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19/02/2013 | FRANCE | N°12-14003

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 19 février 2013, 12-14003


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles L. 311-2 et L. 311-3, 2° du code de la consommation, ensemble l'article L. 311-37 du même code ;

Attendu que, titulaire auprès de la société HSBC France (la banque) d'un compte de dépôt en situation débitrice depuis le mois de juillet 2005, M. X..., assigné, le 19 mai 2009, en paiement d'un solde débiteur excédant le plafond d'application prévu à l'article L. 311-3, 2° du code de la consommation, a opposé à l'ac

tion de la banque la forclusion biennale de l'article L. 311-37 du même code, en se ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles L. 311-2 et L. 311-3, 2° du code de la consommation, ensemble l'article L. 311-37 du même code ;

Attendu que, titulaire auprès de la société HSBC France (la banque) d'un compte de dépôt en situation débitrice depuis le mois de juillet 2005, M. X..., assigné, le 19 mai 2009, en paiement d'un solde débiteur excédant le plafond d'application prévu à l'article L. 311-3, 2° du code de la consommation, a opposé à l'action de la banque la forclusion biennale de l'article L. 311-37 du même code, en se prévalant d'une convention "HSBC Patrimoine" conclue le 15 mars 2006, lui ayant accordé une facilité de caisse de 5 000 euros dont le dépassement acquis dès le 6 avril suivant, sans jamais être régularisé, aurait fait courir le délai d'action de la banque ;

Attendu que, pour rejeter cette fin de non-recevoir, l'arrêt attaqué retient, par motifs propres, que le solde débiteur du compte, qui s'élevait à la somme de 43 832,83 euros, lors de l'arrêté de compte, et restait de 31 175,33 euros à la date de la demande en première instance, dépasse les prévisions de l'article L. 311-3 du code de la consommation, lequel exclut du champ d'application des articles L. 311-1 et suivants du même code les opérations de crédit dont le montant est supérieur à "25 000 euros", de sorte que la forclusion de deux ans prévue à l'article L. 311-37 n'est pas applicable à l'action de la banque ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si M. X... ne s'était pas vu consentir, le 15 mars 2006, un concours autorisant un découvert en compte de 5 000 euros, dont seul le montant devait être pris en considération pour se prononcer utilement sur l'application du régime du crédit à la consommation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres griefs du pourvoi :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 1er décembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;

Condamne la société HSBC France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société HSBC France ; la condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf février deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas, avocat aux Conseils, pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté le moyen tiré de la forclusion de l'action en paiement et d'avoir condamné M. X... à payer à la société HSBC la somme de 22.548,16 € augmentés des intérêts au taux légal à compter du jour de l'assignation ;

AUX MOTIFS QUE

"Serge X... fait valoir que l'action de la banque est irrecevable car forclose, que l'article L. 311-37 du code de la consommation indique que l'action en paiement doit être engagée dans les deux ans de l'événement qui a donné naissance à la défaillance, que le point de départ de ce délai en matière de découvert en compté est fixé à la date d'exigibilité de la créance ; il soutient qu'en l'espèce le premier juge a considéré que s'agissant d'un compte de dépôt sans autorisation de découvert, le point de départ du délai de forclusion n'était pas l'apparition du découvert mais la date de résiliation du compte soit le 27 mars 2008 (signature de l'AR de la lettre du 21 mars), mais qu'il a alors oublié la convention HSBC Patrimoine signée par lui le 15 mars 2006 et qui autorisait un découvert intitulé « facilité de caisse » de 5 000 € ; il avance alors que le montant du découvert ayant été supérieur dès le 6 avril suivant au montant autorisé, la forclusion était acquise depuis le 6 avril 2008 ; la société HSBC prétend d'abord que les dispositions invoquées du code de la consommation n'ont pas vocation à s'appliquer, puis elle oppose des arguments sur tous les points soulevés par l'appelant ; il est précisé dans le jugement que la demande, au titre du solde débiteur du compte de dépôt en cause n° 00560056635, portait sur la somme de 31 175,33 € ; dans ses conclusions, la société HSBC note par ailleurs que ce solde débiteur arrêté au 14 avril 2008 s'élevait à 43 832,83 € ; or, dans le cadre des dispositions des articles L. 311-1 et suivants du code de la consommation alors applicables (notamment L. 311-37 concernant la procédure, et spécialement la forclusion et son délai ici discutés) relatives aux opérations de crédit, l'article L 311-3 exclut de leur champ d'application de telles opérations si leur montant est supérieur à 25 000 € ; dans ces conditions, la forclusion de deux ans prévue à l'article L. 311-37 du code auparavant cité n'est pas applicable, de sorte que l'action de la société HSBC n'est en toute hypothèse pas forclose" (Arrêt p. 5) ;

