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27/03/2013 | FRANCE | N°12-21717;12-21734

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 27 mars 2013, 12-21717 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° D 12-21. 717 et X 12-21. 734 ;

Attendu, selon le jugement attaqué, que, par requête du 27 mars 2012, les syndicats Sud SNHR et Anti-précarité ont saisi le tribunal d'instance d'une demande d'annulation de la désignation de la délégation du personnel aux comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail des établissements Nord/ Ouest, Est/ Rhône-Alpes et Sud au sein de la société Elres intervenues respectivement les 29 novembre 2011, 16 juin 2011

et 25 mai 2011 ; que, par jugement du 8 mars 2011, le tribunal d'instance de ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° D 12-21. 717 et X 12-21. 734 ;

Attendu, selon le jugement attaqué, que, par requête du 27 mars 2012, les syndicats Sud SNHR et Anti-précarité ont saisi le tribunal d'instance d'une demande d'annulation de la désignation de la délégation du personnel aux comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail des établissements Nord/ Ouest, Est/ Rhône-Alpes et Sud au sein de la société Elres intervenues respectivement les 29 novembre 2011, 16 juin 2011 et 25 mai 2011 ; que, par jugement du 8 mars 2011, le tribunal d'instance de Puteaux avait annulé les élections des délégués du personnel et des membres des comités d'établissement ;
Sur le premier moyen du pourvoi de l'employeur :
Attendu que la société Elres fait grief au jugement de dire les syndicats recevables en leurs demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que le délai de quinze jours imparti pour la contestation des désignations des membres du CHSCT court, à l'égard des syndicats et des salariés, à compter du jour où ils ont eu connaissance de celles-ci sauf lorsqu'une fraude a empêché le requérant de saisir le tribunal d'instance dans le délai légal ; qu'en l'espèce, le tribunal a écarté l'application du délai de forclusion en raison d'une prétendue fraude prise de l'organisation du scrutin sans tenir compte de l'autorité de chose jugée attachée à la décision du 8 mars 2011 qui avait annulé les élections professionnelles et donc l'élection des délégués du personnel et des membres des comités d'établissement seuls habilités à composer le collège désignatif ; qu'en statuant de la sorte, sans préciser en quoi cette prétendue fraude avait empêché les requérants d'agir dans les quinze jours suivant la connaissance des désignations litigieuses, et en particulier sans rechercher si la connaissance des désignations n'emportait pas par là-même nécessairement celle des éléments constitutifs de la prétendue fraude, le juge d'instance a privé sa décision de base légale au regard de l'article R. 4613-11 du code du travail, ensemble l'adage fraus omnia corrumpit ;
2°/ que même lorsqu'une fraude a empêché le requérant de saisir le tribunal d'instance dans les quinze jours suivant la date à laquelle il en a eu connaissance, l'application du délai de forclusion n'est pas écartée, mais son point de départ simplement reporté au jour où le requérant a eu connaissance des éléments constitutifs de ladite fraude ; qu'en l'espèce, le tribunal a écarté purement et simplement l'application du délai de forclusion en raison d'une prétendue fraude prise de l'organisation du scrutin sans tenir compte de l'autorité de chose jugée attachée à la décision du 8 mars 2011 qui avait annulé les élections professionnelles et donc l'élection des délégués du personnel et des membres des comités d'établissement seuls habilités à composer le collège désignatif ; qu'en statuant de la sorte, quand il lui appartenait de rechercher si celle-ci avait été connue moins de quinze jours avant la requête, le tribunal a violé l'article R. 4613-11 du code du travail, ensemble l'adage fraus omnia corrumpit ;
