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10/04/2013 | FRANCE | N°12-13685

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 avril 2013, 12-13685


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 6 décembre 2011), que Mme X..., engagée par la société Dell le 16 août 2005 en qualité de responsable de la comptabilité, a, par courrier remis en main propre le 29 février 2008, fait part à son employeur de sa décision de quitter son emploi ; que le 24 avril 2008, elle a saisi la juridiction prud'homale aux fins de faire juger que sa démission était une prise d'acte de la rupture du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sér

ieuse et de faire condamner la société Dell à lui payer diverses so...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 6 décembre 2011), que Mme X..., engagée par la société Dell le 16 août 2005 en qualité de responsable de la comptabilité, a, par courrier remis en main propre le 29 février 2008, fait part à son employeur de sa décision de quitter son emploi ; que le 24 avril 2008, elle a saisi la juridiction prud'homale aux fins de faire juger que sa démission était une prise d'acte de la rupture du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de faire condamner la société Dell à lui payer diverses sommes ;
Sur le pourvoi principal de la salariée :
Sur le premier moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de juger que la rupture du contrat de travail était la conséquence de sa démission et de rejeter ses demandes tendant à la constatation d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et à la condamnation de la société Dell au paiement de diverses sommes, alors, selon le moyen :
1°/ que lorsque le contrat de travail prévoit que la rémunération variable dépend d'objectifs fixés annuellement par l'employeur, le défaut de fixation desdits objectifs constitue un manquement justifiant la prise d'acte de la rupture par le salarié ; qu'en constatant qu'il « n'avait pas été fixé d'objectifs à Mme X... pour l'année 2008 », ce dont résultait un manquement de l'employeur à ses obligations de nature à priver la salariée d'une partie de sa rémunération, la cour d'appel, qui a néanmoins jugé que la rupture de son contrat de travail s'analysait en une démission, au motif inopérant qu'il n'y aurait pas eu de « désaccord entre les parties quant à la situation de la salariée à l'époque de la rupture », n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les articles 1134 du code civil, L. 1231-1 et L. 1235-1 du code du travail ;
2°/ que l'employeur a l'obligation de fournir le travail convenu ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'affectation de Mme X... à un nouveau poste « de façon intérimaire », c'est-à-dire sans assurance de maintien de son activité, ne caractérisait pas le manquement de l'employeur à son obligation de fournir à son salarié le travail convenu, faute d'affectation définitive, peu important l'acceptation de ce dernier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 1231-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant constaté que la salariée ne justifiait pas de l'existence, ni même de l'expression d'un désaccord entre les parties, antérieur ou contemporain de sa démission, dont il est constant qu'elle avait été exprimée sans réserves, la cour d'appel, qui en a exactement déduit que cette décision non équivoque de l'intéressée n'avait pas à être requalifiée en prise d'acte de la rupture, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de dire que la rupture du contrat de travail était la conséquence de sa démission et de rejeter ses demandes au titre de la rupture du contrat de travail y compris au titre du préavis, alors, selon le moyen, que l'indemnité compensatrice de préavis est due par l'employeur en l'absence d'acte du salarié manifestant sans équivoque la volonté de renoncer à poursuivre l'exécution du préavis ; qu'en retenant une demande de la salariée à être dispensée de l'exécution de son préavis, sans relever d'acte manifestant sans équivoque la volonté de renoncer à poursuivre l'exécution de ce préavis, tandis que la salariée n'avait fait valoir, dans sa correspondance avec son employeur, qu'une dispense accordée par ce dernier pour l'exécution du préavis et n'avait formulé aucune demande propre à ce titre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 1234-5 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel a retenu que l'employeur n'avait pas dispensé la salariée de son préavis, mais n'avait fait que répondre positivement à une demande de dispense de préavis qu'elle avait formulée ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le pourvoi incident de l'employeur :
