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23/01/2013 | FRANCE | N°11-25465

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 23 janvier 2013, 11-25465


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 145-5 du code de commerce, ensemble l'article 1134 du code civil ;
Attendu que les parties peuvent, lors de l'entrée dans les lieux du preneur, déroger aux dispositions du chapitre V du titre IV du Livre Ier du code de commerce à la condition que le bail soit conclu pour une durée au plus égale à deux ans ; que si, à l'expiration de cette durée, le preneur reste et est laissé en possession, il s'opère un nouveau bail dont l'effet est réglé par les dispos

itions de ce chapitre ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 19 mai 201...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 145-5 du code de commerce, ensemble l'article 1134 du code civil ;
Attendu que les parties peuvent, lors de l'entrée dans les lieux du preneur, déroger aux dispositions du chapitre V du titre IV du Livre Ier du code de commerce à la condition que le bail soit conclu pour une durée au plus égale à deux ans ; que si, à l'expiration de cette durée, le preneur reste et est laissé en possession, il s'opère un nouveau bail dont l'effet est réglé par les dispositions de ce chapitre ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 19 mai 2011), que la société Johnson Controls MC International a consenti un bail d'une durée de 19 mois sur un bâtiment à usage artisanal à la société Bonnet grande cuisine, qui est demeurée dans les lieux au delà de la date d'échéance du 31 décembre 2006 ; que le 30 juillet 2007, la société Bonnet grande cuisine a délivré à la bailleresse un congé à effet au 31 janvier 2008 ; que le bâtiment, ainsi occupé, a été cédé le 2 octobre 2007 à la société Lemaire Les Sars ; que la société Bonnet grande cuisine a libéré les lieux à la fin du mois de janvier 2008 ; que, par acte du 23 mai 2008, la société Lemaire Les Sars, se prévalant du droit au statut des baux commerciaux, a assigné la société Bonnet grande cuisine en paiement, à titre de dommages-intérêts, d'une certaine somme correspondant aux loyers qu'elle aurait dû percevoir de février 2008 jusqu'au terme normal du bail ; que la société Horis Sasu est venue aux droits de la société Bonnet grande cuisine ;
Attendu que pour débouter la société Lemaire Les Sars de sa demande, l'arrêt retient que cette société n'a pas contesté le congé délivré le 30 juillet 2007 par le preneur, a délivré des factures pour les périodes du 1er décembre 2006 au 28 février 2007 et du 1er mars 2007 au 31 septembre 2007 portant la mention "selon convention d'occupation précaire et temporaire", que les mentions, figurant tant dans la promesse de vente que dans l'acte de cession, relatives aux conditions de la location, informent l'acquéreur du "risque de requalification du bail dérogatoire en bail commercial", et que ces éléments démontrent que la bailleresse a entendu renoncer de manière explicite et non équivoque au statut des baux commerciaux ;
Qu'en statuant ainsi , par des motifs ne caractérisant pas la renonciation non équivoque du bailleur à se prévaloir du statut des baux commerciaux, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 mai 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit , les renvoie devant la cour d'appel de Douai autrement composée ;
Condamne la société Horis aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Horis à payer à la société Lemaire Les Sars la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de la société Horis ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois janvier deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société Lemaire Les Sars
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société Lemaire Les Sars de sa demande tendant à voir condamner la société Bonnet Grande Cuisine à lui payer la somme de 473.417, 05 euros et de l'avoir condamnée à payer à cette dernière, la somme de 1000 euros à titre de dommages et intérêts ;