3°/ que le tribunal d'instance a relevé que la mauvaise foi de l'employeur dans l'organisation du scrutin n'était pas démontrée dès lors qu'il s'était attaché essentiellement, bien que de façon irrégulière selon le tribunal, à assurer la représentation du personnel que la nature des activités de l'entreprise rendait nécessaire ; qu'en retenant cependant qu'il aurait commis une fraude en faisant procéder à l'organisation du scrutin sans tenir compte de l'autorité de chose jugée attachée à la décision du 8 mars 2011 qui avait annulé les élections professionnelles et donc l'élection des délégués du personnel et des membres des comités d'établissement seuls habilités à composer le collège désignatif, le tribunal d'instance n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a de plus fort violé l'article R. 4613-11 du code du travail, ensemble l'adage fraus omnia corrumpit ;
4°/ qu'en se bornant à relever que l'employeur avait fait procéder à la désignation des membres des CHSCT sans tenir compte de l'autorité de chose jugée attachée à la décision du 8 mars 2011 qui avait annulé les élections professionnelles et donc l'élection des délégués du personnel et des membres des comités d'établissement seuls habilités à composer le collège désignatif, le tribunal d'instance n'a pas caractérisé l'existence d'une fraude et privé sa décision de base légale au regard de l'article R. 4613-11 du code du travail, ensemble l'adage fraus omnia corrumpit ;
5°/ que l'appel a un effet suspensif, même s'il s'avère que le jugement entrepris était rendu en dernier ressort ; qu'en jugeant que le jugement du 8 mars 2011 annulant les élections des membres des délégués du personnel et des membres du comité d'entreprise, bien que frappé d'appel, avait un caractère exécutoire de droit puisqu'il n'était susceptible en réalité que d'un pourvoi en cassation, pour en déduire que l'employeur aurait commis une fraude en faisant procéder à l'organisation du scrutin sans tenir compte de l'autorité de chose jugée attachée à cette décision du 8 mars 2011, le tribunal d'instance a violé l'article 539 du code de procédure civile, l'article R. 4613-11 du code du travail, ensemble l'adage fraus omnia corrumpit ;
6°/ que tant qu'un jugement annulant les élections des délégués du personnel et membres du comité d'entreprise, n'est pas exécutoire, la désignation par ces élus des membres du CHSCT est régulière et ne méconnaît pas l'autorité de chose jugée attachée audit jugement ; qu'en jugeant le contraire pour retenir l'existence d'une fraude, au prétexte que l'effet suspensif de l'appel affecte la force jugée du jugement frappé d'appel mais non l'autorité de la chose jugée attachée au jugement qui tranche une contestation dès son prononcé, indépendamment de l'exercice d'un recours suspensif, le tribunal d'instance a violé les articles 480 et 539 du code de procédure civile, l'article R. 4613-11 du code du travail, ensemble l'adage fraus omnia corrumpit ;
7°/ que le délai de quinze jours imparti pour la contestation des désignations des membres du CHSCT court, à l'égard des syndicats et des salariés, à compter du jour où ils ont eu connaissance de celles-ci, par voie d'affichage ou par tout autre moyen ; qu'en l'espèce, l'exposante faisait valoir qu'à supposer que les requérants n'aient pas eu connaissance des désignations lorsqu'elles étaient intervenues ou lors de leur affichage, ils en avaient nécessairement été informés par les conclusions communiquées le 28 février 2012 par Me X... prises dans l'intérêt de M. Y... et du syndicat Alliance ouvriere dans le cadre d'un autre litige pendant devant le tribunal d'instance, ces conclusions mentionnant clairement en page 7 les désignations des membres des CHSCT intervenues dans les établissements concernés ; qu'en énonçant que seul l'affichage pouvait faire courir le délai de forclusion, et en refusant ainsi de rechercher si les requérants n'avaient pas eu connaissance des désignations litigieuses par un autre moyen plus de quinze jours avant le dépôt de leur requête le 27 mars 2012, le tribunal d'instance a violé l'article R. 4613-11 du code du travail ;