ET AUX MOTIFS, A LES SUPPOSER ADOPTES, QUE

"les dispositions d'ordre public prévues en matière de crédit à la consommation par les articles L. 311-1 et suivants du code de la consommation s'appliquent aux actions tendant au paiement du solde débiteur d'un compte de dépôt sans autorisation de découvert dès lors que ce compte a présenté un solde débiteur pendant plus de trois mois successifs sans régularisation postérieure ; le point de départ du délai de forclusion n'est pas l'apparition du découvert mais la date de résiliation du compte de dépôt, rendant exigible l'obligation de paiement, soit en l'espèce le 27 mars 2008 ; compte tenu de la date de délivrance de l'acte introductif d'instance, l'action en paiement n'est donc pas atteinte de forclusion biennale prévue à l'article L. 311-37 du code de la consommation ; le moyen tiré de la forclusion de l'action en paiement ne peut qu'être rejeté" (Jugement p. 2) ;

ALORS, D'UNE PART, QUE le dépassement du découvert en compte autorisé, au-delà du seuil maximal d'application de la réglementation sur le crédit à la consommation, ne fait pas échapper l'ouverture de crédit, consentie pour un montant inférieur au seuil maximal d'application, à ladite réglementation; qu'en retenant, pour écarter l'application du délai de forclusion de deux ans prévu à l'article L. 311-37 du code de la consommation, que l'opération de crédit litigieuse étant supérieure à 25.000 €, les dispositions du code de la consommation ne trouvaient pas à s'appliquer, sans rechercher, comme elle y était invitée, si M. X... ne s'était pas vu consentir un découvert en compte autorisé à hauteur de 5.000 €, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 311-2, L. 311-3 et L. 313-16 du Code de la consommation dans leur rédaction applicable à la cause ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE le dépassement du découvert autorisé constitue le premier incident de paiement non régularisé et marque le point de départ du délai de forclusion biennale; qu'à supposer qu'elle ait adopté les motifs des premiers juges et retenu que l'action de la banque n'était pas forclose dès lors qu'en l'absence d'autorisation de découvert le point de départ du délai de forclusion se situait à la date de résiliation du compte de dépôt, soit le 27 mars 2008, et que l'action engagée le 19 mai 2009 n'était pas forclose, sans répondre au moyen par lequel M. X... rappelait qu'il avait signé le 15 mars 2006 une convention de découvert autorisé de 5.000 €, dépassée dès le 6 avril suivant, que le point de départ du délai de forclusion devait donc être situé à cette date et l'action de la banque introduite avant le 6 avril 2008, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN, SUBSIDIAIRE, DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande tendant à la condamnation de la société HSBC à lui payer la somme de 22.548,16 € à titre de dommages et intérêts ;

AUX MOTIFS QUE

"Serge X... soutient que la banque a commis une faute, qu'elle devait le conseiller, qu'elle a accepté de maintenir un découvert bancaire non autorisé pendant près de trois ans pour un montant non négligeable, qu'elle n'a pas proposé de régulariser le compte par une offre de crédit ou un découvert autorisé ;

