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20/02/2013 | FRANCE | N°11-19305

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 février 2013, 11-19305


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 21 avril 2011), qu'en1994, la société Wirth et Gruffat est devenue une filiale à 100 % de la société de droit allemand Autania AG, d'abord de manière directe, puis de manière indirecte, via une autre filiale à 100 % de cette société, la Millturn Holding Gmbh, détenant 10. 449 des 10. 468 actions de la société Wirth et Gruffat ; que cette dernière a été placée en redressement judiciaire le 8 juillet 2008 ; que par jugement du 5 novembre 20

08, le tribunal de commerce a validé un plan de cession d'une partie des a...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 21 avril 2011), qu'en1994, la société Wirth et Gruffat est devenue une filiale à 100 % de la société de droit allemand Autania AG, d'abord de manière directe, puis de manière indirecte, via une autre filiale à 100 % de cette société, la Millturn Holding Gmbh, détenant 10. 449 des 10. 468 actions de la société Wirth et Gruffat ; que cette dernière a été placée en redressement judiciaire le 8 juillet 2008 ; que par jugement du 5 novembre 2008, le tribunal de commerce a validé un plan de cession d'une partie des actifs de la société et autorisé le licenciement de soixante-trois salariés sur les soixante-quatorze qu'employait la société ; que Mme X...et MM.
Y...
, Z..., A..., B..., C..., G...et D..., cadres de l'entreprise, ont été licenciés le 24 novembre 2008 pour motif économique ; que le 27 janvier 2009, la société Wirth et Gruffat a été mise en liquidation judiciaire, M. E...étant désigné en qualité de liquidateur ; que contestant leur licenciement, les huit salariés ont saisi la juridiction prud'homale de demandes dirigées à l'encontre de la société Wirth et Gruffat et de la société Autania AG ;
Attendu que la société Autania AG fait grief à l'arrêt de dire que la société Wirth et Gruffat et elle-même étaient les coemployeurs des huit salariés et de déclarer en conséquence la juridiction prud'homale compétente pour connaître de toutes leurs demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que si la qualité de co-employeur peut être reconnue à une société juridiquement distincte d'une autre, dès lors qu'il est caractérisé entre elles une confusion d'intérêts, d'activités et de direction encore faut-il pour reconnaître la qualité d'employeurs conjoints d'un même salarié que soit caractérisée l'existence d'un lien de subordination entre chacun des prétendus employeurs et le salarié ; que des relations étroites entre sociétés ne suffisent pas à démontrer la qualité d'employeurs conjoints en l'absence d'exécution d'un travail sous l'autorité des employeurs qui doivent disposer du pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements du subordonné ; qu'en se bornant à affirmer que la société Autania AG avait la qualité d'employeur et que les salariés avaient travaillé sous sa direction, sans précisément caractériser un lien de subordination entre chacun des salariés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;
2°/ que les juges du fond ne peuvent procéder par voie de pure affirmation, sans préciser l'élément de preuve qui leur a permis de fonder leur décision ; qu'en affirmant péremptoirement que les salariés avaient, à compter de juillet 2007, accompli leur travail sous la direction et au profit de la société Autania AG quand aucun des éléments qu'elle avait visés ne venait justifier cette affirmation, la cour d'appel, qui n'a pas pris le soin de préciser sur quel élément de preuve elle se fondait pour déduire un tel motif, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement les éléments de fait qui lui étaient soumis, la cour d'appel a retenu que la société Wirth et Gruffat était devenue une filiale à 100 % de la société Autania AG, qui appartenait au Groupe K..., que M. K..., président de la société Wirth et Gruffat, exerçait des fonctions équivalentes dans la société Autania AG, que le domaine exclusif d'activité du Groupe K...comme des deux sociétés était identique, à savoir la fabrication de machines-outils et d'outils, que ces sociétés avaient une clientèle commune, ainsi que des fournisseurs et prestataires communs, que la société Autania AG a conçu, financé et mis en oeuvre le plan de relance de la société Wirth et Gruffat, que M. F..., consultant choisi par le Groupe K..., a assuré la direction de fait de la société Wirth et Gruffat pendant la mise en oeuvre de ce plan, que ce groupe a assuré un soutien financier à cette société jusqu'à la fin du mois de juin 2008 ; qu'elle a pu en déduire qu'il existait entre les sociétés Wirth et Gruffat et Autania AG une confusion d'intérêts, d'activités et de direction suffisant à conférer à la société Autania AG la qualité de coemployeur à l'égard du personnel de la société Wirth et Gruffat ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société de droit allemand Autania AG aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société de droit allemand Autania AG à payer aux salariés la somme globale de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt février deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas, avocat aux Conseils, pour la société de droit allemand Autania AG