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la salariée le rappel de bonus pour l'année 2008 et les congés payés afférents, alors, selon le moyen, que sous réserve de dispositions légales ou conventionnelles contraires, le contrat de travail peut subordonner le paiement d'une prime ou d'un bonus dont il prévoit le versement à une condition de présence dans l'entreprise à une date donnée, sous réserve que la rémunération effectivement versée au salarié reste, en définitive, au moins égale aux minima légaux et conventionnels ; qu'en déclarant illégale la clause contenue à l'article 7 du contrat de travail de Mme X..., selon laquelle le versement de la prime dite « incentive bonus » était soumise à une condition de présence dans l'entreprise à la date de clôture de l'exercice au titre de laquelle elle était versée, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel ayant retenu que le bonus litigieux, lié aux objectifs fixés à la salariée, sanctionnait le travail fourni individuellement, ce qui impliquait qu'il constituait la partie variable de la rémunération versée en contrepartie de son activité et s'acquérait au fur et à mesure, en a exactement déduit que son paiement ne pouvait être conditionné à la présence de la salariée dans l'entreprise en fin de période ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour non-respect de la clause de non-concurrence, alors, selon le moyen :
1°/ que le juge doit faire respecter et respecter lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, Mme X... se bornait à soutenir que la renonciation par l'employeur à l'application de la clause de non-concurrence, par le courrier en date du 14 mai 2008, était inefficace, et n'a jamais soutenu que la société Dell l'aurait libérée de cette clause à une date antérieure ; qu'en relevant d'office ce moyen, sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 16 du code de procédure civile ;
2°/ que la cour d'appel s'est bornée à relever que la société Dell aurait levé la clause de non-concurrence, « antérieurement à la lettre du 14 mai 2008 mais à une date non précisée », ce dont il résultait que c'est seulement à compter du 14 mai 2008 que la levée de la clause de non-concurrence était certaine ; qu'en déboutant, dès lors, la société Dell de sa demande de dommages-intérêts pour violation de la clause de non-concurrence jusqu'à cette date, la cour d'appel a méconnu les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles L. 1221-1 du code du travail, 1134 et 1147 du code civil ;
3°/ qu'il incombe au salarié, qui soutient que l'employeur aurait renoncé à l'application de la clause de non-concurrence, de rapporter la preuve tant du principe que de la date de cette renonciation ; qu'en statuant comme elle l'a fait, cependant qu'elle constatait que la preuve n'était pas rapportée de la date, prétendument antérieure au 14 mai 2008, à laquelle la société Dell aurait renoncé à l'application de la clause de non-concurrence litigieuse, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, et a violé les articles 9 du code de procédure civile et 1315 du code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté que l'employeur avait confirmé à la salariée, dans un courrier du 14 mai 2008, la levée de la clause de non-concurrence, a retenu que l'absence de précision de la date de cette renonciation, nécessairement antérieure au courrier, ne permettait pas à l'employeur de réclamer quoique ce soit en contradiction avec la volonté ainsi exprimée par lui ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois principal et incident ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix avril deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour Mme X..., demanderesse au pourvoi principal

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir jugé que la rupture du contrat de travail était la conséquence de la démission de Mme Françoise X... et d'avoir rejeté les demandes de cette dernière au titre de la rupture du contrat de travail, tendant à la constatation d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et à la condamnation de la société Dell au paiement des indemnités dues en conséquence ;
Aux motifs que « la démission s'entend d'une volonté claire et non équivoque du salarié de mettre fin au contrat de travail pour des raisons propres et extérieures à l'exécution même de ce contrat ; que si cette démission est concomitante ou postérieure à une manifestation du désaccord de son auteur sur l'exécution du contrat, elle s'analyse en une prise d'acte de rupture du contrat et il appartient alors au juge de rechercher si les manquements de l'employeur sont établis et emportent les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'à défaut, la démission produit ses effets (…) ; que pour justifier de ce qu'elle a été l'objet de pressions pour démissionner, Mme X... fait valoir que son poste avait été supprimé et qu'elle avait été provisoirement nommée sur un poste de « regional pricing manager » dont elle ne voulait pas ; que cependant, il