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09/01/2013 | FRANCE | N°11-21313

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 janvier 2013, 11-21313


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 16 septembre 1999, en qualité de manutentionnaire bagagiste, en dernier lieu au coefficient 160, par la société Euronetec, aux droits de laquelle est venue la société Charlipiste, a été victime d'un accident du travail, le 13 mars 2002 ; qu'à la suite de la visite de reprise en date du 18 avril 2002, il a été déclaré apte à la reprise avec manutention allégée, plusieurs avis postérieurs de la médecine du travail étant rédigés dans les mêmes ter

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 16 septembre 1999, en qualité de manutentionnaire bagagiste, en dernier lieu au coefficient 160, par la société Euronetec, aux droits de laquelle est venue la société Charlipiste, a été victime d'un accident du travail, le 13 mars 2002 ; qu'à la suite de la visite de reprise en date du 18 avril 2002, il a été déclaré apte à la reprise avec manutention allégée, plusieurs avis postérieurs de la médecine du travail étant rédigés dans les mêmes termes ; que le 15 mars 2007, le salarié a saisi la juridiction prud'homale aux fins de se voir reconnaître le statut de chef d'équipe, coefficient 190 B, arguant également d'une situation de harcèlement moral et de discrimination ; qu'il a été licencié pour faute grave le 30 août 2010 ;
Sur le deuxième moyen :
Vu les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
Attendu qu'en application de ces textes, lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;
Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes en réparation d'un harcèlement moral, la cour d'appel a retenu que n'était pas rapportée la preuve de faits de harcèlements répétés ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le troisième moyen :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande tendant à juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que les manquements visés dans la lettre de licenciement sont avérés et caractéristiques d'une insubordination constitutive d'une faute grave ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions du salarié qui soutenait qu'il avait été affecté, lors de la reprise du travail, à un poste qui n'était pas compatible avec les réserves d'aptitude du médecin du travail, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le premier moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande tendant à constater qu'il a exercé depuis le 12 novembre 2003 jusqu'en décembre 2006, puis à compter de janvier 2007, des fonctions au coefficient 190B, de sa demande en paiement de rappel de salaire du 12 novembre 2003 au 15 septembre 2010, d'indemnité de congés payés y afférents, de fixation de salaire à compter du 15 septembre 2010 et de dommages-intérêts pour discrimination, l'arrêt rendu le 17 novembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur les points restant en litige, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Charlipiste groupe Veolia aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Charlipiste groupe Veolia et la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf janvier deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur X... de sa demande de classification dans la catégorie « chef d'équipe » et de l'avoir débouté de ses demandes subséquentes en paiement de rappels de salaires, et de dommages intérêts pour discrimination ;
AUX MOTIFS QU'aux termes de son contrat de travail la qualification de M. Omar X... était celle d'agent d'exploitation manutentionnaire coefficient 160 B ; qu'à la suite de son accident de travail et des restrictions médicales quant au port de charges lourdes M. Omar X... a été affecté à des fonctions de manutention allégée lesquelles consistaient, de 2003 à 2007, à recycler le personnel, passer dans les galeries, observer les opérateurs, contrôler les procédures et informer sur le contenu des procédures ; que sa fiche de poste auprès de la compagnie Emirates à compter du 10 mai 2007, fait figurer la qualification d'agent d'exploitation dont la mission était de vérifier la conformité de l'allotement container avec le telex du chef avion, prendre en charge les listings des bagages correspondance auprès de l'administration, et faire la réconciliation bagage passagers, contacter téléphoniquement l'enregistrement pour le suivi des listes/pax, contrôler le chargement des bagages, veiller au prélèvement des stubs par les agents affectés sur le vol, veiller à faire récupérer les éventuels bagages rush pour chaque départ, contrôler les fiches bingo-cards avant chaque livraison de conteneur, noter toute anomalie qui pourrait survenir pendant le déroulement du vol, vérifier après le départ du vol la présence de tous les documents dans le dossier du vol ; qu'il ne ressort nullement des descriptions de postes occupés successivement par M. Omar X... qu'il dirigeait une unité opérationnelle ou qu'il assurait l'animation, la coordination ou la répartition des membres de son équipe avec la position hiérarchique correspondante, à savoir celle de chef d'équipe ; que les fonctions de M. Omar