LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles L.162-5 du code de la sécurité sociale et 2.1 de l'arrêté du 27 mars 1972 modifié portant nomenclature générale des actes professionnels, le premier dans sa rédaction applicable au litige ;
Attendu, selon le premier de ces textes, que les rapports entre les organismes d'assurance maladie et les médecins font l'objet de conventions nationales conclues séparément pour les médecins généralistes et les médecins spécialistes ou par une convention nationale commune aux deux catégories de médecins, lesquelles déterminent, notamment, les conditions d'exercice de la médecine générale et de la médecine spécialisée ; que, selon le second, les consultations au cabinet du praticien et les visites au domicile du patient font l'objet, respectivement, des lettres-clé C et V et des lettres-clé Cs et Vs selon que le praticien est un omnipraticien ou un spécialiste ; que, pour l'application de ces dispositions, qui seules régissent la tarification et la prise en charge des soins par l'assurance maladie, le généraliste doit s'entendre du praticien qui exerce la médecine générale, et le spécialiste du praticien qui exerce, à titre exclusif, une spécialité déterminée ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le conseil départemental de l'ordre des médecins lui ayant reconnu, par délibération du 11 juillet 2007, la qualification de spécialiste en médecine générale conformément à l'arrêté du 30 juin 2004 portant règlement de qualification des médecins, M. X... a fait application, pour la tarification de ses actes, des lettres-clé propres aux spécialistes, à compter du 9 mars 2010 ; que la caisse primaire d'assurance maladie du territoire de Belfort (la caisse) lui ayant refusé le bénéfice de celles-ci, il a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que, pour ordonner le paiement par la caisse des feuilles de soins sur la base du tarif correspondant à la cotation Cs utilisée par les médecins spécialistes qualifiés, l'arrêt retient que M. X... étant un médecin omnipraticien qui exerce la médecine générale, la caisse n'avait d'autre possibilité que d'appliquer les textes en matière de tarification, l'intéressé n'exerçant pas à titre exclusif une spécialité déterminée et ne pouvant dès lors utiliser la cotation réservée aux spécialistes au sens des articles L. 162-5 du code de la sécurité sociale et 2-1 de l'arrêté du 27 mars 1972 modifié portant nomenclature générale des actes professionnels ; qu'en revanche, M. X... est fondé à soutenir que le principe d'égalité de traitement n'a pas été respecté, dès lors qu'ayant obtenu la qualification de spécialiste en médecine générale, ce qui le différenciait des autres médecins généralistes n'ayant pas obtenu une telle qualification répondant à des critères précis, il pouvait légitimement prétendre , sinon avoir la qualité de spécialiste exerçant à titre exclusif une spécialité déterminée, du moins avoir une égalité de traitement avec les médecins relevant de la médecine spécialisée ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, alors que M. X..., exerçant la médecine générale et non, à titre exclusif, une spécialité au sens des textes susvisés, la cour d'appel a violé ces derniers ; Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 février 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Rejette le recours de M. X... ;
Le condamne aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ; le condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de Belfort la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq avril deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Foussard, avocat aux Conseils pour la caisse primaire d'assurance maladie de Belfort
L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a décidé que la CPAM de BELFORT n'a pas respecté le principe d'égalité de traitement entre Monsieur Guy X..., médecin spécialiste qualifié en médecine générale, et les médecins spécialistes qualifiés, et a ordonné en conséquence le paiement par la CPAM de BELFORT des feuilles de soins sur la base de 23 € correspondant à la cotation CS utilisée par les médecins spécialistes qualifiés et ce avec effet rétroactif à compter du 18 mars 2010 ;
AUX MOTIFS QUE «M. Guy X..., médecin généraliste ayant obtenu la qualification de spécialiste en médecine générale par délibération en date du 11 juillet 2007 du conseil départemental de l'ordre des médecins du Territoire de Belfort, revendique la possibilité de coter ses consultations sur la base de consultations de spécialistes cotées Cs, soit 23 € au lieu de 22 € correspondant à la cotation C utilisée pour les consultations de médecine générale classiques, et ce avec effet à compter de la première saisine de la commission de recours amiable, soit à compter du 18 mars 2010, en invoquant deux moyens reposant, d'une part, sur la qualité de spécialiste qui lui a été reconnue, le médecin omnipraticien étant en effet, selon lui, un spécialiste et la médecine générale étant une spécialité, d'autre part, sur la violation des principes d'égalité de traitement et de non discrimination ; que sur le premier moyen, la Cour de cassation, deuxième chambre civile, par huit arrêts rendus le 8 avril 2010 au visa des articles L. 162-5 du code de la sécurité sociale et 2-1 de l'arrêté du 27 