ne procédait pas d'une cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société GMC aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société GMC à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mai deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société GMC
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de Monsieur X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse, et d'AVOIR en conséquence condamné la société GMC à lui verser une indemnité de 67. 320 € ;
AUX MOTIFS QUE « le licenciement de l'intimé prononcé pour motif réel et sérieux présente un caractère disciplinaire ; il appartient donc à l'employeur d'apporter la preuve de ce que les faits reprochés soit avérés et il incombe au juge de rechercher si ces griefs tels qu'énoncés dans la lettre de licenciement qui fixant définitivement les limites du litige, sont établis » ;
ET AUX MOTIFS QUE « l'employeur qui argue de ce que ces consignes de ce que ces consignes étaient expressément inscrites dans les cahiers des charges, dont l'existence ne pouvaient être ignorées du salarié, ne vise cependant aucunement aux débats lesdits documents de sorte que la cour est insuffisamment éclairée d'une part sur la réalité de ces consignes et d'autre part sur leur teneur et leur caractère impératif. Le « trade manual » produit par l'employeur entièrement rédigé en anglais n'a pas fait l'obet d'une traduction complète et officielle de sorte que la valeur probante de cette pièce est manifestement sujette à caution. En tout état de cause, cette pièce ne fait qu'énoncer qu'il relève de la responsabilité de la société HOEGH AUTO LINERS d'informer les visiteurs du respect d'une tenue de sécurité sans démontrer qu'en pratique ces consignes étaient bien respectées et manifestement impératives pour les salariés de GMC. L'audit effectué par la société HOEGH le 17 août 2007 et produit aux débats par l'employeur est également entièrement rédigé en anglais sans traduction. Il sera par conséquent écarté des débats en raison de son absence de caractère probant. Les dernières pages du rapport du 20/ 08/ 2007 laissent apparaître un certain nombre de manquements tant du personnel de CGM que de celui de GMC sans toutefois qu'il soit fait référence à une quelconque absence de port de tenue de sécurité et ce sans que M. X... ne soit expressément visé. L'employeur ne produit par conséquent aucune pièce justifiant de l'obligation faite au salarié de porter une tenue de sécurité dont le manquement rendrait impossible la poursuite du contrat de travail. Au contraire, le salarié produit une facture établie à l'ordre de la CMA/ CGM portant sur une commande de matériel de sécurité en date du 10/ 12/ 08 soit postérieure à plus de deux mois au licenciement. Le fait que Madame Alexandra Z... atteste ne pas avoir été informée de l'existence de cette commande ne saurait lui ôter son caractère probant. Tout au plus cette dernière attestation entretient l'ambiguïté sur les liens réels entre la société CMA CGM et la société GMC, en ce qu'elle émane d'une salariée du groupe Georges MICHEL engagée en qualité de responsable administrative commune des sociétés CMA-CGM et GMC. L'employeur quant à lui ne produit aucune facture antérieure ni aucun autre document permettant de démontrer que la société disposait du matériel de sécurité en cause au jour du licenciement. En outre M. X... produit plusieurs attestations établies par le personnel du port témoignant n'avoir jamais reçu d'équipements de sécurité pour leurs éventuels déplacements sur les quais. La circonstance que plusieurs salariés soient revenus sur leur attestation initiale ne remet toutefois pas en cause la réalité d'une absence de matériel de sécurité au sein du port. En effet Monsieur Hamza A..., Madame Véronique B... ne remettent pas en cause l'absence de tenue de sécurité au sein du port mais se plaignent seulement de ce que Monsieur X... ait utilisé à leur insu leur témoignage à des fins judiciaires à l'encontre de son ancien employeur. La cour observe toutefois que les attestations initiales en cause comportaient bien la mention « je reconnais avoir conscience que cette pièce est établie en vue de sa production en justice et que toute fausse déclaration de ma part m'exposerait à des sanctions pénales » ce qui laissent supposer qu'elles ont été établies en toute connaissance de cause. L'attestation de Mme Stéphanie C... en date du 29/ 06/ 09 aux termes de laquelle elle