Aux motifs que le bail « dérogatoire et temporaire » du 1er juin 2005 précise que « le présent bail est accepté et consenti pour une durée de 19 mois à compter du 1er juin 2005. Conformément aux dispositions de l'article 3.2 du décret n° 53-960 du 30 septembre 1953, les parties soussignées entendent déroger, en toutes ses dispositions, au statut des baux commerciaux édicté par le décret susvisé. La durée du présent bail ne sera susceptible d'aucune reconduction et expirera le 31 décembre 2006, même à défaut de dénonciation pour cette date » ; que l'article 10 de ce contrat relatif aux dispositions diverses stipule qu'« il est formellement convenu que toutes les tolérances de la part du bailleur, quelles qu'en aient pu être la fréquence et la durée, ne pourront en aucun cas être considérées comme apportant une modification ou suppression à ces conditions ni comme génératrice d'un droit quelconque » ; qu'aux termes de l'article L 145-5 du Code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 4 août 2008, applicable, « les parties peuvent lors de l'entrée dans les lieux du preneur, déroger aux dispositions du présent chapitre à la condition que le bail soit conclu pour une durée au plus égale à deux ans. Si, à l'expiration de cette durée, le preneur reste et est laissé en possession, il s'opère un nouveau bail dont l'effet est réglé par les dispositions du présent chapitre » ; qu'il n'est pas contesté que la SAS Bonnet s'est maintenue dans les lieux jusqu'en janvier 2008 ; que la preuve n'étant pas rapportée de ce que la société Johnson se soit opposée à ce maintien dans les lieux, la société Bonnet a acquis un droit au statut des baux commerciaux ; qu'il est établi néanmoins que, postérieurement à l'acquisition de ce droit, elle a entendu y renoncer de manière explicite et non équivoque par la délivrance le 30 juillet 2007 d'un congé à effet du 31 janvier 2008 ; que s'agissant de la société Johnson, l'absence de contestation de ce congé, la délivrance de factures pour les périodes du 1er décembre 2006 au 28 février 2007 et du 1er mars 2007 au 31 septembre 2007 portant la mention « selon convention d'occupation précaire et temporaire » ainsi que les mentions figurant tant dans la promesse de vente que dans l'acte de cession relatives aux conditions de la location qui informent l'acquéreur du « risque de requalification du bail dérogatoire en bail commercial » démontrent que celle-ci a également entendu renoncer de manière explicite et non équivoque au statut des droits commerciaux ; que ces éléments sont conformes à la volonté des parties exprimée dans l'article 10 du contrat de bail rappelé ci-dessus ; que la SCI Lemaire Les Sars ne peut tirer argument de la délivrance du congé du 16 mars 2009 en référence aux articles L 145-4 et L 145-9 du Code de commerce, dès lors que celui-ci mentionne très clairement qu'il n'est délivré qu'à « titre de précaution », le premier congé étant contesté dans le cadre d'une procédure pendante devant le Tribunal de grande instance de Saint-Omer ; que par suite c'est à bon droit que le premier juge a rejeté la demande de la SCI Lemaire Les Sars en paiement de dommages et intérêts, laquelle ne peut disposer de plus de droit que son vendeur ; qu'en outre c'est par des motifs pertinents que la Cour adopte que le premier juge a fait droit partiellement à la demande de dommages et intérêts formulée par la SAS Bonnet sur le fondement de l'article 1382 du Code civil en réparation du préjudice moral subi ;
Et aux motifs adoptés du jugement qu'il résulte des stipulations du bail et notamment de l'article 10 du bail que le maintien dans les lieux de la société Bonnet au-delà de la durée de 19 mois ne pouvait malgré la tolérance de la société Johnson, emporter novation du bail dérogatoire en un bail commercial classique ;
1°- Alors que les parties peuvent, lors de l'entrée dans les lieux du preneur, déroger aux dispositions du chapitre V du livre premier, titre IV du Code de commerce, à la condition que le bail soit conclu pour une durée au plus égale à deux ans ; que, si, à l'expiration de cette durée, le preneur reste et est laissé en possession, il s'opère un nouveau bail dont l'effet est réglé par les dispositions de ce chapitre ; qu'en statuant comme elle l'a fait, après avoir constaté qu'à l'expiration du bail dérogatoire conclu pour une durée de 19 mois venant à échéance le 31 décembre 2006, la SAS Bonnet s'était maintenue dans les lieux et ce jusqu'en janvier 2008 et que la société Johnson se s'était pas opposée à ce maintien dans les lieux, ce dont il résulte qu'il s'était effectivement opéré un nouveau bail soumis au statut et auquel le preneur ne pouvait mettre un terme qu'à l'expiration d'une période triennale, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil et L 145-5 du Code de commerce dans sa rédaction applicable en l'espèce ;
2°- Alors que la délivrance par le preneur, le 30 juillet 2007, soit sept mois après l'expiration de la durée du bail dérogatoire et alors qu'il s'était maintenu dans les lieux, d'un congé avec effet au 31 janvier 2008, n'est pas de nature à caractériser la volonté non équivoque de ce dernier de renoncer au bénéfice du statut des baux commerciaux ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;

