La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/04/2013 | FRANCE | N°12-11725

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 10 avril 2013, 12-11725


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 27 octobre 2011), que la société Campuget vergers a adhéré, à compter du 1er mars 1985, à la société coopérative agricole Covial ; que par lettre du 25 septembre 1999, la société Campuget vergers, parvenue au terme de sa période d'engagement, a informé la société Covial de son intention de modifier le volume de ses apports en fruits ; que par lettre du 30 avril 2003, la société Campuget vergers a notifié à la société Covial sa volonté de se retirer

de la coopérative agricole au terme de la nouvelle période d'engagement fixé au ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 27 octobre 2011), que la société Campuget vergers a adhéré, à compter du 1er mars 1985, à la société coopérative agricole Covial ; que par lettre du 25 septembre 1999, la société Campuget vergers, parvenue au terme de sa période d'engagement, a informé la société Covial de son intention de modifier le volume de ses apports en fruits ; que par lettre du 30 avril 2003, la société Campuget vergers a notifié à la société Covial sa volonté de se retirer de la coopérative agricole au terme de la nouvelle période d'engagement fixé au 31 décembre 2004 ; que par acte du 29 janvier 2007, la société Campuget vergers a fait assigner la société Covial devant le tribunal de grande instance afin de voir condamner cette dernière au paiement d'une somme représentant la valeur de ses parts sociales dans la coopérative agricole, et ce en conséquence de l'information délivrée en septembre 1999 ; que par jugement du 2 février 2009, le tribunal de grande instance a débouté la société Campuget vergers de sa demande ; que ce jugement a été confirmé par arrêt du 27 octobre 2011 ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué de rejeter la demande en remboursement des parts sociales, alors, selon le moyen, que l'acceptation tacite de la diminution des apports ne pouvait pas constituer une simple tolérance de fait, mais établissait nécessairement l'existence d'un nouvel accord tacite, dès lors qu'il était constaté par la cour d'appel que la société Covial avait accepté la diminution des apports de fruits de la société Campuget vergers au moment même où cette dernière avait manifesté sa volonté de se retirer partiellement du capital de la coopérative ; qu'en décidant que la tolérance de fait ne peut être considérée comme la conclusion d'un nouvel accord tacite au motif, d'une part, que l'adhérent n'avait pas exprimé son souhait de démissionner au 31 décembre 1999 alors qu'elle avait préalablement constaté le contraire, et au motif, d'autre part, que les parties n'avaient pas signé un nouvel accord, alors même qu'il était question de savoir s'il existait un accord simplement tacite, la cour d'appel n'a caractérisé ni l'absence d'un accord tacite ni l'existence contraire d'une simple tolérance de fait ;
Mais attendu que la cour d'appel a constaté l'existence en septembre 1999 d'une simple information délivrée par la société Campuget vergers à la société Covial, la première indiquant à la seconde son intention de n'apporter qu'une moindre quantité de fruits, sans qu'une telle information suscite une réponse du conseil d'administration de la coopérative, la réduction d'apports ainsi opérée faisant l'objet d'une tolérance de fait jusqu'au 31 décembre 2004, date de la démission de la société Campuget vergers ; qu'elle a par ailleurs relevé le défaut d'indication des apports futurs de fruits, ce qui n'avait pas permis à la coopérative de modifier en proportion le nombre de parts sociales détenues par la société Campuget vergers ni donc d'accepter tacitement une modification du contrat de coopération sur ce point ; qu'elle a enfin considéré la poursuite du contrat initial par tacite reconduction, en l'absence de démission de l'associé coopérateur au 31 décembre 1999 et faute d'acceptation non équivoque par la coopérative d'une diminution des apports en fruits unilatéralement décidée par son adhérent ; qu'elle en a déduit l'absence de tout accord tacite et ainsi légalement justifié sa décision ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande fondée sur la rupture de l'égalité entre les associés coopérateurs, alors, selon le moyen, que la constatation de l'absence de discrimination ou de rupture de l'égalité des associés supposait que soit établi le fait que la compensation avec la pénalité de sortie des associés démissionnaires par anticipation ait constitué un critère substantiel du remboursement de leurs parts ; qu'en constatant seulement l'existence d'une compensation avec les pénalités de sortie, sans vérifier qu'elle avait été un élément déterminant des autorisations de remboursement des parts, la cour d'appel n'a caractérisé ni l'absence de rupture d'égalité ni celle d'une discrimination opérée au détriment de la société Campuget vergers et a ainsi privé sa décision de base légale ;