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la société Wirth et Gruffat et la société de droit allemand Autania Ag étaient les co-employeurs de Madame Marion X...et de Messieurs Pierrick Y..., Olivier Z..., Jean-François A..., Jean-Luc B..., Guy C..., Pierre G...et Laurent D..., et d'avoir, en conséquence, dit que le conseil de prud'hommes d'Annecy était compétent pour connaître de toutes leurs demandes, notamment en ce qu'elles étaient dirigées à l'encontre de la société Autania Ag,
AUX MOTIFS QUE la juridiction prud'homale ayant naturellement compétence pour connaître des litiges s'élevant à l'occasion des contrats de travail entre les employeurs et les salariés qu'ils emploient, la Cour examinera d'abord si la société Autania Ag peut être considérée comme le co-employeur des salariés demandeurs ; qu'il ressort des éléments de l'espèce que le Président de la société Wirth et Gruffat était Monsieur Helmut K..., qui détenait 5 des 10 648 actions de la société ; que cet homme a, d'une part, donné son nom à la société holding sise à la tête du groupe K...dont dépend notamment la société Autania Ag, ces deux sociétés ayant leur siège à Kelkheim en Allemagne ; qu'il est, d'autre part, le dirigeant de la société Autania Ag, sa qualité dans cette société étant équivalente à celle de Président dans une société anonyme de droit français ; que le domaine exclusif d'activité du groupe K..., de la société Autania Ag et de la société Wirth et Gruffat est identique : il s'agit de la fabrication de machines-outils et d'outils ; que ces sociétés avaient donc toutes une clientèle commune ainsi que cela est d'ailleurs révélé par les démarches commerciales de Monsieur F...relatées dans le procès-verbal de la réunion du CE du 11 juin 2008, et évidemment des fournisseurs et prestataires communs ; que c'est la société Autania Ag qui a conçu, financé et mis en oeuvre le plan de relance de la société Wirth et Gruffat, dont la presse s'est fait l'écho, Monsieur F...étant devenu, a minima de fait, le directeur de la société ; de juillet 2007, Monsieur I...ayant été muté en juin 2007 dans une autre société du groupe, à juin 2008, Monsieur J...ayant été recruté par M. F...pour occuper le poste de directeur à compter du juillet 2008 (cf. procès-verbal de la réunion du CE du 22 avril 2008 et contrat de travail de Monsieur J...en date du 8 avril 2008) ; jusqu'au 11 juin 2008, soit 20 jours avant qu'il ne cesse, la société Wirth et Gruffat était assurée du soutien financier du groupe et de la société Autania Ag, soutien accordé tant dans l'intérêt de ceux qui l'ont consenti que dans l'intérêt de la société Wirth et Gruffat qui ne pouvait pas s'en passer ; que tous ces éléments établissent que les intérêts, les activités et la direction des sociétés Wirth A Gruffat et Autania Ag étaient confondus et que les salariés ont, en tout cas à compter de juillet 2007, accompli leur travail sous la direction et au profit de ces deux sociétés ; qu'ils permettent en conséquence de dire que la société Autania Ag était leur co-employeur, ce qui rend la juridiction prud'homale compétente pour connaître des demandes qu'ils forment à son encontre,
ALORS D'UNE PART QUE si la qualité de co-employeur peut être reconnue à une société juridiquement distincte d'une autre, dès lors qu'il est caractérisé entre elles une confusion d'intérêts, d'activités et de direction encore faut-il pour reconnaître la qualité d'employeurs conjoints d'un même salarié que soit caractérisée l'existence d'un lien de subordination entre chacun des prétendus employeurs et le salarié ; que des relations étroites entre sociétés ne suffisent pas à démontrer la qualité d'employeurs conjoints en l'absence d'exécution d'un travail sous l'autorité des employeurs qui doivent disposer du pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements du subordonné ; qu'en se bornant à affirmer que la société Autania AG avait la qualité d'employeur et que les salariés avaient travaillé sous sa direction, sans précisément caractériser un lien de subordination entre chacun des salariés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail,
ALORS D'AUTRE PART QUE les juges du fond ne peuvent procéder par voie de pure affirmation, sans préciser l'élément de preuve qui leur a permis de fonder leur décision ; qu'en affirmant péremptoirement que les salariés avaient, à compter de juillet 2007, accompli leur travail sous la direction et au profit de la société Autania AG quand aucun des éléments qu'elle avait visés ne venait justifier cette affirmation, la cour d'appel, qui n'a pas pris le soin de préciser sur quel élément de preuve elle se fondait pour déduire un tel motif, a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-19305
Date de la décision : 20/02/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 21 avril 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 fév. 2013, pourvoi n°11-19305


Composition du Tribunal
Président : M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.19305
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