3° - Alors que lorsqu'à l'issue d'un bail dérogatoire, le bailleur revendique le bénéfice du statut des baux commerciaux, les juges du fond ne peuvent le débouter de sa demande, sans caractériser sa renonciation non équivoque à se prévaloir de ce statut ; qu'en l'espèce, ni l'absence de contestation du congé délivré le 30 juillet 2007, ni la délivrance de factures pour les périodes du 1er décembre 2006 au 28 février 2007 et du 1er mars 2007 au 31 septembre 2007 portant la mention « selon convention d'occupation précaire et temporaire », ni les mentions figurant dans la promesse de vente et dans l'acte de cession relatives aux conditions de la location, qui informent l'acquéreur du « risque de requalification du bail dérogatoire en bail commercial » ne sont de nature à démontrer que la société bailleresse qui ne s'est pas opposée au maintien dans lieux du preneur à l'expiration de la durée du bail dérogatoire, aurait entendu renoncer de manière non équivoque au statut des baux commerciaux ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
4°- Alors que le bail dérogatoire du 1er juin 2005 ne comporte aucune stipulation manifestant la volonté des parties d'exclure l'application du statut des baux commerciaux pour le cas où à l'expiration de la durée de ce bail le preneur restait et était laissé en possession, conformément aux dispositions de l'article L 145-5 du Code de commerce ; qu'en déduisant une telle volonté des parties, des stipulations du bail et notamment de son article 10 qui se borne, après un rappel de toutes les conditions du bail, à préciser que toutes les tolérances de la part du bailleur quelle qu'en aient pu être la fréquence et la durée, ne pourront être considérées comme apportant une modification ou une suppression à ces conditions, ni comme génératrices d'un droit quelconque sans nullement exclure l'application du statut des baux commerciaux à l'expiration de la durée du bail dérogatoire, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
5°- Alors que les parties ne peuvent valablement renoncer au bénéfice du statut des baux commerciaux qu'au terme du bail dérogatoire, une fois acquis le droit au bénéfice de ce statut ; qu'en déduisant la volonté des parties d'exclure l'application du statut des baux commerciaux des stipulations mêmes du bail dérogatoire, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil et L 145-5 du Code de commerce dans sa rédaction applicable en l'espèce.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Lemaire Les Sars à payer à la société Bonnet Grande Cuisine, la somme de 1000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Aux motifs adoptés du jugement qu'en sollicitant dans son assignation du 23 mai 2008 la condamnation de la SA Bonnet Grande Cuisine au paiement des loyers qu'elle prétendait avoir perdus à compter du 1er février 2008 alors qu'elle avait consenti à la société IMC un bail d'une partie de ses locaux et ce à compter du 1er avril 2008 soit antérieurement à l'acte introductif d'instance, la société Lemaire Les Sars a formulé des prétentions manifestement abusives qu'il convient de sanctionner par sa condamnation au paiement d'une somme de 1000 euros à titre de dommages et intérêts ;
Alors d'une part, que la société Lemaire Les Sars faisait valoir que le bail (qu'elle produisait aux débats), conclu avec la société IMC à compter d'avril 2008 sur une partie des locaux litigieux, était un bail consenti à titre gratuit jusqu'en septembre 2008 pour permettre au preneur de réaliser les travaux nécessaires à l'individualisation dans le bâtiment, du lot loué, et que ce locataire a par la suite fait l'objet d'une liquidation judiciaire et a depuis longtemps quitté les lieux ; qu'en ne répondant pas à ces conclusions exclusives du caractère abusif des prétentions de la société Lemaire Les Sars, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
Alors d'autre part qu'en retenant le caractère fautif de la demande en paiement des loyers perdus depuis le 1er février 2008, après avoir constaté que le bail conclu avec la société IMC ne l'a été qu'à compter du mois d'avril 2008 et qu'il ne portait que sur une partie des locaux qui avaient été loués à la société Bonnet Grande Cuisine et que la société Lemaire Les Sars avait réduit le montant de sa demande par des conclusions postérieures à l'assignation pour tenir compte de cette location partielle, la Cour d'appel n'a pas caractérisé la faute imputée à la société Lemaire Les Sars et partant a violé l'article 1382 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 11-25465
Date de la décision : 23/01/2013
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 19 mai 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 23 jan. 2013, pourvoi n°11-25465


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : SCP Ancel, Couturier-Heller et Meier-Bourdeau, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.25465
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