Mais attendu, d'abord, que le tribunal, qui a constaté que l'employeur, en dépit de la décision rendue contradictoirement le 8 mars 2011, a fait procéder à la désignation des membres des CHSCT, sans tenir compte de l'autorité de chose jugée attachée à cette décision qui avait annulé les élections des délégués du personnel et des membres des comités d'établissement, seuls habilités à composer le collège désignatif, et qu'il n'était pas démontré qu'il ait été procédé à l'affichage des résultats du scrutin, en a souverainement déduit par ces seuls motifs l'existence d'une fraude, sans encourir les griefs du moyen ;
Attendu, ensuite, que le tribunal a décidé exactement que le jugement du 8 mars 2011 avait un caractère exécutoire de droit dès lors que seul un pourvoi en cassation non suspensif d'exécution pouvait être exercé à son encontre et que l'appel irrégulièrement interjeté par l'employeur ne pouvait avoir d'incidence ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le second moyen du pourvoi de l'employeur :
Attendu que la société Elres fait grief au jugement d'annuler les désignations des membres du CHSCT, alors, selon le moyen :
1°/ que l'appel a un effet suspensif, même s'il s'avère que le jugement entrepris était rendu en dernier ressort ; qu'en jugeant que le jugement du 8 mars 2011 annulant les élections des membres des délégués du personnel et des membres du comité d'entreprise, bien que frappé d'appel, avait un caractère exécutoire de droit puisqu'il n'était susceptible en réalité que d'un pourvoi en cassation, pour en déduire l'irrégularité de la désignation du CHSCT, le tribunal d'instance a violé l'article 539 du code de procédure civile ;
2°/ que, tant qu'un jugement annulant les élections des délégués du personnel et membres du comité d'entreprise n'est pas exécutoire, la désignation par ces élus des membres du CHSCT est régulière et ne méconnaît pas l'autorité de chose jugée attachée audit jugement ; qu'en jugeant le contraire au prétexte que l'effet suspensif de l'appel affecte la force jugée du jugement frappé d'appel mais non l'autorité de la chose jugée attachée au jugement qui tranche une contestation dès son prononcé, indépendamment de l'exercice d'un recours suspensif, le tribunal d'instance a violé les articles 480 et 539 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant décidé exactement que le jugement du 8 mars 2011 avait un caractère exécutoire de droit dès lors que seul un pourvoi en cassation non suspensif d'exécution pouvait être exercé à son encontre et que l'appel irrégulièrement interjeté par l'employeur ne pouvait avoir d'incidence et qu'en l'absence de collège désignatif, il n'appartenait pas à l'employeur d'arrêter les modalités de désignation de la délégation du personnel au CHSCT, le tribunal en a déduit à bon droit que les désignations litigieuses devaient être annulées ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi du syndicat SNACATPRCA Alliance ouvrière :
Vu l'article 1382 du code civil, ensemble l'article 12 du code de procédure civile ;
Attendu que le tribunal, qui a fait droit aux demandes des syndicats d'annulation des désignations litigieuses, a déclaré recevable l'intervention volontaire du syndicat Alliance ouvrière et a condamné la société à lui payer la somme de un euro de dommages-intérêts " à titre symbolique " ;
Qu'en statuant ainsi en se bornant à allouer une somme à titre symbolique, le tribunal, qui n'a pas procédé comme il lui appartenait à l'évaluation du préjudice réel subi par le syndicat, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Elres à payer au syndicat Alliance ouvrière la somme de un euro en réparation du préjudice subi par l'intérêt collectif de la profession, le jugement rendu le 19 juin 2012, entre les parties, par le tribunal d'instance de Puteaux ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance d'Antony ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Elres à payer au syndicat Alliance ouvrière la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mars deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour le syndicat SNACATPRCA Alliance ouvrière, MM. Z..., A..., J..., K..., L... et Y... et Mmes B..., C..., D..., E..., F..., G..., H... et I..., demandeurs au pourvoi n° D 12-21. 717
Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR fixé à la somme de 1 €, la condamnation de la société Elres, en réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif de la profession.
