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13/02/2013 | FRANCE | N°12-80459

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 13 février 2013, 12-80459


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par:
- Le procureur général près la cour d'appel de Basse-Terre,- L'État français, partie civile,
contre l'arrêt de ladite cour d'appel, chambre correctionnelle, en date du 13 décembre 2011, qui a relaxé MM. Marc de X... et Fabrice Y... des chefs d'escroquerie, faux et usage, et a débouté la partie civile de ses demandes ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pr

is par le procureur général de la violation des articles 618 et 567 du code de p...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par:
- Le procureur général près la cour d'appel de Basse-Terre,- L'État français, partie civile,
contre l'arrêt de ladite cour d'appel, chambre correctionnelle, en date du 13 décembre 2011, qui a relaxé MM. Marc de X... et Fabrice Y... des chefs d'escroquerie, faux et usage, et a débouté la partie civile de ses demandes ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris par le procureur général de la violation des articles 618 et 567 du code de procédure pénale ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris par le procureur général de la violation des articles 97 et 567 du code de procédure pénale ;
Sur le troisième moyen de cassation pris par le procureur général de la violation de l'article 593 du code de procédure pénale ;
Sur le premier moyen de cassation proposé pour l'État français, pris de la violation des articles 173 et 175, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motif ;
"en ce que, l'arrêt attaqué a décidé que les pièces appréhendées par la police judiciaire, sur commission rogatoire du juge d'instruction, alors que l'administration se proposait de les restituer aux personnes intéressées, consécutivement aux visites domiciliaires effectuées sur le fondement de l'autorisation du 4 avril 2001, devaient être écartées des débats, a relaxé en conséquence les prévenus des fins de la poursuite, puis rejeté la demande de l'État ;
"aux motifs qu'il convient de rappeler qu'aux termes de l'article 164 de la loi 2008-776 du 04 août 2008 de modernisation de l'économie, toute personne intéressée peut, désormais, exercer un recours contre les décisions ayant ordonné des visites domiciliaires sur le fondement des dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales et, par conséquent, contre les opérations de visite et de saisie opérées sur le fondement de ces décisions, devant le premier président de la cour d'appel du ressort de la juridiction ayant rendu les décisions ; que ce recours peut être exercé sans condition de décision de délai, y compris pour contester des décisions antérieures à l'entrée en vigueur de la loi précitée ; que c'est dans ces conditions que M. de X... et Me Z..., ès qualité de liquidateur judiciaire de diverses sociétés dont le premier était le gérant, et notamment la SARL Coproban, ont saisi M. le premier président de la cour d'appel de ce siège qui, par ordonnance en date du 25 mai 2011, a annulé l'ordonnance du 04 avril 2001 rendue par M. Cantinol, juge d'instruction au tribunal de grande instance de Basse-Terre, en ce qu'elle a autorisé les représentants de la direction générale des impôts à procéder à des visites et saisies dans les locaux et dépendances occupés par la SARL Coproban, 20 allée des Acacias 97130 Capesterre-Belle-Eau, et annulé en conséquence les opérations de visite et de saisie effectuées en ce même lieu le 5 avril 2001 ainsi que le procès-verbal de visite et de saisie établi à cette occasion ; qu'or, dans le cadre de l'information ouverte contre X... du chef d'escroquerie, à la suite du courrier adressé le 23 octobre 2000 par la direction des services fiscaux au procureur de la république, les pièces saisies au cours des opérations effectuées le 5 avril 2001 dans les locaux de la SARL Coproban ont été mises sous scellés et intégrées au dossier d'information ; qu'en effet suivant procès-verbal en date du 13 juin 2001 (D76) les officiers de police judiciaire, agissant sur commission rogatoire du juge d'instruction, mentionnent qu'à la suite des réquisitions qu'ils ont adressées à la direction nationale des enquêtes fiscales, celle-ci les a informés que les documents, saisis seraient restitués à M. de X... dans les locaux de la B.C.R. ; que dans ces locaux, en présence de M. de X..., ces mêmes officiers de police judiciaire ont eu communication des pièces saisies qu'ils ont cotées et placés sous scellés (notamment scellé n° 6) ; que, quand bien même l'administration fiscale a organisé la remise des pièces saisies entre les mains des enquêteurs de la police judiciaire, il n'en demeure pas moins que les opérations de visite de saisies ont été annulées par la décision du premier président de la cour d'appel en date du 25 mai 2011 de sorte que les pièces saisies au cours de ces mêmes opérations sont ellesmêmes viciées, et donc nulles ; qu'il y a lieu, dès lors, d'ordonner le retrait des pièces issues des opérations de saisie effectuées le 05 avril 2001 et placées sous scellé n° 6 et identifiées sous les numéros 70017 à 70018 - 70029 à 70032 - 70063 à 70089 - 70117 à 701120 - 71461 à 71469 - 71544 à 71549 - 71601 à 71604 - 71612 - 71633 à 71634 - 71645 à 71653 - 71656 -71671 à 71673 - 71826 