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09/01/2013 | FRANCE | N°11-17960

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 janvier 2013, 11-17960


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article 1315 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 1er janvier 2007 par la société Géodis Oil et Gas Logistics services en qualité de "contract manager" ; que par avenant à son contrat de travail du même jour, le salarié a été détaché au Tchad auprès de la société TCL, cet avenant stipulant que ce détachement entraînait la suspension du contrat de travail conclu avec la société Géodis Oil et Gas Logistics services jusqu'à la f

in de la mission du salarié au Tchad ; qu'à l'issue de cette mission, l'intéressé a, ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article 1315 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 1er janvier 2007 par la société Géodis Oil et Gas Logistics services en qualité de "contract manager" ; que par avenant à son contrat de travail du même jour, le salarié a été détaché au Tchad auprès de la société TCL, cet avenant stipulant que ce détachement entraînait la suspension du contrat de travail conclu avec la société Géodis Oil et Gas Logistics services jusqu'à la fin de la mission du salarié au Tchad ; qu'à l'issue de cette mission, l'intéressé a, le 1er mai 2008, conclu un contrat de travail avec la société de droit belge Géodis Wilson Belgium ; qu'il a, le 3 septembre 2008, pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de la société Géodis Oil et Gas Logistics services en invoquant divers manquements de cette dernière à ses obligations ;
Attendu que pour rejeter la demande du salarié tendant à voir dire que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que ce salarié ne démontre pas que sa réintégration en France en qualité de "contract manager" lui aurait été refusée par la société Géodis Oil et Gas Logistics services à l'issue de sa mission au Tchad ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il appartenait à la société Géodis Oil et Gas Logistics services d'établir qu'elle avait satisfait à l'obligation pesant sur elle et résultant des stipulations de l'avenant au contrat de travail de réintégrer le salarié, à l'issue de sa mission au Tchad, dans l'emploi précédemment occupé ou dans un emploi similaire, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute le salarié de sa demande tendant à voir dire que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et dit n'y avoir lieu à statuer sur la rupture du contrat de travail du 1er janvier 2007, l'arrêt rendu le 15 mars 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux, autrement composée ;
Condamne la société Géodis Oil et Gas Logistics services aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Géodis Oil et Gas Logistics services à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf janvier deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Spinosi, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir décidé que la rupture du contrat de travail de M. X... n'est pas imputable à son employeur, la société GEODIS OIL et GAS LOGISTICS SERVICES, d'avoir constaté qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la rupture du contrat du 1er janvier 2007 nové par le contrat du 1er mai 2008 et d'avoir en conséquence débouté M. X... de toutes ses demandes ;
Aux motifs que « Monsieur X... fonde son action à l'encontre de la société GEODIS OIL et GAS LOGISTICS SERVICES sur deux moyens :
- Le non respect de l'obligation de réintégration au retour de l'expatriation,- Le manquement à la bonne foi contractuelle avec le contrat au sein de la société GEODIS WILSON BELGIUM.
Sur le premier point, force est de constater que Monsieur X... ne démontre pas que sa réintégration en France en qualité de « contract manager » lui aurait été refusée. Bien au contraire, il ressort du message que le salarié a adressé le 4 décembre 2007 à son employeur qu'il souhaitait être affecté dans un pays frontalier, tel que la Suisse, le Royaume-Uni, où éventuellement la Belgique, sans faire aucune allusion à ce que son employeur ne lui aurait pas permis de revenir en France. En outre, après la fin de son contrat avec la société belge, la société GEODIS OIL et GAS LOGISTICS SERVICES lui a proposé un nouveau contrat avec reprise d'ancienneté, aux conditions très proches du contrat initial du 1er janvier 2007, si ce n'est que la fonction n'était plus celle de « contract manager » mais celle de « project delegate » sans que cette modification puisse être qualifiée de déclassification puisque la rémunération initiale de 26.400 euros était portée à 39.000 euros, proposition qu'il a néanmoins refusée après avoir annoncé, dès le 13 août 2008 : « Ma confiance ayant été trompée, quelles que soient les nouvelles propositions de Géodis, je ne resterai pas». Ce premier grief ne peut donc être retenu.
S'agissant du manquement à la bonne foi contractuelle, l'employeur, faisant suite au souhait exprimé par le salarié, lui a proposé un contrat avec une société du groupe Géodis implantée en Belgique. Ce contrat a été traduit en français et adressé au salarié avant toute signature, et a donc été accepté par lui en toute connaissance de cause puisqu'il indiquait après en avoir eu connaissance que le contrat : « est conforme et identique à nos échanges». Par ailleurs son statut de cadre lui permettait d'apprécier valablement le contenu de ce contrat. En outre, les contrats de travail successifs avec plusieurs sociétés appartenant à un même groupe ne permettent pas au salarié de se prévaloir de l'ancienneté acquise dans l'une de ces sociétés et peuvent être assortis d'une période d'essai, les employeurs constituant des personnes juridiques différentes et le salarié devant exercer des fonctions différentes de « project delegate ». Il n'est pas démontré que ce contrat ait été vide de toute substance ou qu'il ait entraîné un déclassement du salarié alors que sa rémunération n'avait pas été diminuée par rapport à celle du contrat du 1er janvier 2007 et qu'il le fait bénéficier d'une voiture de société et d'une carte d'essence, ce qui n'était pas prévu par le contrat initial. Quant au fait qu'il ait été soumis à un prélèvement fiscal à la source, il n'est nullement établi que cela aurait été préjudiciable au salarié et notamment qu'il aurait s'acquitter la même année des impôts de deux années successives. Le salarié échoue en conséquence dans sa démonstration.