AUX MOTIFS QUE les syndicats requérants invoquent à bon droit la fraude, en application de l'adage « fraus omnia corrumpit », dès lors que l'employeur, en dépit de la décision rendue contradictoirement le 8 mars 2011, a fait procéder à la désignation des membres des CHSCT, sans tenir compte de l'autorité de chose jugée attachée à cette décision qui avait annulé les élections professionnelles et donc l'élection des délégués du personnel et des membres des comités d'établissement seuls habilités à composer le collège désignatif ; qu'il convient d'observer qu'il a été indiqué à l'audience que la décision rendue le 26 avril 2012 par le tribunal d'instance de Puteaux n'avait pas fait l'objet d'un pourvoi alors que cette décision tirait les conséquences du précédent jugement rendu le 8 mars 2011 ; que le délai de contestation ne peut être opposé qu'en l'absence de fraude ; qu'en outre, s'il est justifié de ce que l'employeur a demandé l'affichage des résultats de ces scrutins, il n'est pas démontré qu'il ait été procédé à cet affichage, qui seul pouvait faire courir le délai de forclusion (cf. jugement p. 6, dernier §) ; qu'il est constant que l'employeur a préconisé des modalités de désignation des membres des CHSCT tel qu'il ressort de la note du 8 avril 2011 et que par ailleurs, en l'absence de collège désignatif, il ne pouvait pas être procédé à la désignation des membres du CHSCT (art. 4613-1 du code du travail), même en application d'un accord passé entre l'employeur et les organisations syndicales représentatives ; qu'il appartient à l'employeur en raison de la carence de cette institution de saisir la juridiction compétente pour voir désigner un mandataire judiciaire faisant fonction dans l'attente du prochain scrutin professionnel devant se tenir dans l'entreprise, à bref délai (cf. jugement p. 7 § 1) ; que-la mauvaise foi de l'employeur dans l'organisation du scrutin, et donc sa faute, n'est pas démontrée dès lors qu'il s'est attaché essentiellement mais de façon irrégulière à assurer la représentation du personnel que la nature des activités de l'entreprise rendait nécessaire.- L'atteinte à l'intérêt collectif invoqué par le syndicat Alliance Ouvrière est constatée mais le préjudice est limité au regard des conséquences résultant de l'annulation des scrutins ; la réparation en sera symbolique (cf. jugement p. 7 § 2 et 3).
1) ALORS QUE l'auteur d'un dommage est tenu à la réparation intégrale du préjudice causé ; qu'après avoir constaté que l'organisation irrégulière par l'employeur des élections aux CHSCT, en l'absence de collège désignatif, avait porté atteinte aux intérêts collectifs de la profession représentés par le syndicat Alliance Ouvrière, la cour d'appel a limité la réparation de ce préjudice à la somme symbolique de 1 € ; qu'en statuant ainsi quand il lui appartenait d'évaluer le préjudice réel subi par le syndicat, la cour d'appel a violé l'article L. 2132-3 du code du travail, ensemble l'article 1382 du code civil ;
2) ALORS QUE (subsidiairement) l'auteur d'un dommage est tenu à la réparation intégrale du préjudice causé ; que pour limiter à un euro la réparation du préjudice subi par le syndicat à raison de l'atteinte portée aux intérêts collectifs de la profession, la cour d'appel a retenu que la mauvaise foi de l'employeur dans l'organisation du scrutin n'était pas démontrée de sorte que le préjudice du syndicat était limité au regard des conséquences résultant de l'annulation des scrutins ; qu'en statuant ainsi tout en relevant que les syndicats invoquaient à bon droit la fraude, dès lors que l'employeur en dépit de l'autorité de la chose jugée par un précédent jugement annulant l'élection des membres habilités à composer le collège désignatif, avait fait procéder à la désignation des membres du CHSCT, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L. 2132-3 du code du travail, ensemble l'article 1382 du code civil. Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Elres, demanderesse au pourvoi n° X 12-21. 734