ressort des pièces produites et notamment d'un courriel du 19 décembre 2007 que Mme Françoise X... avait accepté ce poste « de façon intérimaire » dans l'attente qu'il soit pourvu et qu'elle utiliserait « cette opportunité » pour se « faire une idée plus précise du poste » et qu'elle discuterait de son plan de carrière au premier trimestre 2008 ; que dans un courriel adressé par l'employeur à l'ensemble du personnel le 7 janvier 2008, il était précisé qu'elle n'occupait son poste qu'à titre intérimaire ; qu'il ne ressort d'aucune pièce qu'à la date du 29 février 2008, il lui aurait été définitivement refusé d'être nommée sur un poste correspondant à ses souhaits ; qu'il n'est prouvé l'existence, voire l'expression d'aucun désaccord entre les parties quant à la situation de la salariée à l'époque de la rupture » ;
Et aux motifs adoptés que « la lettre de Mme X... du 29 février 2008, adressée à la directrice RH de Dell, porte comme objet : « Lettre de démission de mes fonctions de FP et A Manager et DEV » ; que cette lettre émane de Mme X... qui l'a établie en trois exemplaires, sans préciser à qui est adressé le troisième et porte à son pied la mention manuscrite de Mme Z..., DRH de Dell à savoir « Lettre remise en main propre le 29 février 2008 » ; que cette mention n'est qu'un accusé de réception et ne peut en aucune façon être considérée comme une adhésion aux propositions souhaitées par Mme X... quant aux modalités d'exécution de la rupture de son contrat de travail à son initiative ; que seule sera acceptée le 7 mars 2008 par l'employeur la dispense de préavis souhaitée par Mme X..., dans les termes suivants : « Nous avons accusé réception de votre lettre de démission remise en main propre le 29 février 2008. A votre demande nous acceptons de vous dispenser d'une partie de votre préavis. En conséquence vous assurerez (en réalité cesserez) de faire partie des effectifs de Dell Rueil-Malmaison le vendredi 14 mars 2008. S'agissant d'une dispense de préavis à votre initiative, nous vous rappelons qu'aucune indemnité compensatrice ne vous est due. Nous vous informons également que vous serez en préavis non effectué et payé du 7 mars 2008 au 14 mars 2008 » ; qu'en conséquence il sera dit et jugé que Mme X... a démissionné et que le contrat de travail est venu à expiration le 14 mars 2008 en sorte que Mme X... ne prospérera pas dans ses demandes en paiement d'indemnité légale de licenciement, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents » ;
Alors, d'une part, que lorsque le contrat de travail prévoit que la rémunération variable dépend d'objectifs fixés annuellement par l'employeur, le défaut de fixation desdits objectifs constitue un manquement justifiant la prise d'acte de la rupture par le salarié ; qu'en constatant qu'il « n'avait pas été fixé d'objectifs à Mme Françoise X... pour l'année 2008 », ce dont résultait un manquement de l'employeur à ses obligations de nature à priver la salariée d'une partie de sa rémunération, la cour d'appel, qui a néanmoins jugé que la rupture de son contrat de travail s'analysait en une démission, au motif inopérant qu'il n'y aurait pas eu de « désaccord entre les parties quant à la situation de la salariée à l'époque de la rupture », n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les articles 1134 du code civil, L. 1231-1 et L. 1235-1 du code du travail ;
Alors, d'autre part, que l'employeur a l'obligation de fournir le travail convenu ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher, comme elle y était invitée (concl., p. 5, § 4 à p. 6, § 3), si l'affectation de Mme X... à un nouveau poste « de façon intérimaire », c'est-à-dire sans assurance de maintien de son activité, ne caractérisait pas le manquement de l'employeur à son obligation de fournir à son salarié le travail convenu, faute d'affectation définitive, peu important l'acceptation de ce dernier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 1231-1 du code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la rupture du contrat de travail était la conséquence de la démission de Mme Françoise X... et d'avoir rejeté les demandes de cette dernière au titre de la rupture du contrat de travail y compris au titre du préavis ;
Aux motifs, propres, que « Mme Françoise X... réclame le paiement de son préavis au motif que son employeur l'en aurait dispensée ; que lorsque le salarié demande à être dispensé de l'exécution de son préavis, et que son employeur accepte, ce dernier ne peut être tenu d'indemniser le salarié à ce titre ; qu'il ne ressort d'aucune pièce que la société Dell aurait dispensé Mme Françoise X... d'exécuter son préavis, cette dernière ayant seulement été autorisée à sa demande à en être dispensée ; que la référence à une promesse verbale dans la lettre de démission ne peut pallier l'absence de tout autre élément ; que dès lors Mme Françoise X..., qui a reçu l'accord de son employeur pour quitter l'effectif le 14 mars et être dispensée d'activité à compter du 7 mars, ne peut solliciter le paiement de la totalité de son préavis ; que sa demande sera rejetée et le jugement confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de Mme Françoise X... tendant à réclamer le paiement de son préavis » ;
