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17/01/2013 | FRANCE | N°11-23848

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 17 janvier 2013, 11-23848


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 30 juin 2011), que Mme Murielle X...été engagée le 1er septembre 1976 comme secrétaire, par contrat à durée indéterminée, par la SCM Groupement rhumatologique de Dunkerque ; que le 18 décembre 2008, les deux associés de cette société ont " cédé leur clientèle libérale " au docteur Y...; celui-ci a, le 15 janvier 2009 notifié à la salariée son licenciement pour motif économique ; que celle-ci a saisi la juridiction prud'homale pour conteste

r ce licenciement ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire qu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 30 juin 2011), que Mme Murielle X...été engagée le 1er septembre 1976 comme secrétaire, par contrat à durée indéterminée, par la SCM Groupement rhumatologique de Dunkerque ; que le 18 décembre 2008, les deux associés de cette société ont " cédé leur clientèle libérale " au docteur Y...; celui-ci a, le 15 janvier 2009 notifié à la salariée son licenciement pour motif économique ; que celle-ci a saisi la juridiction prud'homale pour contester ce licenciement ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen :
1°/ que la réorganisation de l'entreprise constitue une cause économique réelle et sérieuse de licenciement si elle est effectuée pour en sauvegarder la compétitivité sur laquelle pèsent des menaces ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé, par motifs adoptés, que l'employeur ne réalisait plus en 2009 que la moitié du chiffre d'affaires réalisé l'année d'avant par le cabinet, et par motifs propres que si l'employeur avait gardé la salariée à son service, il aurait subi une perte de revenus de 33 % par rapport à ceux des cédants du cabinet, ne bénéficiant ainsi que d'un revenu très inférieur au revenu moyen relevé dans la région pour les rhumatologues concurrents ; que ces motifs permettaient d'établir que la suppression du poste de la salariée, justifiée par la réorganisation du cabinet, était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise qui était menacée, de sorte qu'en jugeant que le licenciement ne reposait pas sur une cause économique réelle et sérieuse, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article L 1233-3 du code du travail ;
2°/ que la réorganisation de l'entreprise constitue une cause économique réelle et sérieuse de licenciement si elle est effectuée pour en sauvegarder la compétitivité sur laquelle pèsent des menaces ; que dès lors, est fondée sur une cause réelle et sérieuse de licenciement, la rupture du contrat de travail du salarié auquel l'employeur n'est plus en mesure de fournir du travail à raison d'une baisse d'activité, l'emploi d'un salarié sans possibilité de le faire travailler menaçant nécessairement la compétitivité de l'entreprise ; qu'en s'abstenant dès lors de rechercher, comme cela lui était demandé, si le fait qu'un médecin radiologue unique succède à deux médecins n'avait pas nécessairement eu pour effet de réduire le nombre d'actes effectués et donc de mettre l'employeur dans l'incapacité de fournir du travail à la salariée manipulatrice radios, si bien qu'existait une menace sur la compétitivité justifiant une réorganisation et qu'était caractérisée l'existence d'une cause économique réelle et sérieuse de licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail ;
3°/ que la décision de procéder à un licenciement économique peut être prise avant toute survenance de difficultés économiques, pour prévenir des difficultés à venir ; qu'en reprochant dès lors à l'employeur d'avoir prévu le licenciement de la salariée avant la cession du cabinet et d'avoir fixé la répartition de son coût avec les cédants, motif manifestement inopérant à caractériser le caractère abusif de ce licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail ;
4°/ en tout état de cause, que le juge ne peut statuer par un motif dubitatif ou hypothétique ; qu'en jugeant que le fait, pour l'employeur, d'avoir décidé du licenciement de la salariée avant même la cession et d'avoir convenu de la répartition de son coût avec les cédants « aurait pu s'analyser aussi en une fraude manifeste au principe du transfert du contrat de travail », la cour d'appel, qui a statué par un motif dubitatif, a violé l'article du code de procédure civile.