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF au jugement attaqué d'AVOIR dit que les syndicats requérants étaient recevables à agir, dit qu'il n'y avait pas de forclusion applicable en présence d'une fraude à la loi, constaté l'irrégularité des scrutins tendant à la désignation des membres des CHSCT des établissements Sud (le 25 mai 2011), Nord/ Ouest (le 29 novembre 2011) et Est/ Rhône-Alpes (le 16 juin 2011) au sein de la société ELRES, annulé ces opérations électorales et dit qu'elles devront être réitérées dans les conditions légales dès lors qu'un scrutin professionnel sera intervenu en vue de désigner les délégués du personnel et les membres des comités d'établissement étant habilités à constituer le collège désignatif, dans l'intervalle, invité l'employeur à saisir la ou les juridictions compétentes en vue de voir désigner un ou des mandataires judiciaires pour faire fonction de CHSCT dans l'entreprise, rappelé que les mandats électifs ou désignatifs cessent de plein droit à la date du jugement qui les annulent, sans effet rétroactif, et condamné la société ELRES à payer au syndicat ALLIANCE OUVRIERE la somme de 1 € en réparation du préjudice subi par l'intérêt collectif de la profession,
AUX MOTIFS QUE pour obtenir l'annulation de la désignation des membres du CHSCT des établissements Nord/ Ouest, Est/ Rhône-Alpes et Sud au sein de la SASU ELRES, les syndicats requérants se prévalent de la carence du collège désignatif en conséquence de la décision rendue par le TI de Puteaux le 08. 03. 11 ; qu'ils opposent l'accord de représentation du personnel de l'UES AVENANCE ENSEIGNEMENT ET SANTE/ GHS SOPRESTHEL-ACANTHE signé le 22. 05. 03 qui prévoit (art. 2. 1) la constitution de 4 établissements distincts au sens des articles L 2367-15 et s. C. Trav pour la mise en place de comités d'établissement au sein de l'UES, mais aussi de 4 CHSCT correspondant aux établissements distincts (art 6) ; que par ailleurs dans chaque établissement ont été prévues les modalités de vote relatives à la désignation des membres du CHSCT et ce, selon un accord signé le 01. 07. 11 pour l'établissement Nord/ Ouest par les membres du collège désignatif concernés, en application des dispositions de l'article 6 de l'accord d'entreprise du 22. 05. 03, avant signature des organisations syndicales représentatives ; qu'il est exact que par jugement rendu le 08. 03. 11, le TI de Puteaux a annulé le scrutin professionnel (1er tour élections DP/ CE) s'étant tenu le 28. 09. 10 dans l'ensemble de l'entreprise ; que cette décision, même frappée de pourvoi, s'impose au juge, dans la mesure où cette décision a l'autorité de chose jugée ; que le jugement rendu le 08. 03. 11 avait, au sens de l'article 480 CPC, autorité de chose jugée relativement à la question tranchée ; que l'employeur oppose l'effet suspensif de l'appel formé devant la C. A de Versailles en application de l'article 539 CPC, qui en empêcherait l'acquisition de la force jugée jusqu'à la date du désistement le 08. 03. 12 ; que cependant, en premier lieu, le jugement litigieux avait un caractère exécutoire de droit puisqu'il n'était susceptible en réalité que d'un pourvoi en cassation, et donc l'effet suspensif de l'appel ne pouvait avoir d'incidence ; qu'en second lieu si l'effet suspensif de l'appel peut affecter la force jugée d'un jugement frappé d'appel, en revanche il n'affecte pas l'autorité de la chose jugée qui est attachée au jugement qui tranche une contestation dès son prononcé, indépendamment de l'exercice d'un recours suspensif en application de l'article 480 CPC ; (…) que sur la fin de non-recevoir tirée de la forclusion de l'action : la SASU ELRES invoque à juste titre le délai d'action qui est prescrit pour contester les résultats d'un scrutin professionnel et donc la régularité du scrutin, qui est de 15 jours à compter de la proclamation des résultats (art. L 2314-28 C. Trav) ; qu'il a été jugé qu'en l'absence de proclamation des résultats le délai ne court pas mais que la SASU ELRES justifie de constats d'huissier établis les 25. 05. 11 (établissement Sud), 29. 11. 11 (établissement Nord/ Ouest) outre le procès-verbal établi le 16. 06. 11 pour l'établissement Rhône-Alpes qui à lui seul ne serait pas suffisant ; que les syndicats requérants invoquent à bon droit la fraude, en application de l'adage " fraus omnia corrumpit ", dès lors que l'employeur, en dépit de la décision rendue contradictoirement le 08. 03. 11, a fait procéder à la désignation des membres des CHSCT, sans tenir compte de l'autorité de chose jugée attachée à cette décision qui avait annulé les élections professionnelles et donc l'élection des délégués du personnel et des membres des comités d'établissement seuls habilités à composer le collège désignatif ; qu'il convient d'observer qu'il a été indiqué à l'audience que la décision rendue le 26. 04. 12 par le TI de Puteaux n'avait pas fait l'objet d'un pourvoi alors que cette décision tirait les conséquences du précédent jugement rendu le 08. 03. 11 ; que le délai de contestation ne peut être opposé qu'en l'absence de fraude ; qu'en outre, s'il est justifié de ce que l'employeur a demandé l'affichage des résultats de ces scrutins, il n'est pas démontré qu'il ait été procédé à cet affichage, qui seul pouvait faire courir le délai de forclusion ;
1. ALORS QUE le délai de quinze jours imparti pour la contestation des désignations des membres du CHSCT court, à l'égard des syndicats et des salariés, à compter du jour où ils ont eu connaissance de celles-ci sauf lorsqu'une fraude a empêché le requérant de saisir le tribunal d'instance dans le délai légal ; qu'en l'espèce, le tribunal a écarté l'application du délai de forclusion en raison d'une prétendue fraude prise de l'organisation du scrutin sans tenir compte de l'autorité de chose jugée attachée à la décision du 8 mars 2011 qui avait annulé les élections professionnelles et donc l'élection des délégués du personnel et des membres des comités d'établissement seuls habilités à composer le collège désignatif ; qu'en statuant de la sorte, sans préciser en quoi cette prétendue fraude avait empêché les requérants d'agir dans les quinze jours suivant la connaissance des désignations litigieuses, et en particulier sans rechercher si la connaissance des désignations n'emportait pas par là-même nécessairement celle des éléments constitutifs de la prétendue fraude, le juge d'instance a privé sa décision de base légale au regard de l'article R. 4613-11 du Code du travail, ensemble l'adage fraus omnia corrumpit ;
2. ALORS en outre QUE même lorsqu'une fraude a empêché le requérant de saisir le tribunal d'instance dans les quinze jours suivant la date à laquelle il en a eu connaissance, l'application du délai de forclusion n'est pas écartée, mais son point de départ simplement reporté au jour où le requérant a eu connaissance des éléments constitutifs de ladite fraude ; qu'en l'espèce, le tribunal a écarté purement et simplement l'application du délai de forclusion en raison d'une prétendue fraude prise de l'organisation du scrutin sans tenir compte de l'autorité de chose jugée attachée à la décision du 8 mars 2011 qui avait annulé les élections professionnelles et donc l'élection des délégués du personnel et des membres des comités d'établissement seuls habilités à composer le collège désignatif ; qu'en statuant de la sorte, quand il lui appartenait de rechercher si celle-ci avait été connue moins de quinze jours avant la requête, le tribunal a violé l'article R. 4613-11 du Code du travail, ensemble l'adage fraus omnia corrumpit ;
3. ALORS en tout état de cause QUE le tribunal d'instance a relevé que la mauvaise foi de l'employeur dans l'organisation du scrutin n'était pas démontrée dès lors qu'il s'était attaché essentiellement, bien que de façon irrégulière selon le tribunal, à assurer la représentation du personnel que la nature des activités de l'entreprise rendait nécessaire ; qu'en retenant cependant qu'il aurait commis une fraude en faisant procéder à l'organisation du scrutin sans tenir compte de l'autorité de chose jugée attachée à la décision du 8 mars 2011 qui avait annulé les élections professionnelles et donc l'élection des délégués du personnel et des membres des comités d'établissement seuls habilités à composer le collège désignatif, le tribunal d'instance n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a de plus fort violé l'article R. 4613-11 du Code du travail, ensemble l'adage fraus omnia corrumpit ;
4. ALORS à tout le moins QU'en se bornant à relever que l'employeur avait fait procéder à la désignation des membres des CHSCT sans tenir compte de l'autorité de chose jugée attachée à la décision du 8 mars 2011 qui avait annulé les élections professionnelles et donc l'élection des délégués du personnel et des membres des comités d'établissement seuls habilités à composer le collège désignatif, le tribunal d'instance n'a pas caractérisé l'existence d'une fraude et privé sa décision de base légale au regard de l'article R. 4613-11 du Code du travail, ensemble l'adage fraus omnia corrumpit ;
5. ALORS encore plus subsidiairement QUE l'appel a un effet suspensif, même s'il s'avère que le jugement entrepris était rendu en dernier ressort ; qu'en jugeant que le jugement du 8 mars 2011 annulant les élections des membres des délégués du personnel et des membres du comité d'entreprise, bien que frappé d'appel, avait un caractère exécutoire de droit puisqu'il n'était susceptible en réalité que d'un pourvoi en cassation, pour en déduire que l'employeur aurait commis une fraude en faisant procéder à l'organisation du scrutin sans tenir compte de l'autorité de chose jugée attachée à cette décision du 8 mars 2011, le tribunal d'instance a violé l'article 539 du Code de procédure civile, l'article R. 4613-11 du Code du travail, ensemble l'adage fraus omnia corrumpit ;
6. ALORS tout aussi subsidiairement QUE tant qu'un jugement annulant les élections des délégués du personnel et membres du comité d'entreprise, n'est pas exécutoire, la désignation par ces élus des membres du CHSCT est régulière et ne méconnaît pas l'autorité de chose jugée attachée audit jugement ; qu'en jugeant le contraire pour retenir l'existence d'une fraude, au prétexte que l'effet suspensif de l'appel affecte la force jugée du jugement frappé d'appel mais non l'autorité de la chose jugée attachée au jugement qui tranche une contestation dès son prononcé, indépendamment de l'exercice d'un recours suspensif, le tribunal d'instance a violé les articles 480 et 539 du Code de procédure civile, l'article R. 4613-11 du Code du travail, ensemble l'adage fraus omnia corrumpit ;
7. ALORS par ailleurs QUE le délai de quinze jours imparti pour la contestation des désignations des membres du CHSCT court, à l'égard des syndicats et des salariés, à compter du jour où ils ont eu connaissance de celles-ci, par voie d'affichage ou par tout autre moyen ; qu'en l'espèce, l'exposante faisait valoir qu'à supposer que les requérants n'aient pas eu connaissance des désignations lorsqu'elles étaient intervenues ou lors de leur affichage, ils en avaient nécessairement été informés par les conclusions communiquées le 28 février 2012 par Me X... prises dans l'intérêt de Monsieur Y... et du syndicat ALLIANCE OUVRIERE dans le cadre d'un autre litige pendant devant le tribunal d'instance, ces conclusions mentionnant clairement en page 7 les désignations des membres des CHSCT intervenues dans les établissements concernés (conclusions de la société ELRES, p. 7-8) ; qu'en énonçant que seul l'affichage pouvait faire courir le délai de forclusion, et en refusant ainsi de rechercher si les requérants n'avaient pas eu connaissance des désignations litigieuses par un autre moyen plus de quinze jours avant le dépôt de leur requête le 27 mars 2012, le tribunal d'instance a violé l'article R. 4613-11 du Code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)

IL EST FAIT GRIEF au jugement attaqué d'AVOIR constaté l'irrégularité des scrutins tendant à la désignation des membres des CHSCT des établissements Sud (le 25 mai 2011), Nord/ Ouest (le 29 novembre 2011) et Est/ Rhône-Alpes (le 16 juin 2011) au sein de la société ELRES, annulé ces opérations électorales et dit qu'elles devront être réitérées dans les conditions légales dès lors qu'un scrutin professionnel sera intervenu en vue de désigner les délégués du personnel et les membres des comités d'établissement étant habilités à constituer le collège désignatif, dans l'intervalle, invité l'employeur à saisir la ou les juridictions compétentes en vue de voir désigner un ou des mandataires judiciaires pour faire fonction de CHSCT dans l'entreprise, rappelé que les mandats électifs ou désignatifs cessent de plein droit à la date du jugement qui les annulent, sans effet rétroactif, et condamné la société ELRES à payer au syndicat ALLIANCE OUVRIERE la somme de 1 € en réparation du préjudice subi par l'intérêt collectif de la profession,
AUX MOTIFS QUE pour obtenir l'annulation de la désignation des membres du CHSCT des établissements Nord/ Ouest, Est/ Rhône-Alpes et Sud au sein de la SASU ELRES, les syndicats requérants se prévalent de la carence du collège désignatif en conséquence de la décision rendue par le TI de Puteaux le 08. 03. 11 ; qu'ils opposent l'accord de représentation du personnel de l'UES AVENANCE ENSEIGNEMENT ET SANTE/ GHS SOPRESTHELACANTHE signé le 22. 05. 03 qui prévoit (art. 2. 1) la constitution de 4 établissements distincts au sens des articles L 2367-15 et s. C. Trav pour la mise en place de comités d'établissement au sein de l'UES, mais aussi de 4 CHSCT correspondant aux établissements distincts (art 6) ; que par ailleurs dans chaque établissement ont été prévues les modalités de vote relatives à la désignation des membres du CHSCT et ce, selon un accord signé le 01. 07. 11 pour l'établissement Nord/ Ouest par les membres du collège désignatif concernés, en application des dispositions de l'article 6 de l'accord d'entreprise du 22. 05. 03, avant signature des organisations syndicales représentatives ; qu'il est exact que par jugement rendu le 08. 03. 11, le TI de Puteaux a annulé le scrutin professionnel (1er tour élections DP/ CE) s'étant tenu le 28. 09. 10 dans l'ensemble de l'entreprise ; que cette décision, même frappée de pourvoi, s'impose au juge, dans la mesure où cette décision a l'autorité de chose jugée ; que le jugement rendu le 08. 03. 11 avait, au sens de l'article 480 CPC, autorité de chose jugée relativement à la question tranchée ; que l'employeur oppose l'effet suspensif de l'appel formé devant la C. A de Versailles en application de l'article 539 CPC, qui en empêcherait l'acquisition de la force jugée jusqu'à la date du désistement le 08. 03. 12 ; que cependant, en premier lieu, le jugement litigieux avait un caractère exécutoire de droit puisqu'il n'était susceptible en réalité que d'un pourvoi en cassation, et donc l'effet suspensif de l'appel ne pouvait avoir d'incidence ; qu'en second lieu si l'effet suspensif de l'appel peut affecter la force jugée d'un jugement frappé d'appel, en revanche il n'affecte pas l'autorité de la chose jugée qui est attachée au jugement qui tranche une contestation dès son prononcé, indépendamment de l'exercice d'un recours suspensif en application de l'article 480 CPC ; (…) que sur la demande d'annulation de la désignation des membres des CHSCT des établissements Sud, Nord/ Ouest, et Est/ Rhône-Alpes, il est constant que l'employeur a préconisé des modalités de désignation des membres des CHSCT tel qu'il ressort de la note du 08. 04. 11 et que par ailleurs, en l'absence de collège désignatif il ne pouvait pas être procédé à la désignation des membres des CHSCT (art 4613-1 C. Trav), même en application d'un accord passé entre l'employeur et les organisations syndicales représentatives ; qu'il appartient à l'employeur en raison de la carence de cette institution de saisir la juridiction compétente pour voir désigner un mandataire judiciaire faisant fonction dans l'attente du prochain scrutin professionnel devant se tenir dans l'entreprise, à bref délai ;

1. ALORS QUE l'appel a un effet suspensif, même s'il s'avère que le jugement entrepris était rendu en dernier ressort ; qu'en jugeant que le jugement du 8 mars 2011 annulant les élections des membres des délégués du personnel et des membres du comité d'entreprise, bien que frappé d'appel, avait un caractère exécutoire de droit puisqu'il n'était susceptible en réalité que d'un pourvoi en cassation, pour en déduire l'irrégularité de la désignation du CHSCT, le tribunal d'instance a violé l'article 539 du Code de procédure civile ;
2. ALORS QUE tant qu'un jugement annulant les élections des délégués du personnel et membres du comité d'entreprise n'est pas exécutoire, la désignation par ces élus des membres du CHSCT est régulière et ne méconnaît pas l'autorité de chose jugée attachée audit jugement ; qu'en jugeant le contraire au prétexte que l'effet suspensif de l'appel affecte la force jugée du jugement frappé d'appel mais non l'autorité de la chose jugée attachée au jugement qui tranche une contestation dès son prononcé, indépendamment de l'exercice d'un recours suspensif, le tribunal d'instance a violé les articles 480 et 539 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-21717;12-21734
Date de la décision : 27/03/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Puteaux, 19 juin 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 27 mar. 2013, pourvoi n°12-21717;12-21734


Composition du Tribunal
Président : M. Béraud (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.21717
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