Mais attendu que la cour d'appel a constaté que la société Campuget vergers n'avait pas, contrairement à d'autres associés dont le remboursement était dénoncé, démissionné de son contrat de coopérateur de manière anticipée, et n'avait ainsi fait l'objet d'aucune pénalité de sortie donnant lieu à compensation ; qu'elle a également relevé, sans qu'un tel motif soit critiqué, que les remboursements dénoncés avaient tous eu lieu au cours d'exercices durant lesquels les résultats comptables de la société Covial étaient différents de ceux auxquels se référait la société Campuget vergers ; qu'elle en a déduit l'absence de rupture d'égalité ou de discrimination au détriment de la société Campuget vergers et ainsi légalement justifié sa décision ;
Sur le troisième moyen :
Attendu qu'il est enfin fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société Campuget vergers de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive, alors, selon le moyen, que la cassation entraîne l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui en est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; qu'il s'ensuit qu'une éventuelle cassation de l'arrêt rendu atteindrait également le chef de l'arrêt par lequel la cour d'appel a débouté la société Campuget vergers de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour résistance abusive, en application de l'article 625, alinéa 2, du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'un tel moyen est inopérant suite au rejet des deux premiers ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Campuget vergers aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix avril deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour la société Campuget Vergers
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de la Société CAMPUGET en remboursement des parts sociales en raison de la diminution de ses apports intervenue à compter du 1er janvier 2000 en dépit de l'accord tacite des parties ;
Aux motifs que « l'EURL Campuget Vergers sollicite le remboursement d'une partie des parts sociales de la SCA Covial, qu'elle détient depuis son adhésion à la coopérative le 1er mars 1985, soit 11.386 parts sur un total détenu de 12.586 parts, au motif que les parts sociales étaient attribuées en fonction des apports de fruits effectués par l'adhérent et que ceux qu'elle a réalisés à partir du 1er janvier 2000 avaient été fortement réduits ; qu'elle considère que cette réduction ayant été acceptée tacitement par la SCA Covial doit s'analyser en un retrait partiel d'associé au 31 décembre 1999, fin de la première période contractuelle quinquennale, justifiant le remboursement des parts sociales détenues mais ne correspondant plus aux apports ; Mais attendu que les statuts de la SCA Covial ne prévoient aucun remboursement des parts sociales en cas de diminution des apports d'un coopérateur, ni la notion de retrait partiel, mais seulement en cas de démission ou d'exclusion du coopérateur ; qu'en l'espère il n'y a pas eu de démission de l'EURL Campuget Vergers à compter du 1er janvier 2000 mais seulement une information de sa part adressée à la coopérative indiquant son intention de n'apporter qu'une moindre quantité de fruits à laquelle il n'a pas été répondu par le conseil d'administration et qui a bénéficié d'une tolérance de fait jusqu'au 31 décembre 2004, date de la démission de l'adhérent ; que l'article 9.3 des statuts de la SCA Covial, visé dans la lettre recommandée avec accusé de réception de l'EURL Campuget Vergers en date du 25 septembre 1999, ne permettait en effet pas à l'associé de notifier autre chose que son retrait total de la coopérative, équivalent à une démission au terme de son engagement quinquennal, et non un retrait partiel ; qu'au demeurant le conseil d'administration de la SCA Covial ne lui a pas donné acte, comme les statuts le prévoyaient (article 9-3) de sa décision de retrait figurant dans cette lettre mais qui était contredite, dans le même document par la dernière phrase « notre retrait se fera pour un volume de production limitée aux surfaces arrachées, et nous resterons sociétaires pour les surfaces restantes et les productions qui en découleront » ; qu'en l'espèce, l'EURL Campuget Vergers n'a nullement mis en demeure la SCA Covial, après le 25 septembre 1999, et jusqu'à sa démission prenant effet au 31 décembre 2004, de lui donner acte de son retrait au 31 décembre 1999, n'a jamais sollicité le remboursement d'une partie de ses parts sociales devenues excédentaires et a effectivement poursuivi ses apports, en qualité d'associé coopérateur, pendant les 5 années suivantes, seule la quantité étant moindre que dans la convention initiale des parties ; que ni dans lettre du 25 septembre 1999, ni par la suite, l'EURL Campuget Vergers n'a indiqué précisément à la SCA Covial le montant prévisible de ses apports futurs de pommes, ce qui ne permettait donc pas à la coopérative de modifier en proportion le nombre de parts sociales détenues par son adhérent ni donc d'accepter tacitement une modification du contrat de coopération sur ce point ; que le contrat initial de l'EURL Campuget Vergers n'ayant pas été dénoncé de façon non équivoque par celle-ci dans sa lettre du 29 septembre 1999, ni remplacé par une autre convention conclue entre les deux parties et applicable au 1er janvier 2000, il s'est donc poursuivi par tacite reconduction, nonobstant la volonté exprimée de l'adhérent de diminuer le montant de ses apports en fruits ; qu'en effet, la tacite reconduction était prévue par l'article 7-5 des statuts et aucun avenant n'a été conclu avec la SCA Covial qui n'a pas non plus accepté par écrit ni par un acte positif non équivoque la modification à la baisse du contrat d'apport de cet adhérent dans une