Et aux motifs adoptés que « la lettre de Mme X... du 29 février 2008, adressée à la directrice RH de Dell, porte comme objet : « Lettre de démission de mes fonctions de FP et A Manager et DEV » ; que cette lettre émane de Mme X... qui l'a établie en trois exemplaires, sans préciser à qui est adressé le troisième et porte à son pied la mention manuscrite de Mme Z..., DRH de Dell à savoir « Lettre remise en main propre le 29 février 2008 » ; que cette mention n'est qu'un accusé de réception et ne peut en aucune façon être considérée comme une adhésion aux propositions souhaitées par Mme X... quant aux modalités d'exécution de la rupture de son contrat de travail à son initiative ; que seule sera acceptée le 7 mars 2008 par l'employeur la dispense de préavis souhaitée par Mme X..., dans les termes suivants : « Nous avons accusé réception de votre lettre de démission remise en main propre le 29 février 2008. A votre demande nous acceptons de vous dispenser d'une partie de votre préavis. En conséquence vous assurerez (en réalité cesserez) de faire partie des effectifs de Dell Rueil-Malmaison le vendredi 14 mars 2008. S'agissant d'une dispense de préavis à votre initiative, nous vous rappelons qu'aucune indemnité compensatrice ne vous est due. Nous vous informons également que vous serez en préavis non effectué et payé du 7 mars 2008 au 14 mars 2008 » ; qu'en conséquence il sera dit et jugé que Mme X... a démissionné et que le contrat de travail est venu à expiration le 14 mars 2008 en sorte que Mme X... ne prospérera pas dans ses demandes en paiement d'indemnité légale de licenciement, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents » ;
Alors que l'indemnité compensatrice de préavis est due par l'employeur en l'absence d'acte du salarié manifestant sans équivoque la volonté de renoncer à poursuivre l'exécution du préavis, ; qu'en retenant une demande de la salariée à être dispensée de l'exécution de son préavis, sans relever d'acte manifestant sans équivoque la volonté de renoncer à poursuivre l'exécution de ce préavis, tandis que la salariée n'avait fait valoir, dans sa correspondance avec son employeur, qu'une dispense accordée par ce dernier pour l'exécution du préavis et n'avait formulé aucune demande propre à ce titre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 1234-5 du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir rejeté la demande de Mme Françoise X... au titre de la clause de non-concurrence et de l'avoir condamnée à rembourser à la société Dell la somme nette qu'elle a perçue au titre de cette clause jusqu'au 14 mai 2008 ;
Aux motifs que « il ressort des pièces produites par la société Dell que Mme X... est entrée au service de la société Cisco en mars 2008 ; que Mme X..., qui ne dément pas son nouvel emploi au sein de la société Cisco, n'apporte aucune pièce au dossier concernant ses fonctions au sein de cette société ni sa date d'embauche effective ; que si la société Cisco développe des produits qui ne sont pas proposés par la société Dell, elle a néanmoins, ainsi qu'il ressort des pièces produites par la société Dell, une activité de service et d'offres de solution aux entreprises dans le domaine de la gestion de réseaux qui recoupe celle de Dell ; qu'il y a lieu de considérer que la société Cisco est pour une part de son activité, une société concurrente de la société Dell ; que Mme X... ne peut réclamer la contrepartie financière de la clause de non concurrence, dans l'hypothèse qu'elle défend, où celle-ci n'aurait pas été levée par son employeur en temps utile ; que le jugement du conseil de prud'hommes sera infirmé sur ce point (…) ; que la société Dell a versé à Mme X... la somme de 1. 210 € brut au titre de la clause de non-concurrence jusqu'au 14 mai 2008 ; que toutefois, ainsi qu'il a été dit plus haut, Mme X... n'a pas respecté la clause de non-concurrence ; qu'elle devra rembourser à la société la somme nette qu'elle a perçue à ce titre, le montant des cotisations sociales prélevées par l'employeur ne pouvant lui être réclamé » ;
Alors que, en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher, comme elle y était invitée (concl. p. 12, § 2) et comme le jugement l'avait retenu, si la société Cisco n'exerçait aucune activité concurrente à celle de Dell au moment où la clause de non-concurrence de Mme X... était en vigueur, peu important le développement postérieur de son activité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 1121-1 du code du travail.