Enfin, les différentes sociétés appartiennent au groupe GEODIS WILSON. Il y a eu novation du contrat avec la société GEODIS OIL et GAS LOGISTICS SERVICES par le contrat avec la société belge et la novation a mis fin au premier contrat en application de l'article 1134 du code civil, sans qu'il soit nécessaire de recourir à la procédure de licenciement. Le contrat du 1er janvier 2007 n'ayant plus d'existence depuis le 1er mai 2008, il n'y a pas lieu de statuer sur la rupture de ce contrat notifiée par Monsieur X... le 3 septembre 2008 » ;
Et aux motifs que « Monsieur X... ne peut se prévaloir de l'article 9 du contrat du 1er janvier 2007 relatif à une obligation de non concurrence pour en solliciter la contrepartie financière puisque ce contrat a été nové par la convention avec la société belge » ;
1/ Alors, d'une part, qu'aux termes de l'article 1315, alinéa 2 du code civil, celui qui se prétend libéré de l'obligation dont il est débiteur doit justifier le fait qui a produit l'extinction de cette obligation ; qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que le contrat de travail du salarié avec la société GEODIS OIL et GAS LOGISTICS SERVICES était, pendant sa mission à l'étranger, seulement suspendu et que, par conséquent, la société employeur avait l'obligation de le réintégrer au sein de ses services à l'issue de cette mission ; qu'il en résulte que l'employeur, se prétendant libéré de cette obligation, devait justifier son exécution ou, à défaut, l'impossibilité de satisfaire à la réintégration du salarié, de sorte qu'en retenant que le salarié ne démontre pas que sa réintégration en France en qualité de « contract manager » lui aurait été refusée, pour décider que n'est pas établi un manquement de l'employeur à son obligation de réintégration justifiant la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié, la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation du texte précité ;
2/ Alors, d'autre part, qu'en relevant qu'après la fin de son contrat de travail avec la société belge, conclu après l'exercice de sa mission à l'étranger, la société GEODIS OIL et GAS LOGISTICS SERVICES a proposé au salarié un nouveau contrat avec reprise d'ancienneté, aux conditions très proches du contrat initial du 1er janvier 2007, quand l'obligation de réintégration devait être exécutée immédiatement après l'issue de la mission à l'étranger, la Cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant pour constater que l'employeur avait satisfait à son obligation de réintégration et a violé l'article 1315, alinéa 2 du code civil ;
3/ Alors, en tout état de cause, que le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, le salarié soutenait, dans ses conclusions d'appel (p. 8), que l'employeur n'avait pu lui proposer de réintégrer son poste de travail initial à l'issue de son expatriation, un autre salarié y étant affecté, et que l'employeur ne disposait, par suite d'aucun poste qui aurait permis sa réintégration et ne lui avait fait aucune proposition en ce sens ; qu'en affirmant que la conclusion d'un contrat de travail avec une société de droit belge à l'issue de l'expatriation du salarié était conforme au souhait de celui-ci, sans rechercher, comme l'y invitaient les conclusions du salarié, si l'employeur lui avait proposé préalablement de réintégrer la société qui l'employait, la Cour d'appel a laissé sans réponse ces conclusions en méconnaissance des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors, par ailleurs, que la novation ne se présume point ; qu'en relevant qu'il y a eu novation du contrat avec la société GEODIS OIL et GAS LOGISTICS SERVICES par la conclusion du contrat de travail avec la société de droit belge GEODIS WILSON et que cette novation a mis fin au premier contrat, sans qu'il résulte de ses constatations que le salarié ait consenti, en toute connaissance de cause, à une novation du contrat de travail après le changement d'employeur, la Cour d'appel a violé l'article 1273 du code civil ;
Alors, enfin, que la novation se caractérise par la création d'une obligation nouvelle et par l'extinction corrélative de l'obligation préexistante ; que le maintien d'un lien de subordination entre le salarié et l'employeur initial est exclusif de toute novation du contrat de travail par changement d'employeur ; qu'en retenant qu'il y a eu novation du contrat avec la société GEODIS OIL et GAS LOGISTICS SERVICES par la conclusion du contrat de travail avec la société de droit belge GEODIS WILSON, sans rechercher cependant si le maintien d'un lien de subordination entre Monsieur X... et la société GEODIS OIL et GAS LOGISTICS SERVICES, postérieurement à la conclusion du contrat avec la société GEODIS WILSON, ne faisait pas obstacle à toute novation, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un manque de base légale au regard de l'article 1273 du code civil, ensemble l'article L. 1221-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-17960
Date de la décision : 09/01/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 15 mars 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 jan. 2013, pourvoi n°11-17960


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Brouchot, Me Spinosi

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.17960
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