revient sur le contenu de son témoignage initial indique que la salariée « ne savait pas que du matériel de sécurité était disponible chez SGM et que même notre acourier SAMR pouvait aussi nous en fournir ». Cette attestation confirme au contraire l'absence de renseignements donnés au personnel du port sur l'existence du matériel de sécurité. En tout état de cause, le revirement de ces salariés ne saurait remettre en cause la carence de l'employeur dans l'administration de la preuve, ce dernier ne rapportant aucun élément objectif susceptible de démontrer l'obligation absolue et impérative faite à Monsieur X... de porter une tenue de sécurité lors des escales des navires. En ces circonstances le fait que la société HOEGH témoigne par mail en date du 20/ 08/ 08 d'un manquement du salarié à son obligation de porter la tenue vestimentaire de sécurité, ne saurait caractériser une faute du salarié empêchant la poursuite de son contrat de travail. Ce mail démontre par ailleurs que le témoignage de la société HOEGH n'est pas spontané mais a été commandé par l'employeur suivant un mail du même jour en vue dde compléter le dossier de M. X... et de débuter une procédure disciplinaire à son encontre. En conséquence, le grief tiré d'une prétendue violation du salarié aux règles impératives de sécurité à l'occasion d'une montée à bord d'un navire n'est nullement caractérisé en l'espèce » ;
ET AUX MOTIFS QUE « la lettre de licenciement fixe un second grief tiré du non respect par le salarié des procédures de reporting demandées par les clients de la société. A l'appui de ce grief l'employeur produit trois mails (11/ 08/ 08, 20/ 08/ 08 et 02/ 09/ 08) émanant de la société CCMA-CGM qu'elle présente comme une cliente importante de la société GMC et entièrement rédigés par Mme Valérie Y.... Toutefois l'objectivité de ces témoignages est sujette à caution dans la mesure où il apparaît à la lecture des pièces produites par les parties que Madame Valérie Y... entretenait alors des liens étroits avec la société GMC. En effet, il résulte de la lettre de licenciement produit aux débats par les parties, et notamment de son pied de page que les coordonnées de la société GMC comportent comme adresse mail celle de Mme Y... (Y...- gmc @ gmcun. com). Bien que le prénom de cette salariée n'apparaisse pas expressément sur cette adresse internet le mail du 20/ 05/ 2009 produit par l'employeur confirme que cette adresse était bien utilisée par cette salariée dans le cadre de ses fonctions. Les mails en date des 11/ 08/ 08 et 2008/ 08 laissent par ailleurs apparaître que M. X... avait des comptes à rendre à Mme Y... qui exerçaient manifestement un contrôle sur son travail. C'est d'ailleurs cette même salariée qui au terme d'un mail en date du 02/ 09/ 08 sollicitait auprès de GMC de « prendre les mesures nécessaires afin de fournir la qualité de service que nos principaux (clients) sont en droit d'attendre de leur agent ». Il n'est pas anodin de relever que dès le 03/ 09/ 08 soit au lendemain de cette demande de Mme Y... le salarié était convoqué à un entretien préalable de licenciement. Eu égard à ces éléments, la cour estime être en possession d'éléments suffisants pour apprécier le manque d'objectivité des pièces produites par l'employeur et émanant de Mme Y... qui entretenaient manifestement des liens étroits avec GMC ne relevant pas d'une simple relation client de sorte que ces dernières seront purement et simplement écartées des débats. Par ailleurs le mail de Per D... responsable de la société HOEGH en date du 20/ 08/ 08 manifestement commandé par l'employeur et entièrement rédigé en anglais sans traduction officielle et complète témoigne de faits imprécis et non circonstanciés qui eu égard aux années de service de M. X... et à l'exécution de son contrat vierge de toute sanction ne constitue pas en tout état de cause pas un grief sérieux justifiant le licenciement ainsi intervenu. En conséquence, le jugement rendu par le conseil des prud'hommes en ce qu'il retient l'absence de cause réelle et sérieux de licenciement de M. X... sera confirmé » ;