Mais attendu qu'en l'absence de difficultés économiques, la réorganisation de l'entreprise ne peut justifier un licenciement pour motif économique que si elle est nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ;
Et attendu que la cour d'appel, qui a constaté que la suppression de l'emploi de la salariée n'était motivée que par la volonté du cessionnaire de maintenir pour lui seul le niveau de revenu des deux médecins dont la clientèle était reprise et de s'assurer ainsi un gain conséquent, a par ces seuls motifs légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M Y...aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Y...et le condamne à payer à Mme Hubert épouse X...la somme de 2 500 € uros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept janvier deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour M. Y...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a dit que le licenciement de Madame X...était sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné Monsieur Y...à payer à Madame X...la somme de 20. 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et celle de 2. 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et d'AVOIR ordonné à Monsieur Y...de délivrer à Madame X...l'attestation employeur destinée à POLE EMPLOI conforme au dispositif de l'arrêt, au plus tard dans le mois de la notification de cet arrêt ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE le courrier de licenciement est ainsi motivé : « votre emploi est supprimé pour les motifs économiques suivants : je suis le seul médecin rhumatologue à succéder aux Docteurs A...et B..., et je ne peux supporter les charges de personnel correspondantes. Aussi la restructuration économique du Cabinet Médical me contraint à supprimer un poste de manipulateur radio … » ; que ce motif n'est à l'évidence ni réel ni sérieux puisqu'il ressort des propres explications de l'appelant et des pièces comptables qu'il a produites aux débats qu'il n'était nullement dans l'incapacité de « supporter » le coût des charges du personnel du Cabinet dont il était devenu le cessionnaire, mais que la suppression du poste de Mme Murielle X...était uniquement motivée par son souci d'avoir un revenu équivalent à celui des deux médecins cédants alors qu'il était seul à poursuivre l'activité du Cabinet cédé ; que si ce souci n'est pas critiquable en soi, ce résultat ne pouvait pas légalement être obtenu en licenciant Mme Murielle X...immédiatement après la cession d'un Cabinet qui ne connaissait strictement aucune difficulté économique, bien au contraire ; que le fait mis en avant par l'appelant que s'il n'avait pas licencié Mme Murielle X..., il aurait subi une perte de revenus de 33 % par rapport à ceux de ses confrères cédants du Cabinet ne saurait suffire à considérer que le licenciement était indispensable à la survie du Cabinet, dès lors que le chiffre d'affaires qu'il pouvait espérer réaliser seul, et qu'il a d'ailleurs effectivement réalisé, lui permettait de continuer à supporter les charges de personnel du Cabinet tout en conservant un revenu très correct (118. 000 € par an), même si estimé par son expert comptable inférieur au revenu moyen relevé dans la région pour un rhumatologue (150. 000 € par an) ; que la clause particulière de l'acte de cession ci-dessus rappelée démontre en outre à elle seule qu'en réalité, le licenciement de Mme Murielle X...avait été décidé avant même la cession et que les parties à cet acte avaient convenu la répartition entre eux de son coût, ce qui aurait pu s'analyser aussi en une fraude manifeste au principe du transfert du contrat de travail posé par l'article L. 1224-1 du Code du travail ; que le jugement frappé d'appel sera donc confirmé en ce qu'il a considéré que le licenciement litigieux était dépourvu de cause réelle et sérieuse ; sur les conséquences de l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement, qu'au moment de son licenciement par M. Gabriel Y..., qui employait habituellement moins de 11 salariés, Mme Murielle X..., née en 1958, avait 33 ans d'ancienneté et percevait un salaire mensuel moyen de 1. 765, 42 € ; qu'elle n'a retrouvé un emploi qu'à temps partiel lui procurant un salaire mensuel de 773 € ; qu'au vu de ces éléments, le montant des dommages-intérêts auxquels Mme Murielle X...a droit par application de l'article L. 1235-5 du Code du travail sera fixé à la somme demandée par elle de 20. 