à 71876 - 71951 à 71970 - 72335 à 72395 - 75001 à 75083 - 75510 à 75522 ; que les pièces viciées saisies sont pour nombre d'entre elles les "factures proforma fictives" considérées comme étant des fausses factures qui sont à la base des poursuites engagées contre M. de X... et M. Y... ; que ces pièces, sur lesquelles les prévenus ont été interrogés par les enquêteurs et le juge d'instruction, constitueraient ainsi à la fois l'écrit dont la vérité aurait fait l'objet d'une altération frauduleuse qui serait l'élément matériel des délits de faux et usage de faux et le support des prétendues manoeuvres frauduleuses constitutives du délit d'escroquerie ; que dans la mesure où ces pièces viciées, qui sont un support essentiel de la procédure ayant abouti au renvoi de M. de X... et M. Y... devant le tribunal correctionnel, n'ont plus de valeur probante, il y a lieu de prononcer la relaxe de ces derniers des fins de la poursuite ;
"alors que, l'exclusion des pièces supposait que l'appréhension par l'officier de police judiciaire, sur commission rogatoire du juge d'instruction, fût irrégulière ; que toutefois, la nullité des actes se rattachant à l'information, ne peut être prononcée, au plus tard, que dans le cadre d'une demande formulée conformément à l'article 175 préalablement à l'ordonnance réglant la procédure ; qu'en décidant néanmoins d'ordonner le retrait des pièces qui avaient été appréhendées au cours de la procédure d'information, quand l'ordonnance de renvoi faisait obstacle à ce que l'appréhension des pièces par l'officier de police judiciaire, sur commission rogatoire, fût considérée comme irrégulière, les juges du fond ont violé les textes susvisés" ;
Sur le second moyen de cassation proposé pour l'État français, pris de la violation des articles L. 16B du livre des procédures fiscales, 151 et 152, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motif ;
"en ce que, l'arrêt attaqué a décidé que les pièces appréhendées par la police judiciaire, sur commission rogatoire du juge d'instruction, alors que l'administration se proposait de les restituer aux personnes intéressées, consécutivement aux visites domiciliaires effectuées sur le fondement de l'autorisation du 4 avril 2001, devaient être écartées des débats, a relaxé en conséquence les prévenus des fins de la poursuite, puis rejeté la demande de l'État ;
"aux motifs, qu'il convient de rappeler qu'aux termes de l'article 164 de la loi 2008-776 du 04 août 2008 de modernisation de l'économie, toute personne intéressée peut, désormais, exercer un recours contre les décisions ayant ordonné des visites domiciliaires sur le fondement des dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales et, par conséquent, contre les opérations de visite et de saisie opérées sur le fondement de ces décisions, devant le premier président de la cour d'appel du ressort de la juridiction ayant rendu les décisions ; que ce recours peut être exercé sans condition de décision de délai, y compris pour contester des décisions antérieures à l'entrée en vigueur de la loi précitée ; que c'est dans ces conditions que M. De X... et Me Z..., ès qualité de liquidateur judiciaire de diverses sociétés dont le premier était le gérant, et notamment la SARL Coproban, ont saisi Monsieur le premier président de la cour d'appel de ce siège qui, par ordonnance en date du 25 mai 2011, a annulé l'ordonnance du 4 avril 2001 rendue par M. Cantinol, juge d'instruction au tribunal de grande instance de Basse-Terre, en ce qu'elle a autorisé les représentants de la direction générale des impôts à procéder à des visites et saisies dans les locaux et dépendances occupés par la SARL Coproban, 20 allée des Acacias 97130 Capesterre-Belle-Eau, et annulé en conséquences les opérations de visite et de saisie effectuées en ce même lieu le 5 avril 2001 ainsi que le procès-verbal de visite et de saisie établi à cette occasion ; qu'or, dans le cadre de l'information ouverte contre X... du chef d'escroquerie, à la suite du courrier adressé le 23 octobre 2000 par la direction des services fiscaux au procureur de la république, les pièces saisies au cours des opérations effectuées le 05 avril 2001 dans les locaux de la SARL Coproban ont été mises sous scellés et intégrées au dossier d'information ; qu'en effet suivant procès-verbal en date du 13 juin 2001 (D76) les officiers de police judiciaire, agissant sur commission rogatoire du juge d'instruction, mentionnent qu'à la suite des réquisitions qu'ils ont adressées à la direction nationale des enquêtes fiscales, celle-ci les a informés que les documents, saisis seraient restitués à M. de X... dans les locaux de la B.C.R. ; que dans ces locaux, en présence de M. de X..., ces mêmes officiers de police judiciaire ont eu communication des pièces saisies qu'ils ont cotées et placés sous scellés (notamment scellé n° 6) ; que, quand bien même l'administration fiscale a organisé la remise des pièces saisies entre les mains des enquêteurs de la police judiciaire, il n'en demeure pas moins que les opérations de visite et de saisies ont été annulées par la décision du premier président de la cour d'appel en date du 25 mai 2011 de sorte que les pièces saisies au cours de ces mêmes opérations sont ellesmêmes viciées, et donc nulles ; qu'il y a lieu, dès lors, d'ordonner le retrait des pièces issues des opérations de saisie effectuées le 05 avril 