X... étaient, en réalité, celles d'opérations de manutention et de traction simples dans une zone aéroportuaire, fonctions qu'il exerçait sous l'autorité d'un agent de qualification supérieure ; qu'il s'ensuit que c'est pas de justes motifs, que la cour adopte, que le premier juge a refusé à M. Omar X... le statut qu'il sollicitait ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'à l'appui de sa demande, le salarié produit plusieurs témoignages indiquant qu'il a été affecté en 2003 à un poste de formateur et que depuis 2006, il supervise le vol Emirates ; qu'il verse également aux débats des plannings dans lesquels il a le titre de formateur ;qu'il ressort des explications des parties à l'audience que M. X... assurait en effet le « recyclage » du personnel quant à l'utilisation du matériel destiné à scanner les bagages et aux procédures applicables ; qu'il ressort des plannings qu'il verse aux débats qu'une quinzaine de salariés étaient recyclés chaque mois ; qu'à la suite d'une visite le 29 septembre 2005, la médecine du travail a noté que le formateur passait dans les galeries, observait les opérateurs, contrôlait les procédures, et informait sur les procédures ; que concernant le poste sur les vols Emirates qu'aux termes de la fiche de poste, dont la teneur n'est pas contestée, M. X... est chargé de vérifier la conformité de l'allotement containeur avec le telex du chef avion, de prendre en charge les listings des bagages correspondances auprès de l'administrateur, de faire la réconciliation bagage/passager, de contacter téléphoniquement l'enregistrement pour le suivi des listes, de contrôler le chargement des bagages, de veiller au prélèvement des stubs par les agents affectés sur le vol, de faire récupérer les éventuels bagages rush, de contrôler les fiches bingo cards avant chaque livraison de conteneur, de noter les anomalies, et de vérifier la présence de tous les documents dans les dossiers vols ; qu'il ne ressort nullement de ces descriptions de postes que M. X... dirigeait une unité opérationnelle, ni qu'il assurait l'animation, la coordination et la répartition des tâches des membres de son équipe ; qu'il n'apparaît pas qu'il était l'interlocuteur des clients directs ; qu'enfin, il ne donne aucun élément sur sa position hiérarchique dans la société et sur son niveau de responsabilité ;
1°. ALORS QUE la qualification professionnelle d'un salarié dépend des fonctions qu'il exerce réellement ; que selon l'article 8.2 de l'annexe I de la convention collective régionale du 1er octobre 1985, concernant le personnel de l'industrie, de la manutention, et du nettoyage sur les aéroports ouverts à la circulation publique, la qualification d'agent d'exploitation correspond à des fonctions de manutention et de traction simples ; que l'arrêt constate que de 2003 à 2007, le salarié, embauché en qualité d'agent d'exploitation, s'est vu confier la mission de former le personnel, passer dans les galeries, observer les opérateurs, contrôler les procédures et informer sur le contenu des procédures, ce dont il résulte que les fonctions effectives du salarié, loin de se limiter à une activité de manutention et de traction simples, dépassaient la qualification d'agent d'exploitation ; qu'en le déboutant néanmoins de sa demande de classification à un niveau supérieur, la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'annexe I de la convention collective susvisée et l'article 1134 du Code civil ;
2°. ALORS QUE que selon l'article 8.6 de l'annexe I de la convention collective régionale du 1er octobre 1985, la qualification de chef d'équipe n'est pas subordonnée à la direction d'une unité opérationnelle et bénéficie au salarié qui dirige les diverses opérations dans les aérogares passagers, et notamment l'observation par tous de l'application des procédures et des instructions de sûreté et de sécurité ; que l'arrêt constate qu'entre 2003 et 2007, le salarié avait notamment pour mission d'observer les opérateurs, de contrôler les procédures et d'informer sur leur contenu, fonction caractéristique de la qualification de chef d'équipe ; qu'en lui refusant néanmoins cette qualification, au motif inopérant qu'il n'avait pas la direction d'une unité opérationnelle, la Cour d'appel a violé les mêmes textes ;
3°. ALORS QU'en s'en tenant à la qualification d'agent d'exploitation mentionnée sur la fiche de poste du salarié auprès de la compagnie Emirates, sans vérifier si, comme il le soutenait, il avait effectivement occupé un poste de superviseur de vol relevant de la qualification de chef d'équipe, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des mêmes textes.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt d'avoir Monsieur X... de sa demande en paiement en dommages intérêts pour harcèlement moral ;
AUX MOTIFS QUE M. X... expose avoir été victime de harcèlement, celui-ci étant constitué par son affectation au tri des bagages et par les multiples convocations dans les services de la médecine du travail ; que n'est pas rapportée la preuve de faits de harcèlement répétés concernés l'intéressé, l'affectation à une tâche précise relevant du pouvoir de direction de l'employeur et les convocations par les services de la médecine du travail étant justifiées par l'état de santé du salarié, état dont il se plaignait en permanence dans le but d'être promu ;