proportion quelconque et pour une durée fixe de 5 ans ; que la tolérance, en fait, d'un apport moindre sans prise des sanctions contractuelles prévues en ce cas, ne peut en effet, être considérée comme la conclusion d'un nouveau contrat tacite, dérogeant à la convention des parties, elle-même tacitement reconduite au 1er janvier 2000, dès lors que l'adhérent n'avait pas exprimé son souhait de démissionner au 31 décembre 1999 et de signer une nouvelle convention pour l'avenir, ce qui était possible ; qu'en toute hypothèse, la conclusion d'un nouveau contrat de coopération applicable au 1er janvier 2000, comme le soutient l'EURL Campuget Vergers ne pouvait être valable qu'avec l'accord de la SCA Covial pour ne pas reconduire le contrat antérieur par tacite reconduction, ce qui n'est nullement établi ; qu'en effet, en ce cas, la SCA Covial aurait dû réduire le nombre des parts sociales attribuées à l'EURL Campuget, en fonction des apports limités que celle-ci avait annoncés, ce qui n'a pas été fait par la Société coopérative ni réclamé non plus par l'associé coopérateur ; que la poursuite, d'accord entre les parties et sans réserves de leur part, de la détention et de l'utilisation des droits sociaux afférent par l'EURL Campuget Vergers, entre le 1er janvier 2000 et le 31 décembre 2004, des 12.586 parts sociales détenues depuis l'origine des relations contractuelles entre les parties caractérise en l'espèce la tacite reconduction du contrat antérieur au 1er janvier 2000, nonobstant la réduction annoncée des apports en fruits et la tolérance de fait de celle-ci par la coopérative » ;
ALORS QUE, l'acceptation tacite de la diminution des apports ne pouvait pas constituer une simple tolérance de fait, mais établissait nécessairement l'existence d'un nouvel accord tacite, dès lors qu'il était constaté par la Cour d'appel que la SCA COVIAL avait accepté la diminution des apports de fruits de la Société CAMPUGET VERGERS au moment même où cette dernière avait manifesté sa volonté de se retirer partiellement du capital de la coopérative ; qu'en décidant que la tolérance de fait ne peut être considérée comme la conclusion d'un nouvel accord tacite au motif, d'une part, que l'adhérent n'avait pas exprimé son souhait de démissionner au 31 décembre 1999 alors qu'elle avait préalablement constaté le contraire, et au motif, d'autre part, que les parties n'avaient pas signé un nouvel accord, alors même qu'il était question de savoir s'il existait un accord simplement tacite, la Cour d'appel n'a caractérisé ni l'absence d'un accord tacite ni l'existence contraire d'une simple tolérance de fait.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de la Société CAMPUGET fondée sur la rupture de l'égalité entre les associés coopérateurs ;
Aux motifs que « l'allégation de l'acceptation par la SCA COVIAL du départ anticipé de certains coopérateurs qu'elle-même faisait l'objet d'une procédure de sauvegarde en 2008, avec remboursement de leurs parts sociales par compensation avec les pénalités encourues par les coopérateurs, est également inopérante au regard de l'invocation d'une discrimination ou d'une rupture de l'égalité de traitement des coopérateurs au détriment de l'EURL Campuget Vergers ; qu'en effet, celle-ci n'a pas démissionné de son contrat de coopérateur de façon anticipée, mais au terme contractuel et n'a fait l'objet d'aucune pénalité de sortie ».
ALORS QUE la constatation de l'absence de discrimination ou de rupture de l'égalité des associés supposait que soit établi le fait que la compensation avec la pénalité de sortie des associés démissionnaires par anticipation ait constitué un critère substantiel du remboursement de leurs parts ; qu'en constatant seulement l'existence d'une compensation avec les pénalités de sortie, sans vérifier qu'elle avait été un élément déterminant des autorisations de remboursement des parts, la Cour d'appel n'a caractérisé ni l'absence de rupture d'égalité ni celle d'une discrimination opérée au détriment de la Société Campuget Vergers et a ainsi privé sa décision de base légale.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la Société CAMPUGET VERGERS de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour résistance abusive ;
Aux motifs que « le refus de la SCA COVIAL de payer les sommes réclamées par l'EURL Campuget Vergers s'avère fondé ; qu'il convient donc de débouter cette dernière de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive » ;
ALORS QUE, la cassation entraîne l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui en est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; qu'il s'ensuit qu'une éventuelle cassation de l'arrêt rendu atteindrait également le chef de l'arrêt par lequel la Cour d'appel a débouté la société CAMPUGET VERGERS de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour résistance abusive, en application de l'article 625 alinéa 2nd du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 12-11725
Date de la décision : 10/04/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 27 octobre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 10 avr. 2013, pourvoi n°12-11725


Composition du Tribunal
Président : M. Charruault (président)
Avocat(s) : SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Fabiani et Luc-Thaler

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.11725
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award