ET AUX MOTIFS DES PREMIERS JUGES, EN LES SUPPOSANT ADOPTES, QUE « la SAS GMC, hormis les mails très proches du licenciement de M. X... de la société HOEGH AUTO LINERS et de la CMA-CGM REUNION avec qui elle entretient des liens étroits, n'apporte aucune preuve ; qu'elle a pu exiger de M. X... la mise en place et le respect de ces procédures de sécurité ; que les attestations des salariés (aussi bien celles faites pour M. X... que les nouvelles « revenant » sur celles-ci) démontrent qu'il n'y avait effectivement pas de matériel de sécurité à la disposition des salariés et qu'aucune consigne ou note n'avaient été faites dans ce sens ; que s'il appartenait bien à M. X... de faire respecter des consignes de sécurité, il appartenait également à son employeur de suivre ce respect et de lui donner les moyens nécessaires à son application ; que la production d'un devis postérieur au licenciement de M. X... ne saurait démontrer l'existence de tels moyens ; que s'il n'est pas acceptable que les procédures ne soient pas respectées par l'ensemble des intervenants le fait qu'elles n'aient fait l'objet d'aucun rappel préalable et qu'il n'ait pas été jugé utile de dénoncer auparavant leur non-respect permanent, démontre le peu d'importance qui y était attribué par la SAS GMC jusqu'à ce qu'elle estime nécessaire de le reprocher à M. X... pour justifier son licenciement ; que ce grief ne saurait donc être retenu ; que la SAS GMC reproche d'autre part à M. X... un mauvais reporting ; que là aussi elle ne produit comme justification que deux mails du mois précédent le licenciement (11 et 20 août) émanant toujours de la société CMACGM ; que ces mails relèvent d'abord un changement d'auteurs pour les « PCR » qui sont apparemment désormais à la charge du service opérations (donc de M. X...) ; que ce changement récent pourrait expliquer les éventuelles difficultés de M. X... qui ne semblait pas y être assujetti auparavant ; qu'ils lui reprochent ensuite d'avoir mal rempli la zone « commentaires » pour un bâteau ; que cette omission sur un seul dossier ne saurait constituer la preuve d'un non-respect des procédures par M. X... » ;
1°) ALORS QUE la charge de la preuve de l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement ne pèse spécialement sur aucune des parties ; qu'en l'espèce, en affirmant que l'employeur supportait seul la charge de la preuve, la cour d'appel a violé l'article L. 1235-1 du Code du travail ;
2°) ALORS QUE le manquement d'un salarié à son obligation de prendre soin de sa sécurité et de celle des autres salariés constitue une faute susceptible de justifier son licenciement ; qu'en considérant que le fait pour un salarié de se rendre sur des bateaux industriels de fret en bermuda et savates, sans aucun équipement de signalement ou de sécurité et sans alerter l'employeur sur un éventuel danger à ce titre, cependant que ce comportement était objectivement dangereux et constituait un manquement de Monsieur X... à ses obligations contractuelles, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1, L. 1235-1, L. 4122-1 et L. 4131-1 du Code du travail ;
3°) ALORS QUE les juges du fond, tenus de respecter le principe du contradictoire, sont notamment obligés, même dans les procédures orales, d'inviter préalablement les parties à présenter leurs observations sur les moyens et les faits tirés du dossier qu'ils envisagent de relever d'office ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que le second grief invoqué dans la lettre de licenciement de Monsieur X..., à savoir ses manquements dans l'établissement de reporting, n'était pas fondé à raison du fait que l'une des pièces l'établissant, l'attestation de Madame Y..., n'était pas probante dès lors que cette dernière n'était pas un simple client mais exerçait un contrôle sur le travail de Monsieur X... comme différentes preuves l'établissaient ; qu'en statuant ainsi, bien que Monsieur X... n'ait jamais contesté la valeur de l'attestation de Madame Y..., ni soutenu qu'elle aurait exercé son autorité sur lui, ni fait état des éléments de fait retenus par la cour sur ce point dans ses conclusions d'appel reprises oralement à l'audience, la cour d'appel, qui a soulevé ce moyen d'office sans inviter préalablement les parties à s'en expliquer et sans permettre à l'exposante de se défendre sur ce point, a violé l'article 16, al. 3 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-12672
Date de la décision : 28/05/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, 29 novembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 mai. 2013, pourvoi n°12-12672


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, SCP Célice, Blancpain et Soltner

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.12672
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