mars 1972 modifié portant nomenclature générale des actes professionnels, a clairement posé les règles en la matière dans des situations comparables, ainsi que rappelé par le tribunal des affaires de sécurité sociale ; qu'il résulte en effet des textes susvisés tels qu'interprétés par la Cour de cassation "Selon le premier de ces textes, les rapports entre les organismes d'assurance maladie et les médecins font l'objet de conventions nationales conclues séparément pour les médecins généralistes et les médecins spécialistes ou par une convention nationale commune aux deux catégories de médecins, qui déterminent, notamment, les conditions d'exercice de la médecine générale et de la médecine spécialisée,' Selon le second de ces textes, les consultations au cabinet du praticien et les visites au domicile du patient font l'objet, respectivement, des lettres -clé C et V et des lettres- clé Cs et Vs selon que le praticien est un omnipraticien ou bien un spécialiste, Pour l'application de ces dispositions, qui seules régissent la tarification et la prise en charge des soins par l'assurance maladie, le généraliste doit s'entendre du praticien qui exerce la médecine générale, et le spécialiste du praticien qui exerce, à titre exclusif une spécialité déterminée" ; que M. Guy X... étant un médecin omnipraticien qui exerce la médecine générale, la caisse primaire d'assurance maladie du Territoire de Belfort n'avait d'autre possibilité que d'appliquer les textes en matière de tarification ainsi que rappelés ci-dessus, l'intéressé n'exerçant pas à titre exclusif une spécialité déterminée et ne pouvant dès lors utiliser la cotation réservée aux spécialistes au sens des textes susvisés ; qu'en revanche, concernant le second moyen, que M. Guy X... est fondé à soutenir que le principe d'égalité de traitement n'a pas été respecté, dès lors qu' ayant obtenu la qualification de spécialiste en médecine générale par délibération du conseil départemental de l'ordre des médecins du Territoire de Belfort en date du 11 juillet 2007, ce qui le différenciait des autres médecins généralistes n'ayant pas obtenu une telle qualification répondant à des critères précis, il pouvait légitimement prétendre, sinon avoir la qualité de spécialiste exerçant à titre exclusif une spécialité déterminée, du moins avoir une égalité de traitement avec les médecins relevant de la médecine spécialisée, faute de quoi la qualification obtenue en 2007 serait vide de sens ; que l'union nationale des caisses d'assurance maladie a au demeurant pris en compte cette inégalité de traitement en décidant le 23 décembre 2010 de modifier le livre III de la liste des actes et prestations adoptée par décision de l'Uncam du 11 mars 2005 en remplaçant la définition de la lettre clé Cs par «consultation au cabinet par le médecin spécialiste qualifié, le médecin spécialiste qualifié en médecine générale ou le chirurgien-dentiste spécialiste qualifié» ; qu'ainsi, M. Guy X..., s'il n'a pas la qualité de médecin spécialiste qualifié au sens des textes précités relatifs à la médecine spécialisée, a bien la qualité de médecin spécialiste qualifié en médecine générale et pouvait à ce titre obtenir la rémunération comparable à celle des médecins spécialistes, à savoir 23 € par consultation, au lieu de 22 €, et ce avec effet à compter de la saisine de la commission de recours amiable, comme il le demande ; que le jugement entrepris sera en conséquence infirmé en ce qu'il a débouté M. GUY X... de son recours» ;
ALORS QUE, premièrement, la prise en charge d'un acte ne peut se faire que conformément aux règles du droit de la sécurité sociale et conformément aux conditions prévues par ce droit ; que le médecin généraliste, quand bien même il aurait acquis une qualification de spécialiste dans sa discipline, ne peut prétendre qu'à une prise en charge telle que prévue par les médecins généralistes ; qu'en décidant le contraire les juges du fond ont violé les articles L. 162-5 du code de la sécurité sociale, 2. 1 de l'arrêté du 27 mars 1972 modifié portant nomenclature générale des actes professionnels ;
ALORS QUE, deuxièmement, faute d'avoir précisé à l'encontre de quel texte, ils entendaient opposer le principe d'égalité, plus précisément s'ils entendaient l'opposer à l'article L 162-5 du code de la sécurité sociale, auquel cas la critique du texte aurait supposé l'intervention du conseil constitutionnel dans le cadre de la question prioritaire de constitutionnalité ou à l'encontre de l'article 2.1 de la nomenclature générale des actes professionnels, auquel cas l'invocation du principe d'égalité aurait supposé l'articulation d'une exception d'illégalité, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 12 du code de procédure civile.
ALORS QUE, troisièmement, si même le médecin généraliste a acquis une formation de spécialiste dans le cadre de sa discipline, les médecins exerçant comme généralistes et les médecins spécialistes exerçant à titre exclusif dans leur spécialité doivent être regardés comme placés dans des situations différentes, au sein desquelles ils n'exercent pas le même type d'activité, n'accomplissent pas les mêmes actes, et en tout cas n'accomplissent pas les actes correspondant aux mêmes caractéristiques ; qu'à tout le moins l'arrêt était rendu en violation du principe d'égalité.