2001 et placées sous scellé n° 6 et identifiées sous les numéros 70017 à 70018 - 70029 à 70032 - 70063 à 70089 - 70117 à 701120 - 71461 à 71469 - 71544 à 71549 - 71601 à 71604 - 71612 - 71633 à 71634 - 71645 à 71653 - 71656 - 71671 à 71673 - 71826 à 71876 - 71951 à 71970 - 72335 à 72395 - 75001 à 75083 - 75510 à 75522 ; que les pièces viciées saisies sont pour nombre d'entre elles les "factures proforma fictives" considérées comme étant des fausses factures qui sont à la base des poursuites engagées contre M. de X... et M. Y... ; que ces pièces, sur lesquelles les prévenus ont été interrogés par les enquêteurs et le juge d'instruction, constitueraient ainsi à la fois l'écrit dont la vérité aurait fait l'objet d'une altération frauduleuse qui serait l'élément matériel des délits de faux et usage de faux et le support des prétendues manoeuvres frauduleuses constitutives du délit d'escroquerie ; que, dans la mesure où ces pièces viciées, qui sont un support essentiel de la procédure ayant abouti au renvoi de M. de X... et M. Y... devant le tribunal correctionnel, n'ont plus de valeur probante, il y a lieu de prononcer la relaxe de ces derniers des fins de la poursuite ;
"alors que, premièrement, à la date du 13 juin 2001, date de l'appréhension par l'officier de police judiciaire, dans le cadre de la commission rogatoire, l'administration fiscale procédait régulièrement à la restitution des pièces, lesquelles devaient être regardées comme ayant été appréhendées régulièrement par l'administration fiscale puisqu'elles l'avaient été sous le couvert de l'autorisation du 4 avril 2001 ; qu'en tenant, néanmoins, cette appréhension pour irrégulière, en vue d'écarter les pièces litigieuses du débat, les juges du fond ont violé les textes susvisés ; que de ce point de vue également, l'arrêt attaqué a été rendu en violation des textes susvisés" ;
Les moyens étant réunis ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale, ensemble les article 175, 179 et 385 du même code ;
Attendu que, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que, en dehors des cas prévus par les alinéas 2 et 3 de l'article 385 précité, lorsque la juridiction correctionnelle est saisie par l'ordonnance de renvoi du juge d'instruction, les parties ne sont plus recevables à invoquer des exceptions de nullité de la procédure antérieure ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt infirmatif attaqué et des pièces de procédure qu'en application de l'article 40 du code de procédure pénale, le directeur départemental des services fiscaux a dénoncé au procureur de la République de Pointe à Pitre des faits relatifs à des opérations de défiscalisation susceptibles de caractériser le délit d'escroquerie ; qu'une information a été ouverte de ce chef, ainsi que pour faux et usage ; que le 13 juin 2001, sur commission rogatoire du juge d'instruction, ont été saisis des documents, notamment des factures arguées de faux, qui venaient d'être restitués à M. de X... par les agents des impôts après avoir été appréhendés lors d'une opération de visite domiciliaire autorisée par ordonnance du 4 juin 2001 du magistrat délégué du tribunal de Basse-Terre ;
Attendu que, mis en examen des chefs précités les 18 mars et 9 avril 2002, MM. Y... et de X... ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel ; que, par jugement du 31 janvier 2008, ils ont été déclarés coupables des faits reprochés et condamnés, chacun, à trois ans d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve, 20 000 euros d'amende et trois ans d'interdiction de gérer ; que, pour prononcer leur relaxe, l'arrêt relève que la décision précitée du 4 juin 2001 et les actes effectués en exécution de cette décision ont été annulés par ordonnance du premier président du 25 mai 2011 ; que les juges en déduisent que "les pièces saisies au cours de ces opérations sont elles-mêmes viciées et donc nulles" ; qu'après avoir prescrit leur retrait de la procédure, ils ajoutent que ces documents, susceptibles de caractériser l'élément matériel des délits de faux et usage ainsi que les manoeuvres frauduleuses de l'escroquerie, n'ont plus de valeur probante ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi alors que, d'une part, les documents ont été saisis en exécution d'une commission rogatoire dont la légalité n'a pas été contestée, d'autre part, aucune conséquence ne saurait être tirée de décisions intervenues dans une procédure distincte, étrangère aux poursuites, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Basse-Terre, en date du 13 décembre 2011 ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, a cé désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Basse-Terre et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale au bénéfice de M. de X... ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Nocquet conseiller rapporteur, M. Dulin conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Leprey ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 12-80459
Date de la décision : 13/02/2013
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Basse-Terre, 13 décembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 13 fév. 2013, pourvoi n°12-80459


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Tiffreau, Corlay et Marlange, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.80459
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