Sur ce plan, il doit être observé que Serge X... est gérant de société et donc un professionnel ;

Il résulte des relevés produits pour le compte de dépôt en cause et des correspondances échangées que ce compte a commencé à devenir débiteur mi-juillet 2005 et que, outre ces lettres jointes au débat, d'autres échanges et rendez-vous entre la banque et celui-ci ont eu lieu puisque ces lettres y font allusion ;

La lettre de la banque du 24 octobre 2006 demandait à Serge X... de régulariser son compte, alors débiteur de plus de 34.000 €, avant le 2 novembre au plus tard, ou au moins de lui adresser un calendrier de remboursement ;

Les relevés du compte montrent que cet avertissement n'a eu aucun effet puisque le compte est resté les mois suivants débiteur dans les mêmes proportions ;

Comme il est mentionné dans sa lettre du 6 juin 2007, un protocole d'amortissement du découvert du compte a été signé en mars 2007 ; mais Serge X... ne l'a pas respecté comme le précise cette lettre (qui est donc postérieure de quatre mois à ce protocole) par laquelle il a été à nouveau mis en demeure de régulariser ;

Les autres correspondances jointes au débat sont de 2008 : lettre du 21 mars de la banque résiliant les comptes, du 4 avril de Serge X... affirmant sa disposition à trouver une solution, puis, après d'autres échanges, du 22 août de la banque où elle prenait note de la volonté de son client de rembourser mais lui indiquait qu'il ne précisait pas les modalités, enfin du 1er septembre de Serge X... où il proposait à la société HSBC de lui établir un échéancier de remboursement sur 48 mois ;

L'appelant Serge X... n'a fait aucune allusion à ces échanges dans ses conclusions ;

L'assignation a donc ensuite été délivrée le 19 mai 2009 ;

Il est exact que le solde débiteur a atteint pendant plus de deux ans de 30.000 à 40.000 €.

Il résulte néanmoins des correspondances précédemment citées que les contacts entre la banque et son client ont été fréquents, que Serge X... a été relancé à plusieurs reprises par la société HSBC pour régulariser sa dette, que pour celle-ci il a été nettement averti en 2006, a pris des engagements en 2007 qu'il n'a pas tenus, s'est engagé à nouveau en 2008 à en prendre ;

De plus, Serge X... est un travailleur indépendant et non pas un client non averti ;

Au regard de ces éléments, la faute de la banque qu'il invoque n'est pas caractérisée et sa demande de ce chef sera rejetée" (arrêt p. 6 et 7) ;

ALORS, D'UNE PART, QUE la banque est tenue envers l'emprunteur non averti d'un devoir de mise en garde au regard de ses capacités financières et des risques de l'endettement nés du découvert accordé ; qu'en l'espèce M. X... faisait valoir que la responsabilité de la banque était engagée à son égard pour avoir manqué à son devoir de conseil en lui maintenant un découvert bancaire important pendant plus de trois ans et qu'elle avait ainsi commis une faute ouvrant droit à réparation ; qu'en retenant, pour le débouter de sa demande, qu'il lui avait été vainement demandé de régulariser son compte au mois d'octobre 2006, que plusieurs correspondances avaient été échangées pour rechercher une solution et lui demander de régulariser sa dette, sans constater que la banque avait averti M. X... au regard de ses capacités financières et des risques de l'endettement nés du découvert accordé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE le seul fait pour l'emprunteur d'être gérant de société ou travailleur indépendant ne suffit pas à lui conférer la qualité d'emprunteur averti ; qu'en retenant, pour le débouter de sa demande de dommages et intérêts pour manquement de la banque à son devoir de conseil, qu'il était un travailleur indépendant et non pas un client non averti, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 12-14003
Date de la décision : 19/02/2013
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 01 décembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 19 fév. 2013, pourvoi n°12-14003


Composition du Tribunal
Président : M. Bargue (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.14003
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