1°. ALORS QUE le salarié n'est tenu que d'apporter des éléments qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral ; qu'en déboutant l'exposant de ses demandes, au motif que n'est pas rapportée la preuve de faits de harcèlement répétés concernant l'intéressé, la Cour d'appel a violé les articles L.1152-1 et L.1154-1 du Code du travail ;
2°. ALORS QUE lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant pour lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral ; qu'en l'espèce, le salarié faisait état, non seulement de son affectation au tri des bagages et des convocations répétées, à la demande de l'employeur, auprès de la médecine du travail, mais encore de pressions exercées par l'employeur et d'un état dépressif réactionnel médicalement constaté ; qu'en rejetant ses demandes au titre du harcèlement moral, sans rechercher si l'ensemble des éléments fournis par le salarié, en ce compris les pressions de l'employeur et les certificats médicaux établissant l'existence d'un lien de causalité direct entre l'état dépressif du salarié et ses conditions de travail, n'étaient pas de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement, la Cour d'appel a violé les mêmes textes.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir jugé que le licenciement de Monsieur X... était fondé sur une faute grave, et de l'avoir débouté de sa demande tendant à juger que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse et des demandes financières afférentes ;
AUX MOTIFS QUE par lettre recommandée avec avis de réception du 18 août 2010, soit postérieurement au jugement et en cours de procédure d'appel, M. Omar X... a été convoqué à un entretien préalable en vue de licenciement et par lettre recommandée avec avis de réception du 30 août 2010, son employeur lui a notifié son licenciement pour faute grave ;que la lettre dont s'agit, qui fixe les limites du litige, après rappel fait au salarié des conditions de son recrutement, de son accident du travail du 13 mars 2002 et des avis médicaux successifs d'aptitude dont il avait fait l'objet sous réserve, jusqu'à 2006, d'exclure le port des charges lourdes, avis toujours respectés par l'employeur, caractérise la faute grave comme suit : - le fait, le 9 août 2010, après retour de congés, de ne pas se présenter à son responsable d'exploitation ; - le 11 août 2010, le refus du salarié de travailler à un poste de manutentionnaire, - le 12 août 2010, la confirmation par le même de son refus en ce sens ; - le 13 août 2010, le refus du salarié de la remise en mains propres qui tentait de lui être faite d'une mise en demeure de travailler ; - le 16 août 2010, la confirmation par le salarié de son refus de travailler ; - le 17 août 2010, l'absence du salarié sur son lieu de travail – le 18 août 2010, la présence sur le lieu de travail avec confirmation du refus de travailler ; évènements successifs à l'origine de la convocation du même jour à l'entretien préalable en vue du licenciement et de la lettre de licenciement subséquente ; que les manquements ci-dessus rappelés et avérés sont caractéristiques d'une insubordination elle-même constitutive d'une faute grave rendant immédiatement impossible le maintien du salarié dans son emploi et justifiant son licenciement pour ce motif ;
1°. ALORS QUE ne constitue pas une faute le refus d'un salarié d'exécuter une tâche ne relevant pas de sa qualification ; que par suite, est dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement du salarié qui a refusé d'exécuter des tâches de manutentionnaire ne relevant pas de sa qualification de chef d'équipe; que la cassation à intervenir sur le premier moyen relatif à la classification du salarié dans la catégorie des chefs d'équipe emportera donc la cassation par voie de conséquence du chef dispositif critiqué au présent moyen en application des dispositions de l'article 624 du code de procédure civile ;
2°. ALORS QU'en tout état de cause, il n'est pas contesté que le salarié justifiait d'un avis médical du 2 mars 2009 le déclarant apte à un poste d'agent d'exploitation manutentionnaire sans port de charges lourdes (conclusions d'appel de l'employeur, p.24, al.1) ; que le salarié faisait valoir dans ses conclusions d'appel (p.13) que le poste auquel il avait été affecté impliquait le port de charges lourdes, de sorte qu'il n'était pas compatible avec son état de santé et qu'en outre aucune visite médiale de reprise n'avait été prévue ; qu'en s'abstenant d'examiner ce moyen, d'où il résulte que ne constituait pas une faute le refus du salarié de travailler à un poste de manutentionnaire inadapté à son état de santé médicalement constaté, la Cour d'appel a privé sa décision de motifs en violation de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-21313
Date de la décision : 09/01/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 17 novembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 jan. 2013, pourvoi n°11-21313


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.21313
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