000 € ; qu'il sera également fait droit à sa demande de remise de l'attestation destinée à POLE EMPLOI, M. Gabriel Y...ne justifiant pas la lui avoir déjà remise et n'ayant formulé aucune observation sur cette demande ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE Gabriel Y..., médecin rhumatologue, a acquis le 18 décembre 2008 la clientèle de ses deux prédécesseurs, les docteurs A...et B..., et a par suite, le 15 janvier 2009, dans la mesure où il assurait désormais seul la gestion du cabinet médical, licencié pour motif économique l'une des deux manipulatrices radio de l'établissement : Murielle Z..., embauchée le 1er juillet 1976 ; que pour justifier du caractère économique du licenciement, Gabriel Y...expose qu'il ne pouvait assurer seul la même charge de travail et de personnel que les docteurs A...et B... et que constitue un licenciement économique la rupture du contrat de travail liée à une réorganisation nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise ; que les docteurs A...et B... ont encaissé en effet au titre de l'année 2007 un total de 733. 015 euros d'honoraires tandis que le docteur Y...n'a perçu, au cours des six premiers mois de l'année 2009, qu'un total de 186. 825, 37 euros d'honoraires, soit moitié moins que ses deux prédécesseurs au vu d'une attestation rédigée le 25 septembre 2009 parla société d'expertise comptable FIDAC ; que cependant le licenciement n'est pas légalement justifié lorsqu'il répond moins à une nécessité économique qu'à la volonté de l'employeur de privilégier le niveau de rentabilité de l'entreprise au détriment de la stabilité de l'emploi ; qu'en l'espèce, Gabriel Y...ne justifie pas de difficultés économiques ou d'une menace sur la compétitivité de son activité, mais a seulement adapté la structure de son cabinet à la réduction du nombre de ses associés afin de rechercher un plus grand profit ; que ce faisant, la mesure de licenciement n'apparaît pas justifiée ;
1- ALORS QUE la réorganisation de l'entreprise constitue une cause économique réelle et sérieuse de licenciement si elle est effectuée pour en sauvegarder la compétitivité sur laquelle pèsent des menaces ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a relevé, par motifs adoptés, que l'employeur ne réalisait plus en 2009 que la moitié du chiffre d'affaires réalisé l'année d'avant par le cabinet, et par motifs propres que si l'employeur avait gardé la salariée à son service, il aurait subi une perte de revenus de 33 % par rapport à ceux des cédants du cabinet, ne bénéficiant ainsi que d'un revenu très inférieur au revenu moyen relevé dans la région pour les rhumatologues concurrents ; que ces motifs permettaient d'établir que la suppression du poste de la salariée, justifiée par la réorganisation du cabinet, était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise qui était menacée, de sorte qu'en jugeant que le licenciement ne reposait pas sur une cause économique réelle et sérieuse, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article L. 1233-3 du Code du travail ;
2- ALORS QUE la réorganisation de l'entreprise constitue une cause économique réelle et sérieuse de licenciement si elle est effectuée pour en sauvegarder la compétitivité sur laquelle pèsent des menaces ; que dès lors, est fondée sur une cause réelle et sérieuse de licenciement, la rupture du contrat de travail du salarié auquel l'employeur n'est plus en mesure de fournir du travail à raison d'une baisse d'activité, l'emploi d'un salarié sans possibilité de le faire travailler menaçant nécessairement la compétitivité de l'entreprise ; qu'en s'abstenant dès lors de rechercher, comme cela lui était demandé, si le fait qu'un médecin radiologue unique succède à deux médecins n'avait pas nécessairement eu pour effet de réduire le nombre d'actes effectués et donc de mettre l'employeur dans l'incapacité de fournir du travail à la salariée manipulatrice radios, si bien qu'existait une menace sur la compétitivité justifiant une réorganisation et qu'était caractérisée l'existence d'une cause économique réelle et sérieuse de licenciement, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du Code du travail ;
3- ALORS QUE la décision de procéder à un licenciement économique peut être prise avant toute survenance de difficultés économiques, pour prévenir des difficultés à venir ; qu'en reprochant dès lors à l'employeur d'avoir prévu le licenciement de la salariée avant la cession du cabinet et d'avoir fixé la répartition de son coût avec les cédants, motif manifestement inopérant à caractériser le caractère abusif de ce licenciement, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du Code du travail ;
4- ALORS, en tout état de cause, QUE le juge ne peut statuer par un motif dubitatif ou hypothétique ; qu'en jugeant que le fait, pour l'employeur, d'avoir décidé du licenciement de la salariée avant même la cession et d'avoir convenu de la répartition de son coût avec les cédants « aurait pu s'analyser aussi en une fraude manifeste au principe du transfert du contrat de travail », la Cour d'appel, qui a statué par un motif dubitatif, a violé l'article du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-23848
Date de la décision : 17/01/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 30 juin 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 17 jan. 2013, pourvoi n°11-23848


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.23848
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