Moyens produits par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Dell, demanderesse au pourvoi incident

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt d'AVOIR condamné la société DELL à payer à Madame X... les sommes de 1. 485 € à titre de rappel de bonus pour l'année 2008 et 148, 50 € au titre des congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QUE « Madame Françoise X... demande pour la première fois en cause d'appel le paiement de son bonus au titre de l'année 2008 au prorata de son temps de présence ; Que l'année fiscale 2008 commençait le 1er février 2008 et que Madame Françoise X... a quitté l'entreprise le 14 mars 2008 ; Qu'un bonus sanctionnant le travail fourni individuellement par le salarié ne peut être soumis, pour être payé, à la condition de la présence du salarié en fin de période ; Que même s'il n'avait pas été fixé d'objectifs à Madame Françoise X... pour l'année 2008, le bonus prévu au contrat de travail lui est dû ; Que pour un mois et demi de présence, sur la base d'un salaire de 66 000 €, avec un taux de performance personnelle de 150 %, il lui sera alloué une somme de 1485 € augmentée des congés afférents » ;
ALORS QUE sous réserve de dispositions légales ou conventionnelles contraires, le contrat de travail peut subordonner le paiement d'une prime ou d'un bonus dont il prévoit le versement à une condition de présence dans l'entreprise à une date donnée, sous réserve que la rémunération effectivement versée au salarié reste, en définitive, au moins égale aux minima légaux et conventionnels ; qu'en déclarant illégale la clause contenue à l'article 7 du contrat de travail de Madame X..., selon laquelle le versement de la prime dite « incentive bonus » était soumise à une condition de présence dans l'entreprise à la date de clôture de l'exercice au titre de laquelle elle était versée, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1 du Code du travail et 1134 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la société DELL de sa demande tendant à voir condamner Madame X... à lui payer une somme à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la clause de non-concurrence ;
AUX MOTIFS QUE « par courrier en date du 14 mai 2008, la société DELL notifiait à Madame Françoise X... : « nous vous confirmons la levée de la clause de non concurrence qui nous liait » ; Qu'il se déduit des termes du courrier que la société DELL avait entendu antérieurement à la lettre, mais à une date non précisée, lever la clause de non concurrence ; Que quand bien même ce courrier tardif n'aurait pas été opposable à la salariée, la société DELL ne peut, en contradiction avec sa volonté ainsi exprimée, réclamer à Madame Françoise X... une somme quelconque pour violation de la dite clause de non concurrence ; Que sa demande sera rejetée » ;
ALORS, DE PREMIÈRE PART, QUE le juge doit faire respecter et respecter lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, Madame X... se bornait à soutenir que la renonciation par l'employeur à l'application de la clause de non-concurrence, par le courrier en date du 14 mai 2008, était inefficace, et n'a jamais soutenu que la société DELL l'aurait libérée de cette clause à une date antérieure ; qu'en relevant d'office ce moyen, sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 16 du Code de procédure civile ;
ALORS, DE DEUXIÈME PART, QUE la cour d'appel s'est bornée à relever que la société DELL aurait levé la clause de non concurrence, « antérieurement à la lettre du 14 mai 2008 mais à une date non précisée », ce dont il résultait que c'est seulement à compter du 14 mai 2008 que la levée de la clause de non concurrence était certaine ; qu'en déboutant, dès lors, la société DELL de sa demande de dommages et intérêts pour violation de la clause de non-concurrence jusqu'à cette date, la cour d'appel a méconnu les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles L. 1221-1 du Code du travail 1134 et 1147 du Code civil ;
QU'IL EN VA D'AUTANT PLUS AINSI QU'il incombe au salarié, qui soutient que l'employeur aurait renoncé à l'application de la clause de non concurrence, de rapporter la preuve tant du principe que de la date de cette renonciation ; qu'en statuant comme elle l'a fait, cependant qu'elle constatait que la preuve n'était pas rapportée de la date, prétendument antérieure au 14 mai 2008, à laquelle la société DELL aurait renoncé à l'application de la clause de non-concurrence litigieuse, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, et a violé les articles 9 du Code de procédure civile et 1315 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-13685
Date de la décision : 10/04/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 06 décembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 avr. 2013, pourvoi n°12-13685


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Delaporte, Briard et Trichet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.13685
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