LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 18 février 2011) que M. X... a été engagé, à compter du 27 décembre 2004, par l'association Club nautique Stellien en qualité d'ouvrier de maintenance dans le cadre d'un contrat initiative-emploi ; que le contrat a été rompu par l'employeur le 5 juin 2008, au motif que la suspension de son permis de conduire, intervenue dans un cadre privé, pour six mois, lui interdisait d'exécuter ses fonctions, dont la mise à l'eau des engins nautiques ; que soutenant qu'il avait été engagé dans le cadre d'un contrat à durée déterminée et qu'en l'absence de faute grave l'employeur ne pouvait mettre fin aux relations contractuelles avant l'échéance du terme, le salarié a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir paiement de sommes correspondant aux salaires restant à courir jusqu'à l'expiration du contrat ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de requalifier le contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et de lui allouer dommages intérêts pour licenciement illégitime sur le fondement de l'article L 1235-5 du code du travail, alors, selon le moyen, que si la qualification d'un contrat de travail dont la nature juridique est indécise relève de l'office du juge, celui-ci ne peut toutefois à la demande de l'employeur requalifier un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée dès lors que les dispositions prévues par les articles L. 1242-1 et suivants du code du travail, relatives au contrat de travail à durée déterminée, ont été édictées dans un souci de protection du salarié qui peut seul se prévaloir de leur inobservation ; que dès lors en requalifiant le contrat à durée déterminée de M. X... en contrat à durée indéterminée en l'absence de demande du salarié, la cour d'appel a violé l'article susvisé ;
Mais attendu que contrairement à ce que soutient le moyen, la cour d'appel n'a pas procédé à la requalification d'un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée à la demande de l'employeur mais a en réalité qualifié le contrat de travail conclu entre les parties dont la nature juridique était indécise ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize mars deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour M. X....
Il est reproché à l'arrêt d'avoir requalifié le contrat à durée déterminée de M. X... en contrat à durée indéterminée et d'avoir, en conséquence, alloué au salarié des dommages intérêts pour licenciement illégitime d'un montant de 8.000 € sur le fondement de l'article L 1235-5 du code du travail,
Aux motifs que « sur la nature du contrat ayant lié les parties, aux termes de l'article L 322-4-4 du Code du travail dans sa rédaction antérieure à le loi n° 2005-36 du 18 janvier 2005 "les contrats initiative emploi sont des contrats de travail à durée indéterminée ou à durée déterminée conclus en application de l'article L.122-2. Dans ce dernier cas, leur durée doit être au moins égale à douze mois et ne peut excéder vingt quatre mois" ; que ces contrats, destinés à favoriser l'accès à l'emploi de certaines catégories de personnes en difficulté, avaient pour support nécessaire (article L. 322-4-2 du même code) une convention conclue entre l'État et l'employeur permettant à ce dernier de percevoir une aide forfaitaire pendant 24 mois consécutifs lorsque le contrat avait été conclu pour une durée indéterminée et pendant la durée du contrat lorsque celui-ci l'avait été pour une durée déterminée (article 6 du décret n°2002-400 du 25 mars 2002 modifié) ; que cette aide était versée pendant 36 mois supplémentaires lorsque le contrat avait été conclu pour une durée indéterminée au profit d'un salarié âgé de plus de 50 ans et de moins de 65 ans appartenant à certaines catégories ; que ce dispositif a été modifié par la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005, les contrats conclus avant l'entrée en vigueur de celle ci restant soumis aux dispositions applicables à la date de leur conclusion ; que la convention 10169 conclue les 8 et 20 décembre 2004 entre l'agence locale pour l'emploi de Berck Côte d'Opale représentant l'État et l'association CNS prévoit qu'elle a pour objet l'embauche par celle ci de Serge X..., demandeur d'emploi âgé de 50 ans et inscrit depuis 18 mois au moins, pour une durée indéterminée en qualité d'ouvrier polyvalent ; que la date d'effet de cette embauche est le 27 décembre 2004 ; qu'il résulte de l'"attestation de situation-échéancier" émanant de l'agence locale pour l'emploi et afférente à la convention 1069 précitée que l'aide forfaitaire a été versée au CNS pendant 60 mois, signe que le contrat avait été conclu pour une durée indéterminée ; que l'attestation remise au salarié au moment de la prise d'effet de son licenciement mentionnait également qu'il s'agissait d'un contrat à. durée indéterminée ; que l'intimée explique la signature avec le même salarié de deux contrats de travail ayant le même objet par l'irrégularité du premier, qui ne pouvait être conclu avant la convention qui lui servait de support, et qu'elle a du refaire avant de le déposer auprès des services du ministère du travail ; qu'elle relève cependant que le premier stipulait qu'il était conclu pour une durée indéterminée, et que c'est par erreur que le second mentionnait qu'il était conclu pour une durée de 5 ans, ce qui était légalement impossible mais correspondait à la durée maximale pendant laquelle l'aide forfaitaire pouvait être perçue ; qu'il résulte de ce qui précède que tel était effectivement le cas ; que le salarié fait valoir que la re-qualification en contrat à durée indéterminée d'un contrat de travail à durée déterminée irrégulier ne peut être demandée par l'employeur ; qu'il s'agit cependant, en présence de deux contrats prenant effet à la même date et divergeant entre eux sur ce point essentiel, de déterminer celui qui correspondait à la commune intention des parties et devait donc régir leurs rapports, de sorte que l'argument est sans portée ; que sur la légitimité du licenciement la lettre du juin 2008 motive cette mesure par "l'impossibilité fonctionnelle" dans laquelle Monsieur X... se trouve "d'exercer (sa) fonction de chauffeur, compte tenu de la suspension de (son) permis de conduire décidée par le préfet pour une durée de 6 mois à la suite du contrôle dont il a fait l'objet dans la nuit du 8 au 9 mai alors qu'il conduisait son véhicule personnel sous l'empire d'un état alcoolique et de la nécessité dans laquelle se trouve l'association "de procéder à (son) remplacement définitif tout particulièrement en ce début de saison estivale ; que l'employeur y souligne que le contrat de travail de M. X... stipule que celui ci occupait à temps complet un emploi de chauffeur et d'agent d'entretien du matériel et prévoyait expressément son "affectation à le mise à l'eau des engins nautiques", ce qui "requiert nécessairement la possession d'un permis de conduire" et que la suspension de son permis de conduire interdisait l'exercice de cette attribution ; que la compagnie d'assurances de l'association a avisé cette dernière de ce qu'elle ne la couvrirait pas en cas d'accident survenu dans ces conditions ; que l'entretien de la base nautique et de son matériel, principalement effectué pendant la période hivernale, "représente une charge de travail bien insuffisante pour justifier votre emploi pendant la période minimale de 6 mois que couvre la suspension du permis de conduire" ; que la lettre de licenciement rappelle enfin que le salarié a répondu par la négative (courrier du 27 mai) à la proposition qui lui était faite de suspendre son contrat de travail pendant la durée de la suspension de son permis ; que l'appelant réplique que la faute commise -qu'il ne conteste pas- l'a été "en dehors de sa période de travail" et que la suspension de permis de conduire dont il a fait l'objet n'affectait pas l'exercice de ses attributions qui auraient été exercées pendant 2 ans par un moniteur de char à voile qui en était démuni ; que son contrat stipulait que ses missions étaient d'une part l'entretien de la base nautique et de son matériel automoteur et d'autre part la mise à l'eau des engins nautiques; qu'il ne faisait nulle mention d'un emploi de chauffeur ni de l'exigence d'un permis de conduire en cours de validité ; qu'un fait de la vie personnelle peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement s'il se rattache à l'activité professionnelle du salarié ; que tel est le cas d'une suspension du permis de conduire lorsque la conduite d'un véhicule automobile est l'activité exclusive du salarié ou lorsque, bien qu'accessoire, elle est indispensable à l'exercice de l'activité principale ; qu'il résulte certes des attestations versées aux débats que la mise à l'eau des engins nautiques occupait, sauf pendant la période hivernale, la majeure partie du temps de travail de l'intéressé, et que la MACIF n'aurait pas couvert la responsabilité civile de l'association en cas de sinistre provoqué par un conducteur non titulaire des certificats en état de validité exigés par la réglementation en vigueur ; qu'aucune des pièces produites ne permet toutefois d'affirmer que, pour la mise à l'eau et la remontée des bateaux, le conducteur du tracteur doive conduire sur des voies ouvertes à la circulation publique ; qu'en tout état de cause, l'association pouvait organiser le travail entre ses trois salariés ayant les mêmes missions de manière à conserver M. X... à son . service; qu'enfin il n'est pas soutenu que la suspension provisoire du permis de conduire de l'appelant ait crée un trouble objectif caractérisé au sein de l'entreprise ; que son licenciement était donc dépourvu de cause réelle et sérieuse; que sur les demandes Indemnitaires la cour dispose d'éléments suffisants pour chiffrer, compte tenu notamment de l'âge (54 ans) et de l'ancienneté (ans, 5 mois et 9 jours) de Serge X... à la date de la rupture, à 8 000 euros, soit l'équivalent de 7 mois de salaire, l'indemnité qui lui est due sur le fondement de l'article L.1235-5 du Code du travail ; qu'il résulte des bulletins de paye produits que l'indemnité compensatrice de préavis et l'indemnité de licenciement ont été payées, l'une en deux versements les 30 juin et 31 juillet 2008, l'autre le 5 août de la même année ; que Serge X... reste encore créancier des congés payés afférents au préavis ; que conformément aux articles 1153 et 1153-1 du Code civil, les sommes ci dessus porteront intérêt au taux légal à compter de la réception de la convocation devant le bureau de conciliation, en l'espèce le 18 avril 2009, pour celle de nature salariale, à compter du présent arrêt pour celle de nature indemnitaire ; .
Alors que si la qualification d'un contrat de travail dont la nature juridique est indécise relève de l'office du juge, celui-ci ne peut toutefois à la demande de l'employeur requalifier un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée dès lors que les dispositions prévues par les articles L. 1242-1 et suivants du code du travail, relatives au contrat de travail à durée déterminée, ont été édictées dans un souci de protection du salarié qui peut seul se prévaloir de leur inobservation ; que dès lors en requalifiant le contrat à durée déterminée de M. X... en contrat à durée indéterminée en l'absence de demande du salarié, la cour d